1-Nameless Order 4.27
2-Prologue 1.49
3-What A Wall 3.46
4-The Great Wall 4.30
5-First Battle 7.39
6-Captive Heroes 1.38
7-A Clean Start 2.27
8-We Are Not The Same 3.17
9-Xia Long, General 1.34
10-At The Border 1.30*
11-Foggy Loyalty 3.02
12-Fog And Fire 3.01
13-The Greed Of Man 1.57
14-Fools And Thieves 3.16
15-The Great Experiment 2.54
16-Bianling Boogie 3.43
17-Tower Tactics 4.20
18-Powder Rangers 3.27
19-Xin Ren 3.55
20-Bridge of Fate 4.26**

*Interprété par Zhao Mu-Yang
et Leehom Wang
Paroles de Wang Changling
Musique de Leehom Wang
**Interprété par Zhao Mu-Yang
et Leehom Wang.

Musique  composée par:

Ramin Djawadi

Editeur:

Milan Music 3998922

Score produit par:
Ramin Djawadi
Supervision musique:
Peter Afterman, Alison Litton,
Margaret Yen

Musique additionnelle:
Brandon Campbell
Mixage score:
Chris Fogel
Montage musique:
Alex Levy, Eric Wegener
Coordination musique:
Oriana Pedone

Artwork and pictures (c) 2016 Legendary East/Atlas Entertainment/China Film Group/Kava Productions/Le Vision Pictures/Legendary Entertainment. All rights reserved.

Note: ****
THE GREAT WALL
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Ramin Djawadi
Réalisateur chinois connu pour ses classiques hong-kongais comme « Epouses et concubines » (1991), « Qiu Ju, une femme chinoise » (1992) ou les fresques épiques que sont « Hero » (2002), « Le Secret des poignards volants » (2004) ou « La Cité Interdite » (2007), Zhang Yimou s’est imposé en l’espace de quelques années comme l’un des cinéastes majeurs de la cinquième génération du cinéma de Chine continentale (à ne pas confondre avec le cinéma hongkongais, plus populaire et commercial, avec les films de Jackie Chan, Bruce Lee ou les films d’action de John Woo ou Johnnie To). Le succès de Yimou est tel que le cinéaste chinois se verra offrir l’opportunité de réaliser son premier film américain, « The Great Wall » (La Grande Muraille), avec des moyens importants (135 millions de dollars), dans une vaste co-production américano-chinoise, une première donc pour Zhang Yimou. Le film se déroule dans la Chine médiévale en pleine ère de l’empereur Renzong (entre 1022 et 1063). Une douzaine de mercenaires européens voyagent à travers tout le pays à la recherche du secret de la mystérieuse poudre explosive. Les mercenaires se retrouvent alors traqués par des bandits Khitan dans les dunes désertiques. Deux des mercenaires, William et Tovar, survivent à l’attaque et doivent trouver refuge dans une caverne avant d’être attaqués brusquement par une mystérieuse créature dont ils réussissent à trancher un bras à coup d’épée. Bien décidés à savoir ce qu’ils ont blessé, William Garin (Matt Damon) et Pero Tovar (Pedro Pascal) se remettent en route avec les restes du bras sectionné et trouvent refuge au pied de la Grande Muraille, où ils sont fait capturés et emmenés par des soldats chinois appartenant à une société secrète militaire surnommée L’Ordre sans nom, dirigée par le Général Shao (Zhang Hanyu) et le Stratège Wang (Andy Lau). L’Ordre sans nom a été commissionné par la cour impériale de la dynastie Song pour protéger la Grande Muraille des attaques de créatures monstrueuses, les Tao Tei, qui se réveillent tous les 600 ans depuis la montagne de Jade où s’est écrasée une météorite il y a des millénaires. Lorsque les soldats chinois découvrent le bras arraché que ramènent avec eux William et Pero, qui sont prisonniers à l’intérieur de la Grande Muraille, ils réalisent qu’une nouvelle attaque des monstres est imminente. Les soldats se mettent alors en place selon cinq factions bien distinctes : les fantassins, les acrobates, les archers, les défenderesses des murailles et les cavaliers. William et Tovar se retrouvent mêlés malgré eux à la bataille opposant l’Ordre sans nom aux monstres ancestraux, et vont devoir prendre position dans ce conflit qui ne les concerne pas.

