1-Kaze no tani no Naushika
-Opening (Nausicaa of
the Valley of the Wind
- Opening) 4.39
2-Ohm no Boosoo
(The Stampede of Ohmu) 2.35
3-Kaze no Tani
(The Valley of Wind) 3.14
4-Mushimezeru Hime
(The Princess who
loves insects) 3.12
5-Kushana no Shinryaku
(Kushana's Invasion) 3.29
6-Sentoo (Battle) 3.11
7-Ohm Tono Kooryuu
(Interchange with Ohmu) 1.39
8-Fukai Nite
(In The Sea of Corruption) 2.33
9-Pejite no Zenmetsu
(Annihilation of Pejite) 3.51
10-Meve to Korubetto
no Tatakai
(A Battle Between
Mehve and Corvette) 1.17
11-Yomigaeru Kyoshin-hei
(Resurrection of the
God Warrior) 3.29
12-Nausicäa-Requiem
(Nausicaa Requiem) 2.55
13-Tori no Hito-Ending
(Bird Person - Ending) 3.48

Musique  composée par:

Joe Hisaishi

Editeur:

Tokuma Japan Communications
TKCA-70133

Album produit par:
Joe Hisaishi

Artwork and pictures (c) 1984 Studio Ghibli. All rights reserved.

Note: ****
KAZE NO TANI NO NAUSICAA
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Joe Hisaishi
Après avoir fait un détour du côté d'Arsène Lupin, le grand Hayao Miyazaki s'attaquait à 'Kaze no tani no Naushika' (Nausicaä de la vallée du vent) en 1984, un classique de l'animation japonaise adapté du fameux manga conçu par Miyazaki lui-même. Le pari de Miyazaki était donc de réussir à résumer en 116 minutes un ouvrage gigantesque (7 volumes en tout) que Miyazaki mit plus de 13 ans à concevoir. Le résultat final, très satisfaisant, s'éloigne malgré tout de l'oeuvre d'origine même si le réalisateur n'en conserve que le squelette (le film ne résume qu'à peu près les deux premiers tomes du manga). Mais étant donné la longueur et l'immensité du manga, le film ne pouvait pas prétendre rivaliser avec l'oeuvre originale, qui se trouve être bien plus complexe, profond et abouti. Dans 'Nausicaä', Miyazaki nous plonge dans un monde futuriste ravagé par la pollution. Ce qui était autrefois une grande civilisation industrielle disparut avec ses connaissances et sa technologie lors des sept jours de feu, une terrible guerre qui ravagea le monde entier. La terre est dorénavant un immense désert recouvert d'une forêt rejetant des gaz empoisonnés dans lesquelles vivent d'énormes insectes mutants s'étant acclimatés au Fukai. La pollution de cette forêt toxique surnommée 'Fukai' (ou 'mer de la décomposition') ne cesse de s'étendre de jour en jour, ravageant les quelques rares habitations qui ont survécues au désastre qui a touché les océans et les mers. Pourtant, un espoir subsiste, celui de la vallée du vent, une région agricole qui vit grâce à l'énergie du vent, et dans laquelle la forêt toxique n'a jamais réussi à s'infiltrer jusqu'à présent. C'est le pacifique roi Jhil qui règne sur la vallée du vent, avec sa fille, la princesse Nausicaä. Mais la fureur des Oomus (roi ver), des insectes géants aux yeux multiples, ne cesse de s'étendre et de provoquer moult catastrophes lors du passage des créatures gigantesques. Nausicaä est la seule à savoir parler aux insectes et à les apaiser. C'est alors que l'empire Torumekian, un peuple belliqueux royaliste et martial, décide de déclarer la guerre à la citée adverse de Pejite. Nausicaä va intervenir et va tenter de mettre fin à la guerre en amenant les hommes à se réconcilier avec le Fukai et les insectes qui, selon elle, ne sont pas là pour détruire les restes de l'humanité mais pour purifier la terre souillée par la pollution de l'homme. Une croyance raconte qu'un jour, un être vêtu de bleu descendra du ciel sur un champ d'or pour restaurer l'alliance perdue entre la Nature et les hommes, afin de guider ces derniers vers un avenir de paix et de pureté.

