1-Dawn Of A New Century 4.28
2-Kenya-Wait For Me 3.32*
3-Task Requires Heroes 4.09
4-Promenade By The Sea 2.54**
5-Nautilus-Sword
Of The Ocean 3.30
6-The Game Is On 2.54
7-Old Tiger 2.56
8-Capturing Mr Hyde 3.29
9-Mina Harker's Secret 3.18
10-Phantom's Lair 5.30
11-Portrait Of Dorian Gray 3.40
12-Treachery 5.29
13-Storming The Fortress 3.55
14-May This New Century
Be Yours 2.34
15-Son Of Africa 2.08*

*Interprété par:
Ladysmith Black Mambazo
Paroles et musique de:
Trevor Jones, Joseph Shabalala
**Paroles de: Victoria Seale

Musique  composée par:

Trevor Jones

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-6492

Album produit par:
Trevor Jones
Producteur exécutif:
Robert Townson
Monteurs de la musique:
Adam Kay, Jeremy Raub
Chargé de la musique pour
20th Century Fox:
Robert Kraft
Musique supervisée pour
la 20th Century Fox par:
Geoff Bywater,
Danielle Diego,
Michael Knobloch

Fox Music Business Affairs:
Traci Dallas-Opdahl
Fox Music Soundtrack
Business Affairs:
Tom Cavanaugh

Artwork and pictures (c) 2003 Twentieth Century Fox Film Corporation. All rights reserved.

Note: **1/2
THE LEAGUE OF EXTRAORDINARY GENTLEMEN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Trevor Jones
'X-Men', 'Spider-Man', 'Blade', 'Daredevil', 'Hulk', etc. quel point commun? Ce sont tous des films mettant en scène des super-héros/justicier issu de comics américains. 'The League of Extraordinary Gentlemen' vient ajouter sa pierre à l'édifice hollywoodien des héros aux super-pouvoirs avec une nouvelle adaptation d'un roman graphique d'Alan Moore et Kevin O'Neill (pour la petite histoire, Alan Moore est aussi l'auteur du fameux 'From Hell', récemment adapté au cinéma par les frères Hugues). Le réalisateur Stephen Norrington n'est pas étranger à ce sujet, puisqu'il avait lui-même mis en scène une autre aventure d'un héros de comics américain, 'Blade' (1998). L'histoire part d'un principe assez intéressant: mélanger dans une même histoire différents héros issus de la littérature. On retrouve ainsi Allan Quatermain, le célèbre aventurier de H.Rider Haggard ('King Solomon's Mines', déjà adapté au cinéma par Jack Lee Thompson en 1985), Mina Harker, la femme vampire du 'Dracula' de Bram Stoker, Henry Jekyll et Edward Hyde de Robert Louis Stevenson, le Capitaine Nemo du '2000 lieues sous les mers' de Jules Verne, Dorian Gray du 'The Picture of Dorian Gray' d'Oscar Wilde, Tom Sawyer, (qui prend ici les traits d'un agent secret américain, n'ayant bizarrement aucun rapport avec le personnage du roman de Mark Twain, si ce n'est qu'il porte le même nom), Rodney Skinner, qui se trouve être un ersatz du héros de 'The Invisible Man' par H.G. Wells, sans oublier le méchant du film, le professeur James Moriarty, issu du 'The Final Problem' d'Arthur Conan Doyle, créateur du célèbre détective anglais, Sherlock Holmes. On pouvait s'attendre au meilleur comme au pire, suivant la direction qu'allait prendre Stephen Norrington, et malheureusement, c'est un bien triste échec pour le réalisateur, le film sombrant dans la médiocrité la plus affolante. Mais avant de continuer, rappelons vite l'histoire.

Le récit se déroule dans le Londres de 1899. Le film raconte comment ces héros peu ordinaires sont contactés par le mystérieux M (Richard Roxburgh) pour fonder la 'ligue des gentlemen extraordinaires', dont l'objectif principal est de mettre fin aux agissements du mystérieux 'fantôme' et de son armée de soldats aux armes futuristes. La ville est en proie aux attaques de plus en plus féroces de l'armée du fantôme, des soldats allemands équipés d'une technologie encore jamais vue auparavant. Le but du 'fantôme' est de déclencher la première guerre mondiale pour assouvir tous les peuples de la terre et gouverner la planète entière. Cet ennemi mégalomane va devoir faire face à une ligue de héros constituée d'Allan Quatermain (Sean Connery), Mina Harker (Peta Wilson), le Capitaine Nemo (Naseeruddin Shah), Tom Sawyer (Shane West), Dr.Jekyll/Mr.Hyde (Jason Flemyng), Rodney Skinner (Tony Curran) ainsi que l'invincible et énigmatique Dorian Gray (Stuart Townsend). C'est le Capitaine Nemo qui va aider ses amis à traverser les mers du globe à bord de son célèbre sous-marin titanesque, le 'Nautilus'. Pourchassant leur ennemi jusqu'à Venise, les héros de la ligue devront faire face à mille dangers et déjouer tous les plans du 'fantôme' jusqu'aux rebondissements de la dernière partie du film avec la trahison d'un des membres de l'équipage.

