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Musique composée par: Philippe Sarde Editeur: Réalisateur: Jacques Rouffio Genre: Drame Avec: Michel Piccoli, Gérard Depardieu, Jane Birkin. (c) 1975 Belstar Productions/Films 66/Jet Films S.A./TTT Filmproduktion GmbH. Note: *** |
7 MORTS SUR ORDONNANCE
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Philippe Sarde
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Inspiré d'une sombre histoire vraie, le film de Jacques Rouffio (c'est son deuxième film après 'L'horizon' en 1967) raconte l'histoire de deux médecins français qui à 10 ans d'intervalle en arrivèrent à se suicider en tuant leur famille dans les mêmes conditions. Le drame de '7 morts sur ordonnance' part de l'histoire d'une importante riche famille de médecins, les Brézé, médecins réputés et influents qui voient leur nombre de patient diminuer de jour en jour alors que ces derniers préfèrent aller se faire soigner chez le docteur Pierre Losseray (Michel Piccoli), lui aussi très réputé dans son domaine. Le vieux Brézé (Charles Vanel) va tout faire pour mettre la pression à Losseray afin que ce dernier accepte de quitter son poste pour venir travailler chez lui comme médecin. Mais devant le refus de Losseray qui n'hésite pas à l'envoyer balader, le vieux Brézé va commencer à le harceler de coup de téléphone et de rencontre successives jusqu'à ce que Losseray craque psychologiquement et accepte de rejoindre son cabinet de médecins. Mais les choses vont de plus en plus mal alors que l'on apprend qu'il y'a plus de 10 ans, une histoire similaire est arrivée exactement dans la même ville et dans les mêmes conditions. Le docteur Jean-Pierre Berg (Gérard Depardieu) était un chirurgien très réputé dans son domaine et un peu flambeur sur les bords jusqu'au jour où le vieux Brézé prit aussi contact avec lui pour lui faire la même proposition. Mais Berg finit par se montrer violent et n'hésita pas à lever la main sur le vieil homme. Brézé continua alors à le harceler de la même façon qu'il harcèle 10 ans plus tard le docteur Losseray afin d'arriver à ses fins. En détruisant la réputation de Berg, Brézé touche à son but: le docteur décide un jour de tuer sa femme, ses enfants et de se suicider ensuite, mettant fin tragiquement à ses jours afin d'arrêter ce cauchemar. 10 ans plus tard, Losseray finira de la même façon en se tirant une balle dans la tête après avoir tué sa femme Muriel (Marina Vlady). '7 morts sur ordonnance' est un drame froid et dur, une sombre histoire inspiré d'un triste fait réel qui évoque une fois de plus la bêtise de l'orgueil et de l'ambition de certains hommes dénués de toute forme de morale. Depardieu et Piccoli sont parfaits dans leurs rôles respectifs, Rouffio s'arrangeant pour faire quelque flash-back avec l'histoire de Berg mise en parallèle avec celle de Losseray afin de nous montrer à quel point les faits coïncident étrangement (l'histoire se répète en somme). Inexorablement, on se rapproche de la triste fin, un destin inéluctable pour deux chirurgiens qui finiront par craquer sous la pression. Bref, '7 morts sur ordonnance' est un film intéressant bien qu'un peu long par moment, un drame terrible dont on connaît déjà l'issue à l'avance mais qui repose essentiellement sur un duo d'acteurs (Piccoli/Depardieu) assez passionnant.
