The Seven-Ups (Don Ellis)

1-Main Title 3.29
2-Car Wash 1 1.42
3-Festa Kidnapping/Funeral 2.09
4-Coffin 4.10
5-Car Wash 2 2.07
6-In Garage 1.56
7-Vito & Moon/Scream 3.37
8-Stalking 2.44
9-Ice House 1.44
10-End Credits 1.35

The Verdict (Johnny Mandel)

11-The Bottom 3.13
12-No Deal 1.14
13-Trouble 2.28
14-Betrayal 2.04
15-End Title 3.57
16-End Title-Choir 3.57

The Seven-Ups (unused score
by Johnny Mandel)


17-Main Title 3.57*
18-The Kidnapping 1.19
19-Antique Shop 2.46
20-A Close Shave 1.43
21-Festa 1.16
22-Cops and Robbers 4.11
23-The Garage 2.04
24-Home to the Junkyard 1.28
25-End Title 1.42

*partial damage.

Musique  composée par:

Don Ellis

Editeur:

Intrada Special Collection Vol. 47

Album produit par:
Nick Redman, Douglass Fake
Producteur exécutif:
Roger Feigelson
Direction musicale pour la
20th Century Fox:
Tom Cavanaugh

Artwork and pictures (c) 1973/1982/2007 Twentieth Century Fox Film Corporation. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE SEVEN-UPS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Don Ellis
Producteur réputé de deux polars majeurs du cinéma américain, « Bullitt » (1968) et « French Connection » (1971), Philip D’Antoni voulu à son tour se lancer dans la réalisation en tournant « The Seven-Ups » (Police Puissance 7), modeste polar urbain sorti en 1973 et qui devait être un melting-polt des deux précédentes productions D’Antoni. Le film a clairement été réalisé dans la continuité de « French Connection » et s’avère être quelque peu opportuniste. On y retrouve une bonne partie de l’équipe du film de William Friedkin, à commencer par la présence de Roy Scheider, le compositeur Don Ellis à la musique, le conseiller technique policier Sonny Grosso et le coordinateur des cascades Bill Hickman, le tout à nouveau produit par la 20th Century Fox. Il paraît difficile de croire que Philip D’Antoni pensait sérieusement renouveler l’exploit de « French Connection » en réalisant son seul et unique film pour le cinéma, et il faut malheureusement bien reconnaître que le pari insensé du réalisateur/producteur se sera finalement soldé par un demi échec (bien que le film rapportera 4 millions de dollars au box-office U.S., suffisamment pour rembourser les 2 millions de dollars du budget initial). L’officier de police Buddy Manucci (Roy Scheider) fait partie de la NYPD de New York à la tête d’une unité spéciale nommée « The Seven-Ups », en référence au fait que la plupart des criminels coffrés par Buddy et ses collègues renégats se retrouvent souvent condamnés à sept ans d’emprisonnement ou plus. Les Seven-Ups utilisent des méthodes peu orthodoxes largement décriées par les autres unités de police de la ville (et bien souvent à la limite de la légalité), mais les chiffres liés à leurs arrestations parlent d’eux-mêmes et ils continuent de recevoir le soutien de leur supérieur hiérarchique. Tout récemment encore, ils viennent juste d’arrêter un réseau de trafic de monnaie dans un magasin d’antiquité.

Peu de temps après, une série de kidnappings touchent de plein fouet la ville. La cible des enlèvements : des mafiosos et des individus qui travaillent pour la pègre new-yorkaise, en échange de fortes rançons. Ces enlèvements sont l’oeuvre de faux policier payés par Vito Lucia, qui s’avère être l’ami d’enfance de Buddy. Ce dernier décide alors d’enquêter sur cette vague de kidnappings qui finit par semer la zizanie dans toute la ville. Buddy et ses collègues mettent alors en place une série de filatures chez les mafiosos ciblés par les ravisseurs. Hélas, au cours des obsèques d’un membre de la pègre new-yorkaise, Ansel (Ken Kercheval), un homme de l’équipe à Buddy, se fait repérer et capturer par les mafieux. Peu de temps après, Buddy et ses collègues retrouvent Ansel assassiné dans le coffre arrière d’une voiture dans un garage. Buddy réussit alors à poursuivre en voiture les deux tueurs, Moon (Richard Lynch) et son complice Bo (Bill Hickman), mais au terme d’une périlleuse course-poursuite durant laquelle Buddy échappe de justesse à la mort, les deux tueurs à la solde de Vito Lucia réussissent à s’échapper. Peu de temps après, Buddy revient au commissariat, dépité, et apprend que ses supérieurs souhaitent le suspendre. Bien décidé à venger la mort d’Ansel, Buddy va retrouver la trace des deux assassins et réalisera tardivement que son ami Vito est derrière tout ça depuis le début.


UN DECALQUE TERNE DE FRENCH CONNECTION ?


