Musique  composée par:

Graeme Revell

Editeur:

Will Records 33655

Réalisateur:
Danny Cannon
Genre:
Policier/Thriller
Avec:
Ray Liotta,
Anthony LaPaglia,
Daniel Baldwin,
Jeremy Piven.

(c) 1998 Lakeshore Entertainment.

Note: **1/2
PHOENIX
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Graeme Revell
Après 'Judge Dredd', Danny Cannon décide de revenir à un genre plus sérieux, le polar/film noir. 'Phoenix' se place dans la lignés des polars à la Quentin Tarantino, dont l'ombre semble planer à plus d'une reprise sur ce film. Avec un scénario qui rappelle 'Reservoir Dos' ou le 'True Romance' de Tony Scott, 'Phoenix' raconte l'histoire de Harry Collins (Ray Liotta), un flic superstitieux qui ne cesse de dilapider son argent au jeu, si bien qu'à force de perdre, il finit par s'endetter auprès d'un caïd local du nom de Chicago (Tom Noonan). Etant dans l'incapacité totale de rembourser Chicago dans le délai qui lui est imparti, Harry n'a plus qu'une seule solution: organiser un coup avec l'aide de ses collègues Henshaw (Anthony LaPaglia), Nutter (Daniel Baldwin) et Shuster (Jeremy Piven) en vue de braquer un sinistre caïd du nom de Louie (Giancarlo Esposito), propriétaire d'un night-club. Evidemment, le plan ne se déroule pas comme prévu et se termine dans un bain de sang, avec la mort de Louie et de ses deux gardes du corps. Pour les quatre flics, c'est le début des ennuis, et pour Harry, c'est le moment d'espérer un petit coup de pouce du destin qui semble s'acharner contre lui depuis quelque temps.

L'histoire de 'Phoenix' semble être assez banale, et pourtant, le scénario est bien ficelé, avec son lot de rebondissements bien préparés et de situations astucieuses. A noter des dialogues intéressants, comme lorsqu'Harry parle d'incohérences dans le film 'King Kong', brillamment mise en parallèle avec le final du film. On appréciera aussi la partie plus humaine du film, avec la romance difficile entre Harry et Leila (Angelica Huston), modeste serveuse dans un bar du coin. L'intérêt principal de ce polar à la Tarantino réside surtout dans la peinture que nous sert le réalisateur du héros du film: toute en demi-teinte, un personnage complexe et superstitieux, qui suit à lettre un certain code d'honneur, une moralité qui ne l'empêche quand même pas de tuer trois types dans un bar, à la fin du film. Le personnage brillamment interprété par Ray Liotta n'a rien à voir avec les héros hollywoodiens de certains films d'action. Celui-ci possède une réelle personnalité, une psychologie spéciale entre le flic honnête et le flambeur invétéré qui finit par tomber dans la corruption et recherche la rédemption, à l'issue de cette violente descente aux enfers. Comme dit précédemment, certaines situations et certaines répliques ne sont pas sans rappeler les polars de Tarantino, même si d'un point de vue mise en scène, Danny Cannon est loin d'avoir l'originalité et le panache du célèbre réalisateur de 'Pulp Fiction'. Reste que 'Phoenix' est un thriller assez réussi, pas un véritable chef-d'oeuvre mais un bien bel effort de la part du réalisateur anglais. Si 'Judge Dredd' annonçait le pire quant à la suite de la carrière de Danny Cannon, 'Phoenix' vient quelque peu rectifier le tir.

