1-Tell Me Now
(What You See) 4.34*
2-Woad To Ruin 11.31
3-Do You Think I'm Saxon? 8.42
4-Hold The Ice 5.42
5-Another Brick In
Hadrian's Wall 7.11
6-Budget Meeting 9.43
7-All of Them! 10.24

*Interprété par Moya Brennan
Musique de Hans Zimmer
Paroles de Moya Brennan

Musique  composée par:

Hans Zimmer/
Nick Glennie-Smith

Editeur:

Hollywood Records
HR 2061-62461-2

Produit par:
Bob Badami, Trevor Morris
Monteur de la musique:
Mike Higham
Musique additionnelle de:
Nick Glennie-Smith,
Rupert Gregson-Williams

Artwork and pictures (c) 2004 Touchstone Pictures & Jerry Bruckheimer, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
KING ARTHUR
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer/
Nick Glennie-Smith
Pour sa nouvelle production, Jerry Bruckheimer a décidé de s'attaquer cette fois-ci de manière ambitieuse à la légende du roi Arthur. En confiant la réalisation au très demandé Antoine Fuqua, Bruckheimer s'assure déjà un spectacle d'action épique hollywoodien comme le producteur les affectionne tant, et sur ce plan, 'King Arthur' ne déçoit pas. La seule véritable originalité du film vient donc du fait que 'King Arthur' est le premier film à vouloir se pencher sérieusement sur le mythe que nous connaissons tous pour le reformuler sous un angle plus historique - une sorte de démystification de l'histoire du roi Arthur et de ses célèbres chevaliers de la table ronde. Effectivement, le film s'inspire de récentes découvertes d'historiens qui pensent avoir retrouvé la trace d'un homme qui pourrait être à l'origine du mythe du roi Arthur. Mais il faut néanmoins préciser que le film extrapole totalement, car aujourd'hui encore, aucun historien n'est à même de dire si cet individu a réellement existé et surtout, s'il a fait tout ce que la légende lui attribue. Néanmoins, nous voilà plongé avec 'King Arthur' dans le 5ème siècle après J.C., à l'époque où l'Empire romain dominait encore une bonne partie de l'Europe et du reste du monde. Cela fait maintenant plus de 5 siècles que l'Empire romain règne sur la Grande-Bretagne, mais cette domination ne cesse de se fragiliser au fil du temps, et les romains finissent par quitter l'île en proie aux invasions saxonnes. Lucius Artorius Castus dit 'Arthur' (Clive Owen) est l'un de ces bretons qui se bat pour défendre la cause de l'Empire romain et protéger la Bretagne des invasions barbares. Avant d'être libéré de ses obligations, Rome lui confie une dernière mission: Arthur et ses chevaliers doivent se rendre dans un petit village afin d'évacuer des proches du Pape et des les ramener en lieu sûr. Arrivé au village, Arthur découvre une population misérable en train de mourir de faim. Il découvre aussi une espèce de prison secrète dans laquelle des hommes d'église détiennent des étrangers torturés pour hérésie. La plupart sont morts sauf un enfant et une belle femme qui a survécu à la torture. Cette femme s'appelle Guenièvre (Keira Knightley) et fait partie des guerriers menés par Merlin (Stephen Dillane), l'un des opposants à Arthur et qui, face à la montée de la menace saxonne, va s'unir avec Arthur et ses chevaliers pour repousser l'invasion barbare. Arthur prend soudainement conscience que lui et ses hommes constituent l'ultime rempart au massacre programmé par les Saxons. Il prend aussi conscience que chaque homme devrait avoir le droit de choisir son destin, sa liberté. Sur le chemin du retour, alors que ses hommes ramènent le peuple à l'abri du Mur d'Hadrien, Arthur doit choisir son destin: s'il revient et accepte les ordres lui rendant sa liberté, il pourra partir vivre en paix, mais s'il refuse ces ordres et qu'il s'oppose aux Saxons, il sait qu'il accomplira quelque chose de grand même s'il doit donner sa vie pour cela.

