1-Defile and Lament 2.34
2-Consolation 2.23
3-Justice Wheel 0.46
4-Pavane For Solace 2.30
5-Abduction 2.59
6-An Asurrendering 1.36
7-Pavane For Loss 1.08
8-Take My Hand
Precious Lord* and
Retribution 6.50
9-Torch Of Hood 2.03
10-Pressing Judgement 1.29
11-White Sheet 2.38
12-Pavane For Solace
(Piano Solo) 2.07
13-Verdict Fanfare
(For Aaron) 4.04
14-Take My Hand
Precious Lord** 4.03

*Interprété par The Jones Sisters
Ecrit par Thomas A.Dorsey
**Interprété par:
Christ Memorial Church Choir/
Andrae Crouch Singers

Musique  composée par:

Elliot Goldenthal

Editeur:

Atlantic Records
82959-2

Musique produite par:
Matthias Gohl
Musique électronique
produite par:
Richard Martinez
Monteurs de la musique:
Michael Connell,
Denise Murray

Artwork and pictures (c) 1996 Warner Bros Limited, Monarchy Enterprise B.V. & Regency Entertainment (USA), Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
A TIME TO KILL
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Elliot Goldenthal
Quoiqu'on puisse penser de ce film de Joel Schumacher, impossible d'y rester insensible! Adapté d'un roman de John Grisham (spécialiste incontesté des thrillers), 'A Time To Kill' (Le Droit de Tuer?) aborde un sujet grave: un homme a t'il le droit de tuer des criminels par vengeance? Légalement, il a la loi contre lui, pourtant, le réalisateur semble être passé par dessus cela en nous livrant un solide plaidoyer contre le racisme sous toutes ces formes, le thème le plus important dans 'A Time To Kill' restant sans aucun doute celui de l'auto-justice: après que deux brutes aient violés et mutilés une jeune fillette noire de 10 ans, son père Carl Lee Hailey (Samuel L.Jackson) va retrouver les deux criminels alors qu'on les conduit au tribunal et va les tuer tout les deux à coups de fusil, blessant gravement au passage un des policiers qui les escortait jusqu'au tribunal. Arrêté quelques heures plus tard, Car Lee Hailey va réussir à obtenir les services de Jake Tyler Brigance (Matthew McConaughey, qui nous livre là une interprétation remarquable), l'un des plus fameux avocats de la ville aidé de son ami et assistant Harry Rex Vonner (Oliver Platt). Brigance va tenter de lutter contre l'antisémitisme qui risque de condamner Carl Lee à l'avance et de l'envoyer à la chambre à gaz. Pour Brigance, c'est le procès de sa vie, celui qu'il ne doit pas perdre. Toute la communauté noire compte sur lui, le procès de Carl Lee prenant alors des proportions carrément inattendue lorsque le frère (Kiefer Sutherland - coïncidence, il se trouve que son père Donald Sutherland joue aussi dans le film-) de l'un des deux individus assassinés va chercher à se venger en harcelant continuellement Brigance et sa famille. Après avoir échappé à deux tentatives d'assassinat par des membres du Ku Klux Klan (un groupe extrémiste et xénophobe malheureusement toujours actif dans certaines régions des Etats-Unis et ce même si aujourd'hui l'organisation n'a plus l'importance qu'elle avait pu avoir il y'a 30 ou 40 ans), Brigance va envoyer sa femme et sa famille dans un autre lieu en sécurité, poursuivant sa plaidoirie malgré les menaces qui pèsent continuellement sur lui et ses amis. Mais la tension ne va cesser de monter au cours de ce procès difficile et va même s'étendre jusqu'aux rues de la ville où le Ku Klux Klan et le NAACP (National Association for The Advancement of Colored People - organisation crée aux Etats-Unis en 1909 militant pour le respect des droits et de la justice pour les noirs et l'élimination des préjugés racistes et antisémites) vont se livrer à de violents affrontements. Pour Brigance, c'est le procès le plus difficile de toute sa carrière et les enjeux sont extrêmement importants, d'autant que son rival l'avocat Rufus Buckley (Kevin Spacey) est bien décidé à tout faire pour convaincre les jurés que Carl Lee est un criminel qui mérite d'être condamné à la chambre à gaz. Brigance devra aller jusqu'au bout de cette terrible épreuve, quitte à en subir les conséquences autant pour lui même que pour ses amis et sa famille. Plusieurs choses choquent dans ce film: tout d'abord, le manichéisme un peu simpliste de l'histoire: ici, les noirs sont très gentils et les blancs sont très méchants. Toute personne censée sait que la réalité n'est jamais aussi simple et qu'il y a du bon et du mauvais partout. D'autre part, si les deux violeurs méritaient effectivement de mourir, qu'en est il sur le plan moral? Légalement, Carl Lee est un criminel qui a commis le pire des crimes: enlever la vie à deux êtres humains. Mais il se trouve que ces deux hommes avaient violés sauvagement sa jeune fillette. Est-ce que cela donne alors le droit de tuer? Bien sûr que non, et pourtant, on ne peut s'empêcher de penser (comme le fait à un moment donné le policier unijambiste en plein procès) que Carl Lee a fait la chose juste et que ces deux crapules méritaient un tel traitement. Dans une société régie par des lois et un système judiciaire, personne n'a le droit de se faire justice soi même. Toute personne condamnée à droit à un procès équitable (du moins en théori
