1-Main Title 1.18
2-The Back Room 3.28
3-Someone's Watching 0.46
4-In The Pool 0.21
5-Love Theme/Shrine 1.44
6-Effeti Moog e Voci 1.10
7-Davey's Waltz 2.01
8-The Chase 2.17
9-Eileen's Death 1.10
10-Love Theme/Wife 0.51
11-Davey's House 3.29
12-Mannequins 0.33
13-Mannequins Come Forth 1.01
14-Heartburst 2.16
15-Flight 1.54
16-In The Water 1.40
17-Dreamwake 0.39
18-Escape 1.39
19-Stalking 0.54
20-Becky's Death 0.29
21-Mannequins On Guard 1.43
22-Love Theme/Confession 1.14
23-"Jerry" To The Rescue 2.24
24-Dance/Axed 2.20
25-Going Home/End Titles 3.21

Musique  composée par:

Pino Donaggio

Editeur:

Full Moon Records WE00842

Score produit par:
Pino Donaggio
Orchestre conduit par:
Natale Massara
Producteurs:
Chris Kuchler, Scot Holton, Tom Null

(c) 1979 Charles Band Productions (c) 2014 Full Moon Features. All rights reserved.

Note: ***
TOURIST TRAP
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Pino Donaggio
« Tourist Trap » (Le Piège) est une obscure série-B horrifique réalisée par David Schmoeller en 1979. Il s’agit du tout premier long-métrage du réalisateur, à peine âgé d’une trentaine d’années lorsqu’il filme « Tourist Trap », après s’être formé auprès de Peter Hyams en l’assistant sur le film « Capricorn One » en 1977. Pour ce premier film au cinéma, Schmoeller s’est inspiré de son propre film d’étudiant (« The Spider Will Kill You ») tourné quelques années auparavant alors qu’il étudiait à l’Université du Texas. Réalisé en seulement 24 jours et produit par Charles Band – grand ponte de la série-B des années 70/80 au même titre que son grand concurrent de l’époque, Roger Corman – « Tourist Trap » débute lorsqu’un groupe d’adolescents partis profiter d’un week-end entre amis se retrouvent bloqués sur une petite route après que le pneu de leur voiture ait éclaté. Eileen (Robin Sherwood) et son fiancé Woody (Keith McDermott) doivent alors s’arrêter à une station service du coin pour y demander de l’aide, tandis que leurs amis Becky (Tanya Roberts), Jerry (Jon Van Ness) et Molly (Jocelyn Jones) voyagent dans un autre véhicule et arrivent à leur tour sur les lieux pour y rejoindre Eileen et Woddy. En explorant la station service, Woody remarque que l’endroit semble abandonné avant de se retrouver brusquement piégé dans une salle située au fond de l’établissement. Plusieurs mannequins et de nombreux objets commencent alors à s’animer dans la pièce, tandis qu’un tuyau de métal empale Woody et le tue sur le champ. Eileen et ses amis recherchent alors désespérément Woody et vont croiser la route d’un certain Slausen (Chuck Connors), qui semble particulièrement méfiant, armé d’un fusil. Slausen propose alors à Jerry de changer le pneu de sa jeep et propose aux ados de visiter sa maison. Ils découvrent alors plusieurs objets en rapport avec le tourisme entreposés dans le musée personnel de Slausen. Intrigués, Eileen cherche alors un téléphone dans une autre pièce et découvre d’étranges mannequins qui commencent à s’animer tandis que plusieurs objets prennent soudainement vie, la jeune femme finissant brutalement étranglée. Peu de temps après, les autres survivants réalisent qu’ils sont pris au piège et traqués par un tueur psychopathe qui possède d’étranges pouvoirs télékinétiques.

