1-The Secret 0.45
2-The Damned Main Title 1.54
3-Crash and Refuge 3.11
4-Gallows Hill 1.26
5-Exodus 1.00
6-Alone 1.54
7-We're Gonna Be Okay 1.37
8-Child's Play 3.18
9-Under Your Skin 1.33
10-Finding Ana Maria 3.05
11-No Getting Out 1.31
12-Your Boss is Handsome 4.21
13-David 1.24
14-Trapped 2.30
15-Ramon's Destiny 2.50
16-From Body to Body 1.31
17-Lauren is Free 1.10
18-Searching the Basement 1.55
19-In The Past 2.31
20-Cut 2.02
21-Locked 3.19
22-It All Began with a Secret 1.16

Musique  composée par:

Frederik Wiedmann

Editeur:

Lakeshore Records LKS-662129

Album produit par:
Frederik Wiedmann
Coordinateur musique:
Lindsay-Bea Davis
Supervision musique:
Erin Dillon, Joel C. High
Monteur musique/
Ingénieur son musique:
Jeremy Tisser
Orchestre:
FAME Macedonian
Radio Symphonic Orchestra

Producteur exécutif:
Brian McNelis
Producteur exécutif:
Skip Williamson
Orchestrations:
Hyesu Yang

Artwork and pictures (c) 2013 IFC Midnight/MPI Home Video. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE DAMNED
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Frederik Wiedmann
« The Damned », connu aussi sous le titre « Gallows Hill », est le nouveau film d’épouvante de l’espagnol Victora Garcia, réalisateur de DTV horrifiques tels que « Mirrors 2 », « Return to House on Haunted Hill » ou « Hellraiser : Revelations ». Le film met en scène David Reynolds (Peter Facinelli), un père de famille accompagné de sa fiancée Lauren (Sophia Myles) qui se rend à Bogota en Colombie pour y retrouver sa fille Jill (Nathalia Ramos), issue d’un premier mariage avec une colombienne aujourd’hui décédée. Sur le trajet, David, Lauren, Jill, sa soeur Gina (Carolina Guerra) et son ami caméraman Ramon (Sebastian Martinez) sont victimes d’un accident de voiture, les obligeant à chercher refuge dans une vieille auberge isolée afin de s'y reposer et de soigner les blessures de Lauren. La demeure abrite un vieillard au comportement étrange, Felipe (Gustavo Angarita), qui hésite à les abriter et leur impose de ne quitter le salon sous aucun prétexte. Mais Jill désobéit à Felipe et se rend à la salle de bains pour se nettoyer. C’est alors qu’elle perçoit distinctement un cri provenant de la maison. Jill découvre alors qu’une jeune fille nommée Ana Maria (Julieta Salazar) est séquestrée dans une cave isolée au sous-sol de l’auberge. Elle réussit alors à libérer Ana Maria, provoquant la fureur de Felipe qui les menace d’une arme avant que David parvienne finalement à neutraliser le vieil homme. Mais personne ne se doute une seule seconde que la jeune fille est en réalité possédée par l’esprit démoniaque d’une sorcière qui passe d’un corps à un autre pour perpétrer ses crimes et accomplir une vengeance maléfique. « The Damned » est au final une énième série-B d’épouvante qui tente d’imiter « Evil Dead » en reprenant le concept d’un survival au fond d’une maison abandonnée avec un groupe d’individus aux prises avec un esprit démoniaque qui possède le corps de ses malheureuses victimes. Avec un casting plutôt correct – Peter Facinelli s’est fait connaître dans la saga « Twilight » - et une mise en scène relativement soignée, « The Damned » pourrait bien être à ce jour le film le plus correct de Victor Garcia (ses précédents DTV horrifiques étaient purement alimentaires et sans grand intérêt), grâce à un script correct et une atmosphère oppressante assez réussie, saupoudrée d’un zest de gore et de suspense glauque. Le film n’a rien de bien original et reste ultra prévisible – le concept de l’esprit démoniaque qui passe d’un corps à un autre rappelle « Fallen » avec Denzel Washington - d’autant qu’il recycle tout ce qui a déjà été fait dans le genre, un mélange de « Evil Dead » et de « The Conjuring », sans oublier un autre détail troublant : le scénario du film rappelle curieusement l’épisode 41 « The Howling Man » de la série TV « Twilight Zone ». Bref, si vous aimez le suspense horrifique et les films de possession démoniaque, « The Damned » devrait vous divertir amplement, mais les autres risquent fort de s’ennuyer devant une production modeste et banale qui n’apporte rien de neuf au genre.

