Musique  composée par:

Alan Silvestri

Editeur:


Réalisateur:
Michael Apted
Genre:
Comédie
Avec:
Richard Pryor, Rachel Ticotin.

(c) 1987 Paramount Pictures.

Note: ***
CRITICAL CONDITION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Alan Silvestri
Saviez-vous que travailler dans un hôpital, c'est rigolo? Bien sûr que non, mais c'est un peu ce que tente de nous faire croire 'Critical Condition' (Toubib malgré lui), la comédie débile et délirante de Michael Apted. Cette histoire de fou commence lorsqu'un certain Eddie se fait surprendre en flagrant délit par la police alors qu'il est impliqué involontairement dans un trafic de bijou. Pour éviter de se retrouver en prison et de se faire descendre par le trafiquant qui a juré de lui faire la peau, croyant qu'il l'a volontairement balancé aux flics, Eddie se fait passer pour un dingue et se retrouve interné dans le service psychiatrique d'un hôpital. Tout va bien jusqu'au soir où un orage provoque une panne de courant dans tout l'hôpital. Alors qu'il essaie de voler son dossier, Rachel Atwood (ravissante Rachel Ticotin), l'administratrice de l'hôpital, le surprend dans un bureau et le prend pour un médecin de l'hôpital. Eddie n'a désormais plus d'autre choix: s'il veut s'en sortir, il va devoir jouer le jeu, même s'il ne connaît absolument rien à la médecine. Pendant qu'il s'amuse à se prendre pour un docteur, Stucky (Joe Dallesandro), un criminel qui se trouve lui aussi dans l'hôpital, va tout faire pour tenter de s'échapper en s'emparant des clés du bateau, clés que détient Rachel elle-même.

'Critical Condition' n'est pas crédible pour un sou, et ce du début jusqu'à la fin. Michael Apted est parti de l'idée d'un quiproquo qui transforme un petit combinard modeste en docteur d'un hôpital agité et surchargé en pleine nuit d'orage. Evidemment, on a droit ici à une sorte de grosse caricature du monde hospitalier, sans aucune crédibilité à l'affaire. On se demande même d'ailleurs comment le personnage interprété par le délirant Richard Pryor arrive même à se faire passer pour un docteur, tant il est tellement mauvais dans ce 'rôle' (bizarre qu'aucun des spécialistes de l'hôpital ne découvre la vérité plus tôt?). Pour en revenir à Richard Pryor, c'est lui qui mène le spectacle ici, mais quel spectacle! Pryor surjoue totalement du début jusqu'à la fin, à tel point qu'il en devient sérieusement gonflant au bout d'une demi heure! Pryor en fait donc des caisses (on dirait qu'il s'est lancé le défi de concurrencer Eddie Murphy dans le même registre - coïncidence, son personnage s'appelle d'ailleurs Eddie), le réalisateur ayant été apparemment convaincu que plus il en ferait, plus il serait marrant, et pourtant, c'est loin d'être le cas! Avec des gags stupides et gros comme des immeubles (cf. scène où Eddie fait rentrer un hélicoptère dans le hall d'entrée de l'hôpital pour remplacer avec le souffle des hélices l'air conditionné qui est éteint), 'Critical Condition' a beau être marrant deux ou trois fois, il n'en reste pas moins une comédie lourde, débile, stupide et sans une once de crédibilité.

