1-Générique 1.49
2-Romance 0.47
3-Les temps modernes 1.08
4-Vent sur les affiches 1.21
5-S'en sortir 1.38
6-La radicale 4.06
7-Barocco
(on se voit se voir) 2.17*
8-Portrait robot 2.11
9-La poursuite 1.29
10-Mais vous vivez de quoi 2.18
11-Les mers du Sud 1.26

*Interprété par Marie-France
Composé par Philippe Sarde

Musique  composée par:

Philippe Sarde

Editeur:

CAM Records
CAM 493362-2

Chef d'orchestre:
Carlo Savina
Orchestrateur:
Hubert Rostaing
"La radicale" dirigé par:
Hubert Rostaing

Artwork and pictures (c) 1992 CAM Records. All rights reserved.

Note: ***
BAROCCO
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Philippe Sarde
Pour son quatrième film, André Téchiné nous livre un thriller assez bizarre et plein d'ambiguïtés. 'Barocco' raconte l'histoire de Laure (Isabelle Adjani) amoureuse d'un boxeur du nom de Samson (Gérard Depardieu) qui, après avoir accepté de se rendre complice de révélations scandaleuses organisées en pleine période électorale, décide de s'enfuir avec sa compagne qui l'a poussé à accepter une importante somme d'argent en échange de sa participation à ces révélations sur l'un des deux candidats des élections. Arrivé à la gare, Samson est agressé par un inconnu qui lui réclame l'argent. Un peu plus tard, Samson se fait assassiner par un type qui a exactement le même visage que lui. Walt (Jean-Claude Brialy), patron du journal qui couvre l'affaire (et qui a organisé l'article destiné à nuire à la réputation de l'un des deux candidats des élections) va se retrouver en contact avec ceux qui ont organisés le meurtre de Samson. De son côté, le mystérieux tueur va se mettre à traquer Laure en lui réclamant l'argent. Lasse, Laure n'aura finalement plus peur de lui et commencera même à tomber amoureuse du tueur étonnement ressemblant à Samson. L'ambiguïté est telle que la fin nous laissera clairement comprendre que le tueur n'est autre que Samson. Mais qui était alors le type qui s'est fait assassiner au début du film? L'intrigue est ainsi suffisamment intéressante pour nous maintenir en haleine jusqu'à la fin. Dommage que l'histoire soit juste très confuse par moment, d'autant qu'il y'a des passages parfois très bizarres (on se demande pourquoi Laure ne reconnaît pas Samson lorsqu'elle voit le tueur pour la première fois? Elle semble ne jamais réagir et ce manque de réaction est finalement incompréhensible) d'autant que le cadrage dans certains plans laisse parfois à désirer. Mais il y'a une atmosphère et une ambiance suffisamment prenante pour que l'on puisse considérer 'Barocco' (un titre mystérieux pour ce film) comme un bon film noir d'un réalisateur qui n'en était encore qu'à ses débuts en 1976.

La même année où Philippe Sarde écrivait la musique du 'Locataire' de Polanski et du 'Juge et l'assassin' de Bertrand Tavernier, le compositeur livrait pour Téchiné ce petit score mystérieux, sombre et dramatique. Sarde utilise l'orchestre avec des harmonies qui une fois de plus tendent à rappeler Debussy avec ce côté impressionniste typique de la musique française du début du 20ème siècle. Bien que le film soit un polar noir voire un thriller, Sarde décide de mettre de côté tout style atonal, dissonant et strident (genre 'Les seins de glace') pour se concentrer autour d'une musique plus dans l'esprit d'un score mystérieux à la Bernard Herrmann. A vrai dire, dans le générique de début, l'influence de Bernard Herrmann est flagrante, surtout lors de l'arrivée du premier motif que l'on pourrait décrire comme le thème de la 'poursuite' ou de la 'traque'. Rythmé par des cordes avec vents (avec des cuivres qui ponctuent le motif) qui créent un climat d'urgence et de panique, ce premier thème nous fait rentrer dans l'univers plus sombre du film (il est amené par une brève tenue de cordes plutôt inquiétante). Le deuxième thème qui sera beaucoup plus présent tout au long du film est quand à lui plus mystérieux et troublant d'esprit. On est ici beaucoup plus proche du style du thème entendu dans le générique de début de '7 morts sur ordonnance'. On retrouve ici la même manière d'écrire pour les cordes et ces harmonies plus Debussyste d'esprit (le morceau se concluant à nouveau sur le thème de la traque). A noter que cette musique est diffusé dans le générique de début alors que l'on voit des plans d'animaux sauvages (crocodiles, serpents, etc.), plan qui représente quelque part une métaphore sur la bestialité de l'homme qui sera clairement démontré tout au long du film (notamment à travers les histoires de magouilles politiques - ne dit on pas pour parler de quelqu'un d'un peu rusé et malhonnête qu'il est un 'requin'?), le réalisateur s'amusant aussi à glisser vers la fin du film quelques plans de ce même documentaire sur les bêtes sauvages (diffusé sur une télé).

Le troisième thème n'est pas développé dans le film mais plutôt répété tout au long du film de manière parfois envoûtante. Il s'agit du thème de la romance, un motif de cordes descendant évoquant le côté dramatique de cette histoire d'amour tragique sur fond de magouilles et de meurtre. 'Romance' offre un excellent contrepoids émotionnel à une partition plus mystérieuse et intrigante que sombre. On retrouve le thème mystérieux du générique de début dans 'Vent sur les affiches', ce thème accompagnant le film dans les moments les plus troublants. Il est aussi l'élément musical parfait qui sert à retranscrire toute l'ambiguïté de l'histoire et de la relation entre Laure et le tueur de Samson (ou Samson lui même?). Dans 'S'en sortir', on retrouve un passage plus dramatique avec des cordes sombres et intrigantes, le tout enrobé dans ce côté toujours calme, trop calme. Le morceau semble évoque un 'faux' espoir pour le couple qui, après avoir empoché une importante somme d'argent, décide de tout quitter pour se refaire une nouvelle vie. Mais l'ambiguïté harmonique du morceau (teinté de certaines harmonies dissonantes sans êtres agressives) nous rappelle toujours 'à l'ordre' en évoquant constamment le fait que le couple est pris dans un piège sans issue.

Pour 'La radicale', il s'agit d'un morceau de samba qui sort complètement du reste lors de la séquence où le tueur de Samson est avec la prostitué qui va lui faire 'la radicale'. Sarde semble s'être amusé à écrire ce petit morceau où il fait intervenir saxophones, piano, voix d'hommes ('oh!') et petites percussions et même si le morceau jure complètement avec le reste du score, ce petit morceau est somme tout sympathique sans être indispensable (il n'apporte en tout cas absolument rien au score). Dans 'Portrait robot', Laure tente de reconstituer le portrait robot du tueur. On retrouve un développement aux cordes du thème mystérieux qui ne cesse de rendre l'histoire intrigante voire inquiétante. Le thème de la traque est repris dans 'La poursuite'. On le trouve lors d'une scène de filature ou lors d'une séquence où l'on voit le casier de Laure à la gare (contenant le sac avec l'argent). Sans être ce que Sarde a fait de mieux dans le genre, 'Barocco' est un petit score intéressant couronné par le César de la meilleure musique en 1977 (la partition de Sarde n'est quand même pas si géniale que cela, donc de là à savoir si elle méritait vraiment ce César), un score qui semble être incontournable dans la filmographie années 70 du compositeur. Intéressant mais pas forcément indispensable.


---Quentin Billard