Le compositeur allemand Frederik Wiedmann retrouve à nouveau Victor Garcia pour la cinquième fois après « Return to House on Haunted Hill » (2007), « Mirrors 2 » (2009), « Artic Predator » (2010) et « Hellraiser : Revelations » (2011). Son travail sur « The Damned » surprend à la première écoute par son caractère mystérieux, sombre et envoûtant assez impressionnant à l’écran. Pas follement originale, la musique de « The Damned » nous apporte quand même une première certitude : Frederik Wiedmann a gagné en maturité, et cela fait plaisir à entendre, d’autant que l’on commence enfin à percevoir un style musical plus reconnaissable que dans ses précédents travaux qui étaient assez impersonnels et passe-partout. L’ancien apprenti de John Frizzell a bien appris ses leçons et cela commence enfin à porter ses fruits. Son travail sur « The Damned » est plutôt intéressant dans la manière dont Wiedmann alterne entre orchestre symphonique et parties électroniques atmosphériques pour un résultat hybride assez convaincant, incluant un thème principal assez réussi et quelques bonnes trouvailles sonores. Si « The Secret » tente de planter le décor avec une atmosphère mystérieuse et sombre, « The Damned : Main Title » développe le thème principal sur fond de rythmes martelés de percussions agressives avec des samples de voix féminine inversée (évoquant Ana Maria) et des cordes sombres développant un motif de trois notes mystérieuses, tandis que la voix inversée apporte un certain mysticisme étonnant au générique de début. Dès le début de l’histoire, Frederik Wiedmann apporte clairement aux images du film le ton horrifique approprié dans « Crash and Refuge », multipliant les dissonances, les clusters de cordes et les percussions agressives. On retrouve ici un style hérité de « Mirrors 2 » ou « Hostel : Part III », largement perceptible dans la manière d’écrire pour l’orchestre ou dans l’utilisation des éléments synthétiques. Le thème principal est repris à 1:41 avec ses trois notes énigmatiques de cordes qui annoncent le cauchemar à venir. Le Main Theme est aussi repris dans « Gallows Hill », Wiedmann mixant ici ses cordes de façon plus lointaine avec une réverbération distante renforçant le caractère mystérieux et sombre de sa musique à l’écran. Les dissonances commencent à se répandre progressivement dans la musique, au fur et à mesure que l’histoire avance comme le confirme l’anarchique « Exodus », qui s’avère être une succession de nappes sonores oppressantes avec un amoncellement de samples de voix féminines et de chuchotements macabres assez inquiétants.

Le travail autour de ces étranges voix féminines est assez intéressant et permet à Frederik Wiedmann d’expérimenter d’une manière similaire à des partitions telles que « The Hills Run Red » ou « Mirrors 2 », tandis que la bonne idée du score est de réussir à mélanger les ambiances horrifiques avec une base thématique assez solide. Un deuxième motif constitué de 4 notes (deux qui descendent et deux qui montent) est introduit aux cordes à 0:16 dans « The Damned : Main Title », motif sinistre associé à la malédiction de la sorcière dans le film. Wiedmann joue habilement sur ce motif dans « Exodus » où il ne conserve que les deux premières notes tandis qu’il reprend le motif complet dans « Alone » entre 0:44 et 1:01 de façon assez intéressante. Un troisième thème est introduit ensuite à 1:22 dans « Alone », thème plus long et assez dense, constitué d’une mélodie aux intervalles chromatiques et torturés, entrecoupé ici de sursauts horrifiques de cordes plus avant-gardistes. Ce fameux troisième thème, assez intense et mystérieux, est associé à la jeune Ana Maria et à sa possession. Ce thème assez envoûtant, sinistre et tourmenté est repris dans « Child’s Play », où Wiedmann parvient à lui apporter un certain mysticisme dans sa manière de mixer les cordes de façon distante avec quelques éléments électroniques atmosphériques et brumeux. Wiedmann suggère même l’innocence apparente de la petite fille avec une boîte à musique introduite brièvement vers la fin de « Child’s Play », jouant sur l’idée de faux semblant (qui est réellement cette petite fille ? Que cache-t-elle au fond d’elle ?). A ce sujet, « Under Your Skin » est assez symptomatique de cette atmosphère paranoïaque, mystérieuse et angoissante que développe largement Wiedmann depuis le début du film. On retrouve ici aux contrebasses le motif de 2 notes de « Exodus » suggérant la tension et le danger, tandis que le thème à 4 notes est repris dans son intégralité aux cordes dès 0:59 avec une utilisation des voix féminines assez mystiques et quasi religieuses. Wiedmann semble avoir été assez inspiré par son sujet, car il parvient à apporter une tension incroyable aux images, largement véhiculée par l’apport essentiel des thèmes, parfaitement structurés et développés tout au long du film : enfin un score horrifique de 2014 avec de vrais thèmes, et pas juste de la bouillie sonore difforme !

