1-Walkin' Talkin' Man 3.36
2-A Cold Day In NY 2.25
3-Blowfish 3.13
4-Ritz 4.51
5-Henry vs. Henry 3.16
6-Ritz Part II 3.13
7-I Don't Like Eggs 3.20
8-Gotta Get Me Some of That 3.33
9-Central Park, 6pm 4.24
10-Buddy Grooves 6.14

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

EMI USA CDP7-97496-2

Album produit par:
Hans Zimmer, Jay Rifkin
Montage musique:
Nick Ratner
Producteur exécutif album:
Mike Nichols

Artwork and pictures (c) 1991 Paramount Pictures.

Note: ***1/2
REGARDING HENRY
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
'Regarding Henry' (A propos d'Henry) est un très beau film signé Mike Nichols, réalisateur allemand à qui l'on doit 'Working Girl', 'Wolf' ou bien encore 'Silkwood', sur un script non moins touchant de JJ Abrams, plus connu aujourd'hui pour être l'auteur de la série TV 'Alias'. Avec ce film, Harrison Ford dévoilait une facette plus sensible de son jeu d'acteur, lui qui était jusqu'à présent abonné aux rôles de héros de films d'aventure, d'action ou de science-fiction. Henry Turner (Harrison Ford) est un brillant avocat new-yorkais sévère et hautain qui se dévoue corps et âme 7 jours sur 7 pour son métier, délaissant sa femme Sarah (Annette Bening) et sa fille Rachel (Mikki Allen). Un soir, alors qu'il descendait de son luxueux appartement pour aller acheter des cigarettes dans un magasin du coin, un voyou le blesse gravement en lui tirant une balle dans la tête et dans le corps. Henry survit à l'agression mais tombe dans un profond coma dont il ressort quasi indemne au bout de quelques jours. Mais cette douloureuse expérience l'a profondément changé, à tel point qu'il est devenu amnésique et qu'il ne se souvient plus de rien, et comme si cela ne suffisait pas, il a aussi perdu la parole et la plupart de ses facultés motrices. Il entame alors une longue et difficile rééducation auprès de Bradley (Bill Nunn), sympathique kinésithérapeute qui va le prendre sérieusement en main et l'accompagner avec entrain dans cette épreuve éprouvante. Mais lorsque sa femme et sa fille viennent lui rendre visite à l'hôpital, il est incapable de se souvenir d'eux et refuse de rentrer chez lui, jusqu'au jour où il se souvient d'un détail dans son appartement qui le convainc finalement de rentrer chez lui. De retour à son luxueux appartement new-yorkais, Henry découvre les vestiges de son ancienne vie et apprend à revivre auprès de sa femme et de sa fille. Son comportement a définitivement changé, Henry étant devenu un homme attentif, calme, posé et juste, tout le contraire de ce qu'il était auparavant. Même sa fille ne le reconnaît plus. De retour à son travail, Henry constate qu'il faisait un métier difficile et souvent injuste et devra affronter les moqueries de ses anciens collègues qui le prennent aujourd'hui pour un demeuré à la suite de son brutal changement de personnalité. Lorsqu'il découvre enfin qui il était auparavant, Henry en conclut qu'il n'aime pas la personne qu'il était autrefois et que c'est définitivement le moment pour lui de prendre d'importantes décisions qui lui permettront de prendre un nouveau départ dans sa vie.

Sur cette excellente intrigue dramatique, Mike Nichols réalise un film beau et émouvant sur un sujet pas souvent traité au cinéma, celui des personnes qui ressortent d'un coma totalement changé et qui doivent suivre une lente et difficile rééducation. Harrison Ford s'avère être particulièrement brillant dans la peau de cet homme qui renaît après être revenu de loin et avoir frôlé la mort, apportant à son personnage une certaine fragilité émouvante et une sensibilité qu'on ne lui connaissait pas, Harrison Ford ayant toujours campé des personnages durs comme de la roche dans ses la plupart de ses films précédents. Le film critique aussi implicitement la manière de vivre de certains couples de la bourgeoisie new-yorkaise et le côté souvent artificiel de leur entourage, même si on pourra toujours trouver un peu facile la façon dont le réalisateur démontre les limites de cette manière de vivre. Quoiqu'il en soit, 'Regarding Henry' est un film très touchant, l'histoire de la renaissance d'un homme qui redécouvre la vie différemment et qui corrige toutes les erreurs de son passé en se rapprochant de sa femme qu'il aime par dessus tout (excellente Annette Bening) et de sa jeune fille. 'Regarding Henry' fait généralement partie des films préférés des fans d'Harrison Ford qui considèrent que l'acteur a réussit à se renouveler et à donner un nouvel élan à sa carrière avec ce très beau film qui, bien qu'il ne paie pas de mien au premier abord, reste aujourd'hui un grand classique du genre!