« Tourist Trap » s’apparente à un slasher movie au budget modeste conçu un an après le succès colossal du « Halloween » de John Carpenter en 1978, alors que le genre est à la mode dans le cinéma d’épouvante américain de la fin des seventies. Après une introduction particulièrement glauque où l’on assiste à une mise à mort étrange à grand renfort d’objets animés, de mannequins rieurs et d’ustensiles qui volent dans tous les sens, le reste du film évolue rapidement vers un suspense horrifique très conventionnel, mettant en scène un groupe de jeunes gens traqués par un tueur totalement fêlé et pervers. Le film vaut surtout par son ambiance étrange et ses nombreuses scènes avec des mannequins et des masques grotesques qui s’animent d’eux-mêmes, le tout servi par l’interprétation solide de Chuck Connors. A ses côtés, les jeunes acteurs paraissent beaucoup plus ternes et font office de bête chair à canon : on assiste ainsi médusé aux réactions totalement stupides et irrationnelles d’une poignée de jeunes qui n’hésitent pas à suivre un vieux type louche armé d’un fusil dans sa maison isolée peuplée de mannequins et d’une étrange collection destinée aux touristes du coin.

Niveau casting féminin, le film met en scène la jolie et sexy Tanya Roberts dans ses débuts au cinéma (elle n’a qu’une vingtaine d’années lorsqu’elle tourne dans « Tourist Trap »), et qui se fera connaître par la suite grâce à « A View to a Kill » (1985) et le nanar d’aventure « Sheena » (1984). Les jeunes actrices semblent d’ailleurs n’avoir été choisies que pour leur plastique, David Schmoeller n’hésitant pas à les dévêtir à la moindre occasion comme par exemple cette scène totalement gratuite où les jeunes filles ne trouvent rien de mieux que de se baigner nues dans un petit lac alors qu’un de leurs amis vient de disparaître. On appréciera les quelques touches d’humour du film et des dialogues très ironiques (« cet endroit est vraiment bizarre ! »), tandis que le récit évolue très vite en survival/slasher conventionnel qui doit beaucoup à ses scènes bizarres de mannequins de cire – on appréciera les effets spéciaux de Robert A. Burns, déjà responsable des effets sur le cultissime « Texas Chainsaw Massacre » de Tobe Hooper - son humour noir bien placé et ses masques glauques étrangement dérangeants. Malgré le fait que le film n’ait pas spécialement marché à sa sortie en salles en 1979, « Tourist Trap » deviendra un slasher culte par la suite, cité régulièrement comme une référence du genre par des auteurs tels que Stephen King.

David Schmoeller croisa la route du compositeur italien Pino Donaggio qui se trouvait en ville au moment où le réalisateur tournait « Tourist Trap » - il travaillait alors sur le « Piranha » de Joe Dante en 1978 - C’est ainsi que le cinéaste aura l’idée de contacter le musicien et de l’engager pour écrire la musique de son premier long-métrage. A la première écoute, le score de « Tourist Trap » s’avère assez particulier et plutôt étrange. Entièrement écrit pour un orchestre symphonique dirigé par Natale Massara, incluant des cordes, des bois, des percussions, un piano et un clavecin synthétique (interprété sur un Moog), le score de Pino Donaggio s’inspire clairement du style des travaux du musicien sur les thrillers de Brian De Palma dans les années 70. Le film débute de manière très particulière sur un « Main Title » étrangement comique avec ses percussions minimalistes, ses cordes hésitantes et ses clarinettes grotesques. Le mélange de mystère et d’humour du « Main Title » semble vouloir brouiller les pistes et nous instaurer dans un climat totalement incertain et bizarre, à l’image des mannequins grotesques du film. On notera ici l’apport du piano en notes rapides, élément récurrent du score de Donaggio. Dans « The Back Room », le compositeur accompagne la scène où Woody visite l’arrière-boutique de la station essence au tout début du film. Donaggio accentue ici le travail des cordes sombres et menaçantes avec le piano, le clavecin et quelques éléments électroniques atmosphériques et lugubres.