Tout cela partait pourtant d'une bonne intention: mettre en scène divers héros de la littérature qui possèdent un passé noir et un secret souvent douloureux! Allan Quatermain est rongé par la mort de certains de ses amis. Dr.Jekyll est quant à lui continuellement torturé par le sombre Mr.Hyde qui hante son corps et son esprit. De son côté, Mina Harker est condamnée à vivre à l'état de vampire pour l'éternité, après avoir été mordue par le comte Dracula il y a des siècles. Le problème du film, c'est qu'il accumule très rapidement les poncifs habituels du genre, le film n'étant qu'une succession quasi ininterrompue de séquences de bastons en tout genre, allant du simple coup de poing facial jusqu'aux inévitables pyrotechnies spectaculaires. On pourrait aussi résumer le film à une banale débauche d'images de synthèse en tout genre, d'une lourdeur assez spectaculaire, à vous coller la pire des migraines. On s'ennuie très rapidement au bout d'une heure, la faute à un scénario mince comme un clou, accumulant cliché sur cliché (le héros que rien n'arrête, le méchant mégalomane, le traître qui n'est là que pour servir de rebondissement, etc.), et à une avalanche d'effets spéciaux saoulant au possible, sans parler des situations grosses comme des maisons et sans aucune crédibilité. On a par exemple du mal à croire que la séquence à Venise se déroule réellement à Venise, tant la ville est méconnaissable et arrangée à la sauce hollywoodienne (et que dire de Paris et de l'inévitable plan de la Tour Effel. Les Américains ne connaissent donc que cela de notre capitale?). On se demande même si le réalisateur a déjà foutu les pieds dans cette ville, car à part nous montrer des gros clichés comme le carnaval vénitien ou les gondoles sur les canaux de la ville, on ne voit pas grand chose d'autre. Et que dire du combat interminable entre les deux monstres, vers la fin du film? Si vous regardez de temps en temps votre montre durant le film, n'en soyez pas surpris, c'est que, comme beaucoup, vous avez trouvé ce film long, chiant et parfaitement excessif. 'The League of Extraordinary Gentlemen' est un festival d'effets spéciaux dans lequel semble se noyer un scénario ridicule et ultra basique, délaissant complètement la psychologie des différents personnages alors qu'il y avait pourtant matière à exploiter quelque chose de passionnant sur ce sujet (réunir autant de personnages contrastés ensemble, cela laissait plein de possibilités intéressantes). En clair, voilà un gros navet américain à éviter absolument. Si c'est cela le nouveau standard du blockbuster hollywoodien, on peut craindre le pire quand à l'avenir de la production cinématographique US!

