1-The Devil and Daniel Webster 2.20
2-Living For Love 3.21
3-The Temptation Waltz 2.03
4-Auld Hornie 4.04
5-The Devil May Dance
In My Pocket 1.54
6-Pactum Tacitum 3.24
7-What The Hell Am I Duning? 5.13
8-Imps And Pimps 1.53
9-The Books Of Lies 2.39
10-Missing The Devil I Still Love 4.12
11-Heksekoster 1.44
12-Nebuchadnezzar Phase 2.56
13-Dying For Love 3.04
14-Malleus Maleficarum 3.14
15-Hell's Bells 4.15

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Composer Promo CD9615

Produit par:
Christopher Young
Assistant de Chris Young:
Samantha Baker
Ingénieur Pro Tools:
Vincent Cirilli
Coordinateur score:
David Giuli
Programmation synthés:
Guillaume Jodoin, Haseo Nakanishi,
Jonathan Price

Coordination score:
Jasper Randall, Vofka Solovey
Assistant du compositeur:
Aldo Shllaku
Production musicale:
Michael Z. Gordon
Montage musique additionnelle:
Ian Honeyman
Montage musique:
Ciaran Hope
Préparation musique:
Robert Puff

(c) 2003 Yari Film Group/Cutting Edge Entertainment/El Dorado Pictures/EFO Films/Miracle Entertainment. All rights reserved.

Note: ***
SHORTCUT TO HAPPINESS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
Variante amusante du mythe de Faust, « Shortcut to Happiness » - connu aussi sous le titre « The Devil and Daniel Webster », et « Sexy Devil » en V.F. – est une comédie racontant le pacte que réalise un écrivain en manque de succès avec une séduisante jeune femme en robe rouge incarnant le diable. Le film est interprété, produit et réalisé par Alec Baldwin – son premier passage derrière la caméra – Il s’agit d’une adaptation de la nouvelle « The Devil and Daniel Webster » de Stephen Vincent Benét, déjà adaptée au cinéma avec le film « The Devil and Daniel Webster » de William Dieterle en 1941. « Shortcut to Happiness » se présente quand à lui sous la forme d’une variante modernisée, où l’histoire est transposée dans l’univers des publications littéraires et des maisons d’édition. Jabez Stone (Alec Baldwin) est un écrivain désespéré. Il a bien du mal à trouver un éditeur pour son dernier livre et doit se contenter d’une vie minable, sans envergure. Il partage néanmoins ses malheurs avec ses amis incluant Julius Jensen (Dan Aykroyd), un auteur à succès qui vient tout juste de signer un contrat avec une grande maison d’édition. Désemparé et à bout, Jabez jette sa précieuse machine à écrire par la fenêtre de son appartement et blesse gravement une vieille dame dans la rue. Paniqué, l’écrivain espère maintenant qu’un miracle va le tirer de cette situation, mais ce qui se produit est au-delà de son imagination : une jeune femme en robe rouge sexy (Jennifer Love Hewitt) sonne à la porte et se présente à lui comme la réponse à ses interrogations. Cette dernière, qui n’est autre que le diable, lui propose gloire et fortune en échange de son âme. Jabez, qui a perdu toute confiance en lui, accepte de signer le contrat du diable. Peu de temps après, tout ce qu’il a toujours rêvé prend vie : ses livres sont publiés et rencontrent un succès colossal. Son éditrice Constance Hurry (Kim Cattrall) est folle de lui. Les femmes rêvent de coucher avec lui. Les médias et la presse s’emparent ensuite de son succès, mais la qualité de ses livres est constamment critiquée. Mais Jabez réalise que quelque chose ne va pas, lorsqu’il comprend qu’il s’est éloigné de ses amis et qu’il a perdu la confiance de ses proches. Désireux de rompre le pacte avec le diable, Jabez se voit aidé par le mystérieux Daniel Webster (Anthony Hopkins), le responsable d’une prestigieuse maison d’édition, qui lui propose d’attaquer le diable en justice afin de rompre le contrat maléfique.

