1-Big Red 5.29
2-Psychic Migraine 3.58
3-Gruagach 1.52
4-You Call Us Monsters 3.26
5-Baba Yaga 3.29
6-A New Eden 5.48
7-Destroyer of All Things 4.33
8-Cathedral Fight 7.32
9-Anung Un Rama 2.16
10-This Isn't You 4.34
11-Hellboy 1.27
12-Rock Me Like a Hurricane
(Spanish Version) 4.14*

*Interprété par Unprotected Innocence
Ecrit par Rudolf Schenker,
Herman Rarebell, Klaus Meine.

Musique  composée par:

Benjamin Wallfisch

Editeur:

Sony Classical 19075942922

Musique produite par:
Benjamin Wallfisch
Musique additionnelle:
Antonio Andrade, Jared Fry,
Alex Lu

Orchestre conduit par:
Chris Egan
Orchestre:
The Chamber Orchestra of London
Orchestrations:
David J. Krystal
Superviseur musique:
Selena Arizanovic

© 2019 Summit Entertainment/Millennium Films/Boyana Film Studios/CB Films/Dark Horse Entertainment/Encore Films/Lawrence Gordon Productions. All rights reserved.

Note: **1/2
HELLBOY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Benjamin Wallfisch
Après les deux premiers films de Guillermo Del Toro, « Hellboy », le comic book imaginé par Mike Mignola vers 1994 refait surface au cinéma à travers un reboot dont le titre original était « Hellboy : Rise of the Blood Queen ». Changement de cap puisque le film est confié cette fois-ci à Neil Marshall, réalisateur spécialisé dans l’horrifique et auteur des mémorables « Dog Soldiers », « The Descent » ou « Doomsday ». Après « Centurion » en 2010, Marshall s’était fait discret au cinéma, préférant se tourner dans la réalisation d’épisodes divers pour la télévision : « Game of Thrones », « Black Sails », « Constantine », « Hannibal », « Tales of Halloween », « Timeless », « Westworld », « Lost in Space », etc. « Hellboy » marque son retour au cinéma en 2019. Le film débute avec l’histoire de la Reine de sang Vivian Nimue (Milla Jovovich) durant l’âge sombre vers l’an 517. La reine répand sa magie noire sur l’Angletrre jusqu’à ce que le Roi Arthur utilise Excalibur pour démembrer Vivian et cacher ses restes à travers tout le pays. De nos jours à Tijuana au Mexique, Hellboy (David Harbour), le démon enquêteur du paranormal qui travaille pour le compte du B.R.P.D. dans le Colorado, combat un agent disparu nommé Esteban Ruiz devenu un vampire. Avant de mourir, ce dernier lui révèle que la fin est proche. Peu de temps après, le leader du B.R.P.D. Trevor Bruttenholm (Ian McShane), qui est également le père adoptif d’Hellboy, lui confie une nouvelle mission : assister l’Osiris Club en Angleterre dans leur chasse aux géants.

Durant son périple avec l’Osiris Club, Hellboy en apprend davantage sur ses origines par le biais des révélations du leader Lady Hatton : Bruttenholm devait tuer Hellboy lorsqu’il arriva sur Terre en 1944 lors du Projet Ragna Rok organisé par les nazis mais il décida finalement de le garder en vie et de l’élever, convaincu qu’il y avait du bon en lui. Au même moment, le monstre cochon Gruagach signe un pacte avec la sorcière Baba Yaga : si le monstre retrouve et réunit les restes de Vivian Nimue, la sorcière réalisera son vœu le plus cher : prendre sa revanche sur Hellboy. En Angleterre, notre héros démon est trahi par les membres de l’Osiris Club et échappe de peu à la mort, avant d’être sauvé par une jeune médium nommée Alice Monaghan. Bruttenholm révèle ensuite à Hellboy que les restes de la Reine de sang ont été retrouvés et qu’une partie de son corps se trouve à l’Osiris Club. Hellboy et Alice rejoignent alors l’équipe dirigée par l’agent du M11 Ben Daimio pour tenter d’empêcher le retour de Vivian Nimue dans notre monde. Cette dernière cherche alors à rentrer en contact avec Hellboy, afin d’ouvrir les portes de l’enfer sur Terre et déclencher l’ultime apocalypse.

