1-A Story About the Future 0.54
2-A Prologue 1.30
3-You've Piqued My Pin-Trist 3.28
4-Boat Wait, There's More! 1.09
5-Edge of Tomorrowland 5.18
6-Casey V Zeitgeist 1.23
7-Home Wheat Home 0.43
8-Pin-Ultimate Experience 4.54
9-A Touching Tale 1.37
10-World's Worst Shop Keepers 3.34
11-Just Get In The Car 1.43
12-Texting While Driving 0.48
13-Frank Frank 1.18
14-All House Assault 4.04
15-People Mover and Shaker 5.27
16-What an Eiffel! 6.57
17-Welcome Back, Walker! 2.32
18-Sphere and Loathing 2.22
19-As The World Burns 4.25
20-The Battle of Bridgeway 2.51
21-The Hail Athena Pass 0.59
22-Electric Dreams 4.41
23-Pins of a Feather 5.19
24-End Credits 5.28

Musique  composée par:

Michael Giacchino

Editeur:

Walt Disney Records BVPR005022

Produit par:
Michael Giacchino
Monteur musique:
Alex Levy
Orchestré et conduit par:
Tim Simonec
Musique enregistrée et mixée par:
Joel Iwataki
Préparation musique:
Booker White
Orchestrations additionnelles:
Marshall Bowen, Dave Giuli,
Susie Seiter

Assistant monteur musique:
Warren Brown
Assistant technique montage:
Eric Wegener
Coordination score:
Andrea Datzman
Préparation score:
Jeff Kryka
Assistant scoring:
David Coker
Equipe Warner Bros Studio:
Tom Hardisty, Ryan Robinson,
Jamie Olvera

Direction musicale pour Walt Disney
Studios Motion Picture Production
et Walt Disney Music Group:
Mitchell Leib
Music business affairs
Walt Disney Studios Motion
Pictures Production:
Scott Holtzman, Don Welty
Production musicale pour The Walt
Disney Studios Motion
Pictures Production:
Ryan Hopman

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 2015 Disney Enterprises, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
TOMORROWLAND
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Michael Giacchino
« Tomorrowland » (A la poursuite de demain) est le nouveau film de Brad Bird tourné pour Disney et sorti en 2015. On se souvient d’ailleurs que l’auteur de « Mission Impossible : Ghost Protocol » avait déjà collaboré avec Disney en 2004 sur « The Incredibles » puis en 2007 sur « Ratatouille ». « Tomorrowland » s’inspire d’une attraction à thème futuriste commune aux différents parcs de loisir Disney et s’oriente vers un univers de science-fiction et de fantastique assez particulier. L’histoire raconte l’aventure extraordinaire de deux individus, Frank Walker (George Clooney), un inventeur de génie désillusionné qui vit reclus chez lui depuis des années, et Casey Newton (Britt Robertson), une jeune adolescente passionnée de sciences dont le père travaille comme ingénieur à la NASA. Ces deux individus ont croisé chacun à leur tour la route de la mystérieuse Athena (Raffey Cassidy), jeune fille énigmatique qui leur a remis à tous deux un pins contenant un symbole en forme de « T ». Ils découvrent alors que le pins a le pouvoir de les transporter dans un univers parallèle et mystérieux nommé « Tomorrowland », une cité futuriste située quelque part dans le temps et l’espace. Mais alors que Casey et Athena se retrouvent traquées et attaquées par des robots déguisés en humains, la jeune fille énigmatique révèle enfin sa véritable identité : elle est un robot de type audio-animatronic, et elle lui a donné le pins de Tomorrowland il y a peu de temps car elle a besoin de Casey pour sauver le monde. La jeune fille l’emmène ensuite retrouver Frank dans sa maison de Pittsfield à New York. Après moult hésitations, la jeune ado réussit enfin à convaincre Frank de voyager avec elle et Athena pour Tomorrowland, alors que la Terre, selon un moniteur de Frank, est très probablement menacée d’extinction dans un futur proche. Le trio utilise alors une machine à téléportation conçue par Frank et se retrouvent dans la Tour Eiffel à Paris, où ils découvrent une pièce avec les mannequins de quatre grandes célébrités : Gustave Eiffel, Jules Verne, Nikola Tesla et Thomas Edison. Ensemble, ces quatre hommes ont fondé le Plus Ultra à la fin du XIXe siècle, un groupe secret d’inventeurs dédié à la recherche de scientifiques qui partagent leur idéal d’un monde meilleur. C’est ainsi qu’ils découvrirent ensemble le monde de Tomorrowland. A leur arrivée là-bas, ils retrouvent une cité entièrement dévastée et font la connaissance de David Nix (Hugh Laurie), une vieille connaissance de Frank, qui dirige Tomorrowland depuis très longtemps. Nix leur dévoile alors une machine à tachyon conçue il y a quelques années par Frank, et qui est capable de montrer des images du passé comme du futur. C’est ainsi qu’ils apprennent qu’un gigantesque cataclysme va détruire le monde dans un futur proche. Nix compte laisser le monde périr, mais Casey s’y oppose fermement et compte bien changer les événements et empêcher ainsi la fin du monde par tous les moyens. Avec l’aide de Frank et Athena, la jeune ado va affronter Nix et tenter de sauver le monde avant qu’il ne soit trop tard.