Le score de Graeme Revell pour 'Phoenix' permet au compositeur d'avoir recours à un style plus rock/country dans lequel l'orchestre occupe une importance moindre, hormis dans quelques passages de la partition. Ne vous attendez pas ici à quelque chose de franchement mémorable. En revanche, le compositeur a su parfaitement retranscrire l'ambiance à la fois sombre et dramatique du film. Ainsi, son 'Main Titles' nous plonge immédiatement dans l'ambiance polar du film avec une rythmique de batterie rock assez cool, enveloppée de guitares électriques et d'un harmonica qui rappelle les décors un peu 'western' du film, la ville de Phoenix dans l'Arizona. A noter que le morceau est accompagné de quelques touches électroniques assez sombres. Revell a sut parfaitement retranscrire toute l'atmosphère du film, des synthés atmosphériques pour l'ambiance noire de l'histoire en passant par l'harmonica pour le côté 'country' et la partie rock (on pense ici au style du 'Vampires' de John Carpenter) pour l'aspect plus sombre et brutal de cette histoire de flics corrompus. 'Four Jokers' évoque les quatre compères avec une rythmique plutôt cool, une basse, des guitares, un harmonica et quelques saxophones aux sonorités étranges à la Goldenthal. Louie, le caïd, est évoqué dans le sombre 'Louie's Seaworld' dans lequel Revell utilise des synthés atmosphériques menaçants et quelques percussions omniprésentes. 'Leila Stays Home' développe la rythmique cool du début avec l'harmonica, le tout enveloppé avec le ton polar souhaité par Revell. Harry se fait bastonner par les hommes de Chicago dans l'excellent 'Harry Gets Attacked' où le compositeur a la bonne idée de reprendre la rythmique de batterie rock/guitares électriques du 'Main Titles', avec l'harmonica toujours présent pour le côté 'country' de sa partition. La musique continue ainsi de développer cette ambiance polar énergique, avec un travail instrumental original de la part de Revell (on pense parfois au style d'un Thomas Newman, genre 'American Buffalo', ou à du Edward Shearmur).

'A Bet On A Horse' est ainsi tout à fait représentatif du style de 'Phoenix', avec rythmique, guitares, basse et quelques sonorités électroniques assez recherchées, preuve que le compositeur sait sortir de l'ordinaire quand il le veut (et ce même si le score de 'Phoenix' n'a rien de révolutionnaire en soi). 'A Trap Is Laid' nous plonge quand à lui dans l'ambiance plus noire du score. En maintenant sa rythmique de percussions accrocheuse, Revell souligne de manière assez sombre l'un des moments de suspense du film. Le compositeur revient à la partie plus mélancolique et intime de son score avec le très beau 'Harry Wins A Bet', faisant intervenir une voix féminine avec une écriture orchestrale plus intime, dominée par le piano et quelques cordes. On retrouve cette ambiance intime dans le poignant 'Getting Things Sorted Out/Doing The Right Thing' pour la résolution finale d'Harry. Ce dernier est blessé et sait qu'il doit se racheter avant de mourir. Avec un thème mélancolique déjà présent dans 'Never Cheat', le morceau illustre entre autre le passage où il s'arrête brièvement en voiture devant la maison de Leila, en sachant qu'il ne la reverra plus jamais. Le morceau de Revell illumine cette scène de manière assez poignante et évoque l'idée de la rédemption, du rachat des fautes, de nos pêchés. La voix féminine revient pour apporter une touche encore plus humaine à ce très beau passage du score de 'Phoenix'.

Tout le reste du score se déroule ainsi sur une ambiance polar/suspense comme le sombre 'A Bet On Life' ou le plus orchestral 'Joey Gets A Lesson' (scène où Harry menace et sermonne le jeune Joey dans sa cellule), Revell conservant la rythmique rock/pop amorcée dans le 'Main Titles' et variée dans des pièces telles que le sympa 'A Game Of Cards' ou 'Harry's Darker Side', où Revell utilise aussi ces espèces de saxophones aux sonorités étranges. Si vous appréciez les scores de Revell qui sortent un peu de son style orchestral habituel, vous devriez apprécier 'Phoenix', même si ce dernier n'a rien de vraiment renversant. 'Phoenix' fait partie des scores méconnus du compositeur, une partition aux accents rock/country assez sympa, à découvrir si, comme moi, vous appréciez les divers travaux de ce compositeur toujours trop sous-estimé.


---Quentin Billard