1-Waters of Irrawady 3.46
2-Memories of The Dead 1.43
3-I Dreamt I Woke Up* 8.41
4-Freedom From Fear 1.06
5-Brother Morphine 1.06
6-Our Ways Will Part 7.11
7-Village Under Siege 4.07
8-Beyond Rangoon 10.09

* Co-composé par
Hans Zimmer et
Nick Glennie-Smith

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

Milan Records
74321 28665-2

Score produit par:
Hans Zimmer, Adam Smaley
Montage de la musique:
Adam Smaley
Assistant de Mr.Zimmer:
Marc Streitenfeld
Direction Art Album:
Nathalie Delaunay
(Milan Records)

Artwork and pictures (c) 1994 Castle Rock Entertainment. All rights reserved.

Note: ****
BEYOND RANGOON
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
'Beyond Rangoon' de John Boorman narre l'histoire d'une jeune médecin américaine, Laura Bowman (Patricia Arquette) parti faire un voyage en Extrême-Orient pour tenter d'oublier les événements tragiques qu'elle a vécue dans son passé (la mort de son fils et de son mari assassinés) et qui, à la suite du vol de son passeport, va se retrouver embarqué dans une aventure périlleuse à Rangoon en Birmanie, là où elle va rencontrer U Aung Ko, un guide local qui va lui faire traverser le pays de manière illégale. Adapté d'une histoire vraie, ce récit poignant raconte comment une femme qui avait perdue toute envie de vivre va se découvrir une cause pour laquelle lutter et donc pour laquelle vivre, et ce symbolisé par le personnage de Aung San Suu Kyi (prix Nobel de la paix 1991) qui luttera à sa manière pour que la démocratie gagne dans ce pays soumis à une effroyable dictature militaire. John Boorman, spécialiste des films d'action/aventure ('Delivrance', 'The Emerald Forrest') n'oublie pas le genre action/aventure qu'il apprécie beaucoup dans ce film, mais sans être vraiment au centre de son film. Effectivement, 'Beyond Rangoon' traite avant tout de l'histoire d'une femme qui va tenter d'expier ses démons en servant petit à petit une cause difficile dans un pays soumis aux horreurs de la dictature, et c'est sur le plan humain que 'Beyond Rangoon' est superbe!

Hans Zimmer a composé là une BO superbe, probablement une de ses plus belles oeuvres avant le chef-d'oeuvre que reste 'The Thin Red Line' en 1998. 'Beyond Rangoon' témoigne une fois de plus de la sensibilité d'un compositeur que certains ont voulu trop vite enfermer dans une étiquette de compositeur bourrin de film d'action. Hors depuis le temps, il ne cesse de prouver sa très grande sensibilité musicale (et humaine) et que 'The Thin Red Line' restera à jamais son chef-d'oeuvre pour la profondeur musicale qu'il a sut extraire du magnifique film de Terrence Malick. Dans 'Beyond Rangoon', Zimmer réutilise son style fait de synthétiseurs mélangés avec de l'orchestre et surtout, une grande dose de couleurs et de sonorités exotiques de l'Extrême-Orient. Pour cela, Zimmer a recours à des flûtes éthniques omniprésentes dans le score, des sons couleur locale et de la percussion exotique, la plupart étant utilisés en samplers de synthé (sauf pour les flûtes de Richard Harvey). Dès le début du film, Zimmer annonce le premier thème dans 'Waters of Irrawady' alors que la barque qui amène Laura et sa soeur Andy en Birmanie arrive près de Rangoon. Le thème déjà très beau pose d'entrée le climat du film avec l'utilisation des flûtes et de sonorités exotiques. Le thème évoque plutôt le pays et la beauté de ses paysages, et ce bien avant de s'intéresser aux personnages ou aux situations dramatiques du film, ce qui explique peut être le fait qu'il soit assez peu utilisé durant le film.