« The Great Wall » est à ce jour le film le plus cher jamais tourné sur le sol chinois – une partie du film a aussi été tournée en Nouvelle-Zélande – Véritable tour-de-force visuel, la superproduction internationale de Zhang Yimou est un hommage aux fresques épiques chinoises avec un casting impressionnant dans lequel se retrouvent parachutés une poignée d’acteurs américains, avec à leur tête Matt Damon, Pedro Pascal et Willem Dafoe. Le film repose sur un script conçu en partie par Tony Gilroy d’après une histoire écrite par Max Brooks (« World War Z »), Marhsall Herskovitz et Edward Zwick, réalisateur bien connu de « Legends of the Fall », « Blood Diamond » ou « Glory ». La présence de Zwick au scénario n’est d’ailleurs pas du au hasard, puisque l’histoire de « The Great Wall » n’est pas sans rappeler celle d’un autre film d’Edward Zwick : « The Last Samurai » (2003), fresque épique dans laquelle un occidental campé par Tom Cruise rejoignait une armée de samouraïs dans le Japon du XIXe siècle. Dans « The Great Wall », on retrouve finalement une trame scénaristique assez similaire : deux occidentaux se retrouvent mêlés à une bataille dirigée par une armée chinoise et vont devoir choisir leur camp dans cette guerre sans merci opposant des humains à une armée de monstres sanguinaires et brutaux. Le film vaut surtout par la qualité de ses effets spéciaux 3D hallucinants (qui sont l’oeuvre d’ILM et Weta Workshop) et ses nombreuses scènes de bataille épiques, tandis que le scénario tente de faire cohabiter la culture occidentale et asiatique à travers les deux héros du film : Matt Damon alias William pour les américains et Jing Tian pour le commandant Lin Mae.

Chacun tente de comprendre l’autre même si le discours initial de Lin Mae est clair dès le début : « nous sommes différents vous et moi ! ». Pour le reste, il ne faudra pas s’attendre à un scénario extraordinaire, bien au contraire. Zhang Yimou ne cherche pas à expliquer davantage l’origine des monstrueux Tao Tei et se contente uniquement de filmer l’affrontement entre monstres et humains pendant 1h40, point à la ligne. En revanche, Yimou sait filmer des batailles comme personne et le résultat est ahurissant d’un point de vue visuel. Soucieux de la portée internationale de son blockbuster, le cinéaste chinois multiplie les ralentis, les effets 3D et les cascades démentielles (notamment celles des guerrières sur les remparts qui se jettent dans le vide !) pour parvenir à ses fins, mais « The Great Wall » s’inspire aussi massivement des grands spectacles hollywoodiens de ces dernières années : on y retrouve la même surenchère, la même frénésie visuelle que dans « Transformers », on y retrouve les mêmes scènes de batailles sanglantes et démesurées que dans « 300 », et un scénario qui rappelle encore une fois le « Last Samurai » d’Ed Zwick. C’est d’autant plus dommage que l’on se serait attendu à autre chose de la part du réalisateur chinois de « Hero » et « Le Secret des poignards volants ». Quand à la polémique futile sur les accusations de « whitewashing » à l’égard du film, elle semble totalement stérile étant donné que les héros américains et chinois sont mis sur le même pied d’égalité dans l’histoire – certains ont même critiqué le fait que les américains s’imposaient encore une fois en sauveur de l’humanité pour défendre une armée entière de super soldats chinois ! -

