1-Overture: Robocop2 6.06
2-Logo*/MagnaVolt* 1.05
3-City Mayhem 3.39
4-Robo and Nuke 2.26
5-Cain and Angie Escape 1.16*
6-Happier Days 1.31
7-Robo Memories 2.11
8-Robo Cruiser 4.44
9-Robo Gets Dumped 0.55*
10-Duffy Nukes*/Robo in Pain*/
Duffy Gets Diced* 3.32
11-Robo Gets Faxxed* 2.02
12-Kids Rob Electronics*/
RoboSparks* 2.33
13-Nuke Lab*/
Nuke Lab Blows* 1.17
14-Robo and Cain Chase 2.45
15-Creating the Monster 2.52
16-Monster at Meeting* 0.44
17-Monster Cleans House*/
Monster Finds Angie* 1.52
18-Goodbye Angie* 3.29
19-Robo Finds Hob* 3.21
20-Robo Fanfare 0.36
21-Elevated and Depressed* 3.28
22-On the Street Again*/
Robo Gets Nuke* 0.59
23-Robo I vs. Robo II 3.45
24-Robo Resolve and End Credits 6.52**

Additional Music:

25-Creating the Monster
(Film Version) 2.54**
26-Robo Hangs Out
(Film Construct) 0.38*
27-Monster Theme Stings 0.50*
28-Fanfare Suite 1.02*
29-Sunblock 5000 0.49*

*Previously unreleased
**Contains previously unreleased material.

Musique  composée par:

Leonard Rosenman

Editeur:

Varèse Sarabande VCL 0219 1191

Produit par:
Leonard Rosenman
Edition Deluxe produite par:
Robert Townson, Neil S. Bulk
Consultant projet:
Lukas Kendall
Orchestrations:
Ralph Ferraro
Scoring et album mix:
Dan Wallin
Superviseur musique:
John Caper, Jr
Supervision technique:
Bill Talbott
Orchestre:
The Hollywood Studio Symphony

Edition limitée à 1500 exemplaires.

Artwork and pictures (c) 1990 Orion Pictures Corporation. All rights reserved.

Note: ****
ROBOCOP 2
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Leonard Rosenman
Avec le succès surprise du « RoboCop » de Paul Verhoeven en 1987, le studio Orion Pictures envisagea très rapidement une suite pour capitaliser sur le succès de leur hit. Prévu à l’origine pour Verhoeven, « Robocop 2 » passa entre plusieurs mains jusqu’à ce que le producteur Jon Davison décide d’engager le réalisateur Tim Hunter et l’artiste Frank Miller. Hélas, Hunter quitta rapidement le projet, mais heureusement Davison contacta ensuite Irvin Kershner, le réalisateur vétéran de « The Empire Strikes Back », « Eyes of Laura Mars » et « Never Say Never Again » qui devint finalement le réalisateur de « Robocop 2 ». Le film se déroule peu de temps après les événements du premier film à Detroit dans un futur proche. La ville est au bord de la faillite provoquée volontairement par l’Omni Cartel des Produits (OCP), qui dirige Detroit alors que la municipalité est placée sous tutelle en attendant de pouvoir rembourser toutes ses dettes. Le vieil homme (Daniel O’Herlihy), l’infâme dirigeant du conglomérat, entend ainsi reprendre le contrôle total de la ville afin de bâtir son projet de cité moderne et utopique nommée Delta City. Pendant que les policiers manifestent en ville pour leurs plans de pension mis à mal par la privatisation de la police de Detroit, la criminalité ne cesse d’augmenter. Un nouveau fléau s’abat sur la ville : le Nuke, une drogue addictive répandue par Cain (Tom Noonan), le leader d’une organisation criminelle et véritable secte considérée comme des adorateurs du Nuke. Au cours d’une descente dans un laboratoire de Nuke avec sa collègue Anne Lewis (Nancy Allen), RoboCop (Peter Weller) rencontre Hob (Gabriel Damon), un jeune ado de 13 ans qui travaille avec Cain. Hob tire sur un Robocop troublé par la vision de l’enfant qui réussit alors à s’échapper avec Cain et Angie (Galyn Görg).

