1-Pompeii 2.35
2-Slaughter 2.50
3-Home 1.15
4-Streets of Pompeii 1.30
5-Revenge 1.51
6-Enslaved 2.27
7-My People Were Horsemen 4.16
8-My Name Is Milo 2.03
9-Celtic Rebellion 6.22
10-The Mountain 1.53
11-To the Harbour 4.08
12-The End of the World 2.29
13-Away From You 4.56
14-My Gods 1.30
15-I Won't Leave You 3.01
16-Praying for Help 2.36

Musique  composée par:

Clinton Shorter

Editeur:

Milan Records 36672-02

Musique produite par:
Clinton Shorter
Montage musique:
Kevin Banks, Jon Mooney
Assistant du compositeur:
Tyler Websten
Supervision musique:
Christoph Becker
Ingénieur scoring ProTools:
Falko Duczmal
Musique additionnelle de:
Todd Haberman

(c) 2014 TriStar Pictures/FilmDistrict/Constantin Film International/Impact Pictures/Don Carmody Productions. All rights reserved.

Note: ***1/2
POMPEII
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Clinton Shorter
Suivant la mode des néo-péplums des années 2000 (revenu au goût du jour depuis le « Gladiator » de Ridley Scott), Paul W.S. Anderson, l’auteur de la navrante franchise « Resident Evil » s’attaque à son tour au genre avec « Pompeii », superproduction d’environ 80 millions de dollars, tourné au format IMAX et sorti au cinéma en 2013. Le film s’inspire des écrits de Pline Le Jeune et retrace les derniers jours de la ville de Pompéi, célèbre ville de la Rome antique située en Campanie et entièrement détruite par l’éruption du Vésuve en l’an 79 après Jésus Christ. Mais plutôt que de s’embarrasser d’une fastidieuse reconstitution historique, Anderson reste fidèle à son goût habituel pour le spectaculaire et élabore un blockbuster dense qui oscille entre le film catastrophe, le film d’aventure et le drame romantique, à la manière du « Titanic » de James Cameron. Ici, comme dans « Titanic », on assiste à une histoire d’amour difficile sur fond de tragédie historique imminente, l’histoire n’étant finalement qu’un prétexte à quelques scènes de bataille dans les arènes empruntées à « Gladiator », « Spartacus » et tous les péplums actuels sortis depuis une quinzaine d’années au cinéma hollywoodien. Le récit débute en l’an 62 après J.-C., alors qu’une tribu celte est entièrement décimée par une légion romaine du tyrannique sénateur Corvus (Kiefer Sutherland), et qu’un jeune garçon prénommé Milo assiste impuissant à la mort de sa mère et de son père. Des années plus tard, en l’an 79, un noble romain qui assiste à un combat de gladiateurs découvre les exploits d’un jeune guerrier rapidement surnommé « le celte » (Kit Harrington), et qui n’est autre que Milo. Ce dernier décime ses ennemis à une vitesse foudroyante et avec une force impressionnante. Le noble romain achète le celte et l’emmène ensuite dans sa ville de résidence à Pompéi. Le celte/Milo y fait la connaissance de Cassia (Emily Browning), une jeune noble pompéienne accompagnée de sa servante Ariadne (Jessica Lucas), à qui il semble faire forte impression. Rejoignant les autres esclaves, le celte rencontre alors Atticus (Adewale Akinnuoye-Agbaje), considéré comme le meilleur gladiateur local, originaire des provinces d’Afrique. D’abord peu réceptif et sur la réserve, le celte accepte alors de parler avec Atticus alors qu’une estime mutuelle naît petit à petit entre les deux hommes. Peu de temps après, les parents de Cassia accueillent chez eux le sénateur Corvus, qu’ils espèrent convaincre d’investir dans un ambitieux projet urbain. Mais en tout bon politicien romain qui se respecte, Corvus est exigent et sournois : en échange de son investissement, le sénateur cherche à convoiter Cassia, qui n’a aucune attirance pour le romain machiavélique. Et alors qu’un combat entre Atticus et le celte est organisé par le propriétaire des deux gladiateurs pour clore les festivités en l’honneur de Corvus, d’étranges fumées commencent à se dégager au loin sur les pentes du Vésuve. Les pompéiens ignorent encore qu’une terrible tragédie est sur le point de se produire, et qui bouleversera à tout jamais les destinées de tous les habitants de la ville.

