1-South Pacific 0.35
2-The Beach 1.27
3-Project Monarch 2.02
4-Packard's Blues 1.14
5-Assembling The Team 1.48
6-Into The Storm 2.44
7-The Island 1.16
8-Kong The Destroyer 3.43
9-Monsters Exist 2.27
10-Spider Attack 1.39
11-Dominant Species 2.00
12-The Temple 5.47
13-Grey Fox 2.33
14-Kong The Protector 1.49
15-Marlow's Farewell 2.37
16-Lost 1.27
17-The Boneyard 1.52
18-Ambushed 2.21
19-The Heart Of Kong 2.11
20-Man Vs. Beast 2.31
21-Creature From The Deep 2.44
22-The Battle Of Skull Island 5.46
23-King Kong 2.42
24-Monster Mash 1.27

Musique  composée par:

Henry Jackman

Editeur:

WaterTower Music WTM39884

Produit par:
Henry Jackman
Superviseurs musique:
Peter Afterman, Margaret Yen
Musique additionnelle:
Alex Belcher, Halli Cauthery,
Stephen Hilton

Monteurs musique:
Clint Bennett, Jack Dolman,
Catherine Wilson

Mixage score:
Alan Meyerson
Ingénieurs techniques score:
Maverick Dugger, Felipe Pacheco
Services de production musicale:
Matthew J. Justmann
Orchestrations:
Stephen Coleman, Andrew Kinney,
Gernot Wolfgang, Jonathan Beard,
Henri Wilkinson, Edward Trybek

Enregistrement score:
Nick Wollage
Choeurs:
London Voices
Assistant d'Henry Jackman:
John Paul Lefebvre
Mixage score:
Remote Control Productions
Direction de la musique
pour Warner Bros Pictures:
Paul Broucek
Direction de la musique
pour WaterTower Music:
Jason Linn
Music business affairs:
Lisa Margolis

Artwork and pictures (c) 2017 Legendary Pictures/Warner Bros. All rights reserved.

Note: ***1/2
KONG SKULL ISLAND
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Henry Jackman
Après le « King Kong » de Peter Jackson en 2005, le gorille géant emblématique du cinéma fantastique américain semblait avoir disparu des écrans depuis un certain temps, jusqu’à ce que paraisse au cinéma « Kong Skull Island », réalisé par Jordan Vogt-Roberts et sorti en 2017. Le film s’inscrit dans la MonsterVerse mise en place par Legendary Pictures et la Warner, un univers dans lequel seront regroupés les grands monstres du cinéma, et qui débuta avec le « Godzilla » de Gareth Edwards en 2014. Il s’agit d’une histoire complètement différente de celle du « King Kong » de 2005. Le récit débute en 1944 en plein cœur de la Seconde Guerre Mondiale. Deux pilotes ennemis, l’américain Hank Marlow (John C. Reilly), et le japonais Gunpei Ikari (Miyavi), s’affrontent sur une île de l’ocan Pacifique avant d’être brusquement interrompus par une créature géante nommée Kong. Des années plus tard en 1973, l’agent du gouvernement américain Bill Randa (John Goodman) recrute les services du capitaine de l’armée de l’air britannique James Conrad (Tom Hiddleston), pour participer à une importante expédition sur une île mystérieuse baptisée Skull Island. Ils sont escortés dans leur mission par les Sky Devils, une unité héliportée américaine ayant combattu au Vietnam, dirigée par le lieutenant colonel Preston Packard (Samuel L. Jackson), le major Jack Chapman (Toby Kebbell) et le capitaine Earl Cole (Shea Whigham). Ils sont accompagnés par la photo journaliste Mason Weaver (Brie Larson), une pacifiste convaincue. Afin d’aider le sismologue Houston Brooks (Corey Hawkins) à établir le plan de l’île, les militaires de Packard font exploser des bombes dans différents endroits, mais les hélicoptères des militaires sont brutalement attaqués par Kong, éliminant plusieurs soldats et obligeant les survivants à se réfugier à l’intérieur de l’île. Packard décide alors de regrouper tous les hommes ayant survécu à l’attaque et jure de venger la mort des siens. De leur côté, James et Mason cherchent à en savoir plus sur Skull Island et la mystérieuse créature géante qui les traque. Ils font alors la connaissance des Iwi, une tribu locale qui vénère Kong, considéré comme un dieu vivant sur l’île et le gardien suprême de Skull Island. James et Mason réalisent alors que le monstre n’est pas un destructeur mais un protecteur, chargé de lutter contre une race de créatures ailées qui ont envahi l’île et menacent la vie de ses habitants.

