1-Main Title 1.59
2-Strange Neighbors 1.49
3-Shrunk 5.37
4-A New World 3.31
5-Scorpion Attack 3.34
6-Test Run 2.08
7-Flying Szalinsky 1.59
8-Night Time 5.04
9-Watering The Grass 4.13
10-Ant Rodeo 3.45
11-The Machine Works 2.05
12-Lawn Mower 5.45
13-Eaten Alive 2.44
14-Big Russ Volunteers 1.24
15-Thanksgiving Dinner 5.27

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

Intrada Special Collection Vol. 94

Album produit par:
James Horner, Simon Rhodes

Artwork and pictures (c) 1989, 2009 Walt Disney Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
HONEY, I SHRUNK THE KIDS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
Grand succès de l'année 1989, la comédie familiale « Honey, I Shrunk The Kids » (Chérie, j'ai rétréci les gosses) de Joe Johnston raconte l’histoire d’un as des inventions en tout genre, qui met un jour au point une machine qui rétréci les objets, jusqu'au jour où la dite machine rétréci par accident ses deux enfants ainsi que ceux des voisins. Rick Moranis, acteur canadien spécialiste des rôles souvent humoristiques dans les comédies interprète ici Wayne Szalinski, l’inventeur fou qui va tout faire pour tenter de retrouver les quatre enfants qui ont été rapetissés par accident par sa propre machine. Commence alors une aventure extraordinaire pour les enfants qui vont devoir traverser un jardin devenu immense pour eux (comme une jungle) afin de retrouver Wayne et de faire en sorte qu'il arrange les choses. Produit par Walt Disney, cette petite comédie d'aventure sympathique repose sur des effets spéciaux assez impressionnants pour l'époque, et où les morceaux de bravoure ne manquent pas (la séquence de l'abeille, de la fourmi, du scorpion, de la tondeuse, de l'arrosoir, etc.). « Honey, I Shrunk The Kids » s’inscrit dans la tradition des films de Disney évoquant avec humour les dérives de la science, comme « The Absent-Minded Professor » et autres films de science-fiction des années 60. Visuellement, le film est un véritable tour de force technique, avec des effets spéciaux spectaculaires assurés par ILM (l’équipe de Georges Lucas). Fait étonnant pour une production Disney : le scénario est inspiré d’une histoire écrite par Brian Yuzna et Stuart Gordon, plus connus pour être deux spécialistes des films d’horreur trash, et qui abordent ici un genre beaucoup plus léger et familial. Evidemment, le succès du film a donné naissance à plusieurs suites de qualité plus souvent douteuse et une série TV en 1997. Un classique du divertissement familial des années 80 !

James Horner est un compositeur décidément très prisé à la fin des années 80. Sa participation à « Honey, I Shrunk The Kids » lui permet de renouer avec le registre de la comédie d'aventure familiale comme il l'avait déjà fait sur « Willow » (1988), « Cocoon » (1985) ou « Batteries not Included » (1986). Le film marque aussi le retour du compositeur sur une production Disney après le magnifique « The Journey of Natty Gann » en 1985. « Honey, I Shrunk The Kids » a permis à James Horner de nous offrir une nouvelle grande partition symphonique riche et colorée, teintée de touches jazzy fantaisistes et d’expérimentations sonores légères et exubérantes. Le score d’Horner est aussi connu pour ses nombreux emprunts musicaux, à commencer par la présence dès le « Main Title » d’un thème principal jazzy repris d’un segment du « Powerhouse B » de Raymond Scott écrit en 1937. Horner s’est réapproprié la mélodie et les rythmes de ce standard du jazz des années 30 et l’a incorporé tout au long de sa partition, associé dans le film aux expérimentations technologiques délirantes de Wayne Szalinski. On pourra toujours trouver cet emprunt facile et très appuyé, ce qui n’a pas empêché certains de rappeler qu’après tout, Horner n’était pas le seul à avoir repris cette célèbre mélodie dans sa musique et que bon nombre de compositeurs l’ont fait bien avant lui sur des musiques de cartoon des années 30/40. Dans « Strange Neighbors », Horner dévoile un second thème de saxophone repiqué note pour note du thème de la musique du film « Amarcord » de Nino Rota (1973), associé lui aussi à Szalinski. Rappelons d’ailleurs à ce sujet qu’il aurait justement été question à l’époque d’un problème juridique opposant alors le compositeur aux ayant-droits des oeuvres de Nino Rota (le compositeur étant décédé depuis 1979), un problème qui aurait d’ailleurs annihilé à l’époque toute tentative d’édition discographique de la partition de James Horner. Et comme si cela ne suffisait pas, on remarquera pour finir que le « Main Titles » du score s’inspire massivement du « Chimp Rumble » du score de « Project X » écrit par James Horner en 1987, sans oublier un morceau qui cite explicitement le thème du film « The Goonies » de Dave Grusin (1985). Encore une fois, force est de constater que le compositeur ne peut s’empêcher de rentrer dans son jeu fétiche des citations et des emprunts musicaux (souvent bien peu honnêtes !) qui ont fait particulièrement grincer des dents sur cette partition.

