Hans Zimmer
Compositeur emblématique de la musique de film moderne, et aussi l’un des plus populaires à l’heure actuelle (2017), Hans Zimmer est un personnage à part dans le monde de la musique au cinéma, paradoxalement l’un des plus populaires et des plus contestés. Il est celui à qui l’on doit ce style musical moderne électronique que l’on entend régulièrement au cinéma ou dans les médias de nos jours, bien que d’autres musiciens aient tenté une approche musicale moderne bien avant lui, en insufflant le rock, la variété ou la musique électronique dans leurs compositions pour le cinéma. Hans Zimmer est simplement celui qui est arrivé à temps dans le monde du septième art pour cristalliser toutes ces méthodes et les ériger en véritables dogmes musicaux reconnaissables entre mille.

Né le 12 septembre 1957 à Francfort en Allemagne, Zimmer étudie très jeune le piano à seulement 3 ans, mais ses cours ne durent que quelques semaines. Il n’apprend pas le solfège et va commencer à se former sur le tas, sans prendre de cours. Après le décès de son père alors qu’il n’a que 6 ans, le petit Hans Florian se réfugie dans la musique qui devient pour lui une sorte d’échappatoire. A 14 ans, il part s’installer avec sa mère en Angleterre au cours de l’année 1971. C’est là-bas qu’il commence à se familiariser avec la musique électronique, qui connaît ses premiers balbutiements au début des années 70. Quelques années après, Zimmer débute une carrière de claviériste avec le groupe Krakatoa, puis il collabore avec les Buggles, groupe de musique new wave crée à Londres en 1977 avec Trevor Horn, Geoff Downes et Bruce Woolley – Zimmer apparaîtra même dans le clip du tube « Video Killed the Radio Stars », chanson emblématique des Buggles – Il collaborera ensuite avec les musiciens du groupe italien Krisma fondé par Maurizio Arcieri et Christina Moser en 1976, ainsi que le groupe Helden. Zimmer collaborera aussi à un album du groupe espagnol Mecano en 1985, et à l’album « Oil & Gold » de Shriekback. Il co-produira aussi le single « History of the World, Part 1 » avec le groupe de punk anglais « The Damned », single qui apparaîtra sur leur LP « The Black Album » en 1980.

Durant sa jeunesse en Angleterre, Hans Zimmer compose aussi des jingles pour les studios de production musicale Air-Edel Associates, l’un des plus importants de Londres. C’est à cette occasion que Zimmer va croiser la route du compositeur Stanley Myers, qui a déjà écrit plusieurs musiques de film dans les années 80. Ensemble, Zimmer et Myers vont fonder le Lillie Yard Recording Studio, où ils vont travailler ensemble sur des compositions alliant les instruments de l’orchestre et les instruments électroniques. Leurs premières collaborations remontent ainsi au film « Moonlighting » en 1982, suivi de « Success is the Best Revenge » (1984), « Histoire d’O : Chapitre 2 » (1984), « Insignifiance » (1985), qui marque leur première collaboration avec le cinéaste Nicolas Roeg, « My Beautiful Laundrette » de Stephen Frears (1985), sans oublier les premières collaborations avec Nico Mastorakis sur des films comme « The Zero Boys » (1986), « Terminal Exposure » (1987) ou « The Wind » (1987). Son premier effort solo, Zimmer le doit au cinéaste Philip Saville qui lui donne sa chance sur le thriller britannique « The Fruit Machine » en 1987, produit par la Cannon. Si cet effort reste largement inaperçu, on revanche, la même année, Zimmer se fait enfin remarquer sur le drame « A World Apart » de Chris Menges, évoquant l’apartheid en Afrique du sud dans les années 60.

Un an plus tard, Zimmer décroche la timbale sur « Rain Man » de Barry Levinson, premier film majeur de sa jeune filmographie qui lui permet enfin de se faire connaître du grand public en 1988. Le film gagne 4 Oscars et connaît un grand succès au cinéma. Quand à la musique de Zimmer, elle devient suffisamment populaire pour être réexploitée dans les médias et même dans des publicités ! Mais c’est sa toute première participation à un film de Ridley Scott en 1989 qui va lui ouvrir les portes de la gloire avec le polar « Black Rain » qui met en scène Michael Douglas et Andy Garcia face à un gang de yakuzas japonais. La musique électro-orchestrale de « Black Rain » impose un style nouveau qui sera très vite remarqué à Hollywood. Dès lors, les studios comprennent que l’on peut faire la musique autrement au cinéma, surtout sur des films d’action. Alors que beaucoup de compositeurs ont travaillé autour des synthétiseurs dans de nombreuses musiques de film des années 70/80, Zimmer est celui qui va populariser le genre et le rendre incontournable à Hollywood.