e car on ne compte plus aujourd'hui le nombre de cas échappant à cette règle - surtout lorsque l'accusé est noir) et ce quelque soit son crime. Le film est aussi là pour nous montrer que la violence n'engendre que la violence et n'amène jamais à rien si ce n'est à anéantir encore plus de vies. Difficile alors de se faire un avis juste: d'un côté, on a ces violeurs qui méritaient leur châtiment, d'un autre côté, on a cet homme meurtri, ce père de famille qui cherche vengeance et supprime ces deux pourritures, la loi faisant de lui un criminel comme il se doit. Est-il un meurtrier? Bien sûr, mais a t'il eu raison de faire cela? Oui et non, car si l'on est inflexible sur la loi, on pensera que Carl Lee mérite d'être condamné à mort mais si l'on a un tant soi peu de coeur, on ne pourra s'empêcher de prendre sa défense comme le fait si bien Brigance dans la scène de son plaidoyer final, séquence hallucinante d'une dizaine de minutes que le réalisateur a filmé en une seule prise (Matthew McConaughey a improvisé les larmes) et qui ne peut nous laisser indifférent. Le film a beaucoup fait parler de lui à cause de son manichéisme un peu irritant (les américains du sud en prennent un coup avec ce film) et de sa défense un peu trop 'militante' de l'auto-justice (ce que les critiques ont sévèrement reprochés au film de Schumacher) sans oublier quelques ficelles pas très crédibles (truc typiquement Hollywoodien: après la scène où Brigance retourne sur les ruines de sa maison calcinée, il retrouve son chien sain et sauf - c'est bien connu, à Hollywood, les chiens ne meurent jamais -) et une fin un peu trop Hollywoodienne (dans la réalité, le procès n'aurait jamais pu se terminer ainsi). Malgré tous ses nombreux défauts (trop de clichés et de facilité Hollywoodienne) et ses contradictions, 'A Time To Kill' est un film qui secoue, qui dérange, qui fait réagir et qui nous touche, car, en plus de nous prouver une fois encore à quel point l'être humain peut être foncièrement mauvais, brutal, sauvage et con, le film nous montre aussi la triste réalité d'une société où le racisme est toujours présent et où la justice n'est finalement pas la même pour tous. Un film complexe et intense qui continue encore à susciter quelques polémiques.

Après avoir écrit un an avant la musique de 'Batman Forever', Elliot Goldenthal retrouve à nouveau Joel Schumacher sur 'A Time To Kill' pour lequel le compositeur a écrit un score très sombre oscillant entre drame, frisson et terreur quasi chaotique. Le score de 'A Time To Kill' évoque clairement le style de l'écriture orchestrale atonale et chaotique chère au compositeur, avec ses effets orchestraux habituels et son utilisation toujours très intelligente des orchestrations. A l'orchestre se rajoute ici quelques instruments supplémentaires comme un harmonica ou un saxophone que Goldenthal 'détourne' astucieusement pour nous offrir une nouvelle 'couleur' de la part de ces instruments. Si l'histoire se passe dans le sud des Etats-Unis, Goldenthal évite d'avoir recours à des instruments trop 'couleur locale' et préfère détourner leurs sonorités et les mélanger au sein de la masse orchestrale afin d'obtenir une sonorité plus neutre, plus sombre, plus étrange. A noter aussi l'utilisation d'un penny whistle vers le début du film dans 'Defile & Lament', sonorités qui ouvrent le film de manière fort mystérieuse avant que Goldenthal utilise son premier morceau de terreur chaotique lors de la scène du viol au tout début de cette sombre histoire. On retrouve ici l'utilisation typique des percussions à la Goldenthal (genre 'Alien3' et surtout 'Interview With The Vampire' qui se rapproche beaucoup par moment du style frissonnant de 'A Time To Kill') avec un martèlement agressif de percussions métalliques et un flot de cordes dissonantes et chaotiques sans oublier les cuivres menaçants que Goldenthal utilise continuellement dans ces moments de terreur ou de tension. Ce premier morceau nous propose une sombre entière en la matière et nous annonce déjà la couleur.

