1-Them and Us 4.18
2-We Forget Who We Are 4.55
3-The Place You Are Right Now 7.06
4-Inquiries 4.38
5-Trails 5.53
6-Broken Glass 5.05
7-Nobody Cares About Me 4.12
8-The Night Drive 12.14
9-Escape 6.34
10-Terminus 2.54
11-Long Shadows On The Street 7.10
12-Resolve 3.34

Musique  composée par:

Trent Reznor/Atticus Ross

Editeur:

Lakeshore Records no label number

Score produit par:
Trent Reznor, Atticus Ross
Montage musique:
Sally Boldt, Jason Ruder,
Ben Schor

(c) 2016 CBS Films/Bluegrass Films/Closest to the Hole Productions/Hutch Parker Entertainment/TIK Films. All rights reserved.

Note: ***
PATRIOTS DAY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trent Reznor/Atticus Ross
« Patriot’s Day » (Traque à Boston) est le nouveau long-métrage très attendu de Peter Berg, après « Lone Survivor » et « Deepwater Horizon ». « Patriot’s Day » revient sur les deux attentats du Marathon de Boston de 2013 et nous plonge dans une superbe reconstitution des événements qui se déroulés avant et après ces attentats qui ont marqué les esprits aux Etats-Unis. Le 15 avril 2013, le jour des patriotes en Amérique, deux frères, Dzhokhar (Alex Wolff) et Tamerlan Tsarnaev (Themo Melikidze) font sauter deux bombes durant le prestigieux et célèbre Marathon de Boston. L’attaque sème la panique dans toute la ville et blessera gravement de nombreuses personnes, dont un jeune couple Patrick Downes (Christopher O’Shea) et sa fiancée Jessica Kensky (Rachel Brosnahan), qui seront conduits dans des hôpitaux différents et amputés dans leurs jambes, tandis qu’un père de famille nommé Steve Woolfenden, blessé dans l’explosion d’une des deux bombes, se retrouvé séparé de son jeune fils Leo, qui a été secouru par des policiers et emmené en lieu sûr. L’agent spécial du FBI Richard DesLauriers (Kevin Bacon) est chargé d’enquêter sur le double attentat avec la collaboration du chef de la police de Boston Ed Davis (John Goodman) et du sergent de police Jeffrey Pugliese (J.K. Simmons) de Watertown, tandis que le sergent Tommy Saunders est chargé d’interroger des témoins et de retrouver la trace des poseurs de bombe. La traque pour retrouver les frères Tsarnaev se déroulera pendant plusieurs jours, les deux frères semant le chaos partout où ils passeront – ils abattront le jeune officier du MIT Sean Collier (Jake Picking) et déroberont le SUV de Dun Meng le 18 avril 2013 – Mais alors que les Tsarnaev projettent de faire exploser une autre bombe à New York, Meng réussit à s’enfuir et avertit la police qui retrouve la trace des deux frères dans les rues de Watertown, une banlieue de Boston. S’en suivra une fusillade spectaculaire dans la rue qui aboutira à la mort de Tamerlan (écrasé par le SUV de son frère) et l’arrestation de Dzhokhar qui s’était réfugié sous la bâche du bateau d’un voisin du quartier. Dzhokhar a été condamné à l’injection létale et attend toujours sa sentence dans une prison fédérale.