« Finding Ana Maria » reprend le motif entêtant de 2 notes aux contrebasses avec une utilisation remarquable de sample de flûte ethnique sud-américaine que l’on entendait déjà à quelques reprises au début du score et une superposition des voix fantomatiques, sans oublier une superbe reprise du thème d’Ana Maria au violon à 2:14, reprise à la fois belle, triste et glauque à en donner la chair de poule ! Le cauchemar commence dans « No Getting Out », où le motif du suspense de 2 notes est à nouveau présent aux côtés du thème de violon d’Ana Maria. Wiedmann met ici l’accent sur les cordes dissonantes aux techniques avant-gardistes et les clusters meurtriers en tout genre. Mais c’est dans la manière dont le compositeur joue avec ses différents motifs que la musique en devient réellement intéressantes, surtout lorsqu’il parvient à juxtaposer les motifs entre eux de façon judicieuse, comme dans « Your Boss is Handsome », où il superpose le motif à suspense de 2 notes et le thème de 4 notes de la sorcière, rappelant que le motif de suspense est en fait un dérivé des premières notes du thème de la sorcière. Autre point majeur : le travail autour des voix féminines, à la limite de la musique concrète, un vrai travail d’orfèvre qui rappellerait presque ce que Jerry Goldsmith avait fait sur « The Omen » en 1976. « Your Boss is Handsome » est aussi intéressant dans le sens où il s’agit d’un des rares morceaux où tous les principaux thèmes de « The Damned » réapparaissent les uns à la suite des autres, incluant le motif de suspense, le motif de la sorcière, le thème d’Ana Maria et le motif de 3 notes de Gallows Hill. Et comme si cela ne suffisait pas, Wiedmann nous permet d’entendre un autre thème, introduit aux violoncelles dans « The Secret » et constitué de 5 notes dramatiques et mystérieuses. Ce motif de 5 notes, associé à David Reynolds dans le film, réapparaîtra justement dans « David » à 0:28 en évoquant la destinée du père de famille qui doit tout faire pour protéger ses proches des assauts de la sorcière. Par la suite, le score va s’évertuer à susciter une atmosphère d’horreur et de tension alors que la sorcière tente d’attaquer les survivants et de s’emparer d’un autre corps pour tenter d’accomplir sa malédiction. Dans « Trapped », Wiedmann évoque l’idée que les survivants sont pris au piège dans l’auberge de Felipe avec un renfort des éléments électroniques, des percussions (incluant un piano martelé frénétiquement dans le grave) et des cordes staccatos agressives avec des effets de col legno (on frappe la corde avec le bois de l’archet), tandis que la tension va crescendo avec un nouveau motif développé ici par des violoncelles assez intenses.

L’horreur est largement véhiculée dans l’agressif « Ramon’s Destiny », qui développe le motif de suspense de façon terrifiante avec de nombreux effets expérimentaux/avant-gardistes des cordes et des voix féminines qui hantent littéralement le morceau. Ici aussi, Wiedmann parvient à trouver le juste équilibre fragile entre l’atmosphère horrifique anarchique et une base thématique solide qui offre de vrais repères émotionnels au spectateur/auditeur, même si l’on regrettera des moments plus faciles comme la seconde partie de « Ramon’s Destiny » qui semble tomber dans un style horrifique banal plus proche de « Return to Hounse on Haunted Hill » ou « Hostel : Part III ». Les sursauts cacophoniques deviennent plus nombreux dès « From Body to Body » ou « Lauren is Free », créant une atmosphère cauchemardesque avec des rappels thématiques (mélodie d’Ana Maria à 0:27 dans « Lauren is Free » et du thème de David à 0:52 dans « In The Past ») et de nombreux effets avant-gardistes/expérimentaux typiques du compositeur allemand, comme c’est le cas dans le climax horrifique ultra violent de « Cut » et « Locked » pour l’affrontement final. Frederik Wiedmann signe donc une partition horrifique assez solide pour « The Damned », probablement son meilleur travail à ce jour pour un film d’épouvante de ce genre. Grâce à une base thématique assez élaborée et parfaitement développée tout au long du film, le compositeur en profite pour rappeler à certains de ses collègues actuels que l’on peut pertinemment écrire une musique horrifique/atmosphérique tout en écrivant de vrais thèmes, qui apportent au final une vraie plus-value dramatique et émotionnelle à cette composition qui, privée de ses thèmes, aurait certainement basculée dans le registre des scores fonctionnels horrifiques inintéressants et écrits à la va-vite, comme on en entend régulièrement ces temps-ci à Hollywood. Au lieu de cela, Frederik Wiedmann rappelle qu’il maîtrise parfaitement le registre de l’épouvante musicale et signe un score terrifiant et très prenant pour « The Damned » à découvrir sans hésitation, car si ce n’est pas encore un vrai chef-d’oeuvre du genre, cela n’en demeure pas moins une partition très réussie et vraiment impressionnante !




---Quentin Billard