Le souvenir de l’enfant lui tirant dessus fait remonter d’anciens souvenirs liés au passé d’Alex Murphy/Robocop, qui se souvient ainsi de son fils et de sa femme (Angie Bolling) et commence alors à l’observer régulièrement devant chez elle. Sa femme porte alors plainte contre l’OCP pour harcèlement et RoboCop se voit sévèrement réprimandé pour son comportement, comprenant qu’il ne pourra plus jamais revivre sa vie d’avant. Peu de temps après, l’OCP commence à développer son nouveau « RoboCop 2 » afin de remplacer l’ED-209 devenu obsolète et pour contrer la grève des policiers. Mais aucun des cyborgs prototypes n’a fonctionné jusqu’à présent et le projet semble voué à disparaître jusqu’à ce que la psychologue Dr. Juliette Fax (Belinda Bauer) suggère l’idée d’utiliser le cerveau d’un criminel en quête de pouvoir et d’immortalité. Malgré l’objection du second en chef Donald Johnson (Felton Perry), le vieil homme donne finalement son accord pour le projet. De son côté, Cain paie les services de Duffy (Stephen Lee), un officier de police corrompu pour aider l’organisation de Cain à lutter contre RoboCop et l’OCP. Mais Murphy a découvert un lieu fréquenté par des hommes de main de Cain, met la main sur Duffy et le force à lui révéler la position exacte du Q.G. de Cain. Au cours de la bataille, Cain sera sévèrement blessé puis tué par Faxx à l’hôpital. Son cerveau est ensuite extrait de son cadavre et placé dans la carcasse robotisé de Robocop 2. Dès son activation, le monstrueux robot est envoyé par l’OCP pour faire le ménage et supprimer tous les témoins gênants. Robocop, remis sur pied après avoir été reprogrammé par l’OCP, jure de tout faire pour stopper Robocop 2/Cain une bonne fois pour toute.

UNE SUITE FRUSTRANTE ET INÉGALE

L’idée majeure de « RoboCop 2 » repose essentiellement sur la participation du dessinateur Frank Miller au scénario, qui imagina une société futuriste violente et corrompue dans laquelle l’OCP affamait la ville de Detroit et n’hésitait pas à envoyer des agents de réhabilitation pour déloger les gens de leurs habitations afin de permettre au conglomérat de bâtir la nouvelle ville de Delta City. Hélas, une bonne partie du script de Miller fut rejeté et remanié en partie par Walon Green, à tel point qu’il ne restait plus grand-chose du scénario original dans le film fini – plusieurs idées prévues à l’origine par Miller seront d’ailleurs réutilisées dans « RoboCop 3 » en 1993 – Miller évoquera par la suite son mécontentement et sa frustration par rapport à son script défiguré par la production et sortira même sa propre version du scénario à travers le comic book « Frank Miller’s Robocop » (qui est, avouons-le, visuellement surchargé et indigeste...). Le script sera remanié plusieurs fois – par exemple dans la version d’origine, Cain s’appelait Kong – et le montage du film évoluera également en conséquence, certaines idées intéressantes ayant malheureusement été coupées au montage à la demande de la production, soit pour atténuer la violence soit pour raccourcir la durée du film et aller à l’essentiel.

Malheureusement, quelque soit les choix qui ont été fait sur « RoboCop 2 », rien ne semble fonctionner comme prévu, du moins pas comme sur le premier « RoboCop ». Irvin Kershner possède une longue expérience du cinéma et sa réalisation ne souffre d’aucun défaut majeur : le cinéaste sait créer la tension, susciter le drame, évoquer la violence sous toutes ses formes et filme des scènes d’action avec une rare lisibilité. Le souci vient essentiellement d’un scénario foutraque et d’idées peu exploitées ou abandonnées en cours de route, sans parler de certaines incohérences probablement liées aux nombreuses coupes effectuées lors du montage final. Concernant Robocop, le premier film posait la question « qui suis-je ? » sur fond de métaphore christique typiquement américaine, le second film interroge plutôt « qu’est-ce que je suis ? ». Sauf que cet aspect de la question est complètement éludé dans la seconde moitié du film et n’a plus aucun intérêt dans le récit. Autre détail qui sent le pâté moisi ici : le choix d’un gamin de 13 ans comme principal bras-droit de l’organisation criminelle de Cain. C’est probablement l’une des pires idées que l’on ait vu dans un film hollywoodien des années 80/90. Non seulement ça ne fonctionne pas une seule seconde mais on sent clairement que cela a été fait pour choquer gratuitement et poser des questions d’ordre morale et éthique dont on se serait bien passé et qui n’apportent rien à l’histoire - hormis de permettre à Murphy de se souvenir de sa famille, mais comme cet aspect du scénario est complètement abandonné dans la seconde partie du film, du coup : quel intérêt ? -