Empruntant de manière indiscutable des éléments et des idées piochées par-ci par-là (les combats de gladiateurs et la relation rivale/amicale entre le celte et Atticus sont calqués sur « Gladiator »), « Pompeii » s’impose au final comme un bon divertissement qui a au moins le mérite d’être exécuté avec une vraie bonne volonté et un réel souci de bien faire, ce qui n’était pas forcément le cas des précédents films de Paul W.S. Anderson, régulièrement marqués par des idées stupides et un manque d’intérêt évident. Ici, le réalisateur abandonne fort heureusement ses mauvais penchants habituels et réussit même à ne pas abuser de ses sempiternels ralentis agaçants et autres effets visuels vains, en filmant de manière plus académique, dont quelques jolis plans à la grue illustrant une architecture antique reproduite certes numériquement en 3D mais plutôt convaincante et assez dépaysante. Le film tient surtout dans la manière dont il décrit la romance difficile entre les personnages de Kit Harrington (révélation de la série TV « Games of Thrones ») et d’Emily Browning (vue dans « Sucker Punch » de Zack Snyder), une romance certes assez banale mais décrite simplement sans pathos, à la manière d’une tragédie grecque. Le fait que le spectateur connaisse d’avance l’issue du film et la catastrophe liée à l’éruption du Vésuve ajoute une dimension dramatique indéniable et prenante au film, alors que les personnages prennent petit à petit conscience que le volcan va tout détruire et que ce n’est plus qu’une question de jours voire d’heures avant que la tragédie n’arrive et anéantisse Pompéi pour de bon. Entre les deux, on assiste à quelques scènes archi convenues, qu’il s’agisse des combats de gladiateurs, des manipulations sournoises de Kiefer Sutherland en politicien romain retors et grand méchant de service, ou de l’histoire de vengeance du celte qui jure de tout faire pour retrouver et tuer Corvus afin de venger la mort de ses parents. Des clichés en veux-tu en-voilà, des effets spéciaux numériques réussis et une bonne utilisation de la 3D, sans oublier un casting correct et un ton dramatique et somme toute assez sérieux (inhabituel de la part d’Anderson), ainsi qu’une dernière demi heure résolument apocalyptique, tragique et spectaculaire, tels sont les ingrédients de ce « Pompeii » qui constitue un bon divertissement et n’a rien du nanar décrié par les détracteurs du réalisateur, même si le film reste un énième blockbuster U.S. ultra calibré et sans surprise particulière, hormis une fin extrêmement pessimiste, inhabituelle pour une production de ce genre !

La partition du film a été confiée à Clinton Shorter, compositeur canadien révélé pour sa participation au « District 9 » de Neill Blomkamp en 2009, et auteur de musiques pour des films tels que « Japeloup » (2013), « Gibraltar » (2013) ou « 2 Guns » (2013). Inattendu sur un blockbuster comme « Pompeii », Clinton Shorter saisit l’occasion d’écrire une grande partition épique et dramatique pour orchestre, choeurs et synthétiseurs. Saluée par une partie des critiques à la sortie du film en salles, la musique de Clinton Shorter est de loin l’élément le plus remarquable du film de Paul W.S. Anderson à plus d’un égard. Dès l’ouverture, on devine clairement à quel point Shorter prend son travail très au sérieux avec le grand orchestre de Londres constitué essentiellement ici de cordes et cuivres sur fond de percussions guerrières et de choeurs en latin évoquant la tragédie antique de la ville de Pompéi. Le travail autour de la chorale est ici assez impressionnant, notamment dans la manière dont Shorter scande un rythme aux choeurs masculins tout en développant une écriture vocale assez dense rappelant l’écriture d’un véritable Requiem classique. Il faut néanmoins souligner le fait que le compositeur s’est manifestement inspiré ici du travail du duo Two Steps from Hell pour leurs musiques de trailers hollywoodiens totalement similaires, et plus particulièrement de leur morceau « Heart of Courage » : zéro originalité donc, même si le caractère épique, grandiose et démesuré de la musique fait réellement plaisir à entendre ! Enfin, l’ouverture de « Pompeii » est aussi capitale puisqu’en plus de poser les bases de la partition, elle dévoile d’emblée le thème principal du score, mélodie épique et héroïque construite autour d’une cellule de 3 notes ascendantes et associées dans le film aux exploits du celte.