« Kong Skull Island » est donc le deuxième film du MonsterVerse censé concurrencer le Dark Universe de la Universal, un projet concurrent à l’objectif similaire. Legendary Pictures et Warner Bros. espèrent ainsi conquérir le public en réunissant les plus célèbres monstres géants du cinéma autour du personnage emblématique de Godzilla. Après la claque visuelle du film de Gareth Edwards sorti en 2014, Jordan Vogt-Roberts était attendu au tournant sur ce « Kong Skull Island ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que le film est à la hauteur des attentes d’un point de vue visuel : avec un Kong gigantesque et plus vrai que nature, des scènes de bataille de monstres titanesques et des effets spéciaux 3D monumentaux (le film profitant du format IMAX à sa sortie en salles), « Kong Skull Island » nous promet un spectacle gargantuesque pour tous les amateurs de gros monstres poilus et de créatures maléfiques. Autre point fort du film : son hommage évident, de par sa photographie splendide et ses images, aux films de guerre du Vietnam, ceux des années 70/80. Le film s’inspire de « Apocalypse Now » et de « Platoon » dans son imagerie visuelle, son évocation du Vietnam – l’histoire se déroule deux ans avant la fin de la guerre, en 1973 – et son île tropicale avec ses jungles sauvages et primitives. La vraie bonne idée de « Kong Skull Island », c’est donc son hommage inattendu à tout un pan du cinéma américain des années 70, même si Jordan Vogt-Roberts n’a nullement la prétention de suivre ici les traces de Francis Ford Coppola ou d’Oliver Stone. Objectif numéro 1 de l’entreprise : divertir avant tout, et sur ce plan, le film est très réussi. En revanche, un point en moins pour un scénario finalement très mince et sans enjeux dramatiques particuliers.

Les personnages arrivent sur l’île, sont attaqués par la bête, puis tentent de survivre, avec comme toile de fond un King Kong gigantesque et des créatures ailées affamées ressemblant à des ptérodactyles de la préhistoire. Rien de plus, rien de moins. C’est un peu mince pour convaincre pleinement. On sait par ailleurs que ces films hérités du cinéma de série-B/série-Z d’antan n’ont jamais eu grand chose à raconter. « Kong Skull Island » n’échappe donc pas à la règle. Les personnages sont d’ailleurs mal développés, peu consistants et finalement largement survolés dans le scénario. Mention spéciale à Samuel L. Jackson qui s’avère bien plus convaincant en militaire désabusé, vétéran du Vietnam qui jure de prendre sa revanche contre Kong – comme il le dit lui-même « cette fois-ci, nous allons gagner cette guerre là ! ». Visuellement, le film est donc splendide, avec la photographie magnifique et très 70’s de Larry Fong, tandis que les effets spéciaux d’ILM repoussent encore une fois les limites du genre : Kong est absolument extraordinaire de réalisme dans ce film, et son combat final contre le monstre ailé est digne de figurer parmi les plus belles scènes de bataille de monstre du cinéma. Seulement voilà, malgré ses bonnes idées et ses références évidentes, « Kong Skull Island » peine à laisser un souvenir durable : les personnages sont creux, l’histoire est finalement inexistante et les enjeux dramatiques sont trop légers pour un film de 2 heures. On espère que les films suivants du MonsterVerse sauront rectifier le tir en adoptant une écriture plus approfondie et plus intéressante !

La partition orchestrale d’Henry Jackman est l’un des éléments les plus positifs du film de Jordan Vogt-Roberts. Malgré des hauts et des bas dans la filmographie du compositeur, force est de constater que Jackman n’est jamais aussi bon que lorsqu’il signe des musiques symphoniques old school, avec des orchestrations plus classiques et des thèmes mémorables. C’est ce que Jackman nous propose ici dans « Kong Skull Island ». Enregistrée avec un grand orchestre et une chorale massive, le score débute de façon impressionnante dans les brefs « South Pacific » et le colossal « The Beach », avec ses choeurs gigantesques. « Project Monarch » dévoile quand à lui le thème principal, thème de cors sur fond d’ostinato de cordes, associé à l’expédition militaire/scientifique sur Skull Island. Jackman confère à son thème une dimension aventureuse et déterminée plutôt bien sentie et très évocatrice à l’écran. Dans « Packard’s Blues », le musicien dévoile le Cosmic Beam, instrument conçu et interprété par le musicien Francisco Lupica, constitué de plusieurs pièces mécaniques, de gongs, chimes et objets divers avec Echoplex, conçu vers 1976 et réutilisé à quelques reprises au cinéma, et notamment dans les BO de 3 films de Terrence Malick : « The Thin Red Line » d’Hans Zimmer (1999) et « The New World » de James Horner (2005) et « Tree of Life » d’Alexandre Desplat (2011). Jackman tire ici partie des sonorités métalliques si particulières du Cosmic Beam pour évoquer la faune sauvage de Skull Island et ses monstres géants. On l’entend notamment dans « Packard’s Blues », qui évoque les sentiments désabusés de Packard au début du film, juste après être revenu du Vietnam. A noter ici l’emploi de quelques sonorités électroniques utilisées régulièrement dans le film en fond sonore ou pour accentuer certaines rythmiques.