Il y a également un problème de ton dans le scénario : le film tente maladroitement de renouer avec l’humour noir satirique du premier opus de Paul Verhoeven, sans jamais vraiment y arriver. Autant la satire paraissait naturelle et sincère dans le premier film qui prenait des allures de comic book grinçant sur fond de répliques mémorables (le running gag « j’en prendrai pour un dollar ! »), autant l’humour de « RoboCop 2 » semble surfait, exagéré et jamais sincère. Kershner est un excellent réalisateur mais il ne possède pas l’ironie de Verhoeven et cela se ressent dans son film. Même la satire des médias, de la politique et des travers de la société semblent factices ici (les nouvelles directives ultra puritaines et ridicules programmées dans la mémoire informatique de Robocop, les leçons de morale aux enfants qui braquent un magasin d’informatique, les tirs sur l’homme en train de fumer dans la rue, etc.), peut être parce que le film veut trop en faire et ressembler à tout prix au premier « RoboCop » plutôt que d’essayer de se chercher une nouvelle identité ? On sent clairement que le script du film est le résultat de nombreuses personnes et c’est peut être pour cela que rien ne fonctionne correctement, y compris au niveau du montage. Exemple typique : il y avait à l’origine une scène où Lewis affrontait et éliminait Catzo durant la fusillade dans l’usine (le bad guy au look Elvis Presley), personnage qui dans le film disparaît purement et simplement pendant la fusillade ! L’acteur qui jouait le rôle de Catzo, Michael Medeiros, se souvient par ailleurs que la scène a pourtant été entièrement tournée et montée et qu’elle fonctionnait correctement. Quelle ne fut donc pas sa surprise lorsqu’il découvrit finalement que toute la séquence avait été coupée dans la version finale, sans raison apparente (hormis peut être d’accélérer le rythme pour conserver une action plus frénétique). Idem pour toutes les scènes initiales qui développaient les personnages et leur psychologie : la scène où Robocop se rendait sur la tombe de Murphy, celle où il regardait une femme nue sous la douche, celle où Cain et Angie se rendaient ensemble dans les bureaux de l’OCP pour observer les spécimens de Robocop 2 et discuter avec Faxx, autant de scènes qui manquent au film et auraient pu permettre de rendre l’intrigue plus consistante et d’éclairer le spectateur sur quelques zones d’ombre.

UN RÉSULTAT EN DEMI TEINTES

C’est un peu cela le problème de « RoboCop 2 » : Irvin Kershner avance des idées mais ne développe rien, trop accaparé par le souci de conserver une action et un rythme soutenu et de ne surtout pas dépasser les deux heures (ça ne serait sûrement plus un problème aujourd’hui…). Se pose ensuite le problème de la violence. Comme pour le premier film, même constat : ici, cela ne fonctionne pas comme chez Verhoeven - qui est un expert en la matière, d’ailleurs faut se souvenir que la même année sortait au cinéma « Total Recall », un sommet de violence pure – Le cinéaste hollandais savait désarmer l’impact de la violence en jouant sur l’humour noir, l’exagération et le côté comic book du film, une façon pour lui de mettre de la distance avec la violence montrée à l’écran comme pour rappeler « rassurez-vous, tout ceci est du cinéma, il ne faut pas trop le prendre au sérieux ». Dans « RoboCop 2 », il y a une volonté manifeste de faire mal en montrant la violence brute et radicale à l’écran, pire encore, Kershner veut choquer et créer une malaise. Certaines scènes parlent d’elles-mêmes, qu’il s’agisse de violence physique ou psychologique : Robocop qui se fait entièrement démembrer bout par bout par Hob et ses complices, la torture de Duffy qui se fait éventrer vivant (probablement la séquence la plus affreuse de tout le film, raccourcie au montage dans la version film mais un brin plus longue dans le « workprint »), la scène ultra gore où les chirurgiens retirent le cerveau de Cain, Kershner insistant assez lourdement sur les détails sanglants quitte à en rajouter une couche (cf. le chirurgien qui lâche un « je ne sais pas vous, mais moi j’ai faim ! »), la mort du jeune Hob, très mal perçue par le public en 1990 ou la mort d’Angie qui, à en croire l’actrice Galyn Görg – qui était une danseuse accomplie – aurait été chorégraphiée par la comédienne elle-même qui était ainsi capable de tordre sa nuque de manière non naturelle mais sans se blesser (anecdote qui tue : il paraît que sa famille et ses amis ont été horrifiés en voyant cette scène !).