Certes, comme beaucoup de ses confrères actuels, Clinton Shorter se voit muselé par la production et obligé de suivre un cahier des charges très strict, reproduisant les formules musicales bien connues à Hollywood depuis plusieurs années. Mais il y a dans la musique de Shorter ce petit quelque chose qui fait bien souvent défaut à la plupart des gros scores habituels de blockbusters U.S., un petit truc que l’on devine aisément dans « Home », dévoilant le superbe thème principal pour la ville de Pompéi, véritable anthem héroïque, noble et solennel pour cors, cordes et choeurs épiques, un thème simple et assez mémorable qui reste l’un des atouts-clé du score de « Pompeii » dans le film. « Streets of Pompeii » permet même à Shorter de réimaginer à sa sauce la musique pompéienne de l’époque avec un ensemble instrumental de percussions et guitares censés reproduire le son antique des musiques de l’an 79 après J.C. Le thème principal de Pompéi est alors repris ici dans toute sa splendeur pour renforcer la sensation d’immensité et de magnificence d’une ville puissante à l’architecture luxuriante.

« Revenge » se montre en revanche plus prévisible dans ses schémas musicaux préconçus et totalement impersonnels : un ensemble de percussions martèlent ici un rythme enragé tandis que Shorter déchaîne son orchestre bien souvent limité aux pupitres des cuivres et des cordes, avec ce sentiment d’héroïsme et de noblesse typique d’une bonne partie de la partition de « Pompeii ». Dommage que le compositeur tombe trop souvent dans les clichés entendus 1000 fois auparavant comme la présence de cette lamentation vocale féminine lassante au début de « Enslaved », reprise de bon nombre de partitions similaires (on pense par exemple au « Gladiator » de Zimmer). A noter par ailleurs que « Enslaved » nous permet d’entendre à partir de 0:06 aux cordes les prémisses du Love Theme dramatique pour Milo et Cassia, qui deviendra un thème majeur très présent dans le reste de la partition.

La musique devient même plus intime et élégiaque dans « My People Were Horsemen », scène durant laquelle le celte parle de son peuple et ses origines à Atticus dans la prison des esclaves (les auditeurs attentifs remarqueront un petit bug sonore à 0:26, où un son de contrebasse débute et s’arrête subitement avec un clic, probablement une erreur étrange qui a échappé aux mixeurs de l’album !). La seconde partie du morceau ramène l’action et l’épique avec un passage guerrier assez grandiose, avec tutti orchestral, choeurs puissants et percussions belliqueuses. Mais si ce caractère scandaleusement impersonnel et l’absence d’un vrai point de vue musical font défaut au compositeur, on ne pourra qu’apprécier les réelles qualités d’une partition ample et généreuse très réussie à l’écran. C’est notamment le cas dans « Celtic Rebellion », superbe morceau d’action orchestral de plus de 6 minutes où orchestre, percussions et choeurs épiques se mélangent pour un pur déchaînement musical belliqueux et assez prenant dans le film comme sur l’album. L’envolée héroïque du thème principal à 3:11 est d’ailleurs un pur plaisir coupable dans son genre – scène du combat avec les gladiateurs dans l’arène – Et c’est bien là que le score de « Pompeii » finit par marquer des points, à force de persister dans son envie de se lâcher totalement malgré le manque total de subtilité, les nombreux passages bourrins et une absence indéniable d’originalité (et un nombre incalculable de trucs repiqués à Zimmer et co !). Le score de Clinton Shorter reste fun, épique et prenant du début jusqu’à la fin, assumant sa surenchère musicale totale, comme c’est le cas dans l’énorme et disproportionné « The Mountain », suggérant la catastrophe liée à l’éruption du Vésuve.

