1-Main Title 4.40
2-Opening The Pyramid 2.08
3-Andes Arrival 1.38
4-Mountain Trek 4.55
5-The Secret Revealed 2.24
6-The Lost City 8.21
7-The Journey Begins 5.56
8-Sylvia's Vision 2.56
9-End Title 3.10

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

Varèse Sarabande CD Club
VCL 1213 1147

Produit par:
James Horner
Producteur exécutif pour
Varèse Sarabande:
Robert Townson
Mastering:
Erick Labson

Edition limitée à 2000 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 1988 Columbia Pictures Industries, Inc. All rights reserved.

Note: **1/2
VIBES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
« Vibes » (Enquête en tête), c’est un peu le condensé de tous les mauvais aspects de certains films U.S. des années 80 : scénario absurde, ambiance bizarre et un peu décalée (à la fois comédie mais aussi film fantastique), acteurs en roue libre et réalisation fourre-tout, le film a été un échec lamentable à sa sortie en salles en 1988, éreinté par la critique et le public qui n’a pas réussi à suivre cette aventure farfelue d’un groupe d’individus aux pouvoirs parapsychiques partis en Equateur à la recherche d’une mythique pyramide renfermant une puissante énergie extra-terrestre capable de détruire le monde. Le film, réalisé par Ken Kwapis (un spécialiste des comédies, à qui l’on doit entre autre « Dunston Checks In » ou le très girly « The Sisterhood of the Traveling Pants »), débute avec la rencontre Sylvia Pickel (Cindy Lauper) et Nick Deezy (Jeff Goldblum). La première est une médium-voyante qui prétend parler à son guide spirituel, une certaine Louise, avec laquelle elle communique après être tombée d’une échelle à l’âge de 12 ans et restée dans le coma pendant 2 semaines. Le second est un psycho-métricien qui a le pouvoir de déterminer les événements entourant un objet qu’il touche. Sylvia croise alors la route du mystérieux Harry Buscafusco (Peter Falk), qui veut l’engager afin de retrouver son fils qui a disparu quelque part en Equateur. La jeune médium coquette et excentrique décide alors de recruter Nick, et ensemble, ils se rendent en Equateur, où Nick comprend qu’Harry leur a caché la vérité, et qu’il est en réalité à la recherche d’une ancienne cité d’or perdue dans les montagnes, et que son ancien partenaire est devenu fou après l’avoir découverte. Hélas, bien qu’ils soient furieux d’avoir été dupés, Nick et Sylvia ne peuvent plus faire demi tour, car le médium Ingo Swedlin (Googy Gress) et le docteur Harrison Steele (Julian Sands) sont aussi à la recherche de la cité d’or et finissent par s’en prendre à eux. Le docteur Steele tue alors Harry et prend Nick et Sylvia en otage, les forçant à utiliser leurs pouvoirs psychiques afin de retrouver la route menant à la mystérieuse cité d’or.

Avec un scénario aussi farfelu, difficile de retenir grand chose de « Vibes », qui aurait pu fonctionner en l’état si Ken Kwapis n’avait pas constamment hésité tout au long du film entre la comédie, le film d’aventure ou le film fantastique. Trop décalé pour fonctionner réellement, le film mélange un humour grotesque et bizarre avec des scènes parfois assez sombres, tirant pourtant bien parti du thème des médiums et des individus dotés de pouvoirs psychiques. La bonne idée de « Vibes » vient du fait que le scénario n’aborde pas le sujet des pouvoirs psychiques sur le thème du super-héros mais le fait plutôt de manière réaliste : on nous présente ainsi Nick et Sylvia comme des individus normaux et égocentriques avec des préoccupations de la vie de tous les jours. Mais au bout de 20 minutes, le scénario dérive très rapidement vers le film d’aventure pur et dur avec une intrigue calquée sur le « Romancing the Stone » de Robert Zemeckis, sorti quelques années auparavant (1984). Dès lors, « Vibes » tente d’imiter de manière ridicule le duo Michael Douglas/Kathleen Turner aperçu dans le film de Zemeckis, et si le tandem formé par Jeff Goldblum et Cyndi Lauper fonctionne de manière correcte, le résultat est extrêmement décevant, en particulier de la part d’un Goldblum qui a l’air de s’ennuyer ferme dans le film, l’acteur étant connu pour son excentricité et sa manière d’apporter une certaine intensité et un humour noir à ses personnages. Quand à l’actrice/chanteuse Cyndi Lauper (star de la pop U.S. des années 80), elle campe la parfaite tête à claque impossible à encadrer. Difficile alors de comprendre comment des vétérans comme Peter Falk ou Julian Sands ont réussi à s’embarquer dans pareille galère, étant donné qu’eux aussi semblent s’ennuyer ferme tout au long du film !