« Shortcut to Happiness » est encore un de ces films qui a connu une gestation difficile. Tourné à New York en 2001 avec le titre « The Devil and Daniel Webster », le film connaît une post-production anarchique et de nombreuses difficultés financières. Alec Baldwin, qui se trouve alors devant et derrière la caméra, voit le contrôle de son film s’échapper en raison de nombreux différends artistiques avec le studio et de graves problèmes financiers : le projet menace ainsi de finir en banqueroute. Baldwin décide de retirer son nom du générique, considérant que le film ne ressemble plus à ce qu’il voulait faire : le nom est remplacé par le pseudo « Harry Kirkpatrick » (ou « Alan Smithee » dans certaines versions). Peu de temps après, le projet est sauvé in extremis de la noyade par le producteur Bob Yari qui rachète les droits du film et prépare un premier montage destiné à des projections lors de festivals de cinéma entre 2003 et 2004, et ce malgré le fait que la copie présentée est inachevée – la phase de post-production n’est pas terminée et certains effets spéciaux n’ont pas encore été réalisés – Le film sera enfin bouclé plus tard et distribué par Yari Film Group en 2007. « Shortcut to Happiness » reprend donc un classique de la littérature à travers une variante modernisée du mythe de Faust. Mais plutôt que de reprendre le contenu du film de 1941, le long-métrage d’Alec Baldwin ressemble davantage à « Bedazzled », comédie satirique datant de 2000 dans laquelle Elizabeth Hurley jouait le rôle d’une diablesse particulièrement sexy.

Ici, c’est Jennifer Love Hewitt qui joue le rôle de l’odieuse tentatrice face à un Alec Baldwin désemparé, qui rêve de gloire et de fortune et découvre au final le revers de la médaille : il a vendu son âme au diable et n’est pas plus heureux au final. Le film se termine, comme dans la nouvelle d’origine, sur un procès fantastique opposant le diable à Jabez Stone, défendu par le vétéran Daniel Webster – formidablement campé ici par Anthony Hopkins égal à lui-même, dans un rôle d’avocat qui rappelle sa prestigieuse performance de John Quincy Adams lors du procès final de « Amistad » de Spielberg – La scène est filmée sur un ton décalé avec des fantômes en guise de jury et de juge. D’une façon générale, le film hésite très souvent entre la comédie burlesque et la comédie dramatique de manière hasardeuse. Guère passionnant et pas vraiment mauvais non plus, « Shortcut to Happiness » a probablement souffert de sa genèse compliquée et le résultat est très inégal, malgré de bons points – un casting excellent, de bonnes idées de mise en scène – Il manque clairement au film une réalisation plus personnelle et un point de vue plus tranché sur l’histoire, et malgré sa morale un peu simpliste – il n’y a pas de raccourci vers le bonheur – « Shortcut to Happiness » s’avère être un divertissement sympathique mais tout à fait dispensable, qu’on oubliera certainement très vite.

La musique de « Shortcut to Happiness » a été confiée à Christopher Young, qui saisit l’occasion ici de renouer avec le genre de la comédie satirique, un style qu’il avait précédemment abordé dans des films comme « The Vagrant » ou « Head Above Water ». L’humour noir du film permet à Young d’expérimenter autour d’une formation instrumentale vaguement similaire à ce qu’il avait déjà fait dans « The Vagrant » : orchestre à cordes, bois, boîte à musique, accordéon, piano préparé, percussions et objets divers – et notamment des bruitages réalisés à partir d’une machine à écrire, idée déjà expérimentée par Erik Satie dans sa musique pour le ballet « Parade » en 1917. Young dévoile ici son thème principal, sournois et sarcastique, dévoilé de façon amusante par des bois sur un rythme bondissant des tambourins/grelots. Le thème évoque clairement le personnage diabolique de Jennifer Love Hewitt avec un second degré et un humour typique de Chris Young. La musique se fait ensuite plus douce au détour d’un thème intime de clarinette, cordes et piano dans « Living For Love », typique de ses musiques de comédie dramatique habituelle. « The Temptation Waltz » développe l’aspect plus diabolique du récit avec une valse lente et mystérieuse dominée par le glockenspiel, un petit ensemble à cordes, une harpe et des notes discrètes d’accordéon (le morceau est en partie repris dans « Hekekoster »). Young suggère habilement le côté maléfique du pacte que Jabez Stone passe avec l’intrigante en robe rouge en jouant sur une retenue et une approche minimaliste réussie, très éloignée de ses musiques horrifiques habituelles généralement plus massives. « Auld Hornie » prolonge cette ambiance retenue avec le glockenspiel et un ensemble instrumental réduit avant de céder la place à une musique plus baroque à base de cordes, de vents et de clavecin, centrée sur une reprise plus prononcée du thème principal aux violons pour la diablesse sexy.

