Disc 1

The French Connection

1-Main Title 0.59
2-Just Looking 0.17
3-Charnier 0.52
4-Copstail 4.03
5-The Old Fort 1.19
6-Sal 1.25
7-Joel 1.04
8-The Car 1.05
9-Doyle's Blues 0.57
10-Waltz 1.01
11-Hotel Chase 5.28
12-What The?!/Umbrella 3.25
13-Subway 0.23
14-The Shot 1.12
15-This Is It/Here We Go/
Stay With It 3.26
16-Lincoln's Blues 2.05
17-Strip 1.45
18-Found 0.36
19-Au Revoir 1.16
20-Surprise/The Last Round Up 1.18
21-Frog In Room 0.50
22-End Titles 2.43

French Connection II

23-Main Title/Waterfront 3.34
24-Boat Ride 1.21
25-Popeye 1.39
26-Popeye's Montage 2.04
27-Volleyball 1.37
28-Hit 1.21
29-Heroin 4.24
30-OD 2.15
31-Pain 1.06
32-Rehabilitation 2.04
33-Revenge 1.16
34-Boat Bottom/Dry Dock 3.07
35-Stalking 4.14
36-Continuation/Here Come the Cops 1.53
37-The Big Chase 2.33
38-Exhaustion 2.24
39-End Title 1.32

Disc 2

Popeye Doyle (Brad Fiedel)

1-Main Title 4.01
2-First Chase 4.11
3-Body Dump 0.42
4-Jill's Apartment 0.47
5-Video One 0.34
6-Gut Feeling 0.32
7-Following The Barkeep 1.50
8-Video Two 1.08
9-Follow The Weasel 0.07
10-Weasel Volunteers 0.33
11-Weasel Makes Parisi 1.33
12-Video Three 1.36
13-Cat and Mouse 2.42
14-Hat in the Ring 0.18
15-Motorcade 2.06
16-Shadow Rises 0.21
17-Tackle the Shadow 0.28
18-Reel 7 Act Out 0.13
19-Weasel's Weapons 0.28
20-Weasel to Popeye's 2.39
21-Reel 8 Act Out 0.24
22-Evil Afoot 0.13
23-Embassy Murder 1.04
24-Hospital Heavy 3.17
25-Final Shootout 4.09
26-Aftermath 0.50
27-End Credits 1.12

Additional Music
The French Connection


28-Hotel Chase (alternate) 5.28
29-The Source 3.31
30-Everybody Gets To Go
To The Moon 3.38*

French Connection II

31-Hit (alternate) 1.22
32-Exhaustion (alternate) 2.24
33-Sores 3.16
34-Blues 2.33
35-Cops 3.52
36-Drugs 4.30

Popeye Doyle

37-First Chase (atlernate) 3.54
38-Prove My Love To You 2.09

*Ecrit par Jimmy L. Webb
Interprété par Three Degrees.

Musique  composée par:

Don Ellis

Editeur:

La La Land Records LLLCD 1408

Album produit par:
Nick Redman, Mike Matessino
Producteurs exécutifs album:
MV Gerhard, Matt Verboys
Direction musique pour
Twentieth Century Fox:
Tom Cavanaugh
Mixage:
Mike Matessino
Montage:
Neil S. Bulk
Mastering:
Daniel Hersch
Assistance de production:
Ron Fuglsby

Artwork and pictures (c) 1971/1975/1986/2016 Twentieth Century Fox. All rights reserved.