C'est sans aucun doute la participation de Trevor Jones à 'From Hell' qui a permit au compositeur d'écrire la musique de 'The League of Extraordinary Gentlemen'. Coïncidence, 'From Hell' était déjà adapté d'un ouvrage d'Alan Moore. Stephen Norrington souhaitait probablement retrouver une ambiance sombre similaire. L'immense partition symphonique de Trevor Jones s'inscrit parfaitement dans l'ambiance noire du film, le seul problème étant ici un manque d'inspiration flagrant de la part du compositeur, plutôt axé ici vers le recyclage de ses partitions de 'From Hell' (c'est indiscutable) ou 'Dark City'. Pourtant, le score semblait prendre une très bonne tournure avec l'incontournable 'Dawn Of A New Century', puissante introduction du film dans lequel le compositeur amorce le style orchestral déchaîné de sa partition. Un mot-clé servirait alors à résumer cette partition: massif. Avec 'Dawn Of A New Century', Jones installe une ambiance sombre avec des cordes sinistres et dissonantes, héritées de 'From Hell'. Rien de bien neuf en soi, d'autant que le retrouve certains tics harmoniques repiqués eux aussi du même score. Ce qui suit est bien plus accrocheur. L'orchestre semble s'emballer alors qu'une rythmique martelé et syncopée s'installe aux cordes, cuivres et percussions. Jones annonce brièvement le thème principal, motif de 3 notes assez sombre, associé aux héros du film. Bizarrement, ce motif n'a rien de vraiment héroïque ou épique, Jones ayant absolument tenu à éviter les sempiternels clichés héroïques. Le thème suivant de 'Dawn Of A New Century' est un motif menaçant de 6 notes, confié à des cuivres guerriers, soutenu par un rythme de marche assez lourd dans lequel on pourra distinguer quelques choeurs sombres à l'arrière plan sonore. Ce sombre thème est associé au méchant du film et évoque la puissance martiale de son armée et son désir de conquête et de destruction. Le thème prend une tournure extrêmement massive lors de la séquence de la destruction du hangar des zeppelins au début du film. A noter que ce thème ressemble étrangement au première note du thème de flûtes qui introduit le mouvement de 'Neptune' des 'Planètes' de Gustav Holst. Etant donné la très grande différence d'esprit entre les deux pièces, on pourrait penser qu'il s'agit d'une simple coïncidence (après tout, il n'y a que 7 notes dans la musique, et il ne faut pas non plus être un obsédé des plagiats). Pourtant, pour tout ceux qui connaissent quasi par coeur la célèbre suite symphonique de Holst, difficile de ne pas penser au premier thème de 'Neptune' à l'écoute du thème cuivré de 'Dawn Of A New Century'. Voilà en tout cas une introduction massive grandiose à souhait, un excellent passage dans lequel le London Symphony Orchestra laisse éclater toute sa brillance et sa puissance avec un thème qui, hélas, manque cruellement d'originalité et d'inspiration. Effectivement, les tournures harmoniques du thème sont un peu simplistes et répétitives. On ne peut pas dire que Jones se soit vraiment foulé sur ce coup-là, et ce même si le thème possède un certain impact majeur sur les images du film. Pour la fin de ce 19ème siècle agité, Trevor Jones nous propose une vision guerrière massive et extrêmement sombre. Peut être qu'au-delà du film en lui-même, 'Dawn Of A New Century' fait aussi office de prémonition funeste, en annonçant déjà le futur conflit de 14/18 (cf. les soldats allemands au début du film, allusion pas très subtile aux deux tristement célèbres guerres mondiales du 20ème siècle).

La ligue se forme avec 'Task Requires Heroes', où Jones utilise un petit motif de célesta assez espiègle pour évoquer le personnage de Rodney Skinner, l'homme invisible. Le motif n'est d'ailleurs pas sans rappeler la fameuse 'Danse de la fée' du 'Casse-noisettes' de Tchaïkovski, Jones conservant toujours un ton sombre dans sa musique, et ce quelle que soit la scène en question. On se serait passé volontiers de la petite chansonnette britannique de 'Promenade By The Sea', très inspiré du 'Bow Belle' de 'From Hell'. Cette petite ballade à trois temps, très 19èmiste, est diffusée sur un vieux gramophone à l'intérieur du Nautilus, histoire de rappeler le contexte musical de l'époque. Malheureusement, le morceau vient gâcher l'écoute d'une partition sombre déjà interrompu par un inutile exercice de pièce africaine vocale dans 'Kenya - Wait For Me' pour les séquences africaines du début du film. A noter, au passage, que le score contient près de 3 ou 4 motifs, et ce à l'inverse de ce que prétendent certaines critiques qui n'ont visiblement pas pris la peine de jetter une oreille plus attentive sur la partition de Trevor Jones.

'Nautilus - Sword Of The Ocean' évoque l'idée de l'aventure (départ du Nautilus qui traverse les mers, à la poursuite du 'fantôme' et de ses sbires), toujours déclinée sur un ton sombre (à noter ici un bref rappel du thème de la ligue sur un rythme martial). On sent poindre ici un certain sentiment d'aventure épique à la David Arnold, mais qui retombe très vite dans la noirceur du score et surtout, dans le manque d'idée d'un compositeur visiblement pas vraiment inspiré par son sujet (et cela n'a rien d'étonnant, quand on voit la nullité du film). Enfin, un peu d'action avec l'excitant et massif 'The Game Is On' et 'Capturing Mr.Hyde'. 'The Game Is On' évoque la confrontation entre les héros de la ligue et les sbires du fantôme lors de la séquence de Venise. Jones met ici l'accent sur les excitantes rythmiques martiales (caisse, timbales, etc.) et les cuivres, quasiment prédominants dans tous les morceaux d'action de ce score massif. Certes, 'The Game Is On' est très prenant et nous rappelle à quel point Trevor Jones possède la maîtrise de l'orchestre, mais il faudra hélas un peu plus que cela pour sauver le reste de la partition d'un certain ennui. A noter que le thème du méchant refait une brève apparition à plusieurs reprises, comme pour rappeler la menace qui pèse sur les héros et le monde entier. 'Capturing Mr.Hyde' est dans le même esprit, décrivant avec fureur la séquence de la capture de Mr.Hyde à Paris. 'Capturing Mr.Hyde' est sans aucun doute l'un des plus excitants passage d'action du score, 4 minutes de déchaînements orchestraux dans lequel le LSO laisse éclater toute sa fureur pour cette séquence très agitée.

