'The Whole Nine Yards' (rebaptisé 'Mon voisin le tueur' en V.F.) met en scène Nicholas Oz, un dentiste (Matthew Perry) qui découvre que son nouveau voisin n'est autre que Jimmy Tudeski dit 'la tulipe' (Bruce Willis), un célèbre tueur à gage professionnel. Terrorisé par cette découverte, Oz ne va pas tarder à se lier d'amitié à Jimmy, qu'il considère finalement comme un type sympa malgré son appréhension. Il découvre finalement que la tête de Jimmy est mise à prix pour une somme colossale. Effectivement, un mafieux nommé Janni Gogolak (Kevin Pollak) le recherche afin de lui faire la peau. Endetté et coincé avec une épouse perverse, Sophie (Rosanna Arquette) et une belle-mère diabolique, Oz se laisse finalement convaincre par sa femme de partir à Chicago pour dénoncer Jimmy Tudeski à Gogolack. Ce dernier détient chez lui Cynthia Tudeski (Natasha Henstridge), la femme de Jimmy. La situation se complique alors le jour où Oz rencontre Cynthia. Pour le dentiste naïf et sympathique, c'est le coup de foudre immédiat. Il va très vite tomber amoureux d'elle, et réciproquement. Oz explique finalement à Cynthia qu'il n'a jamais voulu que tout cela arrive et qu'il ne souhaite la mort de personne. Avec l'aide de son complice Franklin Figueroa (Michael Clarke Duncan), Jimmy va tendre un piège à Gogolak et projette de l'éliminer pour de bon. Il passera ensuite à sa femme et à Oz, devenu un témoin gênant. L'amitié entre Oz et Jimmy va t'elle finalement survivre à cette rude épreuve?

Voici sans aucun doute la meilleure comédie réalisée par un Jonathan Lynn pour une fois inspiré. L'excellent scénario de Mitchell Kapner nous plonge dans l'univers des tueurs à gage sur fond d'intrigue de vaudeville loufoque aux rebondissements multiples. Malgré la présence imposante de Bruce Willis en tueur à gage stoïque avec des principes moraux rigides, c'est Matthew Perry (plus connu pour son rôle de Chandler dans 'Friends') qui mène ici la partie, son personnage de Nick Oz accumulant gags en tout genre. A vrai dire, on sourit lorsque l'on voit tout ce qui arrive au pauvre Oz, coincé entre ses dettes, sa femme diabolique, son nouveau voisin qui l'entraîne dans une combine dangereuse et des mafieux pas très recommandable, sans oublier Jill St.Claire (Amanda Peet), l'assistante d'Oz qui se découvre une passion pour les tueurs à gage et qui décide finalement d'apprendre le métier en compagnie d'une star du genre, Jimmy Tudeski. Le scénario accumule gags, suspense et rebondissements astucieux avec un rythme toujours très soutenu, et même si l'histoire finit parfois par devenir légèrement confuse. A noter un casting assez sympa mené par un duo Bruce Willis/Matthew Perry assez étonnant. On pourra néanmoins reprocher le côté parfois immoral de l'histoire, qui tente de rendre sympathique aux yeux du public un tueur à gage qui a déjà assassiné plus d'une quinzaine de personnes. Ceci étant dit, 'The While Nine Yards' est un film qui ne doit pas être pris au sérieux. Cela reste avant tout une comédie très divertissante sur fond de suspense et d'intrigue criminelle un peu farfelue, baignée dans un certain humour noir et un second degré omniprésent.

Après avoir composé la musique de 'My Cousin Vinny' et 'The Distinguished Gentleman', Randy Edelman collabore pour la troisième fois sur une comédie de Jonathan Lynn avec 'The Whole Nine Yards', pour lequel il nous livre un sympathique score teinté de jazz, de rythmiques sympas, de synthés ambiants avec un peu d'orchestre. 'Jimmy The Tulip' donne d'emblée le ton du score: un thème espiègle avec un saxophone bien profond, une batterie assez agressive avec une basse, une guitare électrique, quelques cordes en staccatos tendance 'ambiance thriller' et un accordéon un peu kitsch 'à la française' (l'histoire se passe au Canada - allez savoir pourquoi Edelman associe l'accordéon au Canada). A noter l'utilisation d'un orgue hammond qui amène une agréable touche 'blues' à certains morceaux du score. Pas de doute possible, on a ici à faire à un score de comédie typique d'Edelman, très rythmé et plein d'humour à la fois. On est surpris dans un premier temps de l'approche instrumentale privilégié par Randy Edelman, bien loin ici du style d'un 'The Distinguished Gentleman' ou d'un 'While You Were Sleeping'. Le reste du score va s'attacher à suivre ce style en accompagnant le film avec un certain humour noir proche de l'ambiance 'comédie criminelle' du film.