'King Arthur' part donc du mythe pour nous en proposer une version plus réaliste et probablement plus exacte d'un point de vue historique, bien que sur ce point, rien encore n'a été formellement prouvé. Ici, pas de quête du Graal, pas d'amour interdit entre Lancelot et Guenièvre (bien qu'un ou deux plans suggèrent que Lancelot est attiré par Guenièvre), pas de mythe entourant l'épée d'Excalibur, pas de Merlin l'enchanteur qui jette des sorts, etc. Tous ces personnages sont présents mais agissent comme des individus normaux et réalistes aux yeux du public, car le véritable enjeu du film est bel et bien là: présenter les hommes qui se cachent derrière le mythe. Evidemment, Arthur et ses chevaliers restent les héros que nous connaissons tous, et qui ont inspiré toutes ces histoires de bravoure, de responsabilité, de courage, de loyauté, une sorte d'idéal chevaleresque pour des hommes qui se sont battu pour faire du monde un endroit plus juste où chaque individu pourrait choisir librement son propre destin. C'est en tout cas le but recherché par Jerry Bruckheimer et le réalisateur Antoine Fuqua (à noter que c'est Michael Bay qui devait réaliser le film à l'origine). Techniquement très réussi le film, mélange habilement drame et combats épiques tendance 'Braveheart', mais sans la violence de ce dernier, car 'King Arthur' paraît finalement très édulcoré et assez grand public, ce qui paraît peu étonnant quand on connaît la politique 'frileuse' de Bruckheimer en matière de spectacle. Clive Owen domine littéralement le film en apportant au personnage d'Arthur une dose d'honneur et de virilité saisissante à l'écran (il joue beaucoup de son regard sombre durant tout le film). Keira Kinghtley est elle aussi remarquable dans le rôle de la belle et légendaire Guenièvre, qui deviendra plus tard la femme d'Arthur. En revanche, on est un peu plus déçu par Ioan Gruffudd qui campe un Lancelot plutôt fade et par moment inexistant. La réalisation est assez bonne même si l'on pourra toujours regretter ces effets de mise en scène un peu lourds comme une utilisation très cliché de ralentis ou des répliques parfois très stéréotypées typique des productions Bruckheimer. Confié à un autre producteur et un autre réalisateur plus intègre et moins plié aux exigences du grand manitou d'Hollywood, il ne fait nul doute que 'King Arthur' aurait pris une toute autre dimension (certainement moins édulcorée). Mais que l'on se rassure, malgré une mise en scène anecdotique et quelques lourdeurs, 'King Arthur' n'en demeure pas moins un excellent divertissement qui apporte une dimension plus humaine et plus dramatique à l'histoire du roi Arthur!