« The Devil May Dance In My Pocket » renoue avec l’humour noir de l’ouverture en reprenant les sons de machine à écrire de l’ouverture et des ponctuations instrumentales plus décalées et inventives, clairement héritées du film « The Vagrant ». Le thème principal est à nouveau présent, confié cette fois-ci à une trompette sur fond de sonorités plus sournoises qui rappellent aussi la musique du film « Head Above Water ». La musique évolue tout au long du film en évoquant le périple et l’ascension fulgurante de Jabez Stone, tout en accentuant le second degré de l’histoire et les doutes de l’écrivain qui, au sommet de la gloire, commence à douter des vraies raisons de ses choix. « Pactus Tacitum » vient pour ailleurs nous rappeler son pacte avec le diable avec une sympathique reprise plus lente du thème principal aux bois et aux cordes (et toujours l’omniprésence du glockenspiel soliste). Fait récurrent dans les BO de Christopher Young : les titres des morceaux contiennent pour la plupart des calembours et des mots d’esprit difficilement compréhensibles pour un public francophone mais plutôt drôles pour ceux qui maîtrisent l’anglais (« Imps and Pimps », « Heksekoster », « Nebuchadnezzar Phase » - titre que Young reprendra par ailleurs pour le CD de « Ghost Rider » - ou « Malleus Maleficarum »). Dans « What the Hell Am I Duning », le compositeur suggère les doutes et les tourments de Jabez, qui voit ses proches s’éloigner de lui alors qu’il triomphe dans sa carrière. La musique devient ici plus mystérieuse et mélancolique, avec des cordes lentes et amères liées à l’état d’esprit de l’écrivain, idée reprise aussi dans « The Book of Lies ».

Les fans des expérimentations loufoques de Christopher Young apprécieront à coup sûr « Imps and Pimps » qui débute sur une dissonance répétée inlassablement par un quatuor à cordes avec les bruitages de la machine à écrire, le clavecin et quelques bois bondissants. Young joue ici sur l’accumulation de sons de manière hétéroclite, accompagnant un rappel du thème principal à l’accordéon (à 0:31) avec des dissonances plus nerveuses et insistantes. La seconde partie fait intervenir le piano et le glockenspiel avec fantaisie et extravagance, incluant même quelques ponctuations de timbales dans un style résolument atonal : « Imps and Pimps » s’avère être par ailleurs le morceau le plus proche de l’esthétique musicale de « The Vagrant », même si certains passages n’ont pas été utilisés dans le film. « Missing The Devil I Still Love » reprend le thème intimiste de « Living For Love » associé à Jabez Stone dans le film, mélodie gracieuse et légère jouée délicatement ici par un piano et des cordes. A ce sujet, on appréciera l’écriture minimaliste du quatuor à cordes dans « Dying for Love », qui s’oriente clairement vers le style de la musique de chambre classique. « Nebuchadnezzar Phase » vient rappeler l’idée que la vie de Jabez est devenue un enfer bien malgré lui, avec le retour des harmonies sombres de la valse de « The Temptation Waltz ». « Malleus Maleficarum » reprend quand à lui le thème de Jabez aux cordes pour la scène finale du procès opposant Daniel Webster au diable. On appréciera la reprise finale du thème au détour d’une envolée orchestrale plus conséquente, évoquant une sensation de libération, de paix retrouvée, avant la conclusion diabolique et sournoise de « Hell’s Bells » qui développe les sonorités extravagantes et farfelues de « The Devil and Daniel Webster ».

« Shortcut to Happiness » s’avère donc être une partition plutôt vive et colorée que nous offre Christopher Young pour la comédie satirique d’Alec Baldwin. Jouant sur la thématique du diable avec un second degré constant, Young s’auto-parodie et oscille entre l’humour noir, le mystère, les dissonances et les mélodies plus classiques avec une inventivité constante. Utilisée de manière très banale sur les images, où la musique apporte une énergie et un humour régulier au film sans surprise, la partition de « Shortcut to Happiness » témoigne du savoir-faire indéniable de l’un des plus talentueux compositeurs américains de sa génération, à l’aise dans tous les styles et réputé pour son sens de l’humour à toute épreuve. Le score s’apprécie davantage sur le promo publié par le compositeur en 2005, et contenant certains détails et quelques musiques non retenues pour le film. Opus mineur dans la filmographie de Christopher Young, « Shortcut to Happiness » devrait néanmoins séduire les fans de ses musiques plus extravagantes comme « The Vagrant » ou « Head Above Water », en attendant une édition CD officielle de cette musique (peut-être chez Intrada ?).




---Quentin Billard