Dans 'A New Neighbor', Oz rencontre Jimmy Tudeski, son nouveau voisin. On notera ici le côté un peu blues du morceau, privilégiant basse, rythmique légère et discrète, synthé, orgue hammond, piano et guitare électrique. On est parfois proche ici d'une musique de vieux polars à l'ancienne, Edelman étant parfois même proche du ton de la pastiche. Ceci étant dit, le compositeur prend son travail très au sérieux et nous offre une série de pièces peu originales en soi mais toujours très agréables, surtout dans le film, où la musique a tendance à détendre l'atmosphère et à asseoir le côté comédie du film. Oz se laisse finalement convaincre par sa femme dans 'Did You Say Divorce?' où Edelman évoque la diabolique séductrice Sophie en ayant recours à une trompette d'ambiance 'blues/slow' pour le côté sensuel du personnage de Rosanna Arquette, et ce un peu avant que le morceau ne parte dans une sympathique ambiance rock/blues avec batterie, basse, guitare électrique, piano, orgue hammond, etc. 'The Whole Nine Yards' nous change un peu des habituelles partitions simplettes et mielleuses que le compositeur a l'habitude d'écrire pour des comédies romantiques. Ici, on sent le côté plus professionnel du musicien, visiblement très à l'aise dans ce style de musique - et à l'inverse de nombreuses partitions de Randy Edelman, on ne sent pas vraiment le côté niais de son style musical ici.

'The Gogolak Mansion' reprend les cordes 'thriller' staccato du générique de début, Edelman accentuant au passage l'ambiance plus sombre du score pour la partie 'polar' (Gogolak est déterminé à faire la peau à Jimmy - Edelman maintient alors la tension de manière assez simpliste mais efficace). La rencontre entre Cynthia (Natasha Henstridge) et Oz se fait sur une nouvelle ambiance jazzy sensuelle avec guitare électrique, basse, vibraphone et quelques synthés atmosphériques, tandis que 'Yanni on a String' nous permet d'entendre un nouveau thème, associé ici à Gogolak. On notera ici l'utilisation étonnante d'un violon aux accents tziganes sur fond de partie orchestrale plus sombre. On notera un nouveau passage sympa avec quelques synthés atmosphériques un peu étranges dans 'Frankie Figs' (Edelman évoque alors le personnage interprété par Michael Clarke Duncan) tandis que 'The Gang Arrives In Montreal' nous plonge quand à lui dans le suspense lors de l'arrivée de la bande à Gogolak à Montréal, venu pour descendre Jimmy. Edelman réutilise les cordes sombres de 'The Gogolak Mission' tout en maintenant la tension par le biais des synthés, du piano et des cordes (il s'agit de la scène où Gogolak et ses sbires se cachent dans la maison où Jimmy et Jill vont leur tendrent un piège). On pourra peut-être regretter le fait que ces passages de suspense soient nettement moins intéressants que toute la première partie plutôt orientée vers des pièces de rock/blues/jazz plus sympa, et surtout plus marquants sur les images du film.

On ne pourra pas passer à côté de 'A Swingin' Barbecue' (Jimmy fait brûler les deux cadavres dans la voiture de Oz), étonnant morceau de swing tranquille qui reprend le thème de Jimmy Tudeski de manière toujours assez inventive - bizarrement, il semblerait d'ailleurs que ce thème ait plutôt tendance à irriter la plupart des béophiles, qui disent rarement du bien de cette sympathique partition de Randy Edelman. Oz s'échappe avec Cynthia dans 'Oz Gets A Surprise', nouvelle pièce de suspense plus atmosphérique dans laquelle Edelman utilise des percussions électroniques dans un style plus 'action'. On a alors droit à une petite pause intimiste dans 'Say I Do' où l'on retrouve un 'Love Theme' (entre Oz et Cynthia) dans le style plus romantique d'Edelman, avant que ce dernier nous livre un nouveau passage plutôt rock/jazzy. Le Love thème revient dans 'Sensuous Lady' et évoque l'attirance réciproque entre Cynthia et Oz (à noter ici la sympathique utilisation d'une trompette et d'une guitare avec les traditionnelles cordes mielleuses du compositeur). Nouvelle ambiance rock/blues dans l'excellent 'I Think We'll Be Fine' (solo de guitare électrique très cool pour la scène de l'échange de dentition - la musique amène un rythme très divertissant pour cette séquence préparant le final du film) tandis que 'Scheming On The Boat' nous ramène dans le suspense et la tension, Edelman décrivant un climat d'incertitude lié à Oz, qui ne sait pas encore comment tout cela va finir. 'Discovering The Evidence' continue de faire monter la tension comme 'The Games'Afoot', la dernière partie du score se situant ainsi très clairement dans le domaine du suspense et des percussions électroniques plus agressives. Le score s'achève finalement sur une ultime reprise du thème de saxophone de Jimmy Tudeski dans 'The Tulip Reprise'.

Vous l'aurez compris, 'The Whole Nine Yards' est un score assez enthousiasmant, développant un style entre rock/blues/jazzy avec quelques pièces de suspense plus sombre et plus caractéristique du style orchestre/synthé de Randy Edelman. Injustement descendu par la plupart des béophiles qui trouvent ce score inintéressant et ennuyeux, 'The Whole Nine Yards' est pourtant l'un des plus sympathiques score de comédie que le compositeur nous ait offert au cours de ces 5 dernières années, Edelman nous dévoilant son goût pour des ambiances rythmiques plus modernes et plus jazzy. Laissez donc une chance à 'The Whole Nine Yards', vous y découvrirez un Randy Edelman en pleine forme qui, pour une fois, ne se contente pas d'accumuler des thèmes simplets et des harmonies un peu maladroites!


---Quentin Billard