La partition musicale de « The Great Wall » a été confiée à Ramin Djawadi, un choix peu étonnant lorsqu’on connaît le passif du compositeur dans le domaine des films d’action et des fresques épiques – on se souvient par ailleurs que la musique devait être initialement confiée à James Horner, qui décéda hélas tragiquement dans un accident d’avion en 2015 - Le compositeur de « Game of Thrones » paraissait le candidat idéal pour cette superproduction américano-chinoise, ayant à son actif quelques titres majeurs comme « Clash of the Titans » (2010), « Pacific Rim » (2013) ou « Warcraft » (2016). Le score de « The Great Wall » a été enregistré avec un grand orchestre symphonique aux studios d’Air Lyndhurst de Londres avec la chorale du Metro Voices – qui interprète ici des parties vocales chinoises – et un ensemble instrumental incluant le pipa (luth traditionnel chinois), le khim (sorte de cymbalum très répandu en Thaïlande, au Cambodge, au Laos ou en Chine) et le guzheng (cithare chinoise à 16 cordes, mais qui peut aller aujourd’hui jusqu’à 21 cordes). « The Great Wall » repose avant tout sur une poignée de thèmes, à commencer par le thème associé à l’Ordre sans nom dévoilé dans « Nameless Order ». Djawadi bâtit ici son morceau autour d’une mélodie ample et majestueuse interprétée par les choeurs chinois traditionnels, les cordes et les sempiternels tambours taikos japonais. On retrouve les instruments asiatiques dont la flûte en bambou accompagnant l’orchestre et la chorale féminine évoquant clairement les guerrières dirigées par la commandante Lin Mae. Le second thème, dévoilé dans le « Prologue », est un motif de 6 notes de cuivres associé à la Grande Muraille. Le motif est dévoilé ici à 1:02 sur fond de triolets énergiques des cordes et d’effets sonores de la shakuhachi japonaise.

Le troisième thème est celui associé à William. On l’entend à la flûte dès 0:07 dans « Captive Heroes », et se distingue par sa série de 3 notes ascendantes évoquant la quête de William, qui souhaite aujourd’hui redonner un sens à sa vie en se battant pour une noble cause. Le thème est repris ensuite par le guzheng au début de « A Clean Start ». Enfin, le quatrième thème est celui associé aux monstrueux Tao Tin dans le film. Ce motif de 3 notes menaçantes de cuivres est dévoilé dès 0:11 dans le « Prologue » et reviendra tout au long du film, notamment durant les séquences d’attaque de la muraille. A l’aide de ses quatre thèmes, Ramin Djawadi va donc élaborer une partition ample, épique et puissante, comme il le fit précédemment sur « Warcraft ». Dans « The Great Wall », le compositeur met en place une figure rythmique aux tambours taikos qui accompagne les martèlements scandés par les guerriers lors de l’attaque de la Grande Muraille. A ce sujet, on retrouve ici une série de variations dramatiques et nobles autour du thème de la muraille. Chacune de ces figures rythmiques de tambours ont ici un rôle narratif puisqu’elles sont censées accompagner dans le film les actions cordonnées des différents guerriers de l’Ordre sans nom. Ici aussi, Djawadi juxtapose les thèmes pour accompagner l’action à l’écran, nous proposant ici une variation épique aux cordes du thème de l’Ordre sur fond de tambours martelés, un premier morceau-clé du score de « The Great Wall ». « First Battle » accompagne la première scène de bataille du film à l’aide d’ostinatos martiaux des cordes, des percussions et des cuivres. Ici aussi, on appréciera la façon dont Djawadi joue avec ses différents thèmes, ceux de la Grande Muraille, de William, des Tao Tei et de l’Ordre sans nom (avec ses choeurs chinois reconnaissables) pendant plus de 7 minutes épiques à souhait. A noter ici la façon dont Djawadi font monter la tension à travers plusieurs rebondissements rythmiques, intensifiant l’action à l’écran sans jamais perdre de vue l’écriture mélodique/thématique, un trait récurrent dans les scores d’action épique du compositeur.