'Nausicaä' est évidemment une oeuvre colossale, un manga d'une grande ampleur qui n'a comme égal le célèbre 'Akira' de Katsuhiro Otomo, autre bande dessinée gigantesque conçue sur de nombreux volumes. Plus qu'un simple long-métrage d'aventure, 'Nausicaä' est une véritable apologie de l'écologie et de la nature, une sorte de criant message destiné à sensibiliser les individus sur le besoin vital de se battre pour protéger la nature et que la terre puisse enfin reprendre ses droits sur la pollution de la société moderne qui ne cesse d'empirer de jour en jour. En ce sens, 'Nausicaä' est donc une brillante métaphore du malaise écologique moderne, qui dénonce au passage la stupidité des guerres et les désastres de la pollution. Nausicaä, célèbre grande héroïne de cette histoire colossale, est l'archétype même de la parfaite héroïne, une belle rousse aux courbes sveltes, déterminée, courageuse, sage, intrépide, tolérante, dotée d'une certaine grandeur d'âme et même complexe (malgré le fait qu'elle soit pacifique, elle tue un soldat Torumekian au début du film), etc. La célébrité de Nausicaä est telle qu'elle a marquée toute son époque au Japon dans les années 70/80, où elle fut considérée comme l'une des plus grandes héroïnes de tous les temps. Pour certains, Nausicaä est même une métaphore quasi christique, l'élue divine envoyée sur la terre pour réconcilier les hommes avec leur monde (ce qui expliquerait alors qu'elle est la seule à savoir communiquer avec les insectes. Elle est aussi la seule à savoir se déplacer avec son avion planeur). Nausicaä dénonce toute la folie des guerres et nous rappelle que le seul véritable combat qui vaut le coup d'être mené et celui pour la survie de la terre. Partant de ce postulat fort, Miyazaki n'a conservé qu'une partie de son immense manga et nous propose un long spectacle d'animation où se mélangent drame, quête spirituelle, guerre, insectes géants et personnages forts et posés. Le film, qui annonce déjà de par son thème le futur 'Princesse Mononoké' (une sorte de remake quasi avoué de 'Nausicaä') communique une véritable magie propre aux long-métrages épiques de Miyazaki, et malgré quelques longueurs et des moments plus ennuyeux, le film s'impose comme l'un des grands classiques du film d'animation japonais, qu'il faut absolument approfondir par la lecture du monumental manga d'origine. Une oeuvre puissante et incontournable, en somme!

'Nausicaä' marque la toute première collaboration entre Joe Hisaishi et Hayao Miyazaki, qui allait trouver en Hisaisi un fidèle complice qui le suivra tout au long de sa carrière, alignant chef-d'oeuvre après chef-d'oeuvre avec une maestria rare. Si la partition orchestrale/électronique de 'Nausicaä' n'a peut-être pas la puissance émotionnelle d'un 'Princesse Mononoké' ou la magie d'un 'Chihiro', le score n'en demeure pas moins une jolie première réussite pour ce long-métrage nippon. Le score repose sur un excellent thème principal considéré comme l'un des classiques du compositeur, exposé majestueusement dès l'ouverture du film, avec un piano et une harpe, des cordes amples et une petite rythmique légère. Le thème principal est associé à la grande quête de Nausicaä et capte à merveille toute la magie et la grandeur du film, un thème mélancolique quasiment épique qui a évidemment réussi à trouver sa place dans le coeur de tous les béophiles et les inconditionnels de l'oeuvre de Miyazaki. 'Chant de Ohm' évoque la fureur du Oomu au début du film avec une première introduction électronique et un premier morceau d'action électronique dominé par des synthés très années 80 et quelques sons de guitare électrique saturée et chaotique, évoquant la puissance et la fureur de l'insecte géant. A noter que l'utilisation de ces synthés rétro, que l'on retrouvera dans des BO comme 'Laputa' ou 'Mon Voisin Totoro', risquent mal de passer aux oreilles de certains béophiles. Mais ils constituent néanmoins la marque de fabrique d'un Hisaishi qui se plaisait à passer de l'orchestre à l'électronique dans les films d'animation de Miyazaki (par la suite, ses musiques resteront bien souvent très orchestrales).

