1-Main Title 4.43
2-Missy Finn Goes Shoppin' 2.42
3-Next of Kin 2.01
4-Do The Right Thang 2.48
5-Once A Slave... 3.26
6-We're Still Friends 2.43
7-Billy Gets Killed 2.19
8-The Barge 2.43
9-Huck Springs Jim 3.15
10-All's Well 4.25

Musique  composée par:

Bill Conti

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-5418

Album produit par:
Bill Conti
Producteur exécutif de l'album:
Robert Townson
Monteur de la musique:
Steve Livingston
Préparation de la musique:
Bob Bornstein

Artwork and pictures (c) 1993 The Walt Disney Company. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE ADVENTURES OF HUCK FINN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bill Conti
Avant de connaître le succès avec ses minables 'The Mummy', Stephen Sommers réalisait en 1993 son deuxième film, 'The Adventures of Huck Finn', retraçant les exploits du célèbre Huckleberry Finn, fruit de l'imagination du romancier américain Mark Twain. Publié en Janvier 1885, 'The Adventures of Huckleberry Finn' reste sans aucun doute l'ouvrage de référence de Mark Twain, un ouvrage qui, selon les dires de certains, serait à l'origine de toute la littérature américaine moderne. On a souvent rapproché ce roman avec l'autre ouvrage incontournable de Twain, 'The Adventures of Tom Sawyer' (1876), les deux héros du romancier partageant de nombreux points en commun (ils ont été réunis par la suite dans 'Tom and Huck' au cinéma). L'histoire a été adaptée de nombreuses fois sur le grand écran, que ce soit de la version de 1920 en passant par celle de 1974 (version musicale réalisée par Jack Lee Thompson) ou une autre version, plus récente, datant de 1995. La version qui nous intéresse ici est celle de 1993, produite par Disney. 'The Adventures of Huck Finn' est donc la deuxième réalisation de Stephen Sommers. C'est un Elijah Wood très jeune à l'époque (12 ans, seulement!) qui campe ici le rôle du célèbre Huckleberry Finn, héros incontournable de la littérature américaine de la fin du 19eme siècle, immortalisé par l'oeuvre de Mark Twain. On retrouve à ses côtés Courtney B.Vance dans le rôle de Jim, l'esclave noir ami de Huck. Ron Perlman est très impressionnant dans le rôle du père alcoolique de Huck. On retrouve aussi Robbie Coltrane et Jason Robards dans le rôle des deux bandits, Le Duc et le Roi. A noter pour finir un petit rôle pour une Anne Heche encore quasiment inconnue à l'époque (c'est son deuxième rôle majeur pour un film).

L'histoire retrace donc les aventures agitées du jeune Huck Finn, un petit garçon entreprenant et débrouillard, indépendant et très forte tête. Huck est éduqué par la veuve Douglas qui tente de faire de lui un enfant civilisé, mais l'enfant n'en fait toujours qu'à sa tête, jusqu'au jour où son père alcoolique le retrouve et commence à lever la main sur lui. Pour Huck, il est grand temps d'en finir avec son père: il va alors organiser un plan machiavélique visant à faire croire qu'il a été assassiné, espérant ainsi que son père, le croyant mort, le laisse tranquille pour de bon. Huck en profite alors pour s'enfuir en compagnie de son ami Jim, un esclave noir qui rêve d'obtenir son indépendance, lui et sa famille. Ensemble, ils vont traverser la rivière du Mississippi afin de rejoindre la ville de Cairo dans l'Illinois, là où il pourra enfin vivre libre. Seulement voilà, les choses se compliquent alors que les gens se mettent à la recherche de Jim qui s'est enfui, croyant qu'il est le meurtrier de Huck. Ce dernier doit alors affronter un cas de conscience pour la première fois de sa vie: doit-il dénoncer Jim ou tenter de l'aider, en sachant bien que, pour lui, ce n'est qu'un esclave. Le jeune garçon n'a pas encore réalisé l'ampleur du drame de l'esclavagisme, et Jim va devoir lui éduquer quelques valeurs humaines afin de lui montrer la bonne voie à suivre.