Assez inattendu sur un film de ce genre, James Horner fut engagé pour signer la musique de « Vibes » en 1988. Pour mieux comprendre cette musique bizarre et étrange à la première écoute, il faut rappeler qu’Horner était au sommet de son art vers la fin des années 80 : spécialiste des musiques de science-fiction avec les deux « Star Trek », « Brainstorm », « Aliens » ou « Krull », Horner a diversifié les genres tout au long des eighties avec une passion évidente pour son art. C’est aussi l’époque où il commença à expérimenter autour d’autres styles comme le rock ou les éléments électroniques voire latino dans les films d’action « 48 Hrs. », « Gorky Park », « Commando » ou « Red Heat ». Bien qu’il soit rapidement devenu un spécialiste incontournable des grandes musiques symphoniques aux thèmes mémorables et au lyrisme poignant, Horner signa quelques partitions particulières valorisant l’électronique et les solistes : ce fut le cas de « Le Nom de la rose » (1986) ou « Where the River Runs Black » (1986), dans lesquels il démontrait une certaine aptitude à créer un univers sonore particulier à l’aide des synthétiseurs, très à la mode dans les années 80. Dès lors, on comprend mieux pourquoi le studio décida d’engager le compositeur sur « Vibes », soucieux de retrouver ce style synthétique/ethnique déjà présent dans le méconnu « Where the River Runs Black ». Hélas, le score d’Horner repose essentiellement sur une atmosphère sonore brumeuse et épaisse assez indigeste et difficile à apprécier en dehors des images, en raison d’une certaine monotonie et d’un caractère répétitif difficile à encaisser.

Ecrit pour un ensemble de synthétiseurs et un groupe d’instruments ethniques incluant flûtes de pan, shakuhachi (instrument fétiche d’Horner, très utilisé la même année dans « Willow »), guitares/banjos et percussions diverses évoquant les cultures musicales de la Cordillère des Andes (Equateur, Pérou, Chili, Colombie, etc.). Dès le « Main Titles », quelques notes mystérieuses et vaporeuses de flûtes de pan suffisent à planter le décor alors que l’on découvre la chaîne de montagnes dans laquelle se trouve l’étrange pyramide aux immenses pouvoirs. Horner choisit de délaisser l’aspect mélodique habituel au profit d’une atmosphère planante limite new-age avec des nappes synthétiques étranges et un univers sonore très particulier qui nous fait voyager dans des contrées lointaines, avec les sonorités improvisées des flûtes de pan et de la shakuhachi. Après un « Main Titles » assez étrange, le reste du score confirme l’orientation assez expérimentale choisie par James Horner sur « Vibes » : « Opening the Pyramid » évoque la scène de la pyramide au début du film à l’aide de synthétiseurs glauques et dissonants, et de chuchotements de voix macabres qui créent ici une atmosphère totalement surnaturelle et impressionnante. L’approche atonale/expérimentale colle parfaitement à l’ambiance de la scène, un élément que l’on retrouvera tout au long du film. Dans « Andes Arrival », Horner s’essaie à la musique péruvienne des Andes à l’aide de l’ensemble des flûtes de pan/shakuhachi, petites percus, claquements de mains et guitares avec un thème pour l’Equateur lorsque Nick, Sylvia et Harry arrivent en Amérique du sud, la musique basculant alors dans ce style « world music » assez typique d’Horner à cette époque.

« Mountain Trek » développe les sonorités des flûtes, des métallophones de type gamelan et des shakers pour la scène de la traversée des montagnes. Mais on regrette ici le caractère répétitif d’une musique qui n’a aucun rebondissement particulier à nous offrir et semble placée librement sur les images sans grande conviction, hormis celle d’expérimenter et de sortir du style orchestral hollywoodien habituel, d’autant que l’absence d’un thème fédérateur rend l’écoute particulièrement fastidieuse (l’album ne dure pourtant que 30 minutes !). Dans « The Secret Revealed », Horner évoque la découverte du secret de la mystérieuse pyramide à l’aide d’un mélange de synthés new-age et de chuchotements étranges de voix. La découverte de la cité perdue dans les montagnes (« The Lost City ») est aussi un prétexte pour expérimenter autour de bruitages électroniques étranges (ressemblant ici à des bourdonnements répétitifs), tandis que les synthétiseurs et les flûtes de pan semblent s’élever pour l’apparition des ruines de la cité, dans un crescendo grandiloquent avec ses synthés kitsch évoquant les musiques new-age/électro de Vangelis des années 80. On retrouve aussi l’atmosphère dissonante et atonale de « Opening the Pyramid » pour suggérer là aussi le danger que représente la pyramide mythique. Les amateurs d’ambiances musicales péruviennes/exotiques apprécieront certainement le dépaysant « The Journey Begins », tandis que la partition atteint son climax dans « Sylvia’s Vision », où les expérimentations bruitistes atteignent ici des sommets de surréalisme sonore – incluant quelques sonorités électroniques reprises de « Aliens » - sur fond de nappes synthétiques macabres et dissonantes et de chuchotements bizarres.

« Vibes » est donc un score très particulier de James Horner, difficile à apprécier réellement en raison de son caractère expérimental assez étrange et son utilisation envahissante de sonorités péruviennes/exotiques réussies au premier abord mais fort répétitives sur la longueur. En l’absence d’un thème fort, le score ne laisse aucun souvenir particulier et reste bien en dessous des réelles capacités du compositeur, visiblement obligé de se restreindre sur le film de Ken Kwapis, avec son groupe d’instrumentistes et ses synthétiseurs cheap. On sait qu’Horner a toujours nourri depuis ses débuts un certain goût pour l’avant-garde musicale – fort de son apprentissage auprès de György Ligeti – ce que confirme son travail atypique sur « Vibes », qui, à défaut de laisser un quelconque souvenir, s’appréciera comme l’un des travaux les plus étranges et les plus insolites qu’Horner ait pu fournir pour un film hollywoodien, à redécouvrir sur l’album ‘Encore’ en édition limitée publié par Varèse Sarabande en 2013.



---Quentin Billard