Pourtant, il serait regrettable de ne s’arrêter ici qu’aux nombreuses références musicales du compositeur, car, loin de n’être qu’une simple béquille musicale pour le compositeur, ces références lui permettent en réalité de soutenir un discours musical plus riche et inventif, car de l’inventivité, le score de « Honey, I Shrunk The Kids » en a certainement à revendre. D’emblée, on est frappé ici par la richesse et la fraîcheur des orchestrations (servies par l’interprétation sans faille du London Symphony Orchestra) : ainsi, le « Main Title » nous propose un mélange assez détonnant entre saxophones, percussions diverses (dont une crécelle, une caisse claire détimbrée et des cymbales), trombones, cors, xylophone, trompettes en sourdine, et glockenspiel, sans oublier les cordes et l’harmonica. Cette ouverture brillamment fantaisiste et joyeuse - qui pourrait presque évoquer une musique de cirque ou celle d’un parc d’attraction - annonce clairement le côté « cartoon » un peu déjanté de la musique d’Horner, entre les rythmes swing/big band des années 40 ou la musique de cirque à la Nino Rota, qui se prolonge dans « Strange Neighbors » où Horner développe le motif de 4 notes introduit dans le « Main Titles », avec une instrumentation similaire et un motif jazzy auquel s’ajoute le thème de saxophone inspiré de Nino Rota. Ici aussi, Horner se montre très inventif dans son instrumentation, retranscrivant à travers ses différentes couleurs orchestrales la folie des expériences scientifiques de Wayne Szalinski. Dans « Shrunk » - scène où la machine du scientifique rétrécit les enfants - Horner développe une atmosphère plus fantastique couplé au thème jazzy introductif du saxophone et les inévitables touches de mickey-mousing indissociable de l’univers Disney. Ici aussi, James Horner se montre très inventif dans ses orchestrations, n’hésitant d’ailleurs pas à noircir quelque peu sa musique pour créer une atmosphère plus mystérieuse et menaçante lorsque les enfants se retrouvent plongés dans un monde devenu immense et bourré de danger. C’est le moment où le compositeur en profite pour dévoiler un autre instrument caractéristique de la partition de « Honey, I Shrunk The Kids », l’orgue, qui interviendra essentiellement dans les passages plus mystérieux et sombres du score.

