1-The Atacama Desert 1.59
2-Empanadas for Dario 1.45
3-To The Heart of the Mountain 2.29
4-The Collapse 4.13
5-Buried Alive 3.45
6-Drilling, the Sweetest Sound! 1.06
7-Prayer-Campe Hope 2.35
8-The Drill Misses
(And Dreams Fade...) 5.39
9-Gracias a la vida 4.50*
10-Aiming to Miss 3.38
11-We Are All Well
in the Refuge, the 33 3.46
12-Always Brothers 2.21
13-Fénix 2.31
14-First Ascent 4.58
15-Celebrations 3.55
16-Family Is All We Have 2.59
17-Al final de este viaje
en la vida 3.22**
18-The 33 3.43
19-Hope Is Love 3.36

*Interprété par Cote de Pablo
Paroles et musique de
Violeta Parra
**Interprété par Los Bunkers
Parole et musique de
Silvio Rodriguez.

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

Water Tower Music WTM39744

Producteur musique:
Simon Franglen
Producteur album:
Simon Rhodes, James Horner
Ingénieur son:
Simon Rhodes
Montage musique:
Joe E. Rand
Assistant montage:
Nevin Seus
Orchestrations:
James Horner, J.A.C. Redford
Orchestre:
The Hollywood Studio Symphony
Musiciens:
George Doering, Tony Hinnigan

American Federation of Musicians.

Artwork and pictures (c) 2015

Note: ***1/2
THE 33
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
« The 33 » est un film américano-chilien réalisé par la mexicaine Patricia Riggen et sorti en salles en 2015. Il s’agit d’un biopic retraçant l’histoire vraie de ces 33 mineurs qui furent piégés sous terre pendant 69 jours dans une mine du San José Mine au Chili en 2010. Le film est par ailleurs adapté du livre « Deep Down Dark » d’Héctor Tobar publié en L’histoire s’attarde ainsi sur le destin de ces mineurs issus de milieux modestes, dont la plupart sont originaires de Copiapó dans le nord du Chili. Tous les jours, ils se rendent à la San José Mine pour y travailler durement. Malheureusement, le patron de la mine ignore les avertissements répétés de Luis « Don Lucho » Urzua (Lou Diamond Phillips) au sujet de l’instabilité des structures souterraines, et c’est ainsi que la mine finit par s’effondrer peu de temps après, le 5 août 2010, bloquant ainsi 33 mineurs à plus de 700 mètres de profondeur sous terre. Les hommes parviennent à se rendre à la chambre de secours aménagé dans la mine mais les réserves de nourriture et d’eau ne sont prévues que pour une quinzaine de jours à peine. Dirigés par le charismatique Mario Sepúlveda (Antonio Banderas), les mineurs tentent de trouver une issue de secours, mais les échelles ont été détruites durant l’effondrement et un immense roc de pierre bloque toute sortie possible. Les kits de soin sont vides, la radio est H.S. et la nourriture commence à s’amenuiser dangereusement, obligeant les mineurs à établir un système de ration journalière de lait et de nourriture pour espérer survivre le plus longtemps possible.

Pendant ce temps, les propriétaires de la mine n’envisagent aucun plan de sauvetage, provoquant la colère des familles des mineurs, qui se rassemblent devant les grilles de la San José Mine. C’est alors que le gouvernement chilien de Sebastián Piñera (Bob Gunton) décide d’intervenir et envoie le ministre des mines Laurence Golborne (Rodrigo Santoro) directement sur le terrain, afin d’établir un plan d’urgence pour secourir les 33 mineurs, avec la complicité de l’ingénieur en chef André Sougarret (Gabriel Byrne). Les premiers forages échouent parce que les foreuses ont dévié de leur trajectoire. Mais un second forage permet d’atteindre la mine et de découvrir que les mineurs sont toujours vivants (ils accrochent un message à l’une des foreuses qui remonte ensuite à la surface). Ils reçoivent alors de la nourriture, des vêtements et des outils pour communiquer par télévision avec la surface. Mais le sauvetage s’avère plus complexe que prévu et va nécessiter des foreuses beaucoup plus puissantes et performantes. Pendant ce temps, le drame attire les journalistes internationaux et le sauvetage est largement médiatisé dans tous les pays du monde entier, pendant plus de 2 mois.