« Patriot’s Day » est donc une formidable reconstitution de cet épisode tristement célèbre de l’histoire américaine. A l’instar de « Lone Survivor » et de « Deepwater Horizon », Peter Berg opte pour une réalisation quasi documentaire, filmant son récit caméra à l’épaule pour mieux nous plonger au coeur de l’histoire. Evacuant tout artifice hollywoodien, Berg choisit ici un point de vue réaliste, celui du spectateur qui serait venu assister à une reconstitution quasi journalistique des événements de Boston en avril 2013. A ce sujet, le film est techniquement bluffant : la séquence des deux explosions du Marathon est absolument saisissante de réalisme, tout comme le chaos qui s’en suit et les nombreux blessés ensanglantés étalés sur les trottoirs de la place. Le clou du « spectacle » est atteint avec l’incroyable fusillade entre les deux frères Tsarnaev et la police vers la fin du film, fusillade absolument chaotique d’une rare violence, une séquence quasi anthologique filmée là aussi sans artifice, sans trucage particulier. La narration est introduite à travers la présentation des différents protagonistes du récit : les policiers, le jeune couple qui se rend au Marathon, les deux frères islamistes radicalisés qui préparent leur coup, les amis des deux criminels, le jeune asiatique qui se fera prendre en otage dans son SUV, etc. Chacun a droit à une présentation préliminaire qui introduit brillamment chaque personnage – et ce malgré l’abondance de seconds rôles – et délivre le quota d’informations nécessaires sur chaque personnage. Si le scénario est donc construit comme dans « Deepwater Horizon », le travail sur les personnages paraît ici plus poussé, plus abouti. L’ensemble n’a rien de foncièrement original mais le film est porté par une force narrative/visuelle saisissante et une montée de tension qui ne nous lâche jamais jusqu’à un final plutôt pompier et un peu trop tire-larme (en gros, les vraies victimes des attentats sont filmées et expliquent que ces événements ont permis aux habitants de la ville de s’unir et de faire barrage contre le terrorisme). En bref, après l’excellent « Deepwater Horizon », Peter Berg confirme avec « Patriot’s Day » qu’il est un maître dans la reconstitution d’événements historiques célèbres et nous offre un film réalisé de manière magistrale, un très grand thriller qui devrait marquer les esprits durablement.

Après avoir fait appel à Steve Jablonsky sur ses précédents films, Peter Berg décide finalement de convoquer le duo Trent Reznor/Atticus Ross pour écrire la musique de « Patriot’s Day ». Connu pour leurs travaux sur le groupe Nine Inch Nails et sur les musiques des films de David Fincher (« The Social Network », « The Girl with the Dragon Tattoo » et « Gone Girl »), Trent Reznor et Atticus Ross étaient un choix plus qu’évident pour « Patriot’s Day ». Résolument électronique et très orientée vers une approche atmosphérique et immersive, la musique de « Patriot’s Day » contribue à nous plonger dans une ambiance sombre et particulière tout au long du film. Le métrage débute au son de « Them and Us », avec ses rythmes répétitifs et ses sonorités hypnotiques de clavier, de synthétiseurs et de loops industriels sur fond de guitare électrique. L’ouverture évoque clairement les préparatifs du Marathon de Boston 2013 au début du film tout en maintenant une tension et un rythme constant par la répétition obsédante des mêmes notes et des mêmes sons qui montent ici en crescendo. L’approche de Reznor et Ross est ici résolument atmosphérique mais aussi très minimaliste : les sonorités sont disposées savamment à l’écran, sans jamais en faire de trop, mais apportant une ambiance quasi viscérale aux images. Chaque émotion du récit est décuplée ici par une approche sonore judicieuse et très élaborée, même si l’ensemble s’avère peu original et peu surprenant à la première écoute. On s’attend par exemple à entendre les sempiternels pianos éthérés intimistes et les nappes sonores planantes dans « We Forget Who We Are » qui reflètent l’émotion et l’état d’esprit des survivants après les attentats de Boston, mais il y a malgré tout une certaine sincérité dans le travail du duo qui évite l’esbroufe et opte pour une approche répétitive et minimaliste parfaite pour le film de Peter Berg.

« The Place You Are Right Now » développe une ambiance plus particulière avec ses nappes sonores étranges à la limite du new-age et ses notes hésitantes de piano mélancolique. Très vite, un rythme de synthétiseur et de clavier se met en place, imposant une pulsation entêtante tout au long des 7 minutes du morceau. On devine ici un sentiment d’urgence grandissant, de danger, alors que l’on rentre enfin dans le vif du sujet à l’écran. Dommage néanmoins que l’esthétique musicale atmosphérique conçue par Trent Reznor et Atticus Ross ait tendance à s’avérer lassante et simpliste sur la longueur : les deux compositeurs se contentent bien trop souvent de répéter les mêmes sons et les mêmes rythmes sur des minutes entières, le tout accompagné d’une simple tenue de note. Le caractère statique de la musique tend parfois à desservir le score plus qu’autre chose, notamment en écoute isolée, mais le résultat à l’écran est pourtant très intense et fort intéressant. « Inquiries » réemploie le piano de manière atmosphérique, mais l’on devine ici une tension, un sentiment de malaise grandissant avec ses nappes sonores plus sombres et quasiment dissonantes. « Trails » accompagne la recherche des deux poseurs de bombe dans le film, quelques heures après les attentats de Boston. On baigne ici dans une ambiance hypnotique assez étrange, notamment à travers les octaves répétés inlassablement au piano, les drones et les nappes sonores brumeuses des synthétiseurs. « Broken Glass » est plus particulier, puisqu’il évoque les frères Tsarnaev durant la scène où ils abattent le jeune policier et volent la voiture de Dun Meng. Reznor et Ross accentuent ici les pulsations électroniques et font monter la tension à l’aide de sonorités plus dissonantes et torturées des synthétiseurs. Le sound design paraît ici plus élaboré, plus organique, comme pour refléter la folie des deux frères extrémistes obsédés par leur haine du monde.