'La vallée du vent' nous introduit dans une atmosphère indienne méditative et improvisée plutôt inattendue, avec cithare et derboukas accompagnant la scène de l'arrivée de maître Yupa dans la vallée du vent. On notera une reprise du thème de la vallée du vent à la cithare à la fin du morceau, renforçant le côté oriental attribué au village du roi Jhil. Dans 'la princesse qui aime les insectes', Hisaishi nous dévoile le superbe thème de la vallée du vent dans une superbe envolée pour cordes, un thème mélodique et mémorable comme Hisaishi sait si bien en écrire (scène où Nausicaa ramène un insecte volant chez lui afin d'apaiser sa colère), la seconde partie plus de type new-age/indienne étant absente du film. Plus particulier, 'L'invasion de Kushana' utilise les synthétiseurs dans un style un peu étranger, décrivant l'invasion des troupes de Kushana dans la vallée du vent, suivi d'un passage orchestral plus martial et cuivré. Dès lors, Hisaishi évoque le début de la guerre et variera ses ambiances avec aisance et diversité. Ainsi, 'Bataille' utilise l'orchestre pour un excellent morceau d'action martial plus massif durant une séquence de bataille aérienne. Dans 'Echange avec les Ohms', Hisaishi évoque la scène où Nausicaä communique avec le Oomu en mélangeant orchestre et synthétiseur new-age, accentuant la magie de la scène. C'est là que le compositeur fait intervenir le joli thème chanté par une enfant et associé à Nausicaä. Au passage, on pourra d'ailleurs reprocher le fait que l'enfant chante horriblement faux, un effet évidemment assumé afin de retranscrire l'innocence de l'enfant et d'évoquer habilement la pureté que recherche Nausicaa à travers sa quête.

'Dans la mer de corruption' se distingue par ses synthétiseurs new-age qui évoquent le fukai et le monde des insectes. On notera ici l'utilisation d'un orgue synthétisé qui déploie des sonorités mystérieuses et envoûtantes par-dessus les nappes de synthé. 'La destruction de Pejite' évoque la scène de la destruction de la citée de Pejite avec un ostinato de percussions électroniques et un nouveau passage new-age/indien associé à l'idée dévastation. Dans 'Une bataille entre Mehve et Corvette', Hisaishi retourne à l'orchestre pour illustrer une autre séquence de bataille aérienne vers la dernière demi-heure du film. On notera ici l'utilisation des cordes et des vents qui créent un plus grand climat d'urgence, avec quelques timbales lors de la poursuite entre Nausicaa et le vaisseau ennemi. Hisaishi change encore de registre dans 'La résurrection du Dieu guerrier' pour la scène, car, après une nouvelle allusion au thème principal mélancolique au hautbois/cordes, la pièce vire dans un style orchestral plus sombre lorsque Kurashana tente de ressusciter le menaçant et massif dieu guerrier. On notera ici le côté atonal de la pièce avec clusters de cuivres, glissendi de harpe et de cordes. A noter qu'Hisaishi fait une brève allusion tout à fait inattendue à la célèbre 'Sarabande' de Haëndel au début de 'Requiem de Nausicaa' lors de la résurrection finale de Nausicaa et la concrétisation de la prophétie, permettant au compositeur de reprendre la mélodie enfantine (toujours affreusement mal chantée sur des 'la-la-la') associée à Nausicaa symbolisant ici le triomphe de la pureté aboutissant à la superbe conclusion de 'L'être-oiseau' reprenant de manière triomphante le thème de la vallée du vent aux cordes avant une ultime reprise du thème principal pour piano et cordes.

Première grande partition symphonique/électronique pour un film d'animation d'Hayao Miyazaki, 'Nausicaä' fait assurément partie des oeuvres incontournables du compositeur qui, même s'il n'atteint pas ici l'émotion et la puissance de certaines de ses futures partitions pour le célèbre réalisateur japonais, signe malgré tout une oeuvre personnelle variée, tour à tour entraînante, émouvante, mystérieuse, sombre, mélancolique, etc. La musique de 'Nausicaä' se veut aussi comme une sorte d'hommage musical rendu au manga d'origine de Miyazaki, une musique qui permet de prolonger l'atmosphère complexe et profonde de ce gigantesque ouvrage de référence dans l'univers des mangas japonais. A noter qu'il existe une superbe édition symphonique (9 pistes) de cette musique, un album à posséder absolument afin de compléter l'écoute de cette bande originale très réussie et typique du grand Joe Hisaishi!


---Quentin Billard