1-Main Title 4.55
2-The Wrong Sword 3.50
3-Over The Top/Fish Market 5.20
4-Half an Equal 2.54
5-Lonely Road 1.57
6-"Let's Talk" 2.16
7-Interlude 1.02
8-"Can't We Do It?" 5.12
9-The Pit 4.48
10-Double Cross 5.50
11-Bamboo Forest 0.30
12-The Traitor 3.22
13-"Stay With Me" 4.25
14-"I Will Go" 1.20
15-Surprise Visitor/
Forced Entry 6.17
16-"As You Wish"/End Title 5.49

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Prometheus Records
PCR 505

Musique produite par:
Jerry Goldsmith
Montage de la musique:
Bob Takagi
Assistant de Mr.Goldsmith:
Lois Carruth
Producteur des sessions:
Bruce Botnick
Album produit par:
Ford A. Thaxton
Producteur exécutif:
Luc Van De Ven

Artwork and pictures (c) 1982/2000 CBS Broadcasting, Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE CHALLENGE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Réalisateur très versatile, John Frankenheimer aura décidément touché à tout durant sa longue carrière de cinéaste hollywoodien, que ce soit dans le domaine du polar pure souche ('French Connection'), du film d'horreur ('Prophecy'), du drame ('Grand Prix'), du thriller politique ('Seven Days in May'), du film d'action ('Ronin') ou bien encore du film de guerre ('The Train'). Avec 'The Challenge', Frankenheimer place Scott Glenn dans la peau de Rick, un ancien boxeur américain qui se retrouve mêlé malgré lui à une guerre entre deux frères japonais dans un pays qui n'est pas le sien. Contacté par un certain Toshio Yoshida (Sab Shimono), Rick se voit offrir un bon paquet de dollars en échange d'un petit boulot: faire passer clandestinement un précieux sabre à l'aéroport et le ramener à son propriétaire, au Japon. En 1944, lors d'un rituel ancestral japonais, Hideo Yoshida (Atsuo Nakamura) déroba le sabre à son grand-père. 35 ans plus tard, le précieux objet tant convoité a enfin été retrouvé à Los Angeles par Toshio et sa soeur Akiko (Donna Kei Benz). Mais sur le chemin d'Osaka, Rick et Toshio se font kidnapper par les hommes de main de Hideo, un sinistre businessman sans scrupules qui se trouve être le frère de Toru Yoshida (Toshiô Mifune), le réel propriétaire du sabre. Hideo fait assassiner Toshio et récupère alors le katana, mais il découvre qu'il s'agit en fait d'un faux. Excédé, Hideo oblige alors Rick à se rendre au dojo du sensei Toru Yoshida afin de récupérer le vrai sabre que le maître a récemment retrouvé. Cela fait maintenant plus de 35 ans que les deux frères recherchent ardemment le sabre, et comme le précieux katana est dorénavant en la possession du vieux Toru, le sinistre Hideo va tout faire pour tenter de la récupérer, quitte à affronter son frère en personne. Rick se fait alors passer pour un élève désireux d'apprendre le budo auprès du sensei Toru Yoshida et va en profiter pour dérober en cachette le sabre. Mais la force et la rudesse de son nouvel apprentissage vont faire changer sa manière de voir les choses. Après moult efforts, Rick deviendra un ninja capable de manier le sabre avec dextérité et honneur. Mais la confrontation entre Toru et Hideo devient inévitable. Après une sanglante attaque dans son dojo, Toru, bien décidé à venger son honneur, se rend dans le Q.G. ultra-protégé de son frère et va l'affronter au cours d'un combat ultime, épaulé par Rick.

'The Challenge' est un des anciens films d'action lambda réalisé par Frankenheimer dans les années 80 et aujourd'hui tombé dans l'oubli (le film n'a même pas encore été édité en DVD). Le personnage de Scott Glenn se retrouve face à un monde et une culture étrangère à laquelle il va finir par s'identifier, coincé entre deux frères ennemis qui s'affrontent autour d'un précieux sabre depuis plus d'une trentaine d'années. Le film nous dévoile toute la philosophie de l'enseignement du budo et des arts martiaux traditionnels dans un Japon à double face, le Japon traditionnel représenté par Toru Yoshida avec son sens de l'honneur, ses traditions ancestrales et son aversion pour les armes modernes, et le Japon plus moderne représenté par le cupide Hideo Yoshida et son goût pour le business et le capitalisme. En ce sens, 'The Challenge' est une bonne réussite puisqu'il réussit à montrer l'opposition et la rivalité entre ces deux mondes, sur fond d'affrontement et de rites ancestraux. Pour le reste, l'intrigue du scénario reste basique et sans surprise, le film mettant beaucoup trop de temps à démarrer et à installer un rythme accrocheur. Ce n'est que lorsque Rick commence à apprendre les enseignements du maître Yoshida que 'The Challenge' commence à montrer un semblant d'intérêt. Reste un affrontement final plutôt violent et mémorable se déroulant entièrement dans l'immense Q.G. d'Hideo dans lequel Toru et Rick affrontent chacun à leur manière les sbires du businessman, 20 minutes dignes du grand Frankenheimer. A noter un petit rôle dans le film pour Kenta Fukasaku, qui se trouve être le fils du grand Kinji Fukasaku, célèbre réalisateur japonais de 'Battle Royale'. Enfin, on notera pour finir que la chorégraphie des combats d'arts martiaux a été assurée par Steven Seagal en personne, à l'époque où il ne s'était pas encore lancé dans une carrière d'acteur!