« Tomorrowland » brasse ainsi quelques thèmes chers à la science-fiction dans cette aventure assez loufoque et plutôt singulière, malheureusement desservie par un scénario brouillon qui semble partir dans tous les sens. Doté d’un budget colossal (190 millions de dollars), le film repose surtout sur son esthétique sci-fi rétro héritée des années 70/80, avec sa description d’une citée futuriste moderne comme on en voyait souvent dans les films d’anticipation des sixties (façon « Logan’s Run »). Disney n’a pas souvent touché au genre de la science-fiction. On se souvient néanmoins de « The Black Hole » en 1979 ou de « Tron » en 1982, ou plus récemment de « John Carter » et « Tron : The Legacy ». Mais comme pour le récent « John Carter », « Tomorrowland » n’a pas vraiment réussi à convaincre le public et s’est plutôt vautré au box-office 2015, faisant encore perdre un bon paquet d’argent au studio de la souris aux grandes oreilles. Pourtant, il y a de bons éléments dans le film de Brad Bird : le casting, pour commencer, avec le choix atypique de George Clooney, qui participe pour la toute première fois de sa carrière à une production Disney. A ses côtés, la jeune Britt Robertson campe une Casey très attachante et jamais stéréotypée, une passionnée de science tenace et déterminée, au caractère affirmé. Face à eux, Hugh Laurie, star de la série TV « Dr. House », s’impose dans le rôle du traditionnel méchant, un rôle qui lui va comme un gant, même si ses intentions paraissent floues et sont très mal développées dans la dernière partie du film (on ne comprend pas pourquoi il veut laisser le monde périr ?), un personnage plutôt raté et vraisemblablement mal écrit. Visuellement, le film est très réussi, avec des effets numériques 3D de grande qualité qui rappellent l’ampleur du budget, et quelques scènes d’action de bonne facture, et notamment la poursuite avec les robots ou la confrontation finale. On regrette donc un scénario bancal et mal fichu, qui tente d’aborder le thème de l’optimisme et de l’utopie futuriste d’une façon originale et rafraîchissante – il faut croire en l’avenir, se réunir tous ensemble pour construire un monde meilleur – un message naïf et très old school qui fait vraiment plaisir à voir, devenu rarissime au cinéma de nos jours. Seulement voilà, de bonnes intentions ne suffisent pas à faire un bon film, et malgré la réalisation impeccable de Brad Bird, le scénario lourdingue de Damon Lindelof plombe une bonne partie du film, notamment durant le dernier acte, où les incohérences se multiplient en pagaille, avec un méchant aux motivations obscures et incompréhensibles, une déception en somme pour cette production Disney qui s’avérait prometteuse au départ, mais se plante misérablement à l’arrivée, faute d’un bon scénario et d’une ligne directrice claire et précise.