Décidément, Hans Zimmer fait partie des compositeurs les plus demandés en ce moment à Hollywood, à tel point que ses futurs projets pour l'année 2005 et jusqu'en 2007 se multiplient encore plus vite que ses propres nouvelles compositions. C'est dire à quel point Hans Zimmer est devenu le musicien de référence à Hollywood. Pour son nouveau score pour 'King Arthur', Zimmer nous délivre un gros score à la fois épique et dramatique dans la lignée de 'Gladiator' et 'The Last Samurai', mais en un peu plus inspiré que ce dernier. Quel musicien pourrait rester indifférent à l'imagerie mythique du roi Arthur et de ses fidèles chevaliers? Quel musicien n'aurait pas envie de dédier sa musique à ces histoires de bravoure, de responsabilité et de loyauté? Même si 'King Arthur' démystifie la légende, Zimmer a cependant opté pour une approche épique de l'histoire, renforçant le côté grandiose du film d'Antoine Fuqua. Pour se faire, le compositeur renoue avec ses formules habituelles: un gros orchestre avec un solide pupitre de percussions, un choeur d'hommes à la 'Crimson Tide', quelques synthés à la M-V, des solistes vocaux et quelques thèmes marquants. Le thème principal, que Zimmer nous propose en chanson pour le générique de fin ('Tell Me Now (What You See)') et qu'interprète brillamment la chanteuse Moya Brennan, s'avère être un bel hommage rendu à cette histoire légendaire. Simple en apparence, le thème principal prend très vite une tournure de plus en plus dramatique tout au long du film, associé à Arthur et ses chevaliers en quête de liberté. C'est d'ailleurs cette ambiance dramatique qui attire particulièrement notre attention ici, la musique apportant très souvent une atmosphère de désolation et de drame au film, et ce malgré le côté épique et guerrier de l'univers de 'King Arthur'. 'Woad To Ruin' pose les bases de la partition avec l'orchestre dominé par des timbales martelées, des cuivres imposants et le traditionnel choeur d'hommes évoquant les exploits de ces héros de légende. Ici aussi, la musique possède un côté sombre que ne tardera pas à nuancer un premier thème plutôt épique associé à Arthur, et que l'on entend principalement au début du film. A l'écoute de ce thème, lui aussi très simple en apparence, impossible de ne pas penser immédiatement à ces idées chevaleresques de courage, de loyauté, de détermination. La musique apporte indiscutablement un plus au film de Fuqua, tout en renforçant le côté dramatique voulu par le réalisateur et le producteur. La seconde partie de 'Woad To Ruin', plus épique, nous fait plonger dans l'action à grand renforce d'orchestre et de percussions déchaînées typiques du compositeur, accompagnant la première scène d'attaque du film.

Dans 'Do You Think I'm Saxon?', la musique prend une proportion épique massive qui rappelle indiscutablement la musique d'Howard Shore pour la trilogie des 'Lord of The Rings'. On retrouve ce même esprit massif, ces percussions surpuissantes et ce mélange orchestre/choeur épique pour une scène avec les troupes saxonnes. L'avancée des barbares se fait d'ailleurs à grand renfort de timbales martelés lourdement d'une manière menaçante et pesante et de cuivres graves (trombones et cors principalement) qui décrivent à merveille le côté barbare des troupes dirigées par le sombre Cerdic (Stellan Skarsgard). On pourra juste regretter le fait qu'une fois encore, le mixage de la musique dans le film soit plutôt hasardeux, le score étant très souvent noyé sous des tonnes d'effets sonores qui rendent difficile l'audition de la musique dans le film, le but ayant apparemment été de faire le plus de bruit possible lors des séquences guerrières. Avec 'Woad To Ruin' et 'Do You Think I'm Saxon?', Zimmer évoque à la fois les chevaliers d'Arthur et les troupes saxonnes, chacun possédant ses propres caractéristiques musicales. Le compositeur en profite aussi pour dévoiler ses deux premiers thèmes et poser les bases de sa partition.

'Hold The Ice' dévoile quant à lui le troisième thème, un magnifique 'Love Theme' décrivant l'amour entre Arthur et Guenièvre, confié ici à la magnifique voix éthérée de Moya Brennan pour une des plus belles scènes du film (le visage de Guenièvre éclairée d'une lumière bleue, avec celui d'Arthur, éclairé d'une lumière plus vive, plus rouge et sombre). Le 'Love Theme' possède une certaine tristesse d'âme, un mélange entre une nostalgie poignante et une résignation qui rejoint une fois encore le côté dramatique de la partition de Zimmer. Ce passage du 'Love Theme' avec la voix de Moya Brennan est sans aucun doute l'un des moments forts du score de 'King Arthur', suivi plus tard de l'excellent morceau d'action épique pour l'affrontement sur la glace, qui se conclut avec une magnifique reprise du thème principal dans une version grandiose pour choeur, percussions et orchestre. La voix éthérée de 'Hold The Ice' nous rappelle la féminité de Guenièvre (qui est pourtant une guerrière accomplie) et l'union des deux amoureux qui cherchent le repos et la paix dans l'amour. Avec peu de moyen pour cette scène, Zimmer a réussit à lui conférer une dimension quasi spirituelle poignante à souhait.