UN BIOPIC DRAMATIQUE MAIS SANS BRIO


« The 33 » est donc un biopic plutôt rondement mené, réalisé en 2015 par Patricia Riggen, cinéaste mexicaine alors peu connue à l’époque (elle se fera surtout connaître avec son film suivant, « Miracles from Heaven » avec Jennifer Garner en 2016). Premier point notable : « The 33 » doit beaucoup à son casting international, car il on retrouve un peu de tout : espagnol(Antonio Banderas), française (Juliette Binoche), philippin (Lou Diamond Phillips), américain (Bob Gunton, James Brolin), brésilien (Rodrigo Santoro), irlandais (Gabriel Byrne) et évidemment une pléiade d’acteurs/actrices mexicains, cubains ou chiliens, dont la jolie Cote de Pablo, plus connue pour son rôle de Ziva dans la série TV « NCIS ». Délaissant l’approche documentaire/caméra à l’épaule remise au goût du jour dans les années 2010 (notamment avec les films de Paul Greengrass ou ceux de Peter Berg), Patricia Riggen opte pour une mise en scène plus dramatique et cinématographique, en surfant sur les codes du film catastrophe et du survival. A ce sujet, l’effondrement de la mine au début est extrêmement spectaculaire et très réussi, surtout que cela arrive assez tôt dans le film après une brève exposition de 15 minutes des personnages.

Par la suite, le film se divise en deux axes narratifs : le destin des mineurs enterrés à plus de 700 mètres sous la terre, et les efforts acharnés des sauveteurs supervisés par le ministre des mines à la surface, sans oublier les sous-intrigues liés aux familles des différents mineurs, sous-intrigues peu passionnantes et dont on se serait bien passé, mais qui contribuent à renforcer le réalisme du film et des personnages. Chacun ici a sa petite histoire, et certaines scènes viennent parfois détendre l’atmosphère (de façon maladroite) ou au contraire faire monter la tension. Les enjeux dramatiques sont bien exploités mais la mise en scène impersonnelle de Patricia Riggen empêche le film de réellement décoller. C’est d’autant plus regrettable que le film possède un casting 3 étoiles qui aurait nécessité un traitement plus ambitieux. Au lieu de cela, on se retrouve avec un développement scénaristique archi convenu, parfois un peu gnangnan (la scène où les mineurs imaginent que leurs familles viennent leur servir un bon repas au fond de la mine) et aussi un peu trop simpliste voire larmoyant par moment. De toute évidence, la réalisatrice connaît son boulot mais étant donné l’intensité du sujet, on frissonne en imaginant ce qu’auraient pu faire Paul Greengrass ou Peter Berg avec une telle histoire. Correct sans plus, donc !


UNE PARTITION LATINO ET DRAMATIQUE


« The 33 » permet à James Horner de nous offrir l’une de ses dernières partitions musicales pour le cinéma, à seulement quelques mois avant son accident tragique d’avion qui lui coûtera la vie le 22 juin 2015. La même année, Horner composa aussi les musiques de « Wolf Totem » et « Southpaw ». Pour les besoins du film, le compositeur nous livre une composition alternant entre un ensemble d’instruments solistes avec la flûte de pan, la guitare sèche et la quena (fameuse flûte en acajou des pays andins, très répandue aujourd’hui au Chili ou au Pérou), des synthétiseurs et un orchestre à cordes. Dès les premiers instants de la musique, on retrouve ici l’influence manifeste d’anciens scores d’Horner, à commencer par « Thunderheart » (1992) et surtout « Vibes » (1988) pour la partie péruvienne/latino de la musique de « The 33 ». Le score débute au son du très joli thème principal, dévoilé par la guitare soliste et la quena dans « The Atacama Desert » sur fond du traditionnel ostinato rythmique de flûte de pan cher à Horner (celui que l’on retrouve notamment dans « Legends of the Fall »). Ce thème aux consonances d’Amérique du sud évoque clairement le Chili et les 33 ouvriers de la mine, avec une certaine nostalgie et une sobriété chère à James Horner.