Note: ****
THE FRENCH CONNECTION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Don Ellis
Polar majeur du début des années 70, « The French Connection » est l’adaptation cinématographique du roman de Robin Moore, lui-même inspiré d’une enquête de police d’Eddie Egan et Sonny Grosso qui traquèrent les membres de la French Connection, un réseau de trafiquants d’héroïne qui sévissait depuis la France sur le sol américain en 1961. Film clé de la filmographie de William Friedkin, « The French Connection » débute à Marseille au début des années 70. Alain Charnier (Fernando Rey), influent et puissant criminel soupçonné de diriger une importante organisation de trafic d’héroïne, fait supprimer un policier qui enquête sur lui depuis des mois, par le biais de son homme de main Pierre Nicoli (Marcel Bozzuffi). Son nouvel objectif : faire passer aux Etats-Unis 32 millions de dollars d’héroïne cachée dans une Lincoln Continental Mark III conduite par l’un de ses amis, un présentateur de télévision français très populaire, Henri Devereaux (Frédéric de Pasquale), convaincu que ce dernier est au-dessus de tout soupçon et que la police ne pourra pas le suspecter d’appartenir au réseau de Charnier. Au même moment, à New York, Jimmy « Popeye » Doyle (Gene Hackman) et Buddy « Cloudy » Russo (Roy Scheider), deux policiers des narcotiques, mènent une enquête sous couverture à Brooklyn, où ils tentent de stopper un suspect mêlé à une transaction de drogue dans un bar du quartier. Après une arrestation musclée et brutale, le suspect révèle qu’il fait partie d’un réseau de trafiquant bien plus important, aux multiples ramifications. Popeye et Cloudy prennent ensuite en filature un nouveau suspect, le mafieux Salvatore « Sal » Boca (Tony Lo Bianco), qui discute avec des membres de la pègre new-yorkaise impliqués dans le trafic de drogue. La piste de Boca les amène jusqu’à Joel Weinstock (Harold Gary), un avocat véreux impliqué dans le réseau de trafiquants d’héroïne. Lorsqu’un informateur apprend à Popeye et Cloudy qu’une importante cargaison d’héroïne vient tout juste d’arriver à New York, les deux flics tentent de convaincre leur supérieur Walt Simonson (Eddie Egan) de mettre sur écoute les téléphones de Boca et sa jeune épouse Angie (Arlene Farber). Ils réalisent alors que Boca fait affaire avec Alain Charnier, mais ce dernier découvre que les policiers le suivent depuis son arrivée à New York et tente alors de semer Popeye dans le métro. Charnier contre-attaque ensuite en envoyant son homme de main Nicoli supprimer Popeye.

Thriller haletant tourné dans un style documentaire très réaliste, « The French Connection » est l’un des films policiers les plus mémorables du cinéma américain des années 70. Récompensé en 1972 par 5 Oscars – celui du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur acteur pour Gene Hackman, du meilleur scénario et du meilleur montage – le film fit forte impression, d’abord parce qu’il s’agissait de l’un des polars les plus sombres que l’on ait vu au cinéma à cette époque, avec son ambiance hivernale très particulière, et sa description glaciale d’une ville déshumanisée, le tout filmé en lumière naturel et dans de vrais décors. Soucieux de concevoir une image réaliste, Friedkin eut l’idée de séparer les membres de l’équipe technique pour obtenir un résultat beaucoup plus naturel à l’écran. Quand au duo incarné par Gene Hackman et Roy Scheider, le cinéaste s’attache à retranscrire avec authenticité les dialogues et les situations réelles qu’ont vécu Eddie Egan et Sonny Grosso, qui ont par ailleurs chacun un petit rôle dans le film. On raconte par ailleurs que Friedkin aurait été influencé par la vision du film « Z » de Costa-Gavras (1969) qui l’aurait inspiré dans sa façon de tourner caméra à l’épaule dans un style documentaire. Mais le vrai atout clé du film, outre la performance remarquable (et oscarisée) de Gene Hackman dans le rôle emblématique de Popeye Doyle – l’acteur étant alors peu connu en 1971 – en flic revêche et brutal qui chasse les criminels sans se soucier des conséquences de ses actes, c’est surtout la célèbre poursuite en voiture vers la fin du film, alors que Popeye poursuit le métro aérien dans lequel se trouve Nicoli depuis une voiture réquisitionnée, remontant à contre-sens la Stillwell Avenue à plus de 150 km/h.

On raconte que Friedkin aurait eut l’idée de tourner cette scène suite à une conversation avec Howard Hawks, qui lui aurait suggéré de réaliser une scène de course-poursuite en voiture qui dépasse toutes celles qui ont été tournées auparavant – et notamment celle emblématique de « Bullitt » (1968) - Séquence hautement mémorable et incroyablement bien rythmée, la poursuite en voiture de « The French Connection » est aussi extrême que le fut sa conception (Friedkin n’aurait pas averti les autorités de la ville et n’avait pas fait fermer l’avenue afin d’accentuer là aussi le réalisme et l’intensité de la poursuite !). Le film se termine par ailleurs lors d’une fusillade dans un entrepôt où Popeye traverse symboliquement des couloirs obscurs avec cette étrange séquence où un coup de feu retentit sans que l’on puisse en connaître la raison, concluant le film sur une touche de mystère qui ne sera jamais élucidé. Il faut replacer le film dans son contexte d’origine : « The French Connection » sort au moment où le cinéma américain connaît un engouement quasiment sans précédent pour le genre du thriller et du polar. L’année 1971 est d’ailleurs particulière à plus d’un titre sur ce sujet, puisque le film de William Friedkin sort la même année que « Straw Dogs » de Sam Peckinpah, le film de gangster « Get Carter » de Mike Hodges, le thriller « Klute » d’Alan J. Pakula, l’incontournable « Shaft » de Gordon Parks, icône du cinéma de Blaxploitation des seventies, sans oublier le sulfureux et violent « Dirty Harry » de Don Siegel. Réalisé avec seulement 1,8 million de dollars, « The French Connection » va conquérir très vite le public et génèrera plus de 51 millions de dollars de recettes, avant de devenir l’un des films cultes de cette décennie, générant deux suites, l’une tournée par John Frankenheimer en 1975 et un téléfilm intitulé « Popeye Doyle » sorti en 1986, avec Ed O’Neill dans le rôle-clé.

