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1-Suite One
Elizabeth and Essex Main Title Narrative March Shadow and Parade The Throne Room After Elizabeth Slaps Essex Elizabeth and Essex 8.14 2-Suite Two The Queen The Courier The Chess Game Mirror Scene The Queen Messenger Poor Child 13.11 3-Suite Three Reconciliation The Hunting Raleigh and Essex Silver Armor Lady Penelope Darling Card Game Love Scene 11.15 4-Suite Four Ireland Council Dismissed Love and The Ring Ireland Shadow of Penelope Elizabeth Weeps The Battle The Truce 9.37 5-Suite Five Essex Returns The Palace Queen Elizabeth Essex Returns Love Scene Arrest 10.13 6-Scene Six The Tower of London The Tower Cecil Essex Love Scene Executioner End Cast 12.15 Musique composée par: Erich Wolfgang Korngold Editeur: Varèse Sarabande VSD-5696 Album produit par: Paul Wing Producteurs associés: Nick Redman, Tony Thomas Producteurs éxecutifs: Bruce Kimmel, Alan Silver Assistant de production: Gyongyver Sovago Artwork and pictures (c) 1998 Varèse Sarabande. All rights reserved. Note: ***1/2 |
THE PRIVATE LIVES OF ELIZABETH AND ESSEX
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Erich Wolfgang Korngold
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Production très réussie de Michael Curtiz, 'The Private Lives of Elizabeth and Essex' offre à Bette Davis et Eroll Flynn les rôles respectifs de la reine Elizabeth d'Angleterre et de celle de Lord Robert Devereaux d'Essex dans une histoire d'amour difficile qui finira de manière tragique, souillé par l'ambition et la soif de pouvoir d'Essex. Bette Davis offre une interprétation magistrale d'Elizabeth en retranscrivant toute l'amertume et les tourments d'une personne au tempérament "volcanique" partagé entre son amour pour Essex et son amour pour son pays. Adapté d'après une pièce de théâtre de Maxwell Anderson, Curtiz conserve plus ou moins cet aspect théâtral dans ses décors tout en mettant particulièrement l'accent sur les personnages et les dialogues évidemment.
Erich Wolfgang Korngold a laissé de grands chefs-d'oeuvre au cours de sa superbe carrière Hollywoodienne. Considéré aujourd'hui comme l'un des plus grands compositeurs de l'âge d'or Hollywoodien, (que l'on redécouvre de plus en plus grâce à une série de réenregistrements et de rediffusions de ses oeuvres) Korngold a signé de grandes partitions pour les films de Curtiz. On pense évidemment en premier au célèbre 'Adventures of Robin Hood' (avec Erolly Flynn, inoubliable en Robin des Bois), mais il y'a aussi 'The Sea Hawk' (1940, toujours avec Eroll Flynn dans le rôle du capitaine G.Thorpe), 'Captain Blood' (1935) ou bien encore 'The Sea Wolf' (1941). Avec 'The Private Lives of Elizabeth and Essex', c'est une vision plus musicale que réellement cinématographique que nous offre Korngold pour le film de Michael Curtiz. Evidemment, ce dernier respecte les personnages, les lieux, l'époque et l'histoire, mais sa partition est construite de telle manière à être unie en continu avec une approche musicale quasi opératique. Son orchestre sonne riche, très coloré, avec l'ajout de harpes et d'un vibraphone. Les thèmes abordés dans la partition de Korngold: la grandeur du royaume d'Angleterre, l'amour et la trahison. L'album édité par Varèse Sarabande permet enfin d'apprécier la partition entière de Korngold à travers six longues suites qui permettent de suivre l'ordre chronologique du film et de décrire toute l'histoire à travers l'évolution de la musique. Le 'Main Title' du film décrit la splendeur du royaume et de la reine Elizabeth en introduisant le thème royal (très cuivré, très solennel). Korngold décrit ensuite le retour victorieux des troupes d'Essex de Cadix en Espagne en utilisant une marche triomphante entraînante qui rappelle par moment le style des marches de Rozsa pour 'Ben-Hur' ou 'King of Kings'. L'ambiance change alors que Elizabeth colle une claque à Essex pour lui avoir tourné le dos, outré de la réaction néfaste de la reine face à la bataille qu'il a mené à Cadix et qu'elle juge désastreuse pour le royaume. L'atout de Korngold est de pouvoir réussir à passer d'une scène à l'autre, d'une émotion à l'autre tout en conservant toujours une unité musicale et une continuité assurée par le style orchestral, l'écriture, les thèmes et les harmonies. A propos de thème, Korngold va très vite développer le 'Love Theme' décrivant le puissant amour entre Elizabeth et Essex, le compositeur évitant dans les scènes romantiques les violons mielleux conventionnels (même si on en trouve aussi beaucoup) pour se concentrer sur une écriture plus tendre, plus douce, utilisant beaucoup de harpes et de cordes flottantes. L'effet rendu à l'écran retranscrit impeccablement la tendresse et l'intimité de ces moments plus que le romantisme en lui-même. C'est ce qui ressort dans le 'Love Scene' de la troisième suite ou celle de la cinquième suite. La deuxième suite concerne la reine. Dans cette suite, Korngold y décrit tout le tourment de la reine notamment après l'affront de Lady Penelope qui lui chante une chanson d'amour de jeunesse, vexant amèrement Elizabeth qui pique soudainement une crise de colère, renvoyant Penelope et cassant tous les miroirs qu'elle trouve autour d'elle. Korngold nous fait ressentir dans son orchestre toute la colère, le tourment et le caractère fort de ce personnage agité par une grande