Mais dès cette première pièce, Zimmer suggère le véritable thème principal du film, celui qui a attrait au personnage de Laura, une femme blessée par la vie. C'est justement l'idée de cette souffrance que Zimmer a grandement et magistralement bien exploré dans sa musique. Des passages tels que 'Memories of The Dead' ou 'Our Ways Will Part' explorent à merveille l'idée de la douleur et de la peine que la vie peut occasionner à un être. Toute personne souffrante devrait se sentir si proche de cette musique. Toute personne heureuse devrait se sentir si toucher par le pathétique et l'humilité de ce thème que Zimmer renforce avec une voix féminine éthérée et aérienne. Dans les moments où Laura se rappelle avec tristesse des moments douloureux de son passé se font de manière si touchante que l'on ne peut que souffrir pour cette pauvre femme, à condition d'avoir la sensibilité nécessaire pour cela biensur. A ce titre, les trois dernières minutes de 'Our Ways Will Part' sont absolument poignantes. Alors que Laura dort, elle rêve que son fils vient la voir et lui demande de le laisser s'en aller. C'est symbolique évidemment, elle réalise qu'elle perd ceux qu'elles aiment à cause de la vie qui efface petit à petit nos souvenirs liés au passé. En se réveillant, bouleversée, elle se confie à son ami U Aung Ko qui dort juste à côté. La voix féminine est évidement liée au personnage de Laura et pourrait évoquer directement sa douleur, renforcée par l'apport de la fûte. Zimmer pose un climat de tristesse si touchant que la scène en devient réellement illuminée, éclairée par une couleur émotionnelle vraiment forte. Ce qui reste marquant dans ces passages, c'est l'ambiance méditative, parfois reposante et mélancolique à la fois, une sorte de réflexion sur soi ou de quête de la tranquillité de l'âme, une idée qui rejoint aussi le film avec la religion bouddhiste évoquée par le film (et le personnage de U Aung Ko, un ancien moine).

Mais le climat s'alourdit aussi parfois pour évoquer l'oppression militaire et les méfaits de la dictature. En ce sens, 'Village Under Siege' est assez fort. On y retrouve le style action familier de Zimmer à l'aide de synthé, percus diverses et flûtes pour souligner la lutte de Laura qui tente de soigner U Aung Ko blessé, le morceau restant très sombre et très tendu. Le style exotique des passages d'action rappelle évidemment 'Black Rain' par moments. La lutte est aussi un élément important dans cette BO. En ce sens, Zimmer utilise un autre thème dans 'Beyond Rangoon' ou 'I Dreamt I Woke Up' (co-composé avec Nick Glennie-Smith). 'Beyond Rangoon' concerne toute la fin du film, alors que Laura aide un petit groupe de rebelles à fuir la Birmanie pour rejoindre la Thaïlande, étant pourchassés par des soldats. Mais alors qu'ils doivent traverser un petit pont le long d'une rivière, un soldat leur bloque le chemin. C'est alors que U Aung Ko sort du rang et vient l'amadouer en le prenant dans ses bras, se montrant résolument humain et pacifiste. Ce passage dure quelques secondes et pourtant, qu'est ce que ces secondes sont fortes sur le plan humain. (pareil pour le plan musical). Le thème qu'utilise ici Zimmer évoque l'idée de l'espoir dans la lutte. On y retrouve tout le talent mélodique de Zimmer à l'aide de son orchestre+synthé et des flûtes pour faire une évocation puissante de l'espoir de quitter le pays au plus vite. Evidemment, Zimmer propose ici un climat action tendu et mouvementé alors que les soldats tirent au mortier pour anéantir le groupe qui tente de s'enfuir. Alors que l'on voit le plan où U Aung Ko et le soldat qui l'aide en sortant tout deux de la fumée provoquée par le tir d'un mortier, Zimmer réaffiche son thème de l'espoir et de la lutte pour évoquer la victoire du groupe qui réussit à passer de l'autre côté de la frontière, en Thaïlande. Déjà, dès les premières vingtaine de minutes du film, Zimmer l'utilisait déjà dans la scène où Aung San Suu Kyi passait devant un groupe de soldats n'osant même pas lui tirer dessus, probablement sensibilisés par le regard si serein et si confiant de cette femme pacifiste. Le générique de fin se termine donc avec le thème de l'espoir/lutte réexposé de manière si belle qu'il ne peut qu'être touchant lui aussi. On enchaîne pour terminer avec le thème du pays entendu au début de 'Waters of Irrawady' qui finit de manière doux et mélancolie avec la voix féminine.

Que dire de plus si ce n'est que 'Beyond Rangoon' témoigne comme nous l'avons déjà dit de la sensibilité d'un compositeur que j'apprécie de plus en plus, un musicien capable de trouver la lumière d'un film, de faire ressortir l'émotion franche et pure dans une matière sujette à créer le véritable climat musical adéquat. Déjà avant 'The Thin Red Line', Hans Zimmer nous faisait comprendre qu'il était un musicien sensible et doué. Il l'a fait avec 'Beyond Rangoon'!


---Quentin Billard