1-Main Title 2.33
2-Siege Of The City 3.25
3-Courtship & Mandrake 4.08
4-Wagon Attack 2.37
5-Martin & Agnes
Love Theme 1.25
6-Castle Invasion 2.03
7-Night Fires 2.22
8-The Box 5.49
9-Water (The Undoing) 1.41
10-Arnolfini Assault 5.49
11-Denouement/End Titles 7.43

Bonus Track

12-The Box (edited version) 4.34
13-St.Martin Leads The Way 2.01
14-Driven From The City 1.14
15-Cask & St.Martin 2.36
16-Agnes's Wagon 1.14
17-Assault On Agnes 3.46
18-The Feast 1.49
19-The Locket 0.48
20-Out Of The Well 2.39
21-Denouement/End Titles
(alternate version) 7.20

Musique  composée par:

Basil Poledouris

Editeur:

Prometheus CD Club
PCR 513 édition limitée

Produit par:
Basil Poledouris
Directeur en charge de
la musique pour MGM:
Anita Camarata
Producteur exécutif pour Prometheus:
Luc Van De Ven
CD Produit par:
Ford A.Thaxton

Artwork and pictures (c) 1985 Metro-Goldwyn-Mayer, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
FLESH + BLOOD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Basil Poledouris
Pour le premier film hollywoodien de Paul Verhoeven (surnommé à juste titre le 'hollandais violent'), 'Flesh & Blood' (La chair et le sang), le réalisateur très controversé à foncé tête baissé dans son sujet sans aucune retenue et sans y aller à la légère : l'histoire se déroule au 16ème siècle quelque part en Europe. Tout commence lors de la prise d'une ville par le comte Arnolfini (Rutger Hauer) aidé de ses fidèles guerriers dirigés par Martin (Rutger Hauer). Après avoir remporté la victoire, Arnolfini trahis ses hommes et décide de les chasser de la ville après avoir récupéré tout le butin. Martin et ses compagnons décident de se venger et vont répliquer en enlevant Agnès (Jennifer Jason Leigh) la fiancée de Stephen (Tom Burlinson), le fils du comte. A son tour, Stephen et Arnolfini vont organiser leur vengeance et tenter de chasser Martin et sa bande de lascars du château dans lequel ils se sont réfugiés. Après quelques tentatives qui vont vite se solder en échec, Arnolfini décide d'employer les grands moyens : répandre la peste pour forcer ses adversaires à quitter le château en les attendant à la sortie pour les massacrer. Voilà pour cette histoire médiévale on ne peut plus basique où l'on retrouve tous les éléments qui firent le style des films hollandais de Paul Verhoeven : sexe et violence, mais avec ici le côté spectaculaire hollywoodien en plus, et la présence de l’acteur hollandais fétiche du cinéaste : Rutger Hauer. Pour ce qui est de l'intérêt du film en lui-même, c'est une toute autre histoire. Pour Verhoeven, 'Flesh & Blood' n'était qu'un prétexte pour prolonger le caractère trash/provocateur de ses films hollandais à travers le style plus spectaculaire et massif des grosses productions hollywoodiennes. Hélas, pour son premier essai hollywoodien, Verhoeven semble avoir quelque peu raté la marche sur 'Flesh & Blood'. Le film ne raconte finalement rien, ne s’attarde même pas sur l’univers du Moyen-âge et se contente simplement d’aligner les scènes de carnage, de violence sadique et de viols pendant près de deux heures, un cocktail nauséabond qui, bien que prenant cadre dans une période moyenâgeuse obscure (le 16ème siècle appartient en fait à la Renaissance alors que le moyen-âge s’est terminé au milieu du 15ème siècle !), n'en demeure pas moins abject et parfaitement gratuit.