« Someone’s Watching » introduit ici un étrange motif de clavecin qui reviendra tout au long du film, associé au mystérieux tueur masqué. « Love Theme/Shrine » nous propose quand à lui un thème romantique reconnaissable à sa boîte à musique enfantine et faussement innocente. Le thème est associé dans le film à Slausen et son amour pour sa femme décédée qui le hante jusqu’à la folie. Comme dans le « Main Title », Pino Donaggio joue ici sur le contraste émotionnel de la musique et les fausses apparences pour mieux tromper l’auditeur/spectateur dans le film comme sur l’album. Dans « Effeti Moog e Voci », le compositeur développe un autre élément clé du score de « Tourist Trap » : des effets sonores étranges d’un synthétiseur Moog – incluant le clavecin synthétique – qui reprend ici le thème romantique mélancolique. « Davey’s Waltz » évoque quand à lui une étrange valse mélancolique pour le personnage de Davey (Shailar Coby), valse portée par des synthétiseurs typiques des années 70. Dans « The Chase », Donaggio évoque une scène de poursuite à travers une pièce pour cordes aux accents étrangement baroques. Fidèle à son goût pour l’expérimentation et les mélanges de genres, le compositeur italien aime ici juxtaposer les styles et les esthétiques musicales pour parvenir à ses fins, avec une liberté de ton évidente, même si l’ensemble paraît parfois étrangement décousu et décalé.

C’est en jouant par ailleurs sur ce décalage constant que Pino Donaggio arrive à susciter l’effroi dans le film et à créer cette atmosphère si incongrue, si dérangeante à l’écran - à noter la reprise du Love Theme aux cors à la fin de « The Chase » - Plus intéressant, « Mannequins » permet à Donaggio d’expérimenter autour d’étranges voix féminines associées aux mannequins dans le film, des voix bizarrement sensuelles mais aussi dérangeantes et surnaturelles. Les voix féminines dominent alors la seconde partie du film, et notamment dans l’étrange « The Mannequins Come Forth » où les voix paraissent plus chaotiques, plus terrifiantes. « The Fight/Revelation » et « The Water » révèlent l’influence manifeste de Bernard Herrmann, flagrant ici dans le jeu des cordes empreintes d’une certaine noirceur. « Escape » reprend le thème baroque de cordes de la poursuite pour une scène où les survivantes tentent de s’échapper de la maison de Slausen. La terreur atteint son apogée dans « Becky’s Death », scène où la jeune femme est tuée par un masque en plastique qui recouvre tout son visage. Le Love Theme est repris ici par une flûte solitaire. On le retrouve aussi dans « Love Theme/Confession » à travers un arrangement plus vif pour cordes, piano et célesta, puis dans « End Title » pour le générique de fin du film.

Partition étrange, minimaliste et insolite, « Tourist Trap » est une œuvre particulière de Pino Donaggio, inspirée par la singularité du film de David Schmoeller et son goût pour l’expérimentation et les mélanges de styles et de sonorités. Jouant sur le décalage et les silences, la partition de « Tourist Trap » a été régulièrement cité comme l’un des éléments les plus mémorables du film de Schmoeller. On peut effectivement saluer ici les efforts du compositeur italien pour multiplier les styles, les ambiances et les sonorités avec une inventivité constante : les voix féminines étranges des mannequins, l’ouverture bizarrement comique et grotesque, le thème romantique totalement décalé dans le contexte horrifique du film, tout semble avoir été fait pour déconcerter au maximum le spectateur et mieux le perdre dans un labyrinthe d’émotions contrastées et excentriques. Cette technique, typique de l’inventivité de la musique du cinéma des années 70, porte ici ses fruits et apporte une vraie personnalité à une série-B horrifique pas vraiment passionnante mais devenue culte au fil des années en partie grâce à son caractère étrange et insolite. A noter que le score de « Tourist Trap » a enfin été édité officiellement en CD chez le label Full Moon Records en 2014, ce qui nous permet de redécouvrir enfin cette étonnante partition dans son intégralité.



---Quentin Billard