Même chose pour « Nobody Cares About Me » qui accentue cette idée de folie des deux frères à l’aide de pulsations entêtantes et de dissonances plus radicales des synthés, pour la scène où ils abattent le policier et volent la voiture de Dun Meng. La musique flirte curieusement ici avec une ambiance quasi horrifique dans la manière dont les deux compositeurs développent les nappes sonores distordues, lentes et dissonantes qui suscitent ici un malaise à l’écran comme sur l’album – il s’agit par ailleurs de l’un des passages les plus intenses du score dans le film - Dans le même ordre d’idée, « The Night Drive » évoque la fuite des deux frères dans le SUV de Dun Meng durant 12 minutes assez interminables sur l’album, durant lesquelles Reznor et Ross profitent de la longueur conséquente du morceau (et de la scène) pour développer les sonorités électroniques obsédantes et oppressantes associées aux deux poseurs de bombe. La musique se glisse de façon insidieuse dans la psychologie torturée des deux personnages, tandis que les pulsations entêtantes des synthétiseurs et des claviers maintiennent un rythme certain à l’écran pour dynamiser le montage de Peter Berg. « Escape » fait monter la tension avec des pulsations plus agressives et des dissonances accrues lorsque Meng réussit à s’échapper, débouchant sur le sombre « Terminus » durant lequel les deux compositeurs expérimentent autour des sonorités électroniques plus étranges, avant la résolution finale apaisée de « Long Shadows on the Street » et l’optimiste « Resolve ».

Trent Reznor et Atticus Ross signent donc un score atmosphérique et sombre assez difficile d’accès pour « Patriot’s Day ». La musique vaut surtout pour son ambiance sombre et viscérale dans le film qui contribue largement à la montée de tension progressive du récit et son atmosphère très particulière qui colle très vite à la peau, tout en demeurant discrète sur les images. Les deux compositeurs saisissent l’occasion pour développer leurs sonorités électroniques habituelles pendant de longues minutes, la musique étant ainsi posée librement sur les images pour dynamiser le montage ou imposer l’ambiance adéquate de certaines séquences. Répétitive et minimaliste, la musique de « Patriot’s Day » n’est de toute évidence pas destinée à toutes les oreilles. Certains auditeurs néophytes auront par exemple du mal à survivre aux 4 minutes de nappes dissonantes non-stop de l’impressionnant « Nobody Cares About Me » ou aux 12 minutes interminables et nerveuses de « The Night Drive » et de leurs nappes sonores statiques et lentes. Il y a dans « Patriot’s Day » une certaine recherche du son, de l’ambiance appropriée à chaque idée ou chaque moment fort du film, avec une certaine liberté de ton typique de Reznor et Ross, mais au-delà de l’expérimentation autour du sound design, l’ensemble reste quand même peu passionnant et finalement peu original dans la forme comme dans le fond. On a déjà entendu ce genre de chose sur les films précédents du duo, et force est de constater qu’un sujet aussi fort que celui de « Patriot’s Day » aurait peut être nécessité une approche plus audacieuse, plus mémorable qu’une simple tapisserie sonore essentiellement constituée de nappes synthétiques, de notes de piano et de pulsations électroniques entêtantes. Malgré tout, il y a dans ce score une ambiance hypnotique qui prend aux tripes, aussi bien dans le film que sur l’album, et reflète la gravité de l’un des plus tristement célèbres attentats survenus sur le sol américain dans les années 2010. A chacun de voir ensuite s’il apprécie ou non ce style électronique et atmosphérique très particulier !




---Quentin Billard