« A New World » illustre alors ce nouveau monde plein de mystère et de danger pour les enfants miniaturisés. Comme d’habitude, Horner en profite pour multiplier les citations et les clins d’oeil divers, avec plus particulièrement ici le retour de l’entêtant et très fameux motif du danger joué par 4 notes de trompettes, un motif qui se ballade dans les partitions d’Horner depuis quasiment ses débuts (« Star Trek II », « Brainstorm », « Willow », etc.). C’est aussi l’occasion pour le compositeur d’introduire de nouvelles sonorités associées au monde gigantesque du jardin. Pour se faire, Horner s’est alloué les services des musiciens d’Incantation, un groupe britannique fondé en 1982 par Tony Hinnigan et Mike Taylor spécialisé dans la musique latine/sud-américaine, et qui avait déjà brillamment collaboré au « Mission » d’Ennio Morricone en 1986 (à noter d’ailleurs que Tony Hinnigan et Mike Taylor sont devenus par la suite les interprètes fétiches d’Horner, qui participeront quasiment à toutes les musiques de film du compositeur). Horner utilise ici des effets sonores de la flûte de pan de Tony Hinnigan et des différentes flûtes ethniques d’Incantation afin de créer des sonorités plus étranges à l’écran, couplées à un travail plus discret de synthétiseur qui apportent un côté quasi surréaliste à ces scènes grandioses et spectaculaires. Encore une fois, Horner se montre particulièrement inventif ici et explore un univers sonore parfaitement adapté aux images du film de Joe Johnston. Le compositeur n’hésite pas à verser dans un style plus sombre et agressif avec « Scorpion Attack », morceau illustrant l’attaque du scorpion géant manifestement calqué sur bon nombre de passages d’action du score de « Aliens » (1986), mais qui apporte une excitation indispensable à l’écran et un côté résolument spectaculaire et impressionnant (seule omission assez regrettable sur le CD : le morceau pour l’attaque de l’abeille dans le film !). Certains morceaux versent à leur tour dans de l’action plus sombre et agressif comme c’est le cas pour la séquence de la tondeuse à gazon dans « Lawn Mower » qui reprend les motifs jazzy (ainsi que ce fameux motif de cors descendants typiques du compositeur !) du « Main Titles » dans un style plus frénétique et massif, avec l’utilisation plus spectaculaire de l’orgue - et quelques emprunts occasionnels aux dissonances à la « Aliens ».

A noter un morceau comme « Ant Rodeo » qui apporte un peu d’humour à la partition de « Honey, I Shrunk The Kids » en citant une phrase mélodique du « Rodeo » d’Aaron Copland (qui avait déjà inspiré le compositeur sur « An American Tail : Fievel Goest West »). Horner cite au passage dans la première section du morceau le thème de « The Goonies » de Dave Grusin et introduit ensuite une brève allusion à Aaron Copland lorsque les enfants réussissent à chevaucher « Anty », la fourmi géante qui les aidera tout au long de leur aventure. La petite touche western que le compositeur glisse dans « Ant Rodeo » apporte une véritable fraîcheur et une énergie appréciable au morceau malheureusement constamment parasité par les références au thème de « The Goonies » (qui, curieusement, évoquait déjà lui aussi les péripéties pittoresques d’un groupe d’enfants aventuriers !). Enfin, « Flying Szalinsky » introduit le dernier grand thème de la partition, le thème des enfants, plus chaleureux et mélodique confié ici aux cordes et aux vents, et qui évoque leur envie de retrouver leur famille. Horner développe ce très beau thème dans « Night Time » où la mélodie est alors confiée à la flûte ethnique d’Incantation pour une reprise de toute beauté d’un thème nostalgique et émouvant tout à fait typique du Horner. L’action reprend de plus belle dans « Eaten Alive » avec son orgue gothique et ses orchestrations puissantes et ses rythmes à la « Aliens ». Enfin, « Thanksgiving Dinner » conclut l’histoire sur le traditionnel happy-end en reprenant les principaux thèmes du score : le très beau thème des enfants bien sûr, mais aussi les différents thèmes/motifs jazzy associés aux expériences de Szalinski (incluant le thème de saxophone de Nino Rota).

« Honey, I Shrunk The Kids » fait sans aucun doute partie des dernières grandes partitions aventure du James Horner des années 80, un compositeur qui, dans les années 90, s’orientera davantage vers des films plus intimistes et dramatiques. Avec cette partition, le compositeur résume toute l’étendue de son savoir-faire et nous offre une partition extrêmement vivante, énergie et colorée pour le film de Joe Johnston, un cocktail réjouissant d’action, d’aventure, d’humour, de tendresse et de fantaisie, malheureusement trop souvent embourbée dans de nombreuses références musicales (Rota, Copland, Grusin, Scott, et même d’anciens scores d’Horner) qui donnent parfois l’impression d’entendre un cocktail assez étrange de différentes mélodies reprises à droite à gauche. Encore une fois, ceux qui ne sont pas réceptifs au sempiternel jeu des citations musicales de James Horner risquent fort d’être déçus par l’écoute de « Honey, I Shrunk The Kids ». Et pourtant, plus que jamais, le compositeur a réussi l’exploit de manipuler ces différentes citations pour aboutir à une oeuvre musicale rafraîchissante et extrêmement cohérente, que l’on pourra enfin apprécier sur la très belle édition CD d’Intrada, et ce alors que le score n’avait jamais été édité auparavant !


---Quentin Billard