« The French Connection » doit une bonne partie de son succès à la partition funky/jazzy très particulière du musicien Don Ellis. Le compositeur – décédé en 1978 – est surtout connu comme trompettiste et batteur de jazz, spécialiste de l’expérimentation et des métriques musicales particulières. Après avoir voyagé en Europe dans les années 60, où il multipliera les expériences musicales en Pologne, en Allemagne et en Suisse, Ellis se fera connaître à New York où il fondera le Workshop Orchestra en 1963, un groupe de jazz spécialisé dans l’improvisation. Passionné par la musique indienne traditionnelle, Don Ellis se spécialisera ensuite dans l’éthnomusicologie auprès du musicien indien Harihar Rao et composera ses premières oeuvres musicales, incluant sa première Symphonie « Contrasts for Two Orchestras and Trumpet », créée par le Los Angeles Philharmonic Orchestra dirigé par Zubin Mehta en 1967. Il fondera ensuite le Hindustani Jazz Sextet incluant le sitar et la tabla d’Harihar Rao. Le compositeur fondera aussi le Don Ellis Orchestra qui se fera connaître pour ses nombreuses expérimentations musicales et créera une trompette à quatre pistons qui lui permettra de jouer des quarts de ton – comme le fera des années plus tard le trompettiste français Ibrahim Maalouf – Après avoir produit quelques albums avec son groupe, Don Ellis sera contacté par William Friedkin pour signer la musique de « The French Connection » en 1971. Le cinéaste souhaitait engager le compositeur après avoir entendu ses anciens albums. Ellis acceptera le projet et enregistrera la musique du film avec son propre orchestre.

Le double album publié par La La Land en 2016 nous permet enfin d’apprécier l’intégralité des partitions de Don Ellis pour les deux films de la franchise, l’album révélant par la même occasion une quantité ahurissante de morceaux non retenus pour le film ou bien remontés différemment sur les images, et ce à tel point qu’il ne restera plus qu’une vingtaine de minutes de musique originales utilisées dans le film. Fidèle à sa personnalité de jazzman expérimental, Don Ellis pose le ton du score dès l’ouverture (« Main Title ») à l’aide de cuivres dissonants et de percussions martelées de façon hystérique sur fond de notes aléatoires des bois. « Just Looking » introduit le thème principal du score, thème mélodique et mélancolique associé à Alain Charnier dans le film, mélodie mémorable qui s’apparente à un refrain populaire typique du style des chansons européennes des années 70 (peut être pour évoquer les origines françaises de Charnier ?), malheureusement sous-employée dans le film mais très présente dans le score complet d’Ellis. Le thème de Charnier n’est d’ailleurs pas sans rappeler ce style de musique que composaient à la même époque en France des musiciens comme Francis Lai, Michel Legrand ou Philippe Sarde. Le morceau développe davantage la mélodie dans « Charnier », accentuant l’idée de la « French Connection » avec l’apport d’orchestrations étoffées incluant cordes, flûte, piano et guitare électrique. A noter que le « Theme from The French Connection » (ainsi intitulé sur les anciens albums sortis à l’époque) a connu un certain succès dans la carrière de Don Ellis, l’ayant incité à réadapter et arranger ce thème à plusieurs reprises. Avec « Copstail », on entre dans le vif du sujet avec un premier morceau de jazz expérimental dans lequel Ellis rappelle son statut de musicien visionnaire du genre : avec ses métriques changeantes, ses tempi multiples et sa trompette omniprésente, « Copstail » accompagne les premières filatures de Popeye et Cloudy au début du film avec cette ambiance musicale si caractéristique de « The French Connection », et qui sera même largement imitée par d’autres compositeurs tout au long des années 70.