Ici, Kershner veut créer un malaise et cela en devient désagréable et peu sincère dans la démarche, surtout lorsque la violence devient également plus psychologique ou morale (des petits enfants qui tabassent un vieux marchand et volent du matériel informatique…). Le film semble ne pas vouloir se fixer de limites, ce qui aurait pu être tout à son honneur (et qui est aussi un peu typique des films américains à la fin des années 80, malgré l’omniprésence de la censure imposée continuellement par la MPAA) si cela avait été mieux fait et mieux construit. Au lieu de cela, « RoboCop 2 » s’avère parfois répugnant, pas drôle et à la limite du mauvais goût. Reste malgré cela quelques scènes très réussies, comme l’affrontement dans la boîte de nuit, la poursuite en moto entre Robocop et Cain, Robocop 2 qui « nettoie » le hangar vers la fin ou la longue confrontation finale entre les deux cyborgs ennemis dans l’immeuble de l’OCP incluant un « body count » assez impressionnant (environ 89 personnes sont tuées tout au long du film !) et l’idée prophétique que la ville de Detroit serait aux bords de la faillite à cause d’une accumulation de dettes trop importantes, ce qui s’est par ailleurs réellement produit en 2013 (quand la réalité rattrape la fiction…). Au final, on ressort toujours sonné par la vision de « RoboCop 2 » : malgré toutes ses promesses, le film est frustrant, inégal, mal monté et offre un amer goût d’inachevé.

Il y a fort à parier qu’avec un script mieux travaillé et un montage plus adapté (ne sacrifiant pas tout à l’action et la violence), le film d’Irvin Kershner aurait certainement gagné en intérêt. Même Paul Verhoeven avouera que le film était une déception et que lui et ses scénaristes avaient eu de bien meilleures idées à l’origine...Résultat : Frank Miller boudera le film, échaudé par sa mauvaise expérience sur « RoboCop 2 » et se sentant trahi par le studio, le producteur Jon Davison avouera que l’échec du film a été un coup dur en prétendant que tout le monde a détesté le film à sa sortie en 90, Irvin Kershner ne réalisera plus de long-métrage pour le cinéma après « RoboCop 2 » - à sa décharge, il aurait apparemment subit des pressions incessantes de la part du studio tout au long de la production du film - Par ailleurs, on sait que le tournage a été cauchemardesque et que Kershner se serait régulièrement disputé avec Nancy Allen, l’actrice allant même jusqu’à dire dans une interview (Mad Movies, N°257) qu’Irvin Kershner était un homme « épouvantable » qui se montrait « abominable » avec elle sur le tournage. Détail intéressant : la comédienne révélera par ailleurs que c’est Kershner lui-même qui a tout gâché dans le scénario et qu’il avait visiblement un problème avec l’actrice qu’il n’aimait pas. Pour en rajouter une couche, l’acteur Michael Medeiros aurait été aperçu à plusieurs reprises sur le tournage en train de déchirer des pages entières du script qu’il détestait apparemment. Quand à Peter Weller, il ne rempilera pas sur « Robocop 3 », occupé à tourner « The Naked Lunch » de David Cronenberg et probablement déçu de sa piètre expérience sur « RoboCop 2 ».

UNE PARTITION D’ACTION ROBUSTE ET COMPLEXE

Après un premier score mémorable signé Basil Poledouris pour « RoboCop » en 1987, tout le monde s’attendait à ce que le compositeur rempile sur le deuxième film. Mais Irvin Kershner demanda finalement au studio d’engager Leonard Rosenman pour écrire la musique de son film, un ami de longue date qu’il connaissait depuis très longtemps et dont il appréciait grandement le travail. A la première écoute, le public et les fans ont été désagréablement surpris par ce changement radical d’approche musicale sur « RoboCop 2 ». Clairement : Rosenman n’est pas Poledouris et sa musique est beaucoup moins accessible, plus cérébrale, davantage avant-gardiste et plus brutale également. Paradoxalement, le film étant ce qu’il est, il y a fort à parier que l’approche plus mélodique de Poledouris n’aurait pas du tout collé à la réalisation d’Irvin Kershner. Le score de « RoboCop 2 » fait donc table rase du travail de Poledouris et Rosenman propose sa vision intégrale du sujet, à travers une nouvelle partition symphonique incluant une basse Fender, un marimba basse, des percussions électroniques, des bongos, quelques synthétiseurs, une clarinette contre-alto, un célesta et, idée clé du score, un groupe de 4 sopranos qui sont placés au milieu du pupitre des bois dans l’orchestre et qui chantent des notes sans paroles (et sans vibrato).