« Tomorrowland » marque les retrouvailles entre Brad Bird et Michael Giacchino après « The Incredibles » (2004), « Ratatouille » (2007) et « Mission Impossible : Ghost Protocol » (2011). Pour sa quatrième collaboration à un film de Bird, Giacchino signe une grande partition symphonique old school et classique d’esprit, dans la lignée des grandes musiques d’aventure des années 80. Dès le départ, Brad Bird souhaitait éviter que sa vision du furtur vieillisse trop rapidement dans les années qui viennent. Tel fut le défi lancé au compositeur, qui devait à son tour évoquer cette utopie futuriste sans risquer de voir sa musique mal vieillir avec le temps. C’est pourquoi Michael Giacchino opta pour une approche symphonique à mi-chemin, selon les dires de Brad Bird, entre le symphonisme de Richard Strauss et l’approche plus moderne de John Adams. Exit ici les éléments électroniques habituels : Giacchino compose pour une vaste formation symphonique et chorale afin de retranscrire l’univers futuriste, magique et fantastique du film de Bird. Et comme toujours chez le compositeur, la partition repose sur une vaste série de thèmes mélodiques très présents tout au long du récit, et parfaitement agencés au scénario et aux différents personnages et péripéties du film. Le thème principal, celui de Tomorrowland et des valeurs qu’elle représente, est entendu dès l’ouverture, « A Story About the Future ». On y retrouve ici cet optimisme si cher au film et à Disney, porté par un piano sur fond d’accords majestueux de cordes et de cors, avant que le thème prenne une envolée triomphante avec ses triolets de trompettes à la fin de l’ouverture. Le deuxième thème de « Tomorrowland » est introduit dans « You’ve Piqued My Pin-Trist ». Il s’agit du thème évoquant l’amitié entre Frank et Athena qui remonte à l’enfance de l’inventeur, en 1964. Ce thème se bâtit ici sur les harmonies du thème principal, et semble indiquer – subtilement – le lien qui existe entre la mystérieuse Athena et Tomorrowland. La mélodie du thème de Frank/Athena est plus nostalgique, douce et rêveuse, chargée elle aussi d’un optimisme léger mais jamais mièvre. Le thème principal décolle enfin à 2:22 avec ses orchestrations plus massives, à l’aide de cors, trompettes, cordes, percussions et grands arpèges rapides de piano en accompagnement. A noter ici la qualité indéniable des orchestrations, qui, comme toujours chez Giacchino, révèlent une science d’écriture classique affirmée et très brillante.

Dans « Boat Wait, There’s More ! », un cor solo introduit le troisième thème du score à 0:10, reconnaissable à sa ligne mélodique de 7 notes héroïques et un brin rétro, illustrant dans le film les moments de bravoure. Ce thème, un peu plus naïf dans sa conception, est aussi associé au Plus Ultra et illustre les concepts de créations et de découvertes scientifiques, et restera associé à ce sentiment d’aventure et de découverte triomphante – certains auditeurs ont noté des similitudes entre ce thème et celui de la quête du Graal dans « Indiana Jones & The Last Crusade » - Enfin, David Nix, le grand méchant de service, a droit à son propre thème, reconnaissable dans « Welcome Back, Walker » ! aux cuivres graves dès 1:41, ou dans « Sphere and Loathing » à 0:33, motif plus sombre en notes longues de cuivres évoquant les sinistres desseins du personnage campé par Hugh Laurie dans le film. Il s’agit d’une mélodie assez longue, reprise aussi au cor dès 3:41 dans « As The World Burns ». Idée intéressante : le thème de David Nix n’est pas spécialement menaçant mais s’avère plutôt dramatique dans l’âme : il illustre le sentiment que Nix abandonne l’idée que l’on puisse sauver le futur et livre la terre à sa destruction programmée. Il est en ce sens l’exact opposé des thèmes du Plus Ultra ou de Frank/Athena, et sera surtout présent durant le dernier acte du film. Détail intéressant, le thème de Nix est en réalité présenté quasiment dès le début du film, dans le mystérieux « A Prologue », où Giacchino le développe pour la première fois de façon ample, avec ce sentiment de pessimisme résigné pour la scène où Nix rejette l’idée de l’invention du jeune Frank en 1964. Avec une base thématique solide, Michael Giacchino développe ainsi l’intégralité de sa partition en quête d’aventure, d’héroïsme et aussi de grands moments de bravoure, de danger et de tension.

C’est dans ce sens que va « Edge of Tomorrowland » (dont le titre est un clin d’oeil au film de Tom Cruise « Edge of Tomorrow »), premier morceau d’action où l’on découvre l’écriture complexe et très riche de Giacchino, avec des rappels au thème de Tomorrowland et un premier déchaînement orchestral où les trompettes s’en donnent à coeur joie avec quelques rythmes martiaux frénétiques, et une superbe envolée assez kitsch du thème héroïque du Plus Ultra à 2:37 lorsque Frank s’envole pour la première fois dans les airs avec son jet pack. Idem dès 3:05 où le thème explose de manière triomphante, rappelant incontestablement les influences de James Horner (« The Rocketeer ») ou John Williams (« Indiana Jones & The Last Crusade »), un premier morceau incontournable de la partition de « Tomorrowland ». On relevera ensuite l’utilisation d’un piano intimiste et, plus étonnant, d’un clavecin dans « Casey vs. Zeitgeist », où le thème dramatique de Nix est repris au cor avec ses ponctuations de xylophone, pizz et clavecin. Giacchino se montre parfois assez loufoque dans ses idées musicales, comme dans « Home Wheat Home » où il débute le thème principal, lui ajoute un choeur grandiose qui se conclut de façon anarchique par un gigantesque cri des chanteurs. « Pin-Ultimate Experience » nous ramène quand à lui dans l’univers de Tomorrowland avec une nouvelle série de variations autour du thème, joué ici de façon plus majestueuse et aventureuse, avec ses arpèges rapides de piano, son accompagnement des cymbales de la batterie et ses cordes martelées, avec aussi le retour du thème de Frank/Athena, lorsque Casey visite Tomorrowland dans son intégralité.