nervosité. On note d'ailleurs dans cette suite la chanson que chante Pénelope et une de ses amies en se mettant au piano (un anachronisme du film. L'instrument qui sonne dans le film comme un piano forte ne peut pas exister à cette époque. Le piano n'apparaîtra que deux siècles plus tard!!!) et à la mandoline. D'un autre côté, au début de la séquence, on aperçoit Essex en train de chasser dans son domaine, retiré du royaume de la reine. Korngold utilise des cuivres et cors pour illustrer cette scène très bien décrite et qui, une fois de plus tendra, à rappeler un style d'écriture hollywoodien proche des fanfares solennelles chères à Newman, Rozsa, Waxman, etc. On ressent toujours aussi le talent qu'a Korngold pour passer d'une scène à l'autre sans éléments disparates, morcelés ou décousus (certaines harmonies permettent au compositeur de faire la transition d'une scène à l'autre), même si le montage du film l'oblige bien évidemment, ce qui disparaît ensuite sur l'album qui constitue une véritable expérience musicale à part entière. A la fin de cette troisième suite, après quelques moments agités, Korngold illustre avec tendresse la réconciliation d'Elizabeth et Essex. Mais le climat se veut plus sombre dans la quatrième suite. Essex part alors mener la bataille en Irlande. La séquence de la bataille est superbement décrite, martiale dans un premier temps (orchestre agité, pupitre de cuivres et de percussions favorisés, impression guerrière ressortant de la musique) puis d'une manière plus solennelle dans un second temps, alors que Essex va capituler face à son ennemi, Lord Tyrone. Korngold arrive à suggérer à la fois l'ambition et la désillusion d'Essex dans cette guerre qu'il ne peut gagner, la reine lui ayant coupé les vivres et ordonné de rentrer immédiatement au royaume. C'est alors que l'on arrive aux deux dernières suites qui sont nettement plus sombres, la cinquième décrivant le retour d'Essex et son arrestation par la reine, la dernière décrivant simplement l'exécution finale. On trouve dans la cinquième et dernière partie un thème plus dramatique qui évoque le tourment et l'amertume de Elizabeth, torturée entre son amour pour Essex et celui de son royaume. Ce thème ressort particulièrement aux cordes lorsque Pénelope implore à genoux Elizabeth de laisser la vie sauve à Essex. On ressent lors de l'arrestation toute l'amertume et les tourments de la reine. Korngold décrit la passion trahie, la désillusion, le tourment psychologique d'Elizabteh ainsi que la détermination tragique d'Essex qui préfère mourir plutôt que de redonner sa bague à Elizabeth. On notera la manière particulièrement sombre de Korngold à décrir la scène de l'arrestation, précédé auparavant d'un morceau plus solennel, alors que Elizabeth faisait rentrer ses gardes dans la salle du trône en claquant des mains, un rappel du style majestueux et solennel du 'Main Title', cette séquence étant une fois de plus une preuve du talent de Korngold à unir sa musique dans un développement musical continu. Pour finir, on notera la scène dramatique de l'exécution finale d'Essex et de la lamentation d'Elizabeth qui aime toujours son amant et l'implore de revenir sur sa décision lors d'une dernière scène d'amour et des adieux poignants entre les deux amants. Korngold se montre aussi dramatique sans trop vraiment tomber dans l'excès mélodramatique, tout en réussissant à doser son orchestre. Arrive alors l'exécution finale: un roulement de tambours se fait entendre alors que l'on aperçoit à l'écran un plan du visage pâle et mouillé de larmes d'Elizabeth, les cordes et les cuivres accompagnant ce roulement. Lorsqu'il s'arrête soudainement, on comprend c'est la fin. Korngold boucle l'oeuvre en revenant sur le thème majestueux du 'Main Title' pour finir sur une touche plus royale, plus solennelle. La partition symphonique de Korngold pour 'The Private Lives of Elizabeth and Essex' possède ce côté théâtral/opératique requis pour le film de Michael Curtiz qui est d'ailleurs basé sur le script d'une pièce de théâtre. La manière dont le musicien traite le film en continu avec une grande unité orchestrale et des thèmes et harmonies bien dosés et utilisés avec pertinence font beaucoup penser à la manière dont, un siècle avant, Hector Berlioz avait écrit sa symphonie dramatique 'Roméo et Juliette'. De la même façon que procède l'oeuvre de Berlioz, 'The Private Lives of Elizabeth and Essex' décrit à travers la musique toutes les émotions des personnages et des différentes situations du film. C'est la musique qui raconte l'histoire et qui fait particulièrement ressortir les personnages et leurs sentiments dans le film, la différence étant que Korngold a bien sûr un support cinématographique à sa disposition, chose que n'avait évidemment pas Berlioz en écrivant sa troisième symphonie. Mais le lien entre les deux compositeurs reste assez fort ici. On pourrait par exemple considérer cette musique comme une grande symphonie en six mouvements que Korngold aurait alors crée dans un style dramatique proche de la troisième symphonie du célèbre compositeur français. En conclusion, 'The Private Lives of Elizabeth and Essex' est une oeuvre intéressante dans la carrière d'Erich Wolfgang Korngold, une oeuvre symphonique maîtrisée, enveloppée dans un style orchestral théâtral et romantique omniprésent. ----Quentin Billard |