« Assembling the Team » développe le thème principal lié au Projet Monarch, avec ce même sentiment de détermination, que l’on retrouve ensuite dans le superbe « The Island » pour l’arrivée sur l’île, avec une ambiance plus héroïque et solennelle assez savoureuse. « The Island » est d’ailleurs l’un des premiers morceaux mémorables de la partition de « Kong Skull Island ». Dans « Into the Storm », Jackman ponctue sa musique de touches rock avec l’apport d’une guitare électrique plus fun, agrémentée de rythmes martiaux et d’accords belliqueux de cuivres. « Kong The Destroyer » accompagne la scène où Kong attaque les hélicoptères des militaires. Jackman nous propose ici son premier morceau d’action tonitruant et démesuré, avec ses cordes virevoltantes, ses cuivres massifs graves aux harmonies mineures reconnaissables et ses percussions déchaînées. Le morceau dévoile aussi le motif puissant et ambigu de King Kong, aux cors à 1:36, et qui sera très présent tout au long du film. Le thème de Kong apporte ici un éclairage particulier au personnage : il évoque aussi bien la grandeur et la puissance de Kong, tout en évoquant son rôle de gardien de l’île et de protecteur de ses habitants. Jackman joue ici habilement sur cette ambiguïté dans ses harmonies et ses variations mélodiques autour du thème. Elément récurrent ici : l’utilisation de ces fameux accords mineurs aux cuivres, qui semblent surgir tout droit d’un score d’Alan Silvestri. D’une façon générale, l’ombre de Silvestri semble planer sur une bonne partie du score de « Kong Skull Island ». Ce n’est d’ailleurs certainement pas un hasard si Jackman a déjà avoué à plusieurs reprises adorer le travail d’Alan Silvestri sur « Predator 2 » (1990), qui a probablement servi d’influence musicale sur « Kong Skull Island ».

« Spider Attack » est un autre morceau d’action féroce qui illustre la séquence de l’attaque des araignées géantes en plein milieu de l’île. Jackman développe ici un flot de percussions tribales/exotiques très réussies, évoquant la faune locale et les créatures de Skull Island. Ici aussi, l’influence de « Predator 2 » est on ne peut plus évidente et semble parfaitement digérée par Henry Jackman – on n’oubliera pas non plus de mentionner l’apport indispensable du Cosmic Beam – « Dominant Species » développe les harmonies mineures sombres aux cuivres, et impose un véritable climat de tension et de danger à l’écran, alors que les survivants sont la proie des créatures en tout genre sur l’île. A noter que Packard, le personnage de Samuel L. Jackson, est régulièrement accompagné d’un motif sonore récurrent, entendu dans « Packard’s Blues » et à la fin de « Spider Attack », reconnaissable au son de ces notes métalliques en écho du Cosmic Beam aux sonorités quasi psychédéliques. Dans « The Temple », Jackman évoque l’arrivée dans le temple des Iwi à l’aide d’une flûte ethnique et de sonorités plus mystérieuses. Le compositeur développe ici le thème de Kong, partagé entre les cordes, les bois, les cuivres et les choeurs. Après une série de variations autour de la tête du thème, la mélodie est reprise de manière plus ample aux cordes dès 3:11. Jackman confère alors au thème une dimension quasi mystique dans ses harmonies et la façon dont il suggère une certaine puissance étonnamment romantique – flagrant dans le jeu des cordes, un trait de caractère fort bienvenue qui pourrait s’expliquer par l’étrange attirance de Kong pour la journaliste photographe Mason dans le film –