UN HELLBOY VERSION GRAND GUIGNOL

Neil Marshall étant connu pour ses films d’horreur, il paraissait évident que son « Hellboy » serait davantage orienté vers le jus de tomate. A ce sujet, le film n’a rien à voir avec ceux de Guillermo Del Toro (ou presque…) : ici, le sang coule à flot, le gore et même le mauvais goût (la longue séquence répugnante entre Hellboy et Baba Yaga au milieu du film). Dès l’origine du projet et une fois l’implication de Mike Mignola confirmée, Neil Marshall savait que ce « Hellboy » version 2019 serait davantage orienté vers un mélange entre l’horreur et l’univers des comic books, comme dans l’oeuvre d’origine de Mignola. C’est l’acteur David Harbour qui a eu la lourde responsabilité de succéder à Ron Perlman dans le rôle d’Hellboy. Bien moins charismatique que le vétéran Perlman, Harbour s’est surtout fait connaître ces dernières années à la télévision (« Stranger Things »). Au premier abord, son Hellboy ressemble à celui des films de Del Toro mais en plus jeune – et moins badass – visuellement, le film porte la marque de Marshall, on y retrouve ses délires habituels, son goût pour le grotesque, les monstres difformes, le gore à outrance et un zest de trash. Il faut néanmoins se souvenir de la polémique lié à un article publié dans The Warp qui mentionnait de multiples tensions durant le tournage du film, notamment entre les producteurs, les acteurs et le réalisateur.

A en croire l’article, Neil Marshall aurait perdu le contrôle de son film, ce qui expliquerait le montage un peu hasardeux et le look fourre-tout du métrage. « Hellboy » est une longue succession de séquences montées précipitamment avec une multitude de sous-intrigues et de seconds rôles que le scénario prend à peine le temps de développer. Certaines scènes sont dignes de mention, pas toujours dans le bon sens du terme, comme la fameuse séquence centrale entre Hellboy et Baba Yaga, un sommet de mauvais goût, ou la scène durant laquelle notre garçon de l’enfer tue les trois géants en Angleterre à grand renfort de gore bien craspec qui rappelle tout le savoir-faire habituel de Marshall dans le domaine. Hélas, tout cela finit par ressembler dangereusement à une production pour la télévision : on a l’impression de retrouver le look trash et ultra brutal de certaines séries TV récentes qui n’ont plus froid aux yeux et misent tout sur les effusions de sang et la violence comme argument marketing majeur. Par rapport au côté plus lisse des films de Del Toro, c’est peut être une amélioration, mais au niveau de la réalisation et de l’esthétique générale, le film est un peu plus « sale » et finalement bien moins réussi que ceux du réalisateur mexicain.

Pourtant, les fans ont de quoi faire avec cette mouture 2019 : des monstres en veux-tu en-voilà, du gore à outrance, du trash, un look série-B façon années 80/90, un héros badass, des scènes d’action démesurées, de bons effets spéciaux et même de l’humour noir et du mauvais goût assumé. Seulement voilà, la mayonnaise ne prend pas, malgré tous les efforts sur le film, il y a quelque chose qui ne prend pas, peut être se souvient-on encore des films de Del Toro et la comparaison paraît quasi impossible et forcément en défaveur du film de Marshall ? Peut être aurait-il fallut attendre quelques années de plus avant de ramener Hellboy au cinéma ? Chacun aura sa réponse à cette question, mais il ne fait aucun doute que l’échec du film au box-office 2019 compromet sérieusement tout projet de suite. Reste que le film est un plaisir coupable qui sera peut être réévalué dans les années à venir (ou pas), seul l’avenir nous le dira.

UNE PARTITION PLUS ÉLECTRO/ROCK MODERNE

Après deux scores mémorables de Marco Beltrami et Danny Elfman, c’est au tour de Benjamin Wallfisch de signer la musique de ce nouvel « Hellboy » 2019. Le compositeur anglais est décidément très actif ces dernières années : « A Cure for Wellness » (2016), « Hidden Figures » (2016), « Bitter Harvest » (2017), « Annabelle : Creation » (2017), « It » (2017), « Blade Runner 2049 » (2017), « The Darkest Minds » (2018), « Serenity » (2019), « Shazam ! » (2019), etc. On note par ailleurs que Wallfisch semble être de plus en plus associé aux films horrifiques, sa participation à « Hellboy » étant finalement plus qu’évidente au vu de sa filmographie actuelle. A la première écoute de la musique de Wallfisch à l’écran, aucun doute possible : on est à des années lumière ici du style plus orchestral/classique de Marco Beltrami sur le premier film de Guillermo Del Toro. Wallfisch opte ici pour une approche résolument électro/rock moderne, à grand renfort de riffs de guitare électrique, de percussions robustes et de synthétiseurs vrombissants, avec quelques parties chorales et orchestrales. Autant le dire tout de suite : le « Hellboy » 2019 sera très clairement rock’n roll et va faire du bruit, beaucoup de bruit ! Si vous aimez le heavy metal sauvage tendance « punk », comme Wallfisch l’avait déjà fait sur « Hammer of the Gods » (2013), vous allez être servi !