ANALYSE DE LA MUSIQUE


Dans « Empenadas for Dario », le thème est repris délicatement par la guitare en tierces parallèles évoquant là aussi cette couleur « latino » agréable et indissociable du film de Patricia Riggen. Comme souvent dans les films dramatiques mis en musique par James Horner, il y a une pudeur, un profond respect de l’histoire, des personnages et des images que l’on ressent dès les premières minutes de la musique dans le film. Dans « To The Heart of the Mountain », le compositeur évoque l’arrivée des ouvriers dans la mine. Horner illustre ici l’immensité de la mine à l’aide de percussions métalliques/synthétiques martelées de manière obsédante comme pour évoquer les coups de pioche des mineurs et l’aspect mécanique et déshumanisé de leur travail. Horner développe pour l’occasion un ostinato de cordes répétitives et entêtantes pour suggérer ici aussi la dangerosité des lieux, avec de nombreux éléments électroniques. Dans « The Collapse », Horner illustre la scène où la mine s’effondre avec un morceau d’action robuste et tonitruant.

On retrouve ici le style action plus moderne du Horner des années 2000, avec ici une influence incontestable de « The Amazing Spiderman » et « Avatar » (et notamment le morceau « War »), influence flagrante dans le travail des percussions/rythmes modernes, des cordes et des éléments électroniques. Horner développe ici ces rythmes métalliques entêtants comme pour rappeler l’idée que le piège est en train de se refermer sur les mineurs. Malgré le côté un peu cheap du morceau (du à des orchestrations limitées aux cordes et l’utilisation des synthés), le résultat est impressionnant à l’écran et Horner sait faire monter la tension lorsqu’il évoque une scène de catastrophe, comme il le fit autrefois dans les passages d’action massifs de « Titanic », même si « The Collapse » est bien loin de pouvoir soutenir la comparaison avec « The Sinking » ou « Death of Titanic ». Dans « Buried Alive », Horner évoque le destin de ces 33 hommes enterrés vivants à plus de 700 mètres de profondeur. Les harmonies de cordes résonnent ici de manière tragique et poignante pour évoquer le triste sort de ces ouvriers avec le retour de l’ostinato entêtant de flûte de pan. Détail intéressant : le compositeur reprend ici le martèlement de 2 sons de « To The Heart of the Mountain » associé à la mine et le confie cette fois à des percussions plus graves.

Dans « The Drilling, The Sweetest Sound ! », on retourne à la surface avec un nouveau thème, une superbe mélodie typique des musiques des Andes ou du Pérou à la quena et à la guitare, dans l’esprit de la BO du film « Vibes ». Ce très beau thème aux consonances sud-américaines traditionnelles illustre la tentative du ministre Golborne et de l’ingénieur Sougarret pour forer afin de sauver les mineurs coincés sous terre. Le thème est aussi associé dans le film aux familles des 33 mineurs qui restent sans relâche devant l’entrée de la mine, criant leur désespoir et leur révolte. Ce thème évoque l’idée du rassemblement et de l’espoir avec ces accents d’air populaire chilien : on le retrouve aussi dans le superbe « Prayer/Camp Hope » où Horner accompagne la mélodie principale de flûte avec ses claquements de mains évoquant vaguement le flamenco des pays andalous. Dans « The Drill Misses (and Dreams Fade... »), on devine une atmosphère de résignation alors que le premier forage a échoué. On retrouve ici les traditionnelles nappes synthétiques planantes typiques des partitions dramatiques d’Horner de ces 20 dernières années, avec le retour du thème principal suggéré ici de manière morose et mélancolique.

