Voilà enfin une comédie américaine fraîche, amusante et réussie, loin de la stupidité des films pour ados attardés que l'on voit aujourd'hui sur la plupart des dernières productions du genre. Le réalisateur d'origine suédoise Lasse Hallström signe là une comédie romantique pleine d'humour avec des dialogues incisifs et des situations bien cocasses. Décidément très demandée dans le registre des comédies romantiques depuis le succès de 'Pretty Woman' en 1990 (qui était pourtant loin d'être son meilleur film et son meilleur rôle), Julia Roberts campe le rôle de Grace Bichon, une jeune femme qui tient l'écurie de courses de son père Wyly (Robert Duvall) et qui découvre un jour que son mari Eddie (Dennis Quaid) la trompe avec une autre femme. Après une séquence de dispute au beau milieu d'une rue alors que Grace est encore en robe de chambre accompagnée de sa file Caroline, Grace décide de partir de chez elle et d'aller habiter chez sa soeur Emma (Kyra Sedgwick). L'attitude inattendue de Grace va alors provoquer une série de vagues de problèmes autour de ses amis et de sa famille. Lors d'une scène hilarante du film, elle annonce devant toutes ses amies les infidélités de leurs maris qui les trompent entre elles, ou elle raconte ainsi à sa mère que son père a déjà eu une brève liaison avec une autre femme provoquant alors la colère de sa mère Georgia (Gena Rowlands) qui va chasser son mari de chez elle (scène hilarante où Wyly fait la course pour tenter de rentrer par la porte), etc. Et pendant sa 'crise', Grace doit tout de même continuer à s'occuper de l'écurie et de sa fille qui rêve de monter un cheval pour lequel elle pense qu'elle n'est pas encore prête. Eloigné de sa fille et de sa femme, Eddie va très vite comprendre qu'il a fait une énorme bêtise et va tenter de se racheter auprès de Grace, mais ce ne sera pas si simple (cf. autre scène hilarante où Grace empoisonne volontairement son mari pendant que celui ci est en train d'essayer de se faire pardonner). Comme la tagline du film l'indique, 'Something To Talk About' (Amour et Mensonges) est un film sur les maris, les femmes, les parents, les enfants et les autres catastrophes naturelles (ces derniers mots résument bien tout l'humour du film à la limite entre la pièce de théâtre farfelue et le vaudeville). Hallström part d'un postulat dramatique (un mari qui trompe sa femme) et arrive à nous faire rire en multipliant les scènes cocasses et les situations hilarantes (cf. scène où Emma parle gentiment à Eddie et lui balance sans le prévenir un coup de genoux dans les 'parties') proche du vaudeville. A noter pour finir que le film devait s'intituler à l'origine 'Grace Under Pressure' mais qu'à cause d'une série portant un nom plus ou moins similaire ('Grace Under Fire' - 1993), la production a du remplacer le titre par celui d'une chanson de Bonne Raitt (entendue dans le film), 'Something To Talk About'. En clair, une petite réussite!