Décidé à aider son ami, Huck va tout faire pour rejoindre Cairo avec lui. C'est sans compter sur l'intervention de la riche famille des Grangerford qui vont recueillir Huck et Jim, redevenant alors un esclave après avoir tenté d'obtenir son indépendance par la fuite. Huck commence à apprécier cette nouvelle vie de confort, jusqu'à ce que la famille de Billy, son nouvel ami, soit décimée par une vendetta sanguinaire les opposant depuis de nombreuses années à une famille ennemie. Petit à petit, Huck découvre le mal du monde dans lequel il vit: l'esclavagisme, la violence sous toutes ses formes, le vol, l'égoïsme, etc. et revoilà Huck et Jim parti vers de nouvelles péripéties, jusqu'à ce qu'ils rencontrent le Duc et le Roi, deux petits brigands spécialistes de coups tordus en tout genre. Les deux bandits vont alors les utiliser pour accomplir leur dernier coup fumeux. Cette fois-ci, Huck aura fort à faire pour tenter de sauver Jim et de prendre ensuite la poudre d'escampette à ses côtés.

Stephen Sommers a réussi à retranscrire le côté satirique et humain du roman de Mark Twain. Plus qu'un roman sur l'Amérique du 19ème siècle, 'The Adventures of Huck Finn' est une sorte de compte morale simplifiée ici par les producteurs de chez Disney pour rendre le message encore plus accessible au plus jeune public. Le message est donc clair: l'esclavagisme, ce n'est pas bien! Je simplifie au maximum, mais c'est pourtant de cette façon là que les choses sont dites dans le film. Il manque donc une certaine profondeur dans le récit, profondeur que seul l'ouvrage est en mesure de nous offrir. Ceci étant dit, le film tient ses promesses et oscille ainsi entre l'humour et la dérision du jeune héros et le côté plus humain et dramatique du récit, où l'enfant découvre la dureté du monde avec la brutalité de son propre père, la mort des bandits se noyant dans l'épave, le meurtre de son ami Billy, les coups de fouets dans le dos de Jim, les arnaques des deux malfrats, etc. il est certain que cette dimension plus humaine risquera fort d'échapper à un public plus jeune. Néanmoins, ceci constitue pourtant l'un des axes majeurs du récit du film. Au final, 'The Adventures of Huck Finn' est une petite réussite sans révolutionner le genre, une version qui, malgré quelques défauts, n'aurait certainement pas déplu à Mark Twain en personne.

Le score symphonique de Bill Conti est très sympathique sans être véritablement inoubliable. Sa partition s'articule autour d'un thème principal très mélodique, frais et nostalgique, évoquant les paysages de l'Amérique du 19eme siècle avec un certain sentiment d'aventure. On trouvera aussi un autre thème sous la forme d'une petite polka enjouée évoquant l'espièglerie et la malice de Huck Finn. Ce thème n'est pas sans rappeler certaines partitions plus 'americana' de Aaron Copland, un modèle pour tous les compositeurs américains voulant retranscrire le son orchestral de l'Amérique. Un troisième thème, plus sombre et mélancolique d'esprit, évoque le personnage de Jim, souvent entendu aux cors. Le 'Main Title' s'ouvre donc au son de ce thème introduit par des traits de cordes énergiques et des cors majestueux. Avec ses cordes amples, le thème principal évoque à merveille l'univers du roman de Mark Twain. La seconde partie du 'Main Title' nous permet d'entendre l'amusant thème de polka confié à des vents, des cors, une trompette et des cordes sautillantes, soutenues par une basse dansante. La bonne humeur transparaît pleinement dans ce petit thème de polka évoquant la musique de l'Amérique de cette fin du 19eme siècle. La polka se poursuit dans le générique lorsque Huck affronte un garçon à mains nues. Le rythme enjoué du morceau est rompu par un sombre motif descendant de 4 notes de hautbois, personnifiant le sinistre père de Huck Finn (Ron Perlman), revenu pour le battre.

'Missy Finn Goes Shoppin' permet à Conti d'apporter un peu d'humour dans sa partition avec un petit morceau sautillant aux allures d'une pièce de mickey-mousing où dominent les cordes, les vents et la trompette. Le morceau décrit avec espièglerie la séquence où Huck se fait passer pour une fillette pour voler de la nourriture à une dame. Conti a parfaitement capté dans sa musique toute la malice du personnage, réutilisant au passage le thème de polka à la trompette, sur un rythme encore plus dansant. Le musique possède un certain classicisme d'écriture nous rappelant au passage que Bill Conti est passé maître dans l'écriture orchestrale et que ses modèles "classiques" vont de Beethoven à Stravinsky en passant par Mozart, Holst ou Tchaïkowsky. 'Next of Kin' décrit la scène où le père de Huck tente de le tuer à coup de couteau, étant sous l'emprise de l'alcool. Le morceau évite de décrire la violence en privilégiant une écriture plus posée avec une basse dans le style d'une passacaille et une écriture de cordes et de cuivres assez typée.