Les choses se corsent enfin avec « World’s Worst Shop Keepers », où les robots attaquent alors Casey et Athena dans le magasin puis dans la rue. Giacchino met l’accent ici sur les registres plus graves de l’orchestre avec quelques dissonances et des sursauts orchestraux plus agressifs. Le morceau se lance ensuite dans un nouveau déchaînement orchestral virtuose et complexe d’une intensité remarquable. A noter que l’action va jouer un rôle primordial durant une bonne partie de la partition de « Tomorrowland », comme le rappellent les excitants « Just Get In Car » pour la poursuite en voiture, « Texting While Driving » ou le colossal « All House Assault », lorsque les robots attaquent la maison de Frank, 4 minutes d’action martiale pure et dure, le morceau rappelant ici le style de « Mission Impossible : Ghost Protocol » dont on retrouve une manière similaire d’écrire pour les déchaînements d’action orchestrales. « People Mover and Shaker » nous ramène dans l’aventure et les rappels aux thèmes principaux, ainsi que les 6 longues minutes de « What an Eiffel ! », reprenant le thème héroïque de Plus Ultra, le thème de Frank/Athena et le thème de Tomorrowland, lorsque les héros se téléportent dans la Tour Eiffel et y découvrent une rampe pour une fusée les amenant vers Tomorrowland, autre grand morceau d’action/aventure du score de Giacchino. A leur arrivée, les choses changent avec le retour du superbe thème dramatique de Nix dans « Welcome Back, Walker ! » qui nous entraîne dans le dernier acte du film. A noter l’écriture très particulière de « Sphere and Loathing » et son écriture mécanique des bois (clarinettes, flûtes, hautbois), de cordes, de piano et des trompettes, qui se répondent entre eux de manière métronomique et répétitive (façon Philip Glass ou John Adams), une très bonne idée qui rajoute un soupçon de fantaisie au score. L’aspect tragique et sombre de « As the World Burns », annonçant la fin du monde, est l’un des premiers climax dramatiques impressionnants du score, avec l’emploi des choeurs élégiaque avec l’orchestre.

« The Battle of Bridgeway » nous amène enfin à la bataille finale où Frank, Athena et Casey tentent de détruire la machine à tachyon de Nix. Giacchino se lance ici dans un superbe assaut orchestral totalement déchaîné et décomplexé, avec ces rythmes bondissants évoquant les musiques de swashbuckler à l’ancienne, façon Korngold ou Rozsa. A noter ici l’écriture massive des trompettes, chaque pupitre de l’orchestre étant privilégié dans ce déchaînement symphonique assez monumental et intense dans le film, débouchant sur la conclusion de « The Hail Athena Pass ». « Electric Dreams » ramène alors le calme à la fin du film, marqué par le retour du thème principal de Tomorrowland, alors qu’un nouvel espoir est permis et que Frank et Casey doivent maintenant recruter à leur tour d’autres rêveurs optimistes pour y rejoindre Tomorrowland et bâtir un meilleur monde. Même chose pour la coda triomphante de « Pins of a Feather » et le superbe « End Credits », reprenant les principaux thèmes du score pendant plus de 5 minutes. Michael Giacchino signe donc une nouvelle partition symphonique riche, généreuse et colorée pour « Tomorrowland ». Toujours inspiré par le cinéma de Brad Bird, Giacchino multiplie les thèmes, les envolées aventureuses, les déchaînements d’action complexes et les moments dramatiques pour parvenir à ses fins, retranscrivant tout l’univers si particulier du film à travers des orchestrations riches et soutenues, fidèles au credo de Giacchino sur le retour d’une musique symphonique old school façon années 80 (à mi-chemin entre Horner et Williams). Les fans du compositeur apprécieront à coup sûr « Tomorrowland », même si l’on regrette le manque d’originalité des thèmes ou de certaines idées musicales. Il n’en reste pas moins que le score de Giacchino est une jolie réussite dans son genre, une énième à rajouter au compteur d’un compositeur prolifique qui n’a décidément pas fini de nous faire rêver, et qui doit, plus que jamais, se battre pour imposer à Hollywood sa vision d’une musique de cinéma plus classique et symphonique, à la manière des grands maîtres d’antan !




---Quentin Billard