Après sa musique charmante et enjouée pour la comédie dramatique « Driving Miss Daisy » écrite en 1989, Zimmer débute les années 90 en se consacrant quasi exclusivement pour le cinéma américain. Les grands réalisateurs de l’époque commencent alors à faire appel à lui : John Badham l’engage sur le film d’action « Bird on a Wire » en 1990, Tony Scott lui demande d’écrire la musique rock et fun de « Days of Thunder » en 1990 – première collaboration de Zimmer à une production Don Simpson/Jerry Bruckheimer – John Schlesinger requiet ses services sur son thriller « Pacific Heights » avec Michael Keaton en 1990, ainsi que Peter Weir sur la comédie avec Gérard Depardieu « Green Card » et Ron Howard sur « Backdraft » (1991), qui marque la première collaboration de Zimmer à un film d’Howard. A noter que c’est en 1989 qu’Hans Zimmer fonde son studio de production musicale Media Ventures aux côtés de Jay Rifkin à Santa Monica. Cette démarche, originale et nouvelle à l’époque, consiste à produire des musiques pour des films, des publicités ou des jeux vidéos en recrutant et formant des compositeurs chargés d’écrire dans un style vaguement similaire. Parmi les premiers musiciens qui viennent grossir les rangs de Zimmer, on retrouve John Von Tongeren, Harry Gregson-Williams, Don Harper, Gavin Greenaway, Mark Mancina, Henning Lohner, Jeff Rona ou Michael A. Levine.

Les années 90 débutent ainsi sous les meilleures auspices pour Zimmer. De plus en plus créatif et inventif, Zimmer mélange les styles et touche à tout dans ses musiques, maîtrisant toujours plus l’électronique qu’il intègre à des parties orchestrales ou des instruments acoustiques solistes. Sa deuxième collaboration avec Ridley Scott, il la concrétise sur le film culte « Thelma & Louise » en 1991, Zimmer s’octroyant pour l’occasion les services du guitariste Pete Haycock. Le compositeur continue de travailler avec des grands noms de l’époque : Mike Nichols sur « Regarding Henry » (1991), pour lequel il remplace Georges Delerue, Richard Donner sur « Radio Flyer » (1992), John G. Avildsen sur le bouleversant « The Power of One » (1992), l’une des plus belles partitions qu’écrit Zimmer au début des années 90, Barry Levinson sur le nanar « Toys » (1992), Tony Scott sur « True Romance » (1993), Bille August sur « The House of the Spirits » (1993) ou James L. Brooks sur la comédie « I’ll Do Anything » (1994). L’année 1994 est d’ailleurs importante pour Zimmer, car le musicien connaît un premier moment fort de sa carrière en signant la musique de « The Lion King », sa première participation à un film d’animation Disney, dont l’énorme succès lui permet de gagner l’Oscar de la meilleure musique de film en 1995.

En 1994, Zimmer signe le score du film d’action « Drop Zone » de John Badham, et met le pied dans le domaine des musiques d’action, qui deviendront sa spécialité dans la seconde moitié des années 90. L’approche à la fois rock, électronique et orchestrale de Zimmer colle parfaitement avec les desideratas des studios au milieu des nineties. Le compositeur signe d’ailleurs l’une de ses meilleures musiques du genre pour « Crimson Tide » de Tony Scott en 1995, qui contient l’un des thèmes les plus mémorables que Zimmer ait écrit de toute sa carrière, thème largement réutilisé dans plusieurs bandes-annonces et dans les médias jusqu’à la fin des années 90. Dès lors, Zimmer devient LE compositeur des musiques d’action que l’on engage régulièrement lorsque l’on souhaite avoir une musique moderne et très énergique sur son film. Zimmer continue malgré tout à osciller entre les petits films et les grosses productions. Il signe notamment le drame de John Boorman « Beyond Rangoon » en 1996 ou la comédie « Nine Months » de Chris Columbus. En 1996, John Woo fait appel à lui sur le film d’action « Broken Arrow », pour lequel Zimmer nous livre un autre classique de la musique d’action des années 90, avec son fameux riff de guitare basse indissociable du bad guy campé par John Travolta dans le film. La même année, Michael Bay fait pour la première fois appel à lui pour consolider le travail de son collègue Nick Glennie-Smith sur « The Rock », l’un des meilleurs films d’action de sa génération et un vrai travail de collaboration qui démontre tout le savoir-faire de Zimmer et son équipe.