'Do The Right Thang' évoque la séquence où Huck et Jim dérive sur la rivière à bord de leur radeau. On trouvera ici le motif de Jim joué aux cors et vaguement plus mélancolique, nous rappelant au passage que Jim est un esclave fugitif en quête de liberté. Le morceau possède un esprit toujours très espiègle mais déjà plus sombre que 'Missy Finn Goes Shoppin'. Aucun doute possible, Huck Finn reste le personnage privilégié par la musique de Bill Conti. 'Once A Slave...' vient rompre cette ambiance par un ton nettement plus dramatique et résigné. Mélancolique à souhait, ce très beau morceau met en avant des cordes plaintives lors de la scène où Jim redevient un esclave chez les Grangerford et où Huck doit faire face à un nouveau cas de conscience, alors qu'il commence à comprendre le côté réellement néfaste de l'esclavagisme.

'We're still friends' débute sur un thème de hautbois poignant (repris en réalité d'une partie du thème principal), évoquant les liens amicaux unissant Huck et Jim malgré les problèmes que ce dernier doit affronter. La deuxième partie du morceau prend une tournure plus énergique avec un ostinato de percussions quasi martiales lors de la scène où Billy Grangerford se fait tuer par la famille ennemie. Conti nous permet d'entendre au passage un nouveau contrepoint de cordes nous renvoyant vaguement à Beethoven et à Bach. Une fois encore, le compositeur évite toute violence dans son sujet en privilégiant une écriture orchestrale plus énergique que réellement brutale. 'Billy Gets Killed' est un nouveau morceau mélancolique soulignant la séquence de la mort de Billy, Huck venant se recueillir près de son corps. Conti nous fait entendre au passage un petit thème de flûte mélancolique, simple évocation résignée de la bêtise humaine à laquelle Huck est témoin à ce moment là. D'une manière générale, si Bill Conti a teinté sa partition de moments enjoués et de quelques touches d'humour, il ne manque jamais de souligner au passage le côté plus humain et dramatique de l'histoire.

'The Barge' est sans aucun doute le passage le plus sombre de tout le score. Avec des cordes torturées, le morceau décrit la séquence où Huck et Jim se retrouvent sur le bateau des pirates en train de couler. A noter ici une excellente écriture de cuivres et de cordes très rythmées, la séquence tournant autour d'un thème vif évoquant le danger de la scène. Le thème principal revient à la fin de la scène, accompagné de manière surprenante par un orgue, une petite trouvaille étonnante et intéressante. Quant à 'Huck Springs Jim', il s'agit de la séquence où Huck aide Jim à s'évader de la prison à la fin du film. Energique, le morceau repose ici aussi sur un excellent contrepoint entre les cordes, les cuivres et les vents. Le thème de Jim est entendu au hautbois avec, au passage, le thème mélancolique de flûte de 'Billy Gets Killed'. Le morceau trouvera sa conclusion sur une reprise plus puissante du thème principal pour la retrouvaille entre les deux amis. La conclusion se fera sur 'All's Well' démarrant sur le thème de cors de Jim repris de 'Do The Right Thang'. Le thème de polka à la trompette revient finalement une dernière fois pour déboucher sur une réexposition du thème principal dans la version du 'Main Title', une petite coda énergique et enjouée concluant cette petite 'symphonie américaine' en 10 mouvements.

Entre temps, l'album aura malheureusement omis de nombreux morceaux qui auraient dû être présents pour mieux représenter la partition de Conti qui fait près de 90 minutes dans le film alors qu'on n'en trouve que 30 minutes sur le CD. On ne pourra que regretter l'absence de ces nombreux morceaux qui nous aurait permit de bénéficier d'une écoute plus riche et plus prenante. Malgré tout, le score présent sur l'album de Varèse Sarabande témoigne de la fraîcheur d'écriture du score. Bill Conti fait preuve d'un grand classicisme d'écriture alternant influence Beethovénienne et modèles américains comme Aaron Copland. 'The Adventures of Huck Finn' n'est pas un chef-d'oeuvre en soi. Il s'agit simplement de ce style de partition divertissante que l'on se plaît à écouter dans le film ou en dehors du film sans vraiment se prendre la tête. Recommandé, si vous voulez découvrir la facette plus légère d'un compositeur très éclectique et pas toujours bien représenté au niveau discographique.


---Quentin Billard