ANALYSE DE LA MUSIQUE

En 1990, Rosenman, âgé de 66 ans, est devenu un vétéran de la musique de film hollywoodienne avec 35 ans de carrière exemplaire derrière lui. Sa musique pour « Robocop 2 » est l’apothéose de sa carrière dans le domaine des musiques de science-fiction, un puissant résumé musical de l’oeuvre du compositeur : on y retrouve donc des inspirations manifestes de « The Cobweb », « Fantastic Voyage », « Countdown », « Beneath the Planet of the Apes », « A Man Called Horse », « Battle for the Planet of the Apes », « Race with the Devil », « The Car », « The Lord of the Rings », « Prophecy » ou « Star Trek IV ». On retrouve ici l’esthétique avant-gardiste habituelle et sérielle de Rosenman héritée de son éducation musicale auprès d’Arnold Schoenberg ou Luigi Dallapiccola, cohabitant avec une approche mélodique plus accessible pour la partie thématique du score. La partition de Rosenman retranscrit pleinement l’action à l’écran, évoque la psychologie tourmentée de Robocop et apporte par la même occasion un second degré indéniable au film de Kershner. Il y a un humour noir évident dans la composition du maestro qui apporte un style particulier aux images, une dérision qui n’empêche jamais le compositeur de souligner également la violence et la noirceur du film, sans jamais en faire trop. Dans une note de l’album « Deluxe » publié par Varèse Sarabande, Rosenman explique que le concept de sa musique pour « RoboCop 2 » était aussi de trouver comment évoquer les sentiments humains d’une machine et de souligner la dualité existante entre l’homme et le robot.

Dès l’ouverture, « Logo/MagnaVolt » débute au son des traditionnelles montées de tons pyramidales typiques du compositeur – l’une de ses principales marques de fabrique – pour l’apparition du logo d’Orion à l’écran. Un rythme survolté surgit alors brusquement, scandé par les bongos avec un riff de basse Fender pour le spot publicitaire de MagnaVolt au début du film (un rappel aux fausses publicités du premier film de Verhoeven). On apprécie ici l’importance et la richesse des orchestrations, même si ce n’est qu’une brève introduction. Les choses deviennent plus évidentes dans « City Mayhem », illustrant le montage dans les rues de Detroit au début du film. Rosenman oscille ici entre une certaine noirceur et un second degré plus malin. Les harmonies sont ici plus complexes, le compositeur n’hésitant pas à user de quelques éléments de polytonalité pour susciter le trouble à l’écran et créer une ambiance sombre et désespérée. Au niveau des orchestrations, il faut noter que Rosenman n’utilise quasiment pas les violons et les altos dans la moitié des morceaux du score, préférant mettre l’accent sur les violoncelles et les contrebasses (comme il l’avait déjà fait dans « Beneath the Planet of the Apes » en 1970).  « City Mayhem » suggère les dissonances mais jamais de manière frontale, Rosenman préférant opter pour des accords complexes et des mélanges de tonalités.