« Grey Fox » reprend quand à lui le thème principal du Projet Monarch, introduit ici par un duo de trompettes aux harmonies très ‘americana’ évoquant Aaron Copland. On ressent ici une ambiance plus solennelle et touchante, très réussie, qui apporte une nuance émotionnelle intéressante à la partition. Le morceau grandit à travers un crescendo orchestral plus optimiste et déterminé, avec ses rythmes martiaux et ses harmonies évoquant l’espoir, l’union pour la force et la survie. « Marlow’s Farewell » reprend les trompettes solennelles à la Copland associées dans le film à Hank Marlow, le survivant qui se trouve sur l’île depuis 1944, qui fait ses adieux aux Iwi alors qu’il décide de quitter l’île pour de bon. Ces passages plus émotionnels et touchants sont très réussis, permettant à Henry Jackman d’évoquer l’aspect plus humain du récit, notamment autour du personnage de John C. Reilly. Les notes énigmatiques du Cosmic Beam annoncent la couleur dans « Lost » avec le retour du motif de Packard, tandis que « The Boneyard » accompagne la scène où les héros sont traqués par les monstres ailés dans la vallée aux ossements géants. Dommage que Jackman retombe ici dans le travers habituel du sound design facile et peu inspiré, alors qu’on se serait attendu à quelque chose de plus primitif, de plus sophistiqué pour évoquer la tension de la scène. L’attaque se poursuit dans « Ambushed », superbe morceau d’action orchestral très réussi, avec ses accords mineurs puissants de cuivres, de choeurs, ses traits rapides de cordes/bois (piccolo et flûtes notamment), le tout accompagné de brèves références au thème principal.

« The Heart of Kong » est un autre moment fort du score, avec une variation passionnée autour du thème de Kong aux cordes. Jackman reflète ici toute l’ambiguïté du personnage dans ses harmonies qui ne trouvent jamais de résolution mais qui témoignent d’un classicisme étonnant dans l’écriture des cordes et du cor soliste. « Man vs. Beast » accompagne quand à lui la scène où Packard et ses hommes tentent de piéger Kong, alors que James et Mason s’opposent à lui. Le morceau est dominé par son martèlement ahurissant et tribal des percussions, Jackman juxtaposant habilement le motif de Packard et le thème de Kong. « Creature from the Deep » nous amène quand à lui à la bataille finale avec les créatures ailées surgissant des profondeurs. Ici aussi, impossible de ne pas ressentir l’influence d’Alan Silvestri dans l’écriture harmonique globale du morceau. Jackman accentue ici le travail autour du pupitre de cuivres démesurés (notamment trombones et tubas) avec une chorale gigantesque autour de variations du thème de Kong. « The Battle of Skull Island » illustre les 5 minutes du combat final, épique et totalement déchaîné comme il se doit. C’est l’occasion pour Jackman de développer ici le thème principal (avec ses envolées héroïques reconnaissables) et le thème de Kong, avec un flot incessant de cuivres monstrueux, de pulsations synthétiques et de percussions agressives. « The Battle of Skull Island » est de loin le meilleur morceau d’action de « Kong Skull Island » et devrait ravir les amateurs de déchaînements orchestraux belliqueux à la Silvestri. A noter la superbe reprise puissante, sombre et triomphante du thème de Kong à la fin de la bataille (entre 4:41 et 5:16), autre grand moment du score de Jackman.

« Kong Skull Island » s’avère donc être un score d’action de haut niveau, avec ses thèmes de qualité, ses orchestrations démesurées (un pupitre de cuivres assez énorme, une très grande chorale) et ses influences musicales évidentes – notamment à Alan Silvestri – Impeccablement placée sur les images, la musique d’Henry Jackman apporte la puissance, la tension et le mystère nécessaire aux images. Décidément, après l’excellente partition d’Alexandre Desplat pour « Godzilla » en 2014, force est de constater que le MonsterVerse de Legendary et Warner semblent stimuler les compositeurs qui officient sur ces films, en espérant que les prochains épisodes – et notamment le très attendu « Godzilla vs. King Kong » - soient du même acabit. Quand à Henry Jackman, si son parcours au cinéma prend régulièrement des allures de montagne russe (on oscille souvent entre le très bon et le médiocre), « Kong Skull Island » vient fort heureusement nous rappeler que le compositeur est capable du meilleur lorsqu’il s’en donne les moyens, et ce même si son score n’a rien de follement original en soi. Une réussite donc, sans être un chef-d'oeuvre du genre, mais que les fans d’Henry Jackman ne devraient pas manquer !




---Quentin Billard