Rares sont les grosses productions hollywoodiennes de l’époque à avoir autant mis en valeur la violence et les actes de cruauté gratuits dans un même film, une cruauté qui n’a aucune justification ici, si ce n'est par l’argument simpliste et réducteur qui consiste parfois à dire « le Moyen-âge était une période difficile et les hommes étaient tous des bêtes ». Certes, on pourra toujours apprécier l'ambiguïté dans les sentiments de certains personnages du film, comme la relation entre Martin et Agnès, renforcée par une complexité psychologique rare pour un film de ce genre. Pour le reste, 'Flesh & Blood' est un film hollywoodien qui se veut clairement anti-hollywoodien : antihéros, sexe, violence gratuite et complaisante, etc. Ici, pas de compromis possible ! On est en pleine catégorie du film « pur et dur ». Du coup, ‘Flesh & Blood’ paraît être une apologie morbide de la violence transposée dans les débuts de la Renaissance, et ce alors que les protagonistes du film vivent encore dans le moyen-âge tardif (il y a un vrai problème de cohérence par rapport au cadre historique du film !). Jennifer Jason Leigh est intéressante dans son rôle de jeune vierge qui connaîtra ses premières expériences sexuelles par le viol et d'autres brutalités du même genre, son personnage mélangeant étrangement tout au long du film innocence et perversion (difficile de ressentir une quelconque sympathie pour cette femme). Par ailleurs, le film tente d’aborder par moment l’idée d’une romance mais sans jamais y arriver : lorsque Martin annonce à Agnès qu'il l'aime, on a quand même beaucoup de mal à le croire, après l'avoir violée et brutalisée avec sa bande de copains. Paul Verhoeven ne s’encombre ni de morale ni d’éthique et prolonge ses délires trash et son sens inné de la provocation. Le pire est qu’il y arrive étonnamment, alors que la MPAA et les producteurs hollywoodiens faisaient pourtant régner la censure sur le cinéma américain depuis de nombreuses années. Il est d’ailleurs notoirement connu que le réalisateur a toujours entretenu une relation conflictuelle avec la censure américaine, mais il faut croire que les années 80 (nettement plus laxistes qu'aujourd'hui en terme de liberté d’expression dans les médias) ont permis à Paul Verhoeven de transposer la vision personnelle de ses films hollandais dans sa première grosse production américaine - quelque chose qu'il ne pourrait d’ailleurs plus refaire aujourd'hui. De tous les films traitant du moyen-âge, 'Flesh & Blood' a beau être le plus audacieux et le plus violent de tous, il n'en demeure pas moins écoeurant et gratuit, un film excessif de bout en bout qui, de toute évidence, n’aura pas laissé un grand souvenir dans le monde du cinéma. De l'humour, voilà ce qu'il manquait cruellement à 'Flesh & Blood' pour faire passer la pilule ! Heureusement, Paul Verhoeven corrigera le tir et apportera enfin un vrai humour noir salvateur dans son prochain film hollywoodien, 'Robocop'.

'Flesh & Blood' marque aussi la première collaboration entre Paul Verhoeven et Basil Poledouris, collaboration qui grandira au fil du temps avec les partitions hautement mémorables du violent 'Robocop' (1987) ou de l'épique 'Starship Troopers' (1997) pour lequel le compositeur fit intervenir un effectif orchestral gigantesque. Pour 'Flesh & Blood', le compositeur de l'inoubliable 'Conan The Barbarian' (1982) plongea dans l'univers musical du moyen-âge avec brio. Evidemment, la participation de Poledouris sur 'Conan' a probablement favorisé son arrivée sur 'Flesh & Blood'. Mais il serait vain d'essayer de rapprocher 'Conan The Barbarian' de 'Flesh & Blood' tant les deux partitions différent par le style employé. Effectivement, 'Conan' utilisait des choeurs épiques avec un orchestre déchaîné tandis que 'Flesh & Blood' s’avère être beaucoup plus posé tout en conservant le côté guerrier de 'Conan'. La grosse différence provient surtout ici de l’écriture harmonique de la partition, puisque la majorité du score de 'Flesh & Blood' se base essentiellement sur l’enchaînement caractéristique de quintes à vides en parallèle, un élément particulièrement flagrant dès l'ouverture du film qui débute au son du thème principal, mélodie modale forgée sur cette harmonie typiquement médiévale. Evidemment, c'est un stéréotype indissociable de la musique du moyen-âge, mais à l'instar du fameux score de Trevor Jones pour 'Excalibur' (1981) de John Boorman (qui montrait une connaissance et un respect authentique du compositeur pour la musique du moyen-âge), la musique de ‘Flesh & Blood’ crée une ambiance médiévale adéquate pour le film, même si le compositeur s'autorise quelques excursions vers un style symphonique parfois plus proche de 'Conan' afin de ne pas être esclave du style médiéval et de développer le caractère plus dramatique et spectaculaire du film.

Epaulé par l’incroyable performance du prestigieux London Symphony Orchestra (doté ici d'une section de cuivres particulièrement puissante, surtout dans le pupitre des cors), Basil Poledouris restitue toute la barbarie guerrière du film de Verhoeven avec un thème principal médiéval (associé à Martin), un autre thème plus héroïque et noble (pour le personnage de Stephen) et un 'Love Theme' qui rappelle par moment le lyrisme de 'Conan'. Pour beaucoup, le score médiéval et guerrier de 'Flesh & Blood' renvoie très clairement aux grandes partitions épiques du Golden Age hollywoodien et plus particulièrement aux partitions guerrières de Miklos Rosza qui adoptait souvent un style médiéval/épique similaire pour des grosses productions de ce genre ('Ben-Hur', ‘King of Kings’, ‘Quo Vadis’, etc.). L'ouverture développe donc le thème principal qui peut paraître quelque peu froid et décevant à la première écoute, mais qui crée ici l'atmosphère moyenâgeuse parfaite pour le film, sur un rythme ternaire entraînant avec les cordes et les cuivres (cors et trombones principalement) soutenu par des percussions typiques de ce genre de musique (principalement un tambourin et des timbales). On entre ensuite dans le vif du sujet avec le premier morceau d'action guerrier du score pour l'attaque de la ville au début du film, Poledouris continuant de développer le style épique et guerrier de sa musique avec un pupitre de cuivres toujours impressionnant et des cordes puissantes et des percussions accompagnant tout le reste de l'orchestre. 'Wagon Attack' est dans le même ordre d'idée, développant ici aussi le thème médiéval associé à la brute épaisse qu'est Martin, pourtant considéré au début du film comme le héros de l'histoire - on change d’ailleurs très vite d'avis à son sujet dans la suite de l'histoire puisque Martin devient réellement l'ennemi à abattre dans la dernière partie du film !). A ce sujet, Poledouris a parfaitement joué le jeu et a renforcé à son tour toute l'ambiguïté du film, ambiguïté parfaitement retranscrite dans le 'Martin & Agnes Love Theme' qui évoque cette relation troublante et étrange entre ces deux individus finalement aussi pervers l'un que l'autre. On finit d’ailleurs par se demander qui domine qui - cf. scène dans le bain !