A 0:57, des cuivres bondissants illustrent la scène où deux jeunes prostituées tabassent un voyou pour lui dérober des bijoux dans la rue. A 1:23, la musique vire carrément à la comédie avec ses brefs accents jazzy humoristiques et quasi parodiques lorsque les deux jeunes filles marchent sur le trottoir leur butin en main. Rosenman atténue ici la noirceur de cette introduction morne et désespérée d’une société décadente livrée à la pauvreté et l’anarchie. La seconde partie met en avant des rythmes nerveux et des envolées brutales de cuivres reflétant la violence dans les rues. « Robo and Nuke » dévoile quand à lui le thème principal de la partition, un motif héroïque de 6 notes associé à Robocop dans le film et reflétant des exploits et sa détermination à combattre le crime. Le thème principal de « RoboCop 2 » rappelle fortement celui plus amusant de « Star Trek IV » dans sa construction avec aussi celui de « The Lord of the Rings », plus flagrant dans « Overture : Robocop 2 », morceau dans lequel Rosenman développe pleinement son thème dans son intégralité pendant près de 6 minutes (il s’agit en fait du générique de fin du film). Le thème de Robocop se compose en réalité de deux éléments bien distincts : la cellule mélodique (A) de 6 notes et un motif B secondaire constitué de 3 notes plus rythmiques, que Rosenman juxtapose régulièrement avec le motif A ou qu’il développe parfois de manière isolée. On est très loin ici du célèbre thème musical composé par Basil Poledouris pour « RoboCop ». Encore une fois, Leonard Rosenman a ses propres idées et veut proposer quelque chose de complètement différent pour le film de Kershner. Le thème de « RoboCop 2 » est d’ailleurs un peu moins héroïque que celui de Poledouris mais plus orienté vers une forme de dérision presque caricaturale, et aussi étonnant que cela puisse paraître : cela fonctionne parfaitement dans le film et cela apporte une vraie personnalité aux images.

« Cain and Angie Escape » fait monter la tension durant la scène de l’attaque du laboratoire de Nuke au début du film. Le compositeur évite de tomber dans la surenchère d’action et opte ici pour une approche tout en retenue, avec des contrastes orchestraux plus saisissants – à noter ici la façon dont les instruments de l’orchestre se répondent entre eux – et des cellules rythmiques scandés dans le grave. Avec « Happier Days », on découvre la partie plus lyrique et psychologique du score. Le morceau, mélancolique et quasi onirique, développe la thématique liée aux souvenirs d’Alex Murphy sur sa vie d’avant avec sa femme et son fils. On devine ici une nostalgie poignante, amère et tout en retenue, avec l’apport des 4 chanteuses qui se trouvent au milieu des bois de l’orchestre. Les voix résonnent ici de manière quasi fantomatiques, rappelant l’humanité perdue de Murphy et la vie qu’on lui a volé à tout jamais. Les violons et les altos sont ailleurs présents cette fois-ci dans l’orchestre, incluant également le célesta. Dans le mélancolique « Robo Memories », le thème est développé de manière intime par des bois, durant la scène où Murphy retire son casque et fait face à sa femme en lui expliquant que son mari est mort et que ce qu’elle voit en face d’elle est un masque crée pour rendre hommage à Alex Murphy, un moment terrible pour une femme effondrée qui n’arrive pas à faire son deuil. Rosenman a l’intelligence d’illustrer la scène sans pathos mais avec une retenue et une économie de moyens poignante, et l’apport indispensable des voix féminines fantomatiques qui semblent planer mystérieusement lorsque la femme de Murphy apparaît dans la pièce, choquée par le visage de son mari incrusté dans le corps du cyborg.

« Robo Cruiser » est l’un des passages clé du score. Le morceau accompagne la séquence où Robocop se rend à l’usine désaffectée pour y traquer Cain avant d’être capturé et démembré violemment. Le morceau débute au son du thème principal développé sous la forme d’une marche héroïque et déterminée. Très vite, la musique s’apaise ensuite et devient plus mystérieuse, plus sombre également alors que Robocop pénètre l’usine. A 1:42, une section débute avec une série de notes étranges à la guitare électrique pour le plan où l’on aperçoit le cadavre et la photo d’Elvis Presley (la guitare fait ici allusion au rock’n roll). Rosenman évoque ici le mysticisme de Cain qui est le véritable gourou de la secte des adorateurs du Nuke. Le compositeur illustre pour cela la séquence à l’aide d’harmonies planantes quasi sérielles et plutôt dissonantes, avec l’apport exceptionnel des voix féminines qui résonnent ici de manière surréaliste, quasiment oniriques. La deuxième partie de « Robo Cruiser » est plus violente et brutale avec ses envolées de cuivres lorsque Robocop est capturé et découpé en morceaux. Rosenman en profite ici pour développer subtilement le motif B rythmique du thème de Robocop. « Duffy Nukes/Robo in Pain/Duffy Gets Diced » s’intéresse quand à lui au personnage de Duffy, le flic corrompu qui aide secrètement Cain. La musique devient ici plus sombre, avec toujours un second degré curieux, typique de Rosenman, notamment pour la scène où un sbire de Cain frappe Duffy dans son dos et l’amène dans une pièce sur un lit à roulettes. Le passage avec le tuba, le piano et les cordes staccatos vers 0:52 a presque un côté un peu ridicule, tout comme la section rythmique avec le marimba basse et le piano à 1:16. On pourrait presque s’imaginer que tout ceci est une vaste farce pour faire peur à Duffy.