« We Are Not the Same » profite quand à lui de l’accalmie après la bataille en utilisant ici un violoncelle avec le guzheng, le khim et la flûte en bambou. Djawadi reproduit parfaitement ici l’ambiance chinoise traditionnelle à travers le jeu des solistes tout en se montrant respectueux des traditions musicales. « Xiao Long, General » accompagne les funérailles du Général Shao pour l’un des premiers grands moments d’émotion du score, avec ses cordes élégiaques et son violoncelle soliste éthéré. A noter ici un sound design délicat constitué de sons de bols et de gongs qui viennent renforcer la dimension funèbre de la séquence pour ce qui reste l’un des plus beaux passages de la partition de « The Great Wall ». « Foggy Loyalty » évoque quand à lui la scène où William décide de combattre pour l’Ordre sans nom et se jette dans le brouillard pour tenter de capturer l’un des Tao Tei afin de l’étudier et de comprendre comment vaincre les monstres. Le thème de la Grande Muraille est à nouveau très présent, avec celui des monstres (notamment vers 1:54). La séquence se termine d’ailleurs dans le sombre « Fog and Fire », qui débute sur une reprise du thème de William aux cordes (à 0:22) et se conclut sur son thème aux choeurs vers 2:29, une façon pour le compositeur de symboliser l’idée que le mercenaire européen fait désormais partie des guerriers de la Grande Muraille. L’action reprend le dessus dans « Fools and Thieves » et « The Great Experiment » avec ses choeurs féminins épiques. On entre ensuite dans le dernier acte du film avec « Bianling Boogie » pour la scène où les Tao Tei envahissent la capitale du royaume à la fin du film. Le thème des monstres est évidemment ici très présent (à 0:28) ainsi que celui de la Grande Muraille et de l’Ordre. A ce sujet, ne ratez pas la superbe reprise du thème principal aux choeurs à 2:11. La musique devient aussi ponctuellement dissonante pour les moments les plus chaotiques et les plus intenses, même si Djawadi parvient toujours à conserver son approche mélodique/thématique.

« Tower Tactics » accompagne le combat final, alors que William et Lin Mae tentent d’atteindre la reine des monstres pour mettre fin à leurs attaques. A noter par ailleurs que Djawadi a aussi écrit un thème héroïque pour la commandante Lin Mae (on l’entend notamment vers 1:31), qui devient plus important lors de la bataille finale, étant donné que c’est à elle que revient la charge de succéder au Général Shao et de commander les troupes de la Grande Muraille. A noter ici l’omniprésence du motif de 3 notes des monstres, qui semble monter en crescendo tout au long du partition, Djawadi n’hésitant pas à modeler et remodeler ce thème protéiforme, jusqu’à lui conférer une certaine puissance maléfique avec l’ajout des choeurs (à 2:20). Il y a un caractère dramatique et déterminé assez saisissant dans la dernière partie de « Tower Tactics » alors que les deux héros vont tout tenter pour sauver le monde de la menace des Tao Tei. Même chose pour « Powder Rangers », avec sa superbe reprise du thème de l’Ordre sans nom dans un tutti orchestral/choral absolument grandiose. Enfin, « Xin Ren » reprend une dernière fois le thème de Lin Mae (à la flûte dès 0:36) dans une ambiance plus touchante, lyrique et apaisée, idéale pour conclure le film en beauté. Ramin Djawadi signe donc un score épique et puissant pour « The Great Wall », probablement l’une de ses meilleures partitions à ce jour pour le cinéma.

Comme l’ont fait précédemment Klaus Badelt sur « The Promise », Christopher Young sur « Monkey King » ou John Debney sur « League of Gods », Djawadi s’est laissé happer par l’imagerie si particulière et si magique du cinéma chinois, lui inspirant de très belles mélodies et une partition robuste, énergique et captivante du début jusqu’à la fin, avec ses thèmes mémorables et parfaitement développés. Décidément, force est de constater que Ramin Djawadi semble s’améliorer sur chacun de ses projets et continue de nous surprendre avec ses musiques épiques thématiques et généreuses, car même si l’ensemble reste toujours peu original et écrit assez platement, on ne peut qu’adhérer à cette vision musicale d’un score mélodique riche en idées thématiques, qui constitue une écoute satisfaisante d’un point de vue narratif. Certes, ce n’est pas de la grande musique, mais le score est écrit avec honnêteté et intelligence, et surtout, ce n’est pas juste du papier peint mais une musique qui raconte une vraie histoire, qui a quelque chose à dire, qui veut nous amener quelque part. A l’heure où la musique de film semble s’appauvrir de jour en jour, il faut apprécier ce genre de bon moment musical bien trop rare de nos jours, en espérant que les compositeurs américains continueront de travailler pour le cinéma asiatique, qui n’a pas fini de les inspirer !




---Quentin Billard