Grand maître de la dramaturgie musicale et des émotions, James Horner sait plus que quiconque comment véhiculer des sentiments dans un film à travers sa musique, et « The Drill Misses (and Dreams Fade...) » est assez symptomatique de son génie pour l’expression musicale des émotions humaines, le tout fait avec une pudeur et un respect qui sont pour lui des valeurs chères, même si, là aussi, on a déjà entendu des choses bien plus mémorables chez Horner auparavant. « Aiming to Miss » est un morceau plus mystérieux et intriguant où le compositeur développe d’étranges arpèges de piano ondulants alternant majeur/mineur, un peu comme dans le « Vertigo » de Bernard Herrmann. On retrouve ensuite le thème de l’espoir dans « We Are Well in the Refuge, the 33 » alors que la foreuse atteint enfin sa cible et que les mineurs laissent un message sur la foreuse pour faire savoir à la surface qu’ils sont toujours vivants. L’espoir renaît à travers les accents populaires simples de « We Are Well in the Refuge », le morceau grandit en émotion et devient plus intense sur ses derniers instants avec cet enthousiasme sincère et remarquable.


UNE CONCLUSION POIGNANTE, SOUS LE SIGNE DE L’ÉMOTION


« Always Brothers » reprend le thème principal de guitare pour rappeler subtilement les liens fraternels qui unissent les 33 mineurs, tandis que « Fénix » tente d’apporter un sentiment d’espoir durant sa coda harmonique poignante de cordes et quena. On arrive ensuite au dernier acte du film dans « First Ascent », alors que l’équipe de forage envoie un ascenseur pour permettre au premier mineur de remonter à la surface. Horner développe ici un climat d’émotion quasi onirique avec ses synthétiseurs cristallins éthérés et quasi surréalistes, accompagnés de cordes planantes et rêveuses, comme si le songe des mineurs étaient désormais à portée de mains : une très belle réussite ! A noter par ailleurs que l’ascension se termine sur le retour des percussions ‘action’ synthétiques (façon Remote Control/Hans Zimmer) dans un style proche de « The Collapse ». On arrive ensuite à l’apothéose du film et de la partition de « The 33 » dans le somptueux « Celebrations ». Le morceau, typique de James Horner, est écrit dans un style majestueux, poignant et solennel. La musique évoque durant le final du film l’idée de libération, de retour à la surface et de retrouvailles avec la famille.

Horner a réellement écrit ce morceau comme une véritable célébration du courage de ces hommes qui se sont battus jusqu’au bout pour survivre à l’enfer. Horner reprend ici le thème sud-américain dans un arrangement somptueux pour cordes, flûte, percussions/guitare et choeurs (on est très proche par moment du style de « Mission » d’Ennio Morricone), juxtaposé à un nouveau thème solennel et poignant très proche de sa musique pour « Glory » (1989). Les fans d’Horner peuvent se réjouir : on retrouve ici le compositeur de l’émotion et des sentiments humains en pleine forme ! Le thème principal de guitare est repris ensuite dans « Family Is All We Have » en toute pudeur et avec une retenue touchante, tandis que le thème de l’espoir est repris une dernière fois dans « The 33 », tandis que le magnifique « Hope is Love » reprend le thème principal dans un ultime arrangement orchestral poignant et romantique, typique du regretté compositeur.

James Horner prouva sur les derniers instants de sa vie qu’il était plus que jamais le compositeur des émotions et des sentiments humains à Hollywood, et sa partition touchante et poétique pour « The 33 » ne fait guère exception à la règle. Hélas, le compositeur décéda peu de temps après (le film est dédié à sa mémoire), mais son œuvre reste et perdure dans le temps. « The 33 » apporte donc une émotion toute en finesse au film de Patricia Riggen, sans jamais verser dans le mélodrame. Horner maîtrise son sujet de bout en bout et même si l’on regrettera certains moments inégaux (le côté cheap de « The Collapse » ou l’usage de percussions modernes façon Remote Control, qui n’a pourtant rien à voir avec le style habituel d’Horner!) et un certain manque d’originalité dans l’écriture ou l’emploi des solistes, force est de constater que « The 33 » constitue encore une fois une expérience d’écoute remarquable aussi bien sur les images qu’en écoute isolée. Les fans du compositeur écouteront d’ailleurs cette partition avec un gros pincement au coeur, car c’est assurément le chant du cygne du musicien, avec « Southpaw » et « The Magnificent Seven ».



---Quentin Billard