Plus épique, 'Another Brick In Hadrian's Wall' utilise un thème plus majestueux sur fond de percussions martiales pour évoquer les exploits d'Arthur et de ses chevaliers lorsque ceux-ci décident finalement de tenir tête aux saxons, ce qui permet alors à Zimmer de nous délivrer un nouveau passage d'action viril et héroïque à la fois (quel dommage que ses thèmes soient trop stéréotypés. On reconnaît trop par moment les origines de certains thèmes qui rappellent 'The Last Samurai', 'Gladiator' ou même 'Pirates of The Carribean'). Finalement, 'Budget Meeting' décrit l'affrontement final entre les saxons et les troupes d'Arthur à grand renfort de percussions massives, d'orchestre et de choeurs grandioses comme Zimmer nous en a rarement donné à entendre ces derniers temps. Surpuissant, le 'Budget Meeting' (un titre bien bizarre qui sent l'ironie à plein nez - Zimmer a t'il fait référence au renvoi de Michael Bay pour un problème de budget?) apporte une ultime touche épique quasi apocalyptique à cet affrontement final comme chaque béophile était en droit de s'y attendre. Hans Zimmer ne nous surprend pas mais tient malgré tout ses promesses. Il nous livre un score d'action épique musclé et dramatique, qui transcende le film et ses images, constituant sans aucun doute l'un des atouts majeurs de 'King Arthur', qui se conclut finalement sur l'excellent 'All of Them!' où Zimmer récapitule ses principaux thèmes (superbe reprise vocale poignante du 'Love Theme' pour le final). Evidemment, ceux qui aiment la retenue et la subtilité pourront passer leur chemin, car, en dehors du 'Love Theme' poignant de 'Hold The Ice', le score de 'King Arthur' est tout sauf subtil, mais à quel autre genre de musique peut-on s'attendre pour un film qui ne parle que de batailles et de liberté durant près de deux heures?

Au final, 'King Arthur' est une bonne surprise de la part d'un Hans Zimmer qui n'avait pas particulièrement brillé de son inspiration ces derniers temps après quelques récentes déceptions. Ceux qui apprécient le Zimmer de l'action épique pourront se régaler avec l'excellent 'King Arthur', dans lequel le compositeur délaisse ses synthétiseurs habituels (même s'ils restent mixés à l'orchestre) et nous offre une partition symphonique grandiose, dramatique et émouvante à la fois. Certes, ne vous attendez pas à quelque chose de très original ou de particulièrement inoubliable ici. Zimmer fait ce qu'on lui dit de faire, point, mais cette fois-ci, le compositeur allemand s'est surpassé, et, à défaut d'avoir livré un grand chef-d'oeuvre, Zimmer nous permet d'entendre son brillant hommage musical rendu à cette histoire légendaire d'Arthur et de ses fidèles chevaliers. Reste que l'on pourra toujours regretter le traitement moderne de la musique et le manque d'authenticité du travail de Zimmer, un problème qui n'existait pas à l'époque des films épiques du 'Golden Age' Hollywoodien, lorsque des compositeurs comme Miklos Rozsa n'hésitaient à faire des recherches sur la musique de l'époque lorsqu'il composait par exemple pour un film épique comme 'Ben-Hur'. Mais la mentalité vis-à-vis des films et de la musique a aujourd'hui bien changé à Hollywood, et on ne parle plus désormais que d'efficacité et de recette. C'est pour cette raison que dans ce contexte de médiocrité ambiante, il est bon de pouvoir encore entendre un compositeur maîtriser pleinement son sujet malgré un large problème d'originalité et de recettes déjà bien éculées. Un score recommandé, tout simplement!


---Quentin Billard