1-Little Light of Love 4.50
2-Mondoshawan 4.01
3-Timecrash 1.49
4-Korben Dallas 1.43
5-Koolen 0.55
6-Akta 1.51
7-Leeloo 4.56
8-Five Millenia Later 3.13
9-Plavalaguna 1.47
10-Ruby Rap 1.55
11-Heat 2.54
12-Badaboom 1.12
13-Mangalores 1.06
14-Lucia di Lammermoor
(G.Donizetti) 3.10
15-The Diva Dance 1.32
16-Leeloominai 1.41
17-A Bomb in the Hotel 2.14
18-Mina Hinoo 0.54
19-No Cash no Trash 1.04
20-Radiowaves 2.32
21-Human Nature 2.03
22-Pictures of War 1.19
23-Lakta Ligunai 4.14
24-Protect Life 2.33
25-Little Light of Love
(End Titles version) 3.29
26-Aknot! Wot? (bonus track)

Musique  composée par:

Eric Serra

Editeur:

Virgin Records 7243 8 44290 2 7

"Aria of "Lucia
Di Lammermoor"

Performed by: Inva Mulla Tchako
and The London Symphony Orchestra
Words by: S.Cammarano,
Music by:
G.Donizetti,
Produced by:
Michel Glotz
"The Diva Dance"
Performed by: Inva Mulla Tchako.
Composed and Produced by:
Eric Serra
"Little Light Of Love"

Performed by: R.X.R.A.
Courtesy of: The X-Plorians,
From:
The forthcoming album by R.X.R.A.
Words and Music by:
Eric Serra,
Produced by: Rupert Hine
and Eric Serra.

Artwork and pictures (c) 1997 La Marguerite/Gaumont. All rights reserved.

Note: ***
LE CINQUIÈME ELEMENT
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Eric Serra
« Le Cinquième Elément » reste sans aucun doute l’un des films les plus ambitieux de Luc Besson, un blockbuster français produit par Gaumont, réunissant une pléiade de stars hollywoodiennes telles que Bruce Williams, Gary Oldman, Ian Holm, Milla Jovovich, Chris Tucker et quelques seconds rôles dont le regretté Brion James (grande gueule du cinéma d’action des années 80), John Neville, Luke Perry ou bien encore l’actrice/réalisatrice française Maïwenn, qui interprète la mystérieuse cantatrice extraterrestre dans le film. « Le Cinquième Elément » nous transporte ainsi dans le monde futuriste du XXIIIème siècle, un univers étrange et coloré qui se retrouve aujourd’hui menacé de destruction par un mal mystérieux. Il y a trois siècles, des extraterrestres arrivèrent sur Terre, en Egypte, pour y récupérer quatre pierres représentant les quatre éléments de la vie, afin de les préserver du Mal. 300 ans plus tard, les extraterrestres sont de retour mais leur vaisseau est malheureusement détruit. Des scientifiques réussissent alors à récupérer, dans les décombres de l’appareil, un mystérieux objet à partir duquel ils réussiront à reconstituer Leeloo (Milla Jovovich), une jeune femme énigmatique qui possède d’étonnantes facultés. Mais après avoir pris la fuite, Leeloo croise alors la route de Korben Dallas (Bruce Willis), un chauffeur de taxi qui va se retrouver entraîné malgré lui dans une grande aventure pour sauver le monde, à la rechercher des fameuses pierres de la vie et du mythique cinquième élément, l’unique espoir pour la survie de l’humanité.