Dans 'Consolation', Goldenthal a recours à un orchestre plus dramatique, sombre et lent dans lequel il nous fait entendre son unique thème principal qui risquera d'échapper à nos oreilles à la première écoute (comme c'est souvent le cas chez Goldenthal, les thèmes ne sont pas toujours faciles à mémoriser), thème lent, sombre et mélancolique évoquant le côté plus dramatique de l'histoire mais avec un ton toujours très sombre, surtout dans l'utilisation des cordes et des sonorités plus graves de l'orchestre. 'Justice Wheel' change radicalement de caractère puisque Goldenthal utilise ici un ostinato de cordes mélodique avec des cuivres plus déterminés, ostinato évoquant l'idée simple de la justice qui se met en marche de manière implacable et inexorable. Dans 'Pavane For Solace', Goldenthal a recours à un saxophone mélancolique et un harmonica soutenue par des cordes résignées, instruments qu'il utilise une fois de plus d'une manière assez subtile pour évoquer ici les tourments de Carl Lee alors que ce dernier commence à craindre de perdre son procès ou de passer toute sa vie en prison. 'Abduction' évoque de manière terrifiante la scène de l'enlèvement d'Ellen Roark (Sandra Bullock) et des harcèlements des membres du Ku Klux Klan. Impressionnant et terrifiant, le morceau utilise une superbe écriture de cordes dissonantes, des clusters de l'orchestre et de tenues stridentes avec les cuivres hurleurs chers au compositeur et l'utilisation assez surprenante ici d'un violon soliste qui contribue à renforcer le côté frissonnant du morceau (on pense clairement à 'Interview With The Vampire' ici). Goldenthal a parfaitement réussi à cerner toute la violence de ces scènes à travers son écriture atonale intense et sa maîtrise incomparable de l'orchestre.

Si 'An Asurrendering' nous fait entendre le côté plus dramatique de l'histoire, 'Pavane For Loss' nous permet d'entendre un thème de piano/cordes plus mélancolique et surtout plus intime, lié à la tragédie de l'histoire et à la pression que ressent Brigance tout au long de ce procès, pression accentuée par les harcèlements incessants du Ku Klux Klan qui menace même sa famille. 'Pavane For Loss' apporte une touche de mélancolie intime et non négligeable au sein d'un score plutôt sombre et extrêmement tendu (repris dans la piste 12 de l'album). Mais le morceau le plus impressionnant reste sans aucun doute 'Take My Hand Precious Lors & Retribution' où Goldenthal utilise un choeur de gospel mélangé sur un orchestre dissonant et extrêmement menaçant lors de la scène clé où Carl Lee abat les deux violeurs vers le début du film. Goldenthal fait superbement monter la tension dans cette scène avec des tenues de cordes dissonantes et menaçantes et des sonorités orchestrales chaotiques, le morceau rendant la scène particulièrement intense (les chants gospel sont là pour évoquer les origines noires du personnage), l'histoire se concluant sur un 'Verdict Fanfare (For Aaron)' libérateur lors du verdict final, mais éloigné d'un style trop triomphant, Goldenthal restant toujours assez subtil dans son approche musicale par rapport aux images, et ce quelque soit le contexte de la scène. Cette alternance entre morceaux dramatiques/mélancoliques (et toujours aussi sombres) et ces passages de suspense/terreur chaotiques font de 'A Time To Kill' un score tout à fait recommandable bien que peu original en soi, une BO qui plaira sans aucun doute aux fans du compositeur et à tout ceux qui apprécient régulièrement ses travaux.


---Quentin Billard