« The Old Fort » propose une variation plus sombre et dissonante du thème principal aux cordes. Don Ellis instaure un suspense et une tension à l’écran de manière très particulière, même si une bonne partie de la musique n’a pas été utilisée pour le film. Dans « Sal », Ellis évoque le personnage du gangster Salvatore Boca à l’aide de notes étranges d’un violon soliste en écho. Ici aussi, on nage en pleine expérimentation musicale pure typique des années 70. Idem pour « Joel » et le jeu virtuose et complexe des cordes en notes rapides en écho. « The Car » illustre une autre scène de filature avec l’apport de la guitare électrique et un mélange de cordes et de cuivres dissonants. La personnalité de jazzman du compositeur transparaît pleinement dans « Doyle’s Blues » avec sa partie de bugle soliste tandis que « Waltz » s’avère être une pièce particulière, une étrange valse lente pour violons jouée de façon particulière et hésitante dans les registres extrêmes. La poursuite à l’hôtel new-yorkais (« Hotel Chase ») permet à Ellis de nous offrir un autre morceau de suspense qui évolue très rapidement vers une rythmique funky typique du cinéma des années 70 – l’influence du « Bullitt » de Lalo Schifrin est ici flagrante – avec ses cuivres et ses cordes dissonantes et ses riffs funky de basse sur fond d’improvisations de hautbois. La traque entre Popeye et Charnier permet ensuite au compositeur de développer le thème de manière plus étrange et dissonante dans « What The – Umbrella » avec des rythmes entêtants et des éléments jazz trépidants.

La traque se prolonge ensuite dans le métro (l’agressif « Subway ») où Charnier parvient à semer Popeye, puis c’est la fameuse séquence où Popeye abat l’homme de main de Charnier dans le dos à travers les clusters extrêmement dissonants de « The Shot ». On nage clairement ici dans le registre de la musique contemporaine du XXe siècle grâce aux expérimentations avant-gardistes de Don Ellis qui repoussent les limites de la musique au cinéma et offrent une nouvelle perspective à la composition pour les films. « This Is It/Here We Go/Stay With It » développe les rythmes frénétiques à l’aide de cuivres agressifs, de batterie et de percussions exotiques (congas). « Strip » rejoint l’écriture entièrement atonale de « The Shot » avec ses cuivres massivement dissonants (là aussi le morceau n’a pas été utilisé dans le film). « Found » nous amène quand à lui au dernier acte du film dans un morceau plus contrapuntique de cuivres, tandis que « Au Revoir » reprend le thème de Charnier à la guitare électrique avec sa batterie survoltée, son chorus de saxophone et ses ponctuations jazzy et dissonantes des cuivres. Et c’est la confrontation finale dans l’entrepôt grâce au superbe « Surprise/The Last Round Up », un morceau chaotique et expérimental d’une puissance colossale, reprenant l’ouverture dissonante du « Main Titles » lors de la fusillade finale – la pièce repousse ici les limites techniques du jeu des instrumentistes dans un registre très virtuose ! – La confrontation s’achève enfin dans le sombre et lugubre « Frog in Room » avant un générique de fin plutôt noir et pessimiste (« End Titles »).

Avec ses accents jazzy syncopés et ses rythmes complexes évoquant l’environnement urbain du film, la musique de « The French Connection » est un véritable tour de force technique et une musique d’une rare fulgurance. Expérimentale, atonale/polytonale/modale/tonale, improvisées et très influencée par la musique contemporaine des années 50/60, la partition de Don Ellis est un score mémorable d’une rare intensité et d’une inventivité à toute épreuve. L’écoute sur l’album publié par La La Land nous permet enfin d’apprécier pour la première fois l’intégralité du travail d’Ellis sur le film de William Friedkin, incluant tous les morceaux qui ont été coupés au montage. L’écoute complète du score est une véritable révélation : on y découvre une oeuvre qui baigne dans une folie constante, capable néanmoins de garder les pieds sur terre grâce à un très beau thème principal mémorable et des passages jazzy plus conventionnels. Partition emblématique des polars hollywoodiens des années 70, « The French Connection » est un score qui ouvrira la voie à une longue série de partitions expérimentales aux accents funk/jazz comme le feront à la même époque des musiciens comme Lalo Schifrin, Quincy Jones, Jerry Goldsmith, Jerry Fielding ou David Shire. Score incontournable de cette époque, « The French Connection » se doit d’être apprécié à sa juste valeur grâce au double album publié par La La Land, la meilleure édition à ce jour de l’oeuvre emblématique de Don Ellis. Suite à l’énorme succès du film de Friedkin, Ellis retrouvera le producteur Philip D’Antoni sur le polar « The Seven-Ups » en 1973 et signera quelques musiques de film jusqu’en 1978 (date à laquelle il décède prématurément à seulement 44 ans), sans oublier une deuxième partition mémorable pour « The French Connection II » de John Frankenheimer en 1975.



---Quentin Billard