Luc Besson réalise donc un grand film de science-fiction et d’aventure avec un casting impeccable, un univers riche en couleurs et de grandes scènes d’action. Le problème vient surtout ici de l’humour puéril et insupportable du film (pauvre Gary Oldman qui campe une caricature pitoyable d’Hitler dans le film !), des cabotinages agaçants de l’irritant sidekick de base joué par Chris Tucker, d’un certain mauvais goût dans le choix des décors et de la pauvreté d’un scénario qui, non content de recycler les formules hollywoodiennes du genre, se permet aussi de repiquer des éléments du film d’animation culte « Heavy Metal » (1981), et plus particulièrement pour la scène où Leeloo tombe dans le taxi volant de Korben vers le début du film, scène calquée sur une séquence similaire de « Heavy Metal ». Frôlant le navet friqué à plusieurs reprises, « Le Cinquième Elément » n’a de toute façon pas d’autres buts que celui de nous divertir, sauf qu’ici, malgré quelques scènes intéressantes et des effets spéciaux de qualité, on s’ennuie plus qu’autre chose - alors qu’il y avait pourtant matière à faire un film bien plus grandiose et prenant si Luc Besson n’était pas tombé dans l’humour débile et insupportable - qui prend les spectateurs pour des idiots. L’univers futuriste et coloré qu’a crée Luc Besson pour ce film est assez saisissant et mémorable (avec la complicité du directeur de la photographie Thierry Arbogast et des costumes du célèbre Jean-Paul Gaultier), mélangeant humains et races extraterrestres à la façon d’un « Star Wars » (la scène à bord du Fhloston Paradise et plus particulièrement lors de la scène anthologique du récital de la diva Plavalaguna), mais là aussi, constamment plombé par les facéties grotesques d’un Chris Tucker déchaîné ou les cabotinages d’un Gary Oldman bien pathétique. Seul Bruce Williams s’en tire plutôt bien dans le rôle qu’il connaît sur le bout des doigts, le sauveur du monde, accompagné d’une Milla Jovovich charmante et niaise dans ce film. En bref, voilà un blockbuster de science-fiction « frenchy » de très mauvais goût, qui prétendait rivaliser avec les grosses productions hollywoodiennes, mais qui n’eut finalement pas le succès escompté, car si le film a plutôt bien marché en Europe, il n’en fut pas de même aux Etats-Unis où il reçut un accueil très mitigé.

Une fois de plus, Eric Serra (alias RXRA) a fait équipe avec Luc Besson sur « Le Cinquième Elément » pour produire une partition originale, fraîche et entraînante. Le concept musical du « Cinquième Elément » repose ainsi sur une idée somme toute très intéressant : mélanger divers genres musicaux tout au long du film, de la chanson, du rap, de la techno, du reggae, de la musique arabe en passant par la musique symphonique ou l'opéra : ici, il y en a donc pour tous les goûts ! L’objectif était ainsi d’illustrer en musique la richesse visuelle et formelle de l’univers multicoloré crée par Luc Besson sur ce film, en utilisant une musique qui reflète cette richesse à travers un style protéiforme en constante évolution tout au long du film. Qu’en est-il finalement de la cohérence et de l’unicité de l’oeuvre créée par Eric Serra ? Et bien, le compositeur s’en tire vraiment bien et réussit à concrétiser son audacieux parti-pris dans le film, en ayant ainsi recours à un thème principal qui fédère l’ensemble de la partition du « Cinquième Elément ». Le thème principal représente ici l'idée du combat pour la vie incarné par le personnage de Milla Jovovich. On retrouve ce thème à travers différentes interprétations tout au long de la musique, au célesta, au saxophone (« Mina Hinoo »), à la trompette en sourdine ou aux cordes. Eric Serra lui attribue ainsi différentes couleurs instrumentales et apporte à cette mélodie une émotion et une certaine grâce plus typique de la sensibilité du compositeur - qui signe là un très beau thème. Le mot d'ordre du compositeur sur « Le Cinquième Elément » semble avoir été l’éclectisme ! Serra joue donc sur plusieurs tableaux à la fois et passe d’un genre musical à un autre avec une aisance rare (et assez unique dans une musique de film française de cette époque !). A noter que, quelques années plus tard, Christophe Héral, un jeune compositeur français, procédera de la même façon avec un éclectisme incroyable sur la musique du jeu vidéo « Beyond Good and Evil » sorti en 2003 et publié par Ubisoft, preuve qu’il existe un véritable savoir-faire musical en France mais qu’il est devenu hélas bien trop timide de nos jours ! Les méchants du film, les Mangalores, possèdent eux aussi un thème menaçant et inquiétant, rythmé avec quelques sonorités électroniques sombres et les cuivres de l'orchestre (« Mangalores »). La musique de Serra évoque dans un premier temps les décors égyptiens du début du film (« Mondoshawan »), puis se concentre ensuite sur une véritable invention fantaisiste de la musique du XXIIIème siècle, largement entretenue par tout un travail des sonorités électroniques très personnelles, basées sur des sons mécaniques et industriels triés sur le volet. A ce sujet, impossible de ne pas évoquer l’expérimental et superbe « Five Millenia Later », qui développe les sonorités électro/techno chères au compositeur avec une inventivité rare, mélangeant quelques touches orchestrales discrètes pour évoquer les sonorités musicales fictives du XXIIIème siècle. Serra y fait preuve ici d’un goût sûr pour l’expérimentation synthétique, qui renvoie clairement à ce qu’il avait déjà tenté dans sa musique pour le film « Atlantis » en 1991. Des morceaux comme l’étrange « Plavalaguna » sont de purs joyaux de musique électro expérimentale, qui devraient pleinement satisfaire les fans du compositeur.