Jerry Goldsmith avait déjà collaboré à deux reprises sur d'anciens films de John Frankenheimer, 'Seven Days in May' (1964) et 'Seconds' (1966). Pour sa troisième collaboration à un film de Frankenheimer, le maestro californien nous livre une solide partition orchestrale teintée de suspense, de touches asiatiques et de gros morceaux d'action typiques du compositeur. Ne vous attendez donc pas ici à un score aussi surprenants que 'Seven Days in May' et son concert de percussions ou l'injustement méconnu 'Seconds' et ses fameux solos d'orgue hypnotisant. La musique de 'The Challenge' évoque donc le côté action/suspense du film avec un seul et unique thème principal aux accents asiatiques, lié à Toru Yoshida et Rick. Comme d'habitude, le film s'ouvre au son du thème principal de 8 notes avec l'instrumentation asiatique typique incluant le koto (sorte de cithare d'origine chinoise à 13 cordes de soie suspendues sur des sillets mobiles) et la fameuse shakuhachi (flûte japonaise) qui possède ici un rôle important dans cette introduction où Goldsmith lui offre quelques solos. Les cordes et les vents se mettent alors en place, exprimant le mélange des cultures occidentales/orientales comme dans le film (le héros est un américain qui va adopter pendant un temps la culture japonaise). Le 'Main Title' possède un côté à la fois contemplatif, serein et mystérieux, évoquant quelque part l'idée d'une certaine spiritualité suggérée par la shakuhachi, une spiritualité ancestrale nous renvoyant aux enseignements du maître Yoshida. On appréciera ici l'ambiance à la fois mystérieuse et sereine qu'adopte Goldsmith pour cette sympathique introduction, où le thème est développé pendant plus de 4 minutes, dans un style assez envoûtant et parfait pour introduire cette histoire de vengeance dans un Japon à la fois traditionnel et moderne (une analogie simpliste consisterait à rapprocher l'orchestre symphonique à la dimension moderne/occidentale du pays, tandis que les instruments traditionnels japonais pourraient alors simplement évoquer le Japon des traditions et des rituels ancestraux).

L'action ne tarde pas à exploser dans le superbe 'The Wrong Sword', premier déchaînement orchestral dans lequel Jerry Goldsmith nous dévoile comme à l'accoutumée un grand talent dans le maniement des rythmes et des instrumentations inventives. Hormis un développement plus rythmé du thème japonais, c'est l'instrumentation et la brutalité de l'orchestre qui attire ici notre attention, illustrant la scène où Rick et Toshio se font kidnapper et brutaliser par les sbires d'Hideo Yoshida dans une camionnette, à Osaka. Goldsmith met ici l'accent sur les cuivres et des cordes frénétiques et parfois très dissonantes. Mais l'aspect le plus intéressant repose ici dans l'utilisation des percussions, incluant en plus des timbales traditionnelles, des tambours japonais, des percussions en bois et des percussions métalliques aux sonorités plus étranges qui nous renvoient très clairement ici à certaines sonorités étranges entendues dans 'Planet of The Apes'. Pour un score composé en 1982, 'The Challenge' sonne étonnement comme du Goldsmith des années 60/70 et c'est tant mieux, étant donné la qualité du score et de son instrumentation, apportant une certaine richesse à la musique dans le film. Loin de se contenter de ce premier déchaînement orchestral, Goldsmith prolonge son travail d'action sur 'Over The Top/Fish Market' pour la scène où Rick échappe aux tueurs d'Hideo dans le marché aux poissons, vers le début du film. Cuivres, cordes dissonantes et tendues, percussions diverses omniprésentes, sonorités asiatiques (koto et shakuhachi), tout est fait pour suggérer le danger qui pèse sur Rick lors de son arrivée au Japon, avec, au passage, un nouveau développement du thème principal de 8 notes, qui devient ici plus tendu, synonyme d'action et de danger.