La fin des années 90 permet à Zimmer d’écrire deux partitions majeures : « Prince of Egypt » pour DreamWorks en 1998 et surtout « The Thin Red Line » pour le chef-d’œuvre de Terrence Malick en 1999, une partition contemplative et poignante d’un lyrisme extraordinaire, complètement inattendu de la part du musicien, qui semble mettre tout le monde d’accord, y compris les détracteurs du musicien. Hélas, l’avenir des studios Media Ventures s’assombrit lorsqu’un différend financier oppose Jay Rifkin et Hans Zimmer vers 2003, Rifkin poursuivant Zimmer en justice en lui réclamant 10 millions de dollars de dommages et intérêts, remettant en cause sa gestion des contrats des compositeurs qui travaillent à Media Ventures. A la suite de cela, Zimmer fonde son propre studio, Remote Control Productions, qui reste encore aujourd’hui très populaire, puisqu’il continue de recruter des compositeurs chargés d’écrire dans un style électro/orchestral moderne. Dans les années 2000, Zimmer triomphera avec des titres majeurs sur d’importants blockbusters hollywoodiens : « Gladiator » (2000) reste l’un de ses meilleurs travaux pour un film de Ridley Scott. « Black Hawk Down » impose un son particulier, fruit d’une collaboration avec de nombreux musiciens de Media Ventures. « The Road to El Dorado » et « Spirit » l’imposent comme un compositeur de film d’animation, « Pirates of the Caribbean » (2003) permet à Zimmer et son complice Klaus Badelt (qui est officiellement crédité pour la musique, tandis que Zimmer est crédité en tant que producteur mais compose pourtant une bonne partie des thèmes !) de lancer une franchise ultra populaire et d’écrire l’un des scores d’action les plus populaires de sa génération, avec ses thèmes célèbres et reconnaissables.

La suite de la carrière de Zimmer se poursuit sur le même acabit : films d’animation (« Laura’s Star », « Der kleine Eisbär 2 », « Madagascar », « Kung Fu Panda »), drame historique (« King Arthur », « The Last Samurai »), thriller, comédie (« The Holiday ») et films d’action, dont la trilogie « Dark Knight » de Christopher Nolan, pour lequel Zimmer renouvelle le style musical des films de super-héros – jusqu’ici ultra balisé à Hollywood - et impose un style de musique d’action beaucoup plus sombre et moderne à base de sound design, d’instruments solistes et d’électronique intense. Très reconnaissable, la musique des « Dark Knight » devient le nouveau modèle musical à suivre, modèle qui se concrétise dans la musique du film suivant de Nolan, « Inception » (2010), qui met en place le très controversé ‘horn of doom’, un sample conçu à partir d’un son de cuivres joués dans le grave, et que l’on entend de nos jours dans la plupart des musiques hollywoodiennes modernes ou dans les médias (même dans les émissions de télé réalité !). Plus que jamais, les années 2010 marquent la suprématie du style d’Hans Zimmer et de ses collègues de chez Remote Control au cinéma. Les studios réclament régulièrement le compositeur et ses collaborateurs sur des grosses productions en tout genre, laissant peu de temps à Zimmer pour se renouveler ou changer d’horizon.