C’est en tout cas que la musique semble suggérer jusque là. A 1:54, on devine presque l’influence de la « Musique pour cordes, percussion et célesta » de Bartok (coïncidence?). Les notes répétitives des cuivres en sourdine vers 2:50 laissent planer un doute alors qu’Angie et Hob menacent Duffy devant un Cain imperturbable. A 2.58, un terrifiant tutti de l’orchestre fait basculer la musique dans l’horreur pure avec des dissonances brutales et un cluster progressif des cordes lorsque Duffy se fait ouvrir le ventre. Dans « Robo Gets Faxxed », Faxx passe du temps à reprogrammer Robocop. La musique se veut ici plus mystérieuse, planante et intrigante avec un étrange motif de 4 notes des bois (flûtes, clarinettes, hautbois) qui semblent suggérer les mauvaises intentions de Faxx et ses manipulations. Le motif revient ensuite à 1:10. Dans « Kids Rob Electronics/RoboSparks », la musique s’agite soudainement. Rosenman met en place la partie plus ‘action’ de sa partition à l’aide de timbales plus agressives et de cuivres robustes, incluant une série de développements autour du thème A et B de Robocop. La marche revient ensuite à 0.42 alors que Robocop s’apprête d’un pas déterminé à s’électrocuter pour effacer sa nouvelle programmation bidon imposée par l’OCP à 1:10, le tout à grand renfort de percussions synthétiques et de cordes/cuivres agressifs et dissonants. A 1:45, des violons en tutti quasi impressionnistes apaisent le climat alors que le motif A de Robocop paraît plus posé, libéré de tout son poids, jusqu’à l’accord majeur plus optimiste à 2:17.

La poursuite entre Robocop et Cain est illustrée en grande pompe dans le superbe et intense « Robo and Cain Chase », l’un des meilleurs morceaux d’action du score. Le morceau est clairement vu ici du côté de Robocop car Rosenman se concentre quasi exclusivement sur le thème A et B du héros campé par Peter Weller, le tout accompagné de rythmes syncopés complexes, de cuivres robustes et de percussions belliqueuses (timbales, cymbales, caisse claire, piano, xylophone). On arrive alors à l’un des morceaux les plus mémorables du score, le somptueux « Creating the Monster », un tournant majeur dans la partition de Rosenman et le film lui-même : il s’agit de la musique illustrant la scène de la sanglante opération chirurgicale avec le cerveau de Cain. L’ambiance devient ici particulièrement inquiétante. On y retrouve les harmonies mystérieuses de « Robo Cruiser » mais sous une toute autre forme. Ici, les voix féminines résonnent de manière surréalistes et l’on devine une connexion évidente entre « Creating the Monster » et « Robo Gets Faxxed » - les deux séquences mettant en scène le Dr. Faxx justement – « Creating the Monster » est un morceau absolument fascinant de par son atmosphère surréaliste, sombre et prenante, avec cette tension mystérieuse qui monte progressivement, et ces voix fantomatiques. Le morceau évoque parfaitement l’idée de la création du monstre absolu et renforce par la même occasion le caractère gore de la séquence : c’est une pure réussite !

Dans « Monster At Meeting », Rosenman dévoile le second thème du score, un motif de 4 notes sombres et menaçantes associées à Robocop 2 dès 0:20, souvent confié à des cuivres graves (cors, trombones, tuba). La thématique du monstre est brillamment développée dans « Monster Cleans House/Monster Finds Angie ». Le morceau illustre parfaitement la violente fusillade dans le hangar. Rosenman suggère ici le jeu du chat et de la souris en alternant entre pizzicati ironiques des cordes et sforzandos agressifs des cuivres, avec quelques ponctuations brutales des percussions. Rosenman est soucieux de ne pas trop accentuer la violence qui se suffit à elle-même sur les images, mais préfère ponctuer occasionnellement certaines actions sans en faire de trop. On retrouve aussi les motifs rythmiques habituels du compositeur, scandés de manière répétitive comme dans « The Car » (1977). « Goodbye Angie » illustre la scène où Robocop 2 découvre Angie. Mystérieux et tendu, le morceau devient progressivement plus planant, presque romantique, lorsqu’Angie, terrifiée, tente d’apaiser le monstre en expliquant à Cain que tout sera comme avant. A 1:57, les violoncelles résonnent presque de manière romantique avant que l’orchestre ne s’emballe violemment lorsque le monstre tue brutalement Angie : un très beau passage en somme, reflétant tout le talent de compositeur de Leonard Rosenman ! « Robo Finds Hob » suggère la mort du jeune Hob sans verser là aussi dans le moindre pathos. On devine une mélancolie planante et douce dans le morceau de Rosenman, tout en retenue, avec pudeur et jamais mélodramatique.