Hans Zimmer a eu une période films d'action ('The Peacemaker', 'Black Rain', 'Crimson Tide', 'The Rock', etc.) mais c'est probablement dans le registre des comédies que l'on pouvait entendre des choses plus surprenantes de la part du compositeur. 'Something to Talk About' n'est pas le score orchestral que l'on entend habituellement pour ce style de film. Zimmer fait appel à certains de ses amis musiciens pour former un petit groupe d'instruments dans un style très country/blues/rock qui donne une certaine pêche au film. Aidé de son ami Graham Preskett (qui collabora avec lui lors de ses débuts en Angleterre dans le registre pop/rock et qui fut l'orchestrateur de Hans Zimmer sur le film 'Twister' de 1990, sans oublier le fait que Preskett écrivit aussi la musique de 'Rosencrantz & Guildenstern Are Dead' aux côtés de Brian Gulland et du mentor de Zimmer, Stanley Myers), Zimmer crée un score plein d'énergie et de bonne humeur, un petit score écrit pour quelques guitares avec guitares électriques, une dobro (guitare inventé en 1928 par un certain John Dopyera, l'instrument ayant la particularité de posséder un résonateur métallique), une basse, un banjo, un piano très 'blues', un harmonica, un petit orgue hammond B-3 et une batterie pour la rythmique des morceaux. Score sympathique et très cool, 'Something To Talk About' n'est pas LA grande partition de comédie de Hans Zimmer mais adopte un style cool et détendu étonnamment très proche de ce que Danny Elfman a fait sur 'Midnight Run', la BO qui se rapproche le plus de ce sympathique score de Hans Zimmer. Renforçant le côté cool de certains de ses passages à l'aide de cordes du synthé, Zimmer crée ce climat de bonne humeur typique de la musique de ce film qui s'ouvre au son d'un morceau pour guitares/banjo/basse/piano/batterie avec le thème principal qui sonne plus harmonique que réellement mélodique mais qui annonce d'entrée la couleur. Zimmer a opté pour une approche très 'vague' par rapport aux images, c'est-à-dire que la musique ne colle pas à la seconde près par rapport aux images mais sert plus d'ambiance d'atmosphère musicale. Le compositeur et son fidèle collaborateur ont décidés de créer ce climat de bonne humeur et de jovialité tout au long du film tout en soulignant avec une énergie très communicative le côté survitaminé de cette histoire pleine d'humour où l'héroïne court à droite à gauche pour se démêler de ses problèmes entre son travail à l'écurie de son père, sa famille et son mari.

Un deuxième thème un petit peu plus sombre apparaîtra plus loin soutenu par un banjo et le reste des instruments, un petit thème typique de l'esprit mélodique de Zimmer avec des harmonies mineures un peu plus sombres (et des enchaînements d'accord assez surprenants d'ailleurs), un thème un peu plus bizarre qui reste très clairement associé dans le film aux séquences de 'dispute' (on pourra donc l'appeler le 'thème des disputes'), thème qui apporte cependant une certaine touche d'humour dans ces séquences nous rappelant une fois encore que nous sommes dans une comédie et que toute cette histoire n'a rien de franchement très sérieux et trouvera de toute évidence une conclusion plus paisible et heureuse. Zimmer avait déjà un peu abordé le style 'country' dans certaines de ses précédentes partitions comme c'était par exemple le cas dans 'Thelma & Louise' (1991). Ici, comme nous l'avons déjà mentionné plus haut, Zimmer et Preskett se rapprochent de très près du 'Midnight Run' de Danny Elfman dans un score qui adopte la même formation instrumentale (les cuivres en moins) dans un registre musical tout à fait similaire. Par moment plus intime et nostalgique, la musique de Zimmer (qui, même si elle semble 'flotter' pendant tout le film par dessus les scènes n'oublie quand même pas d'illustrer les différentes ambiances du film) s'adapte aux différents tons du film, d'abord cool et détendue au début du film, puis un peu plus dans le style humour noir avec le thème des disputes sans oublier ces passages plus nostalgiques pour les moments plus intimes (lorsque Grace est avec sa fille où lorsqu'Eddie tente de se réconcilier avec en tentant de se faire pardonner) où Zimmer utilise alors des guitares plus douces soutenues par une basse et des instruments plus calmes. A noter aussi deux passages particulièrement majestueux, cool voire héroïque pour les séquences de course de chevaux à la fin du film où Zimmer utilise aussi un violon très 'country' le banjo, les guitares et le reste des instruments pour donner une certaine énergie à ces scènes finales.

Si vous souhaitez entendre un Zimmer un peu différent et un peu plus surprenant, 'Something To Talk About' devrait vous ravir, d'autant que la musique file la pêche et garde tout au long du film ce côté 'cool' et plein de bonne humeur, une musique qui saura probablement vous faire sourire lors des jours de grisailles. Visiblement, Zimmer et sa bande se sont bien amusés sur cette partition aux accents 'country/rock' qui file une pêche incroyable dans le film. En conclusion, si 'Something to Talk About' n'est certes pas l'un des chefs d'oeuvre du compositeur mais constitue néanmoins un exercice de style de très bonne facture, typique de l'énergie que semble déployer Zimmer pour chacune des comédies qu'il met en musique, un registre dans lequel le musicien semble avoir trouvé sa voie depuis fort longtemps. Une BO très sympathique!


---Quentin Billard