Philippe Sarde a composé un score très court mais très intéressant pour '7 morts sur ordonnance', une musique assez froide, mystérieuse et dramatique qui aurait gagné en intérêt si elle avait été un tantinet plus présente tout au long du film. (Sarde collaborera par la suite avec Rouffio sur 'Violette & François' en 1977, 'Le Sucre' en 1978, 'Mon beau-frère a tué ma soeur' en 1985 et 'L'état de grâce' en 1986) C'est bien évidemment le générique de début du score qui reste le morceau le plus intéressant du score et quasiment le seul morceau présent tout au long du film avec un autre passage de percussions plutôt court et sans intérêt particulier. L'ouverture de '7 morts sur ordonnance' permet au compositeur d'adopter ici une écriture symphonique et un langage harmonique très proche de Claude Debussy. A l'écoute des premières notes de l'ouverture (scène où l'on voit Losseray faire son malaise), on se croirait revenu à l'époque où Debussy composa son poème symphonique 'La Mer'. Certaines harmonies font parfois penser à des oeuvres orchestrales du compositeur français telle que le célèbre 'Prélude à l'après-midi d'un faune' ou 'Sirènes' (extrait des fameuses '3 Nocturnes' pour orchestre de Debussy). Avec des cordes à la fois majestueuses et mystérieuses, Sarde pose un climat étrange dans cette introduction. Après un motif de 4 notes des cordes qui ouvre le film, Sarde nous fait entendre son thème de cordes sur un temps ternaire, avec une harpe, un célesta et des cors en reprenant le motif de 4 notes. Après une introduction orchestrale intéressante, un étrange choeur rentre dans l'orchestre pour déclamer une prière latine sur une seule note. (le morceau est joué dans le générique de début alors que l'on voit un plan fixe d'un électrocardiogramme évoquant l'univers médical du film - et dramatique - du film) L'utilisation étrange de ce choeur religieux à consonance quasi Grégorienne sur un univers orchestral très 'impressionnisme français' à la Debussy a quelque chose de surprenant à la première écoute, mais bien évidemment, l'effet n'est pas gratuit. La prière latine chanté par le choeur évoque clairement la mort, thème au centre du film (et dans le titre) puisque les deux personnages principaux finiront dans la mort en emportant avec eux leur famille. La prière du choeur est quelque part une allusion à la propre prière intérieure de ces deux hommes qui savent durant leur dernière heure qu'ils ne pourront plus faire marche arrière, comme s'ils espéraient trouver "le repos" auprès de Dieu. Ce morceau possède aussi un côté très envoûtant qui interviendra par moment au long du film, utilisé uniquement par fragments. Un autre morceau plutôt atonal intervient lorsque Berg fait son entrée très remarqué dans une pièce de l'hôpital en passant par la fenêtre. Sarde utilise ici des sonorités graves avec des percussions, une trompette en sourdine, quelques cuivres et vents. Atonal, le morceau évoque plutôt ici certains travaux d'Arnold Schoenberg (voire les premières pièces orchestrales d'Edgar Varèse) mais l'on regrettera le fait que ce morceau ne soit lui aussi pas vraiment développé dans le film. (surtout qu'il n'apporte rien de particulier dans la première scène où il apparaît) On le retrouvera dans la scène finale lors du dernier plan se concluant sur le visage du sinistre Brézé lors d'un match de tennis (là, la musique évoque le côté sombre et mauvais du personnage). Enfin, troisième morceau important du score, une petite pièce assez brève confiée à des percussions (tambours, caisse, etc...) avec un étrange ostinato rythmique qui ressemble bizarrement au son d'une machine à écrire (on pense à Satie et son fameux solo de machine à écrire dans son ballet 'Parade', mais aussi à Penderecki dans son 'Fluorescences' pour orchestre), morceau utilisé alors que les médecins de la famille Brézé se rendent à leur petite réunion familiale quotidienne pour parler de leur sombre résolution. Le problème de cette musique, et comme c'est trop souvent le cas dans certains films français de cette époque, la musique est sous-utilisé tout au long du film. Si le thème d'ouverture posait déjà une ambiance mystérieuse et majestueuse à la fois au début du film, (on pourrait penser ici à une évocation plus paisible de la 'mort', une sorte de 'repos' dans l'au-delà que visent finalement les deux héros à la fin de leur vie) il est fort regrettable que le réalisateur (ou le compositeur) n'ait choisi que d'utiliser quelques secondes uniquement de certains passages du score de Sarde. On aurait ainsi aimé entendre un travail de développement un peu plus approfondi autour de l'utilisation du choeur religieux ou du thème de 4 notes. La musique nous donne finalement une dure sensation d'inachevée, un travail non abouti, un gâchis alors que Sarde avait ici l'occasion de composer une partition plus approfondie pour le film. Mais une fois encore, la musique a été relégué au second plan (probablement pour conserver le ton 'réaliste' de l'histoire, bien que récemment, Angelo Badalamenti nous a pourtant prouvé que l'on pouvait concilier musique et 'ton réaliste' d'une histoire avec sa musique pour le film 'L'adversaire' de Nicole Garcia) et c'est vraiment dommage. A part cela, '7 morts sur ordonnance' reste une intéressante BO de la part d'un compositeur peu connu et encore jeune à l'époque. ---Quentin Billard |