Ces morceaux d'action particulièrement brutaux, excitants et inventifs, alternent avec des passages plus calmes comme 'Half an Equal' qui impose une atmosphère plus sombre et mystérieuse, nous renvoyant au côté contemplatif du 'Main Title', le morceau étant ici dominé par les cordes et les vents. 'Lonely Road' développe à son tour le thème et ses touches asiatiques de shakuhachi et du koto avec cordes et vents sombres qui semblent suggérer un avenir bien incertain pour Rick dans un pays et des coutumes qui lui sont totalement étrangers. 'Let's Talk' décrit alors les premières journées de Rick dans le dojo de Toru Yoshida. Goldsmith dévoile ici un petit thème plus léger et intimiste dans la scène où Rick s'adresse au jeune enfant et commence à se lier d'amitié avec lui. Les cordes, les vents ainsi que les harmonies se veulent plus chaleureux, dans un style presque nostalgique et vraiment très touchant, apportant un peu d'émotion à un score sombre et souvent agressif. On notera le côté plus suspense de 'Can't We do It?' avec ses cordes dissonantes dans la scène où Rick vole le sabre et se prépare à le donner à Hideo lorsque Toru et ses compagnons le rattrapent dans la rue, débouchant sur 'The Pit', l'un des plus sombres morceaux du score décrivant la scène où Rick, en guise de punition, est enterré dans le sol, son épreuve consistant à tenir le plus longtemps possible sans manger ni boire afin de se racheter de sa faute après du maître. Goldsmith accentue alors ici les cordes sombres et dissonantes et les sonorités plus graves et parfois étranges qui expriment les tourments physiques et mentaux de Rick durant cette éprouvante épreuve, jusqu'à un final plus agressif lorsque Rick craque au bout de 5 jours.

Après cette longue séquence dans le dojo, on retourne dans le domaine de l'action avec le sombre 'Double Cross', tandis que le compositeur nous offre un bref interlude asiatique dans 'Bamboo Forest' pour la scène où Rick s'entraîne au maniement du katana dans la forêt de bambous. La dernière partie du film débute enfin avec 'The Traitor' pour la scène où l'un des compagnons de Yoshida le trahit et fait rentrer des hommes d'Hideo dans le dojo, débouchant sur une première confrontation sanglante et un nouveau morceau d'action massif typique de Goldsmith. 'Stay With Me' se veut plus chaleureux et intime lorsque Rick fait l'amour avec Akiko, le thème japonais se transformant ici à l'occasion en somptueux 'Love Theme' pour cordes et vents, un thème romantique traversé d'une certaine mélancolie quasiment nostalgique. La confrontation finale débute avec 'Surprise Visitor/Forced Entry' lorsque Toru et Rick infiltrent le Q.G. d'Hideo pour lui régler définitivement son compte. Le morceau alterne brillamment entre action et suspense dans un véritable jeu du chat et de la souris où les sursauts de percussions agressives et de rythmes syncopés sont légions, débouchant sur un ultime morceau d'action totalement frénétique et particulièrement violent lorsque Rick affronte lui-même Hideo dans l'excitant 'As You Wish', suivi d'une ultime reprise du thème principal dans un 'End Title' plus serein.

'The Challenge' est un énième score d'action d'une efficacité redoutable signé Jerry Goldsmith, qui, en 1982, était à l'aube d'une série de grandes partitions d'action telles que 'First Blood', 'Rambo II', 'Extreme Prejudice', 'Total Recall', etc. Avec 'The Challenge', Jerry Goldsmith s'impose une fois encore comme un grand maître des musiques d'action frénétiques et des déchaînements orchestraux virtuoses, donnant comme d'habitude beaucoup de fil à retordre à ses interprètes. La musique apporte une certaine richesse au film, car, malgré un scénario assez linéaire et une mise en scène plutôt plate et parfois ennuyeuse, la musique arrive à nous convaincre parfaitement de la crédibilité de ce 'challenge' sans merci entre deux frères ennemis dans un Japon à la fois traditionnel et moderne. Le score de Goldsmith apporte son lot d'action et de suspense au film de John Frankenheimer avec un véritable souci d'orchestration exemplaire et une inventivité typique du Goldsmith de la fin des années 70 et du début des années 80. A noter que, pour une fois, le compositeur n'utilise ici aucun élément électronique, préférant avoir recours à une instrumentation acoustique plus étoffée. Pour Goldsmith, le 'challenge' aura donc été de concilier l'aspect à la fois asiatique et occidental dans un même score. A l'écoute de la musique dans le film, on peut dire que son but a finalement été atteint, car, même si 'The Challenge' n'est pas l'un des grands chef-d'oeuvres du maestro, il n'en demeure pas moins un score d'action exemplaire qui nous prouve une fois de plus toute l'immensité du regretté compositeur californien qui aura décidément tant apporté au cinéma hollywoodien!


---Quentin Billard