'Mina Harker's Secret' est nettement moins intéressant, plus atmosphérique et toujours aussi sombre. Il évoque le sombre secret qui hante Mina Harker, la femme vampire. 'Phantom's Lair' représente la séquence de la découverte du gigantesque repère du 'fantôme' dans la dernière partie du film. Jones installe un certain climat d'inquiétude avec des sonorités orchestrales à la fois graves et sombres. A noter ici l'utilisation discrète du choeur d'hommes à l'arrière plan sonore, renforçant le sentiment de menace lié à cette évocation de l'antre du mal. Le thème du méchant est toujours présent, entendu cette fois-ci aux cordes. On descend dans les ténèbres avec 'Portrait Of Dorian Gray' pour l'une des séquences horrifiques du film (le mystérieux portrait de Dorian Gray), gâchée par des effets spéciaux à deux balles. Le morceau prolonge l'ambiance noire du score avec des cordes moribondes débouchant sur un passage chaotique et sinistre à la 'From Hell'.

Malheureusement, le CD de Varèse Sarabande omet de nombreux morceaux du score, et plus particulièrement les morceaux d'action, ce qui fait que l'on se retrouve avec une dominante de passages atmosphériques parfois assez ennuyeux et qui gâche un peu l'écoute. 'Treachery' est dans ce style là. Certes, Jones arrive parfaitement à évoquer la sombre trahison dans le film, mais à l'écoute, c'est loin d'être aussi intéressant, d'autant qu'on ne peut une fois de plus s'empêcher de penser à 'From Hell' ici, preuve que le compositeur n'avait aucune inspiration particulière en écrivant ce score, et qu'il a dû se tourner vers ses précédentes partitions pour construire quelque chose de cohérent par rapport au film. A noter que le compositeur a recours ici à une formule d'ostinato rythmique dans la dernière partie du morceau, une formule rythmique inspirée une fois de plus du célèbre 'Mars' des 'Planètes' de Holst. Ceci n'a rien de nouveau, puisque Jones avait déjà fait référence à l'incontournable mouvement de Holst dans 'Dark City' (preuve une fois encore que Jones ne savait vraiment pas quoi faire). Le puissant 'Storming The Fortress' développe un excitant tempo d'action plein de fureur pour la séquence de la destruction finale de la forteresse. A noter un travail autour du thème de 'Capturing Mr.Hyde', déjà utilisé de manière plus sombre dans 'Treachery' et apparemment associé au traître du film (On retrouve ici des rythmiques empruntées à 'Desperate Measures' et 'Dark City', deux anciens scores de Trevor Jones). 'Storming The Fortress' permet au final d'atteindre l'apogée de la fureur orchestral dans toute sa splendeur, avec un énième rappel du thème cuivré du 'fantôme' ainsi que le motif de la ligue. Le résultat est évidemment très spectaculaire à l'époque, bien que tout cela manque cruellement d'originalité. Le film se conclut sur 'May This New Century Be Yours', avec la fin du 19ème siècle annoncée fièrement par 'Dawn Of A New Century' au début du film. Jones utilise une dernière fois le thème du 'fantôme' pour la mort du méchant à la fin du film. A noter ici l'utilisation discrète d'une petite rythmique électrique avec l'orchestre. L'histoire trouvera une conclusion plus paisible avec un retour au calme bien mérité, avec la chanson africaine 'Son Of Africa' (à noter que Trevor Jones est lui-même un 'fils de l'Afrique', puisqu'il s'agit de son pays natal).

Certes, Trevor Jones a accomplit avec succès la tâche qui lui était demandé: créer une partition orchestrale massive et sombre pour ce film spectaculaire. Le problème du score de 'The League of Extraordinary Gentlemen' provient surtout d'un manque flagrant d'idée d'un compositeur dépourvu de toute idée créatrice intéressante par rapport à la musique de ce film, contraint de devoir piocher par-ci par-là pour créer une partition taillée sur mesure pour le film. Cette démarche fort douteuse a de quoi nous décevoir, le compositeur nous ayant pourtant ravi avec les récents '13 Day' ou 'From Hell'. Pour ma part, j'ai déjà entendu un Trevor Jones bien plus inspiré, c'est certain. Certes, les amateurs de grosses partitions massives et spectaculaires ne pourront qu'apprécier ce score, bien qu'il manque encore beaucoup de bons morceaux d'action sur le CD de Varèse Sarabande. Mais plutôt que d'entendre un ersatz de 'Dark City', 'From Hell' ou 'Desperate Measures', on préfèrera passer notre chemin pour écouter quelque chose de bien plus inspiré et de prometteur. Décidément, ce 'League of Extraordinary Gentlemen' aura été une source de déceptions de bout en bout!


---Quentin Billard