ANALYSE DE LA MUSIQUE

Le ton est donné dès « Big Red » - à noter que l’album n’est absolument pas dans l’ordre chronologique du film ! - Il s’agit d’un premier morceau d’action totalement déchaîné débutant sur des riffs fun de guitares électriques saturées à grand renfort de samples électro agressifs. Ceux qui connaissent le travail de Benjamin Wallfisch sur « Hammer of the Gods » retrouveront ici un style très similaire. Le travail des percussions en mode ‘action’ est évidemment ici calqué sur les productions du studio Remote Control d’Hans Zimmer, pour lequel Wallfisch travaille déjà depuis plusieurs années, notamment en tant qu’arrangeur et compositeur additionnel. Dans « Big Red », on retrouve tous les tics des productions Zimmer de ces dernières années mais orientées davantage vers le heavy metal/électro agressif. Il y a bien une partie orchestrale, enregistrée avec une formation conséquente, mais elle est malheureusement noyée sous une tonne de synthétiseurs, de percussions, d’effets sonores et de riffs survoltés de guitares, sans oublier la partie chorale, elle aussi plutôt sous-mixée. Le film possédant également une dimension horrifique/gore, Wallfisch n’hésite pas non plus à avoir recours à une multitude de passages dissonants et d’effets avant-gardistes des cordes (clusters stridents, glissandi, sonorités aléatoires, etc.), même si là aussi, tout cela reste trop souvent noyé dans la masse sonore.

A l’écran, l’objectif de Wallfisch est on ne peut plus clair : faire un max de bruit pour évoquer le combat d’Hellboy contre les forces du mal, tout en lui conférant un côté rock cool et fun ! En soi, pourquoi pas, sauf que l’exécution est plutôt hasardeuse et pas très convaincante. Concernant le personnage d’Hellboy, il se voit attribuer deux motifs : les riffs rock de guitare entendus au début de « Big Red », qu’on retrouve également dans « Cathedral Fight » et « Hellboy » pour le côté badass du personnage. La deuxième idée, plus mélodique, est entendue aux cordes à 5:08. Le thème mélodique d’Hellboy s’apparente essentiellement à une mélodie mystérieuse et descendante des cordes, utilisées et développées à de nombreuses reprises tout au long du film. Dans « Psychic Migraine », quelques voix féminines planantes et des nappes sonores menaçantes évoquent clairement la Reine de Sang. A 1:48, Wallfisch dévoile le thème associé à la médium Alice dans le film, constitué d’une mélodie aux notes ascendantes de cordes, mystérieuses et sombres. « Gruagach » illustre quand à lui l’une des séquences d’affrontement contre le monstre-cochon géant. Wallfisch développe ici le motif de 4 notes descendants associé dans le film à Gruagach. Le compositeur joue ici sur les rebondissements rythmiques et multiplie les assauts orchestraux à grand coup de percussions, de cordes stridentes et de cuivres robustes et démesurés.

« You Call Us Monsters » s’oriente vers un style plus atmosphérique à l’aide de sonorités graves et obscures pour la Reine de Sang (notamment vers 2:23 avec le retour des voix féminines). Néanmoins, l’action reprend le dessus très vite à l’aide de samples, de cuivres hystériques et de percussions meurtrières. Le thème d’Hellboy est ensuite repris aux cordes à 2:35. Dans « Baba Yaga », Wallfisch livre un thème plus intéressant pour l’odieuse sorcière Baba Yaga. Le thème est confié ici à des cordes en harmoniques et en octaves, dont les sonorités glaciales nous plongent d’emblée dans une ambiance étrange et surréaliste (à 0:49 par exemple). C’est d’ailleurs peut être l’une des idées les plus réussies du score de « Hellboy », le travail de sound design autour de ce thème étant plus pâteux, ennuyeux et inintéressant. Néanmoins, le morceau apporte quelque chose de particulier à la scène où Hellboy fait la connaissance de Baba Yaga vers le milieu du film. « A New Eden » développe quand à lui la thématique de la Reine de Sang avec les cordes et la voix féminine (notamment vers 1:49, où le thème est ici développé dans son intégralité : une cellule de 4 notes puis une cellule de 5 notes). On devine dans ces notes éthérées l’ambiance plus mystique et sombre de la maléfique Vivian Nimue, même si très vite, Wallfisch ne peut s’empêcher de retourner dans l’action pétaradant à grand renfort de cuivres et de choeurs gothiques.