UNE CONCLUSION IRONIQUE ET SPECTACULAIRE

Le « Robo Fanfare » annonce quand à lui le dernier acte du film – c’est l’occasion de se souvenir que Rosenman était également un grand compositeur de fanfare militaire – la bataille finale débute au son du tonitruant « Elevated and Depressed ». Rosenman reprend ici l’esthétique action brutale et rythmique de « Robo and Cain Chase », sauf qu’ici, il fait s’affronter les motifs de Robocop et le motif de 4 notes de Robocop 2. Si vous aimez le Roseneman des musiques d’action déchaînées, vous allez adorer chaque seconde de « Elevated and Depressed », dans le film comme sur l’album, ainsi que « On the Street Again/Robo Gets Nuke » et le grand final épique de « Robo I vs. Robo II ». Ici, Rosenman fait se culminer les motifs de Robocop et Robocop 2 dans un duel violent où les musiciens du Hollywood Studio Symphony s’en donnent à coeur joie. Enfin le film se termine sur « Robo Resolve and End Credits », reprenant la fameuse « Overture » dans son intégralité. C’est l’occasion d’entendre enfin le thème principal dans sa version complète, sous la forme d’une marche triomphante mais pleine d’ironie. L’humour est ici accentuée par l’utilisation des 4 chanteuses qui entonnent un « Robocop ! » ultra kitsch qui semble surgir tout droit d’une musique des années 60. Ajoutons à cela une marche d’harmonie caractéristique qui débute à 1:12 et qui possède ce côté vaguement « sixties » très rétro (façon Michel Legrand) et calqué sur le thème de « Star Trek IV » (1986).

C’est le genre de morceau surprenant qui partage généralement les auditeurs : soit on adore, soit on déteste ! Mais en 6 minutes, Rosenman résume parfaitement l’humour noir du film et le caractère comic book du récit : le message est assez clair, on aurait tort de prendre tout cela trop au sérieux ! A noter pour finir que l’album « Deluxe Edition » de Varèse propose également quelques bonus tracks intéressants, et notamment un insert nommé « Robo Hangs Out » qui se situe dans le film entre « Elevated and Depressed » et « On the Street Again », lorsque Robocop est suspendu au toit de l’immeuble et entraîne Robocop 2 dans sa chute. On découvre aussi une suite que Rosenman a écrit pour le montage du film, « Monster Theme Stings », une démo de 50 secondes reprenant plusieurs fois le thème de 4 notes du monstre/Robocop 2 aux cuivres, sous différentes variantes (l’une de ces variantes étant utilisée dans le film, lorsque le monstre s’empare de la télécommande du vieil homme et la brise sous la pression de sa puissante pince).

« Fanfare Suite » compile quand à lui toutes les fanfares composées par Rosenman pour la présentation catastrophique des prototypes de Robocop 2 vers le début du film. Enfin on découvre la musique d’un autre spot TV dans le lyrique « Sunblock 5000 » et sa flûte rêveuse sur fond de harpe/célesta apaisée et de voix féminines planantes. Au final, Leonard Rosenman signe une partition d’une richesse ahurissante pour « RoboCop 2 », cohérente d’un bout à l’autre du film, complexe, avant-gardiste mais aussi très mélodique, résumant 35 ans d’une carrière exemplaire au cinéma. Le score est l’aboutissement de toute une vie et même si l’on regrette le côté un brin « compilation/best-of » des meilleures idées de Rosenman pour ses anciens films dans « RoboCop 2 », force est de constater qu’on tient là l’un des meilleurs scores de toute sa carrière, à redécouvrir d’urgence à travers le superbe album « Deluxe » de Varèse qui présente enfin l’intégralité du score de « RoboCop 2 » entièrement remasterisé !



---Quentin Billard