Les années 2010 permettent aussi à Zimmer de s’orienter vers un style plus conceptuel, plus abstrait : avec le motif sonore du Joker dans « The Dark Knight » ou certaines idées développées dans « The Amazing Spider-Man 2 » ou « Interstellar », Zimmer travaille sa matière sonore et tente des choses avec plus ou moins de succès. Hélas, le compositeur devient de plus en plus critiqué en raison de son implication dans l’uniformisation d’un style musical initialement unique à Hollywood mais qui va être copié par tout le monde et totalement digéré et récupéré par les grosses majors hollywoodiennes. Aujourd’hui, pour avoir un son « branché » qui plaît au public, il faut Zimmer ou ses complices ! Le compositeur teuton devient ainsi la bête noire de nombreux critiques qui l’accusent d’appauvrir considérablement le niveau général de la musique de film, qui tire à la baisse d’année en année, notamment grâce au développement de la MAO et des moyens informatiques qui permettent à tout un chacun de s’improviser compositeur, même sans avoir de réelles connaissances en matière de composition ou d’écriture – ce qui est le cas, rappelons-le, d’Hans Zimmer – A l’heure des productions mises en musique par ses compères Junkie XL, Steve Jablonsky, Ramin Djawadi, Atli Orvarsson, Steve Mazzaro, Andrew Kawczynski, Lorne Balfe, Heitor Pereira, Henry Jackman ou Geoff Zanelli, le style de Zimmer s’est répandu partout dans les médias audiovisuels ou les jeux vidéos.

Malgré tout ce que l’on peut reprocher au compositeur allemand, force est de reconnaître qu’il est aujourd’hui l’un des symboles forts de la musique de film moderne et aussi l’un des plus populaires, l’un des rares qui soit aujourd’hui capable de toucher le grand public et d’atteindre des non-initiés, notamment à travers ses nombreux spectacles et ses master class. Conscient de ses limites en tant que compositeur, Zimmer reste lucide sur son oeuvre, mais il faut reconnaître que le musicien a su acquérir une réputation exceptionnelle en l’espace d’une trentaine d’années, de sa jeunesse en Angleterre jusqu’à sa suprématie sur les musiques de blockbusters hollywoodiens actuels. Assurément, le roi Zimmer a encore de belles années devant lui !
Sa discographie

A World Apart (1988)
Paperhouse (1988)
Rain Man (1988)
Black Rain (1989)
Driving Miss Daisy (1989)
Green Card (1990)
Pacific Heights (1990)
Backdraft (1991)
K2 (1991)
Regarding Henry (1991)
White Fang (1991)
A League Of Their Own (1992)
The Power of One (1992)
Radio Flyer (1992)
Toys (1992)
The House of The Spirits (1993)
Point of No Return (1993)
Beyond Rangoon (1994)
Drop Zone (1994)
I'll Do Anything (1994)
The Lion King (1994)
Renaissance Man (1994)
Crimson Tide (1995)
Nine Months (1995)
Something To Talk About (1995)
Broken Arrow (1996)
Muppet Treasure Island (1996)
The Rock (1996)
Smilla's Sense of Snow (1996)
As Good As It Gets (1997)
The Peacemaker (1997)
The Prince of Egypt (1998)
The Thin Red Line (1999)
Gladiator (2000)
Mission: Impossible 2 (2000)
Black Hawk Down (2001)
Hannibal (2001)
Invincible (2001)
Pearl Harbor (2001)
The Pledge (2001)
The Ring (2002)
Spirit: Stallion of The Cimarron (2002)
The Last Samurai (2003)
Matchstick Men (2003)
Tears of The Sun (2003)
King Arthur (2004)
Lauras Stern (2004)
Thunderbirds (2004)
Batman Begins (2005)
Der Kleine Eisbär 2 : Die Geheimnisvolle Insel (2005)
Madagascar (2005)
The Da Vinci Code (2006)
The Holiday (2006)
Pirates of the Caribbean: Dead Man's Chest (2006)
Pirates of the Caribbean : At World's End (2007)
The Simpsons Movie (2007)
The Dark Knight (2008)
Frost/Nixon (2008)
Kung Fu Panda (2008)
Madagascar : Escape 2 Africa (2008)
Angels & Demons (2009)
Sherlock Holmes (2009)
Inception (2010)
Megamind (2010)
Kung Fu Panda 2 (2011)
Pirates of the Caribbean : On Stranger Tides (2011)
Rango (2011)
Sherlock Holmes : A Game of Shadows (2011)
The Dark Knight Rises (2012)
12 Years A Slave (2013)
The Bible (2013)
The Lone Ranger (2013)
Man of Steel (2013)
Rush (2013)
The Amazing Spider-Man 2 (2014)
Interstellar (2014)
Chappie (2015)
Batman V Superman :Dawn of Justice (2016)
Inferno (2016)
Blade Runner 2049 (2017)
The Boss Baby (2017)
Dunkirk (2017)