Dommage que le compositeur tombe trop souvent dans la cacophonie pure comme il a parfois tendance à le faire, sans aucune subtilité, dans « Destroyer of All Things » par exemple, où la troisième minute du morceau vire au vacarme sonore absolu. « Destroyer of All Things » reprend par ailleurs le thème d’Alice aux cordes (vers 3:36). On retrouve également le thème d’Hellboy sous une variante dramatique à 2:31. La violente bataille dans la cathédrale vers la fin du film est illustrée en grande pompe dans « Cathedral Fight » avec le retour des sonorités heavy metal/électro. Il s’agit là aussi d’un énième morceau d’action survolté et bruyant, ultra massif mais difficile à digérer en écoute isolée. Wallfisch développe ici le motif de 4 notes de Gruagach aux cuivres graves et le thème d’Hellboy à travers de multiples variantes (souvent aux cordes). On retrouve également les riffs cools de guitare rock de « Big Red » illustrant les exploits d’Hellboy face à Gruagach et la Reine de Sang. Certaines parties de cuivres, complètement survoltées, auraient là aussi méritées d’être mieux valorisées au lieu de noyer le mix sous une tonne de samples, de loops et d’effets sonores abrutissants. Le thème mystérieux et envoûtant de la Reine de Sang et sa voix féminine caractéristique revient ensuite à 5:04, alors que la Reine cherche à posséder Hellboy pour ouvrir l’Apocalypse sur Terre.

UNE CONCLUSION APOCALYPTIQUE

« Anung Un Rama » débute au son d’une reprise surpuissante du thème d’Hellboy aux cuivres, pour la suite de la bataille finale dans la cathédrale et la possession d’Hellboy. On y retrouve également le motif de 4 notes de Gruagach, des effets sonores survoltés des cuivres (dont un passage qui fait étrangement penser à Danny Elfman) et des percussions frénétiques. « This Isn’t You » reprend le thème d’Hellboy de manière plus dramatique, alors que le héros tente de se soustraire à la possession de la Reine de Sang et d’empêcher la destruction totale du monde. Wallfisch développe ici la mélodie principale de manière plus dramatique et intense aux cordes. On retrouve aussi le thème ascendant de la médium Alice (vers 2:33), repris de manière dramatique aux cordes et au piano durant toute la dernière partie de « This Isn’t You ». Enfin, le score se termine sur « Hellboy » qui est essentiellement une reprise des deux idées majeures du personnage d’Hellboy : les riffs de guitare rock (à 0:33) et le thème mélodique des cordes (0:55).

Au final, on ressort assez épuisé par l’écoute de la musique d’Hellboy sur l’album. Le score s’avère être plutôt répétitif, bruyant et parfois grotesque dans son sound design abrutissant. Mais on aurait tort de rejeter entièrement le travail de Benjamin Wallfisch, car, qu’on le veuille ou non, le compositeur a apporté un effort tout particulier dans la construction thématique de sa partition, avec un thème pour Hellboy, la Reine de Sang, Gruagach, Baba Yaga et Alice. Quasiment tous les personnages principaux de l’histoire possèdent une idée ou un motif qui permet de les identifier dans la musique, et même si cela paraît imperceptible à l’écoute du score sur les images, les thèmes sont bel et bien présent et parfaitement développés. Le souci vient surtout du volume sonore très élevé de la plupart des morceaux d’action et d’un manque total de finesse dans le film. Wallfisch confond trop souvent action et vacarme et en oublie qu’il a un orchestre entre ses mains.

Quitte à opter pour une approche heavy metal/rock, n’aurait-il pas mieux valut développer davantage cet axe musical plutôt que de vouloir à tout prix mélanger cette esthétique avec des parties orchestrales/chorales régulièrement noyées dans la masse ? Comme souvent dans ce genre de cas, à moins d’être un expert en la matière ou d’avoir un talent très particulier, difficile d’apprécier réellement le résultat qui frôle souvent la cacophonie pure. Evidemment, on est ici à des années lumières de la partition splendide de Marco Beltrami pour le « Hellboy » de Del Toro, mais quitte à partir sur quelque chose de complètement différent, on aurait préféré que Benjamin Wallfisch soit plus radical et fasse de l’électro/rock pur et dur, peut être que cela serait finalement mieux passé ? Il n’est donc pas question ici d’opposer la musique symphonique à celle plus moderne du rock ou de l’électro mais de constater simplement que le mélange des deux n’est pas toujours heureux, et qu’il aurait mieux valut choisir l’un ou l’autre pour les besoins du film. Un score très mitigé et assez lourdingue donc, malgré de très bonnes idées, c’est bien dommage !






---Quentin Billard