Une pièce comme l’incontournable et fameux « The Diva Dance » évoque ainsi parfaitement la personnalité du compositeur français : ce dernier dit lui-même avoir des goûts très diversifiés en musique, pouvant tout aussi bien écouter du classique que de la techno. « The Diva Dance » mélange ainsi de l’opéra classique avec un rythme de dance, révélateur de la personnalité musicale éclectique de Serra. Le morceau accompagne d’ailleurs avec une certaine fantaisie exubérante la séquence de la bataille lors du récital de la diva Plavalaguna. Ce morceau est d’autant plus mémorable qu’il se paie quand même le luxe de succéder dans le film à l’air de l’opéra de Donizetti chanté dans le film par la diva. A la tradition opératique d’antan (« Lucia Di Lammermoor »), Serra prolonge la scène par sa propre musique (« The Diva Dance ») qui sert de passerelle entre le classique et la musique industrielle, et dans lequel Serra manipule habilement la voix, en alternant astucieusement les sons live de la soprano et quelques notes samplées par-ci par-là pour les notes suraigües qui seraient impossibles à reproduire par la voix humaine naturelle !

Eric Serra fait donc preuve d’une certaine audace et d’une grande liberté dans la musique du film de Luc Besson, servie par une série d’expérimentations synthétiques très réussies, et aussi tout à fait caractéristiques de la personnalité musicale de Serra. L'orchestre symphonique intervient quand à lui à plusieurs reprises de manière plus discrète, hormis quelques morceaux plus orchestraux comme l’élégiaque « Pictures of War », musique accompagnant la scène où Leeloo voit défiler devant ses yeux des scènes de guerres terrifiantes représentant la bêtise humaine, tandis que « Protect Life » évoque le final du film où Korben demande à Leeloo de protéger l'humanité en sauvant le monde grâce à sa contribution en tant que cinquième élément, pièce réexposant d’ailleurs le thème principal au célesta et aux cordes. N’oublions pas non plus de signaler le puissant « Lakta Ligunai » pour la scène finale du cinquième élément, reprenant à travers un tutti orchestral/choral assez épique un autre thème de la partition, plus ample et dramatique, associé aux pierres de vie mystiques. En bref, voilà une partition originale, fantaisiste et très riche, servie par un panel de styles musicaux très diversifiés, et indissociables de l’univers futuriste et excentrique du film : du symphonique, de l’opéra, du rap, de la dance, de la techno, de la musique arabo-égyptienne et même du reggae dans le sympathique « Heat ». Eric Serra cherche à réinventer son propre style musical à travers une bande son surprenante à plus d’une reprise, bien que parfois trop diversifiée pour pouvoir réellement convaincre - malgré tous les efforts louables du compositeur, l’ensemble manque encore un peu d’unité dans le film. Signalons pour finir la très belle chanson écrite par Serra pour le générique de fin du film, « Little Light of Love », une chanson pop plus exubérante dans laquelle le compositeur semble s’en être donné à coeur joie - sans aucun doute l’une des meilleures chansons qu’il ait écrites pour un film de Luc Besson !

Sans être le nouveau chef-d'oeuvre d’Eric Serra, « Le Cinquième Elément » est une partition tout à fait étonnante qui réserve son lot de surprises aux oreilles les plus curieuses. On pourra néanmoins reprocher la qualité du rapport image/musique qui fluctue beaucoup tout au long du film : ainsi donc, certains morceaux sont en parfaite adéquation avec les images (le magnifique « Protect Life »), mais d’autres semblent survoler les images pour donner un peu trop d'indépendance à la musique. On peut donc louer la quête d’originalité et de nouvelles sonorités d’Eric Serra, mais il est regrettable de constater que dans cette entreprise, on perd parfois un peu nos repères alors que le film en lui-même se veut au contraire très accessible. Trop d’éclectisme tue l’éclectisme ? Sans doute, même si chacun aura son avis sur le sujet, car à trop vouloir varier les ambiances, la musique s’essouffle et déçoit par les contrastes trop saisissants qui finissent par se créer entre la grande qualité de certains morceaux (« The Diva Dance », « Five Millenia Later », « Protect Life ») et la qualité plus douteuse d’autres pièces (« No Cash No Trash », « Ruby Rap », « Aknot Wot »). Malgré cela, on ressent néanmoins satisfait de l’écoute de la musique du « Cinquième Elément », qui reste une partition de qualité de référence dans la carrière d’Eric Serra, un score frais et inventif d’une grande originalité, à réserver en particulier aux fans du compositeur et à ceux qui apprécient les mélanges et autres métissages musicaux !


---Quentin Billard