Alan Silvestri a décidément eu une année 'comédie' en 1987, car, mis à part son chef-d'oeuvre, 'Predator', ses trois autres partitions de cette année ont été écrites pour 'Overboard', 'Outrageous Fortune' et 'Critical Condition'. Il est d'ailleurs étonnant de constater à quel point ses trois partitions comédies, assez méconnues, ont un même point commun: l'utilisation du synclavier très années 80 et des rythmiques pop typiques du Silvestri de cette époque. 'Critical Condition' ne déroge pas à la règle et affirme dès l'ouverture du film un style synthé/pop avec une rythmique bien speedé, cool et très entraînante. Evidemment, cette musique électronique/pop bien kitsch sent bon les années 80, mais on se laisse malgré tout entraîner, pour peu que l'on apprécie cette facette moins connue du compositeur attitré de Robert Zemeckis. Le générique de début permet ainsi au compositeur d'affirmer son premier thème sur fond de rythmique cool et rapide, qui sera rejointe plus tard par un saxophone jazzy soliste, dans un style qui n'est pas sans rappeler son travail effectué sur 'Romancing The Stone' de Zemeckis en 1984. La rapidité de la rythmique de ce premier thème de synthé pourrait ainsi évoquer astucieusement la panique et l'agitation qui s'empare de l'hôpital durant cette nuit d'orage qui va vite paraître interminable pour tout le personnel et les patients de l'hôpital. C'est aussi l'occasion pour le compositeur de nous rappeler son goût pour ces musiques de synclavier qu'il affectionnait tant à ce moment-là.

Le score de Silvestri va être utilisé avec une extrême parcimonie dans le film. Sur les 100 minutes de film, on doit à peine entendre 25 ou 30 minutes de musique, preuve que le film aurait d'ailleurs presque put se passer de la musique de Silvestri. On se demande alors si le score du compositeur n'est pas de trop dans le film de Michael Apted? Pas du tout, car si ses interventions se font rares, c'est pour mieux apporter de l'énergie au film lorsque le score intervient. Passé une reprise de la rythmique pop/synthé du début lors de la séquence où Eddie tente de s'enfuir dans une ambulance au début du film, on trouvera même quelques pièces de style thriller/suspense pour évoquer la menace du criminel, Stucky. C'est dans ces moments là où l'on retrouve les synthétiseurs atmosphériques et glauques qui annoncent déjà le style de 'The Abyss' et qui ne sont pas sans rappeler le travail effectué par le compositeur sur 'No Mercy' (1986). Ces morceaux de suspense rompent brutalement avec le côté cool et détendu du reste du score, apportant un peu de piment à la modeste partition du compositeur (on pourra peut-être regretter le côté parfois un peu 'cheap' de certains morceaux de suspense), la tension trouvant même son point culminant au cours de la poursuite finale entre Stucky et Rachel, avant qu'intervienne Eddie qui s'improvise héros pour l'occasion.

Evidemment, Silvestri évoque aussi la relation entre Eddie et la jolie Rachel par le biais du traditionnel 'Love Theme', écrit pour orchestre, synthé et saxophone soliste typiquement romantique. Là aussi, on pourra critiquer le côté un peu kitsch et stéréotypé de ce morceau romantique de sax, mais c'est ce pourtant tout ce qui donne son charme à cette sympathique musique qui n'a rien de bien originale mais qui réaffirme au moins un talent certain de la part du compositeur pour illustrer en musique des comédies en tout genre. On regrettera le fait que le 'Love Theme' ne soit pas un peu plus présent tout au long du film, Silvestri ayant même composé une variation jazzy sur ce thème, honteusement absente du film et uniquement entendue sur une obscure compilation pirate dédiée aux musiques d'Alan Silvestri. A noter, pour finir, que la musique fait même intervenir la célèbre 'Chevauchée des Walkyries' de la Tétralogie de Richard Wagner, lors d'une scène où Eddie monte dans l'hélicoptère où le réalisateur s'est amusé à faire un gros clin d'oeil humoristique et bien lourd à 'Apocalypse Now' (1979). Bilan: un petit score comédie modeste, banal et assez anodin mais sympa malgré tout. Au final, il est dommage que le score de 'Critical Condition' n'ait jamais été édité, car, à l'instar des sympathiques 'Overboard' et 'Outrageous Fortune', ce petit score comédie mériterait de trouver sa place sur une galette, pourquoi pas une compilation qui regrouperait ces 3 scores comédies composés la même année que 'Predator'?


---Quentin Billard