Réalisé sans brio et sans génie particulier, « The Seven-Ups » est un polar opportuniste qui n’a été fait que pour permettre à Philip D’Antoni de surfer sur le succès de « French Connection » (le film est d’ailleurs souvent considéré comme un spin-off du métrage de Friedkin, puisque Roy Scheider y interprète dans les deux films le même rôle). Hélas, le réalisateur/producteur a beau s’être entouré des meilleurs, difficile de renouveler l’exploit d’un grand homme du septième art qu’est Wiliam Friedkin. Soyons clair : D’Antoni n’est pas Friedkin ! Il manque clairement à D’Antoni un vrai savoir-faire de cinéaste et de réalisateur. Ce dernier se contente trop souvent de poser sa caméra et d’attendre que quelque chose se passe à l’écran. Multipliant les champs et les contrechamps à loisir, Philip D’Antoni n’a de toute évidence aucune idée précise sur la manière de monter un film ou de réaliser des idées visuelles. Sa réalisation plan-plan est tout juste efficace mais flirte dangereusement avec un certain amateurisme, heureusement rattrapée par l’équipe de professionnels dont il s’est entouré pour faire son film. Hélas, le scénario est somme toute très léger et ne suffit pas à faire de « The Seven-Ups » un polar mémorable. Il y a pourtant de bonnes choses dans ce film : des décors urbains filmés en lumière naturelle, un ton sombre et violent typique des années 70, un casting impeccable (Roy Scheider, charismatique et violent qui n’hésite pas à torturer et menacer la victime d’un enlèvement pour obtenir des informations, sans oublier cette éternelle « gueule » burinée de Richard Lynch !) et l’inévitable course poursuite en voiture de près de 9 minutes qui recycle celle de « Bullitt » et « French Connection », seule véritable séquence mémorable du film. « The Seven-Ups » se transforme alors durant ces 20 dernières minutes en un pur vigilante movie dans la lignée des « Dirty Harry » ou « Death Wish », sans aucun éclat, sans aucune saveur : n’est pas William Friedkin qui veut !


UNE PARTITION AVANT-GARDISTE…


On retiendra finalement de ce film l’excellente partition musicale avant-gardiste de Don Ellis, qui rempile ici dans l’univers des musiques de polar urbain après « French Connection » en 1971. Le compositeur se voit offrir ici l’opportunité d’expérimenter à nouveau comme il le fit sur le film de Friedkin en multipliant les collages sonores, les techniques instrumentales avant-gardistes et les expérimentations les plus déroutantes pour parvenir à ses fins. Rappelons qu’Ellis était un jazzman connu essentiellement pour ses albums expérimentaux et son implication dans le jazz-fusion – il fonda à la fin des années 60 le groupe de jazz indien « The Hindustani Jazz Sextet » - A la première écoute, impossible de ne pas être frappé par la radicalité extrême de la musique de « The Seven-Ups » : dès le « Main Title » (ouverture du film), Don Ellis nous plonge dans une atmosphère de chaos et de noirceur absolue à l’aide de cordes stridentes et extrêmement dissonantes. Ellis opte ici pour une approche résolument atonale qui rappelle clairement les expérimentations des musiciens avant-gardistes du milieu du XXe siècle : l’ombre de Penderecki, Ligeti, Lutoslawski ou Xenakis semble planer ici sur la partition d’Ellis, mais le compositeur américain possède un style bien à lui et assez reconnaissable, surtout après « French Connection ». Le « Main Title » s’articule ici autour d’un pupitre de cordes utilisant différentes techniques : des nuages sonores de clusters stridents (amoncellement de dissonances progressives), des vibratos expressifs, une utilisation de registres extrêmes, des harmoniques, des trémolos, d’effets aléatoires de pizzicati et de quelques éléments électroniques. Ellis gomme ici tout élément mélodique pour jouer davantage sur les textures sonores et les effets instrumentaux avant-gardistes et abstraits.

« Car Wash 1 » est l’un des éléments les plus mémorables de la partition de « The Seven-Ups ». Le morceau, extrêmement dissonant, atonal et brutal, accompagne la séquence du car wash avec la rançon dans le coffre arrière de la voiture. Assez curieusement, la musique joue ici sur une ambiance de paranoïa absolue durant la séquence où les deux mafiosos sont à bord de la voiture coincée entre les rouleaux du car wash. Si à l’écran, la séquence peut paraître anodine et molle, la musique apporte ici une émotion différente, jouant sur la peur et l’anticipation d’une hypothétique agression – qui ne se concrétisera finalement pas – Certes, on pourra toujours reprocher l’extrême exagération de « Car Wash 1 » à l’écran, un élément récurrent dans « The Seven-Ups » reflétant probablement les exigences un brin démesurées de Philip D’Antoni à l’égard de la musique de Don Ellis, mais le reste est tout de même foncièrement original et mémorable, à tel point que le compositeur parvient à immortaliser l’une des séquences de car wash les plus étranges de toute l’histoire du cinéma ! Il règne une noirceur incroyablement glauque dans « Festa Kidnapping/Funeral » pour la scène du kidnapping de Festa et des funérailles du mafioso. Ellis prolonge ici son travail de textures sonores autour des cordes et accentue les effets sonores des synthétiseurs pour nous plonger dans une atmosphère étrange, vaporeuse et abstraite, à la fois sinistre et surréaliste (notamment dans l’utilisation de bols métalliques et d’un waterphone).