Le score de Hans Zimmer pour 'Regarding Henry' est tout à fait caractéristique du style musical du compositeur allemand au début des années 90. Le score est écrit pour synthétiseurs avec basse électrique, claviers, saxophone, un peu à la façon de 'Driving Miss Daisy', 'Rain Man' ou de 'Green Card'. Zimmer fait même intervenir la voix soliste du chanteur Bobby McFerrin pour dynamiser l'ensemble de sa partition. Etant donné le sujet du film, la musique se devait absolument d'éviter tout accès larmoyant et autre sentimentalisme outrancier (à noter que c'est Georges Delerue qui devait écrire la musique à l'origine). Fort heureusement, Hans Zimmer a sut éviter le piège du mélodramatique hollywoodien en nous offrant au contraire une partition intime et légère toute en retenue, apportant une émotion particulière et toute en finesse au film de Mike Nichols. Dès l'ouverture dans 'Walkin' Talkin' Man', Zimmer annonce son thème principal joué par des claviers et quelques sons de synthé typique du Zimmer de la fin des années 80 avec une basse électrique pop/groovy qui se met très vite en place pour accentuer la dynamique du morceau, sans oublier d'étranges rythmiques vocales solo cool de Bobby McFerrin, une bonne idée qui apporte un certain tonus au score. La musique de 'Regarding Henry' possède un côté nostalgique et intimiste assez touchant, évoquant à merveille l'itinéraire de cet homme qui se réinvente une nouvelle vie. Si 'Walkin' Talkin' Man' possède un certain entrain typique des scores comédies dramatiques de Zimmer, 'A Cold Day in NY' s'impose par ses ambiances électroniques tendance new-age avec claviers, nappes de synthé et trompette en sourdine jazzy. Comme souvent, Zimmer joue avec ses différentes sonorités électroniques en évoquant ici une ambiance plus froide illustrant la ville de New York.

'Blowfish' accompagne la scène de la rééducation d'Henry avec une très belle reprise du thème principal aux claviers avec de très belles sonorités de synthétiseur (avec ce qui s'apparente à une clarinette) et une petite rythmique légère mais efficace. On ressent ici l'espoir d'un meilleur avenir pour Henry, au fur et à mesure qu'il progresse et réapprend à marcher, à parler et à revivre. Très touchant, 'Blowfish' est de loin l'un des plus beaux morceaux du score de Hans Zimmer, preuve que le compositeur possède une sensibilité évidente pour ce style de partition intimiste et chaleureuse (on pense irrémédiablement ici à 'Rain Man'). Idem pour 'Ritz' lorsqu'Henry peint le logo Ritz sans savoir encore à quoi cela correspond (c'est une manière pour lui d'extérioriser un ancien souvenir de son passé), avec ses nappes de synthé planante et ses sonorités new-age, auquel Zimmer ajoute par la suite des petites percussions plus énergiques. Au fur à mesure qu'Henry apprend à revivre, la musique se veut plus chaleureuse, plus énergique. 'Henry vs. Henry' reprend donc le thème d'une façon similaire à 'Blowfish' avec un rythme plus soutenu et typique du compositeur, annonçant clairement l'espoir d'un nouveau départ dans la vie d'Henry, lorsque ce dernier découvre ce qu'il était dans son ancienne vie. La musique conserve toujours cette retenue avec quelques rythmiques entraînantes qui suggèrent le départ vers une nouvelle vie comme dans 'Ritz Part II' qui se veut plus optimiste et touchant à la fois avec son énième reprise du thème principal. On pourra d'ailleurs reprocher au compositeur d'avoir un peu trop usé systématiquement de son thème, n'offrant aucune autre possibilité au compositeur d'entendre autre chose que cette mélodie (très belle malgré tout), ce qui finit par rendre l'écoute un brin monotone et lassante, même dans le film.

On appréciera néanmoins l'émotion qui se dégage de pièces comme 'I Don't Like Eggs' avec sa seconde partie plus énergique avec la basse et le thème à la clarinette, 'Gotta Get Me Some of That' étant une énième reprise un peu lassante du thème, qui reste décidément omniprésent tout au long du film. 'Central Park, 6pm' nous permet alors de retrouver le style de 'Walkin' Talkin' Man' avec sa rythmique groovy entraînante, ses solos rythmiques vocaux et son thème toujours joué aux claviers. Henry découvre alors que sa femme le trompait et que lui-même avait une maîtresse. Il part donc faire un tour à Central Park pour méditer et se changer les idées, la musique évoquant ici sa détermination à changer définitivement de vie. A noter que le chanteur Bobby McFerrin nous propose un passage de scat très cool pour la partie finale du morceau. Le compositeur conclut son score en se faisant plaisir avec 'Buddy Grooves' qui, comme le titre l'indique, met l'accent sur les rythmiques groove avec l'appui de ses claviers, de la basse et des rythmes vocaux de Bobby McFerrin en onomatopés, concluant la musique sur une touche de jovialité simple et remarquable.

Le score de 'Regarding Henry' fait donc partie de ces musiques électroniques intimistes comme Hans Zimmer en a écrit à plusieurs reprises à la fin des années 80 et au début des années 90. La musique suit le parcours du personnage d'Henry Turner, avec une émotion toujours très retenue et un côté rythmique omniprésent, qui évite à la musique de sombrer dans la mollesse en offrant au contraire le maximum de vitalité que la musique puisse offrir à l'auditeur (et au film de Mike Nichols), à l'image du changement de personnalité radical d'Henry Turner. Sans être l'un des chef-d'oeuvres de Hans Zimmer, 'Regarding Henry' fait néanmoins partie de ces partitions intimistes touchantes dans lesquelles le compositeur dévoilait progressivement un talent de plus en plus évident à une époque où Hollywood n'avait pas encore totalement d'emprise sur son inspiration et sa créativité. Plus que jamais avec 'Regarding Henry', Zimmer affirmait une personnalité musicale sure et évidente, reconnaissable entre mille, utilisant l'électronique dans un but toujours très musical, avec une certaine émotion et une grande sincérité de ton. Dommage cependant que le score ait tendance à utiliser un peu trop systématiquement le thème principal qui finit par devenir très lassant au bout de la 3ème ou 4 ème reprise, d'autant que le compositeur ne le développe quasiment jamais. Malgré tout, 'Regarding Henry' fait partie de ces partitions fraîches et intimistes que l'on ne peut que recommander à tout ceux qui voudraient se replonger dans les anciennes BO du Zimmer du début des 'nineties'.


---Quentin Billard