La séquence plus romantique de l’idylle entre Stephen et Agnès (scène où cette dernière cueille le Mandrake et explique à son fiancé que s'ils mangent tous deux cette plante, ils seront amoureux l'un de l'autre pour la vie) permet de développer un passage nettement plus lyrique qui, comme signalé précédemment, nous renvoie au lyrisme des passages romantiques de 'Conan': cordes plus intimes et harmonies plus 19èmistes : toutes les formules musicales habituelles sont utilisées ici pour faire de ce passage une pièce plus tendre et plus 'humaine' dans la partition de ‘Flesh & Blood’. Et dans un registre similaire, on ne pourra qu’apprécier le magnifique 'Love Theme' typique du compositeur dans 'Martin & Agnes Love Theme', thème de cordes poignant dont la beauté apporte un certain décalage aux scènes entre Martin et Agnès (qui prétend aimer Martin alors que ce dernier l’a quand même violée et brutalisée !). Associer un ‘Love Theme’ aussi lyrique à deux personnages aussi ambigus, il fallait oser ! De toute évidence, le Love Theme d'Agnès et Martin est l'autre point majeur du score de Basil Poledouris, qui contribue lui aussi à apporter un peu d'émotion et de sentiment au sein d’un film bourrin au possible. Autre passage incontournable du score de ‘Flesh & Blood’, le superbe 'Castle Invasion' pour la scène de l'assaut de Stephen et Arnolfini contre le château où se sont réfugié Martin et ses sbires. Le morceau se développe progressivement autour d'un rythme ternaire (proche du 'Main Title') et de traits de cordes staccatos avant d'être très rapidement rejoint par les vents et le reste de l'orchestre pour illustrer le caractère épique et héroïque de cette attaque - même si le morceau peut paraître un peu trop sautillant et léger au début de la scène. A noter que Poledouris continue de développer les harmonies moyenâgeuses dans ces morceaux guerriers et épiques à l’ancienne. 'Castle Invasion' prend alors une tournure véritablement plus épique et héroïque (séquence où Stephen déploie sa machine pour passer au dessus des remparts du château), qui semblerait presque annoncer le style de ce que fera Basil Poledouris sur 'Starship Troopers' en 1997. 'Arnolfini Assault' illustre quand à lui l'assaut final d'Arnolfini et de ses hommes contre le château de Martin avec un excellent 'End Titles' en guise de conclusion du film.

A noter que le montage de la musique dans le film est parfois très douteux : les transitions d'une séquence contenant de la musique avec une autre (sans musique) se font bien souvent par l’emploi d’une coupure nette ('cut cut') et parfois même à seulement 30 secondes voire une minute avant la fin du morceau. Si cela n’apparaissait qu’une ou deux fois dans le film, cela pourrait encore passer, mais lorsqu'on entend cela quasi systématiquement tout au long du film, on est droit de se demander ce que le monteur de la musique a bien pu faire ! Ces coupures maladroites tendent à amputer la partition de la fin (pourtant indispensable) de certains de ses morceaux et apporte un côté étrangement maladroitement et bancal au montage de la musique dans le film. Agir ainsi est d'ailleurs totalement irrespectueux envers la partition écrite par le compositeur et donne vraiment l'impression que le réalisateur n'a fait aucun effort pour présenter un peu mieux la musique de Basil Poledouris dans le film. Malgré ce point négatif, la partition de ‘Flesh & Blood’ s’affirme très clairement comme le seul véritable point positif de cette immense bêtise cinématographique (après tout on pardonnera Verhoeven : ce n'est que son premier film à Hollywood !) et s’impose comme une partition incontournable dans la carrière du compositeur, et ce bien avant les oeuvres colossales qu'il écrira pour les deux autres films de Paul Verhoeven : 'Robocop' et 'Starship Troopers'. Moins épique et enlevant que 'Conan The Barbarian', 'Flesh & Blood' n'en demeure pas moins une partition guerrière et épique à l'ancienne, nous renvoyant au bon vieux temps des scores péplums/romains de Miklos Rosza ou Mario Nascimbene, autre référence incontournable pour situer le style du score de 'Flesh & Blood'. Une grande réussite !


---Quentin Billard