ANALYSE DE LA MUSIQUE


Avec ces premiers éléments mis en place, Don Ellis fonce tête baissée dans son sujet avec « Coffin », dont l’utilisation de cordes staccatos acérées ne sont pas sans rappeler Bernard Herrmann. Ici, le pupitre des cordes est largement valorisé pour susciter une tension permanente à l’écran, les violons et les altos répondant continuellement ici aux ostinatos de violoncelles et de contrebasses. A noter l’emploi ici de ponctuations agressives de xylophone qui ne sont pas sans rappeler Bartok. « Car Wash 2 » illustre la deuxième scène de car wash avec une nouvelle séquence où deux mafiosos transportent une rançon dans le coffre arrière de leur voiture. Ici aussi, Ellis reproduit l’atmosphère macabre et sinistre de « Car Wash 1 » en jouant sur d’étranges vibratos et quarts de ton des cordes, accentuées par des clusters agressifs et dissonants des violons stridents, acérés comme des lames de rasoir. Le compositeur nage ici en pleine expérimentation musicale, évoquant les recherches sonores de la musique contemporaine des années 1950/60, avec une liberté de ton évidente. On nage clairement ici en pleine musique de thriller ténébreuse qui semble à l’écran assez démesurée par rapport à la réalisation terne et peu inspirée de Philip D’Antoni.

« In Garage » procède exactement de la même façon, avec son amoncellement de dissonances extrêmes des cordes. « Vito & Moon/Scream » reprend les ostinatos agressifs des cordes de « Coffin » pour évoquer les scènes avec Moon (Richard Lynch) et Vito. Ellis en profite pour employer furtivement un piano, un violoncelle soliste (qui multiplie des trémolos hystériques) et un petit groupe de cordes dans un style qui rappelle parfois les pièces de musique de chambre de Ligeti ou de Bartok. Toujours enclin à l’expérimentation pure, le compositeur va même jusqu’à demander aux musiciens de frapper sur la caisse de leurs instruments (vers 2:08) ou avec le bois de l’archet sur les cordes (vers 2:36) pour multiplier les effets sonores incongrus des cordes. « Stalking » s’avère plus conventionnel dans son mélange de cordes et de piano et ses ostinatos agressifs, créant un sentiment d’urgence et de danger à la façon de Bernard Herrmann. La musique évoque ici la détermination de Buddy à retrouver le tueur d’Ansel, « Stalking » rappelant clairement ici certaines sections de la BO de « French Connection ». Ellis utilise pour l’occasion un violoncelle électrique dont il tire quelques effets sonores assez étranges (notamment grâce à l’emploi de quelques glissandi). « Ice House » nous amène au dernier acte du film avec une noirceur assez impressionnante et radicale.


BILAN FINAL…


Enfin, « End Credits » conclut le film sur une pièce de cordes dramatiques et élégiaques assez poignante, constituée d’harmonies torturées qui rappellent là aussi certains passages de « French Connection ». La musique évoque alors le sentiment de désillusion et de trahison, lorsque Buddy découvre à la fin du film que son meilleur ami Vito est derrière tout ça depuis le début. « End Credits » est par ailleurs l’unique pièce de la musique de « The Seven-Ups » qui emploie un semblant d’harmonie tonale, alors que l’essentiel de la partition est bel et bien atonal et avant-gardiste. Fait intéressant : il faut savoir que le premier compositeur pressenti sur ce film fut Johnny Mandel, qui composa un score pour le film de Philip D’Antoni, malheureusement entièrement rejeté par la production au profit d’une nouvelle composition plus expérimentale de Don Ellis. L’album publié par Intrada en 2007 nous présente par ailleurs l’intégralité du travail de Don Ellis et de la musique rejetée de Mandel pour « The Seven-Ups », incluant le score très court de Mandel pour le film « The Verdict » sorti en 1982, incluant une pièce pour choeur a cappella bouleversante et assez exceptionnelle. La musique rejetée de « The Seven-Ups » s’avérait ainsi totalement différente : Johnny Mandel opta pour une approche mélodique/tonale plus conventionnelle, mélangeant le jazz et les éléments musicaux italiens pour évoquer la mafia new-yorkaise (à la manière de « The Godfather »), là où Ellis – pourtant lui-même un jazzman – préféra rejeter tout élément jazz au profit d’une partition atonale très expérimentale et difficile d’accès. Ceux qui ont adoré le travail de Don Ellis sur « French Connection » apprécieront donc à coup sûr les recherches sonores abstraites et incroyablement noires de la partition de « The Seven-Ups », reflétant encore une fois l’inventivité extraordinaire et la liberté de ton de la musique de film américaine dans les années 70 !




---Quentin Billard