Et c’est la panique et le sauve-qui-peut général dans « To the Harbour » pour la longue scène finale de la destruction de Pompéi. Clinton Shorter conserve ici un ton résolument orchestral et choral, délaissant les éléments électroniques qui sont finalement peu présents (hormis une guitare électrique filtrée plutôt ratée vers 1:10 !). L’atmosphère d’apocalypse de « To the Harbour » est renforcée par l’apport des choeurs mais aussi par ces nombreux ostinatos rythmiques martiaux façon « Mars » des « Planètes » de Holst. On appréciera aussi la façon dont Shorter fait la tension et renforce toujours plus le sentiment de chaos et de puissance avec quelques bons rebondissements rythmiques et même un passage tragique puissant vers 2:25, et une citation sombre du thème de Pompéi à 3:30. Le drame devient prépondérant dans l’élégiaque « The End of the World », morceau poignant particulièrement réussi en dehors d’une utilisation bateau d’une énième lamentation vocale féminine, et qui reprend le thème romantique tragique pour Milo et Cassia (à partir de 1:25 aux cordes). La confrontation finale entre le celte et Corvus est illustrée avec une puissance constante dans « Away from You » et « My Gods », ultimes morceaux d’action totalement belliqueux, fun et épiques, traversés d’envolées héroïques et d’anthems prenants à la manière des musiques du Media Ventures des années 90. Dommage que « I Won’t Leave You » ne fasse pas grand chose pour cacher ses influences évidentes au « Gladiator » de Zimmer, avec les vocalises féminines calquées sur celles de Lisa Gerrard, tandis que Shorter en profite pour développer le thème principal sur un mode intime et dramatique pour les retrouvailles finales du celte et de Cassia. On retrouve pour « I Won’t Leave You » et le poignant « Praying for Help » une série de développements autour du Love Theme pour le final tragique du film, développements très réussis qui permettent à Clinton Shorter de concrétiser pleinement son travail autour de ce thème qui aura pris de plus en plus d’importance au fur et à mesure de l’avancée du récit, sans oublier une très belle reprise du thème de Pompéi à 1:30.

Pas subtile pour un sou et peu originale, la partition de « Pompeii » parvient à échapper à la banalité absolue en imposant un ton épique/héroïque assez fun et prenant dans les nombreux passages d’action du film. La musique véhicule une certaine puissance sur les images, même si l’on regrette encore une fois l’emploi de ces fichues formules musicales empruntées aux productions Remote Control. Mais Clinton Shorter conserve malgré tout une approche très orchestrale, à la manière du récent travail de Tuomas Kantelinen sur un film similaire, « The Legend of Hercules ». Du coup, le score gagne en intérêt, notamment grâce à ses déchaînements orchestraux surpuissants et maîtrisés, et ses choeurs en latin utilisés de manière quasi ininterrompue, mettant les bouchées doubles dans les passages martiaux/guerriers totalement débridés. On nage clairement ici en pleine musique de néo-péplum des années 2000, mais avec un vrai sens de l’épique et un certain fun dans la manière totalement décomplexée dont Clinton Shorter assume ses rouleaux compresseurs musicaux et ponctue le film d’envolées thématiques grandiloquentes et d’héroïsme à l’ancienne façon années 90 : un score d’action épique et dramatique somme toute assez sympa dans son genre, sans être particulièrement inoubliable ou même indispensable !





---Quentin Billard