1-Main Title 1.17+
2-The Truck Attacks 3.01
3-Back To The Church/
The Pipe 4.14
4-Finding The Body 2.36
5-The House of Pain 3.02
6-Kenny and Darla 1.14
7-Trish's Surprise 0.42
8-Trish and Darry's Theme 1.28
9-The Truck Returns 0.38
10-The Creeper Attacks 2.13
11-Monster Mashed/
The Big Flap 4.09
12-Creeper's Tale 2.42
13-Bone Appetite 1.06
14-My Heart Goes Out 2.35
15-Creepy Crawler 1.56
16-My Brother's Keeper 6.31
17-Jeepers Creepers 2.18*
18-Here Comes the
Boogey Man 2.53**
19-Truck's Horn 0.06***

+Composé par Bennett Salvay
et Victor Salva
*Musique et paroles de
Johnny Mercer, Harry Warren
Interprété par Paul Whiteman
et his Swing Wing.
**Ecrit par Lawton, Brown, Smith,
Lang et Benson
Interprété par Henry Hall
et the BBC Dance Orchestra
Parties vocales de
Val Rosing
***Effet sonore conclusif.

Musique  composée par:

Bennett Salvay

Editeur:

Percepto Records/Free 3416

Album produit par:
Bennett Salvay, Victor Salva
Producteurs exécutifs:
Steven Machat, Jeff Myatt

Artwork and pictures (c) 2002 Free Inc. All rights reserved.

Note: ***
JEEPERS CREEPERS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bennett Salvay
De temps en temps, certains films surprennent là où on ne les attends pas. C'est le cas de 'Jeepers Creepers', petite série-B horrifique réalisé par Victor Salva ('Powder'), et qui met en scène deux jeunes ados aux prises avec un horrifiant croque-mitaine démoniaque, qui revient sur terre tous les 23 ans pour se nourrir durant 23 jours (le film tire son nom de la chanson homonyme associée mystérieusement dans le film au démon). A première vue, le film ne paye pas de mine, avec des effets spéciaux moyens et des acteurs peu connus, mais 'Jeepers Creepers' arrive malgré tout à nous surprendre sur plus d'un point. Tout d'abord, c'est avec une maestria rare que Salva introduit les deux jeunes héros au cours d'un long prologue d'une quinzaine de minutes où l'on voit se nouer entre Trish (Gina Philips) et Darry (Justin Long) une émouvante et très spontanée relation frère/soeur dans une simplicité particulièrement réaliste. Point d'effets artificiels ici, juste une exposition ordinaire de deux personnages principaux qui rappelle par moment les prologues à la Stephen King. C'est la spontanéité du jeu et des dialogues de Trish et Darry qui rend ici la scène particulièrement intéressante. Puis, sans crier gare, Salva nous introduit l'intrigue avec le camion fou et l'église désaffectée, le réalisateur en profitant au passage pour faire un clin d'oeil à l'un de ses films coups de coeur de jeunesse, 'Duel' de Steven Spielberg. Dès lors, Salva installe intelligemment une atmosphère lourde qu'il développera et amplifiera tout au long du film (avec plus ou moins d'habileté). On bascule dans l'angoisse lorsque Darry descend dans la cave où il découvre avec horreur les corps empalés sur les murs du souterrain. C'est l'expression horrifique sur le visage du jeune Justin Long qui rend ici la scène encore plus malsaine qu'elle ne l'est déjà. A vrai dire, on est totalement convaincu par les deux jeunes acteurs, qui nous font ressentir cette peur quasi psychologique tout au long du film - et ce à l'inverse de la plupart des films d'horreur habituels où l'on a toujours l'impression que les personnages sont blasés et insensibles aux pires atrocités, se contenant d'un timide cri pas toujours très réaliste. Hélas, ces quelques bons éléments sont vite gâchés par des incohérences et des éléments inutiles. Tout d'abord, on ne comprend pas vraiment l'utilité du personnage de la voyante. On ne comprend pas non plus le sens de l'association de la gentillette chanson 'Jeepers Creepers' au démon (s'agit il d'une sorte de vilaine blague?). Ensuite, on regrettera le fait que le Creeper - une fois découvert - paraisse moins effrayant et ridicule avec son costume en plastique digne d'une mauvaise série-B horrifique à petit budget. On est loin ici du kitsch d'un 'Freddy', mais il n'empêche que l'on aurait apprécié voir un monstre moins bâclé. Le film bascule dans le grotesque lors de la séquence du combat dans le commissariat, qui contient sans aucun doute les plus mauvais éléments du film et les clichés habituels du genre, et ce malgré une fin originale et tout à fait étonnante! Pour finir, on pourra aussi regretter l'emploi des sursauts habituels qui, en plus d'être particulièrement téléphonés et prévisibles, gâchent une ambiance angoissante d'une qualité rare.

Néanmoins, il faut reconnaître au film une atmosphère macabre et sérieuse très personnelle où semble être absent le second degré habituel des traditionnels 'slasher-movies' hollywoodiens. Victor Salva nous propose donc un vrai film d'horreur à l'ancienne, en mettant l'accent sur la terreur plus que sur l'hémoglobine (il y a assez peu d'effets gores ici!). Mais le réalisateur va encore plus loin et nous propose aussi une exploitation saisissante de la peur dans toutes ses dimensions (de l'inquiétude simple à l'angoisse lourde qui empêche à un moment Darry de parler pendant plus de 5 minutes), peur incarnée par le maléfique Creeper, symbole quasi religieux du diable, une idée renforcée par le fait que la cave où Darry fait son horrifiante découverte au début du film se situe à côté d'une vieille église désaffectée, en proie aux corbeaux - oiseaux annonciateurs de malheur dans l'imagerie populaire. 'Jeepers Creepers' n'aurait alors été qu'une simple série-B d'horreur sans relief si Salva n'avait pas en plus ajouté une dimension homosexuelle limite pédophile assez malsaine dans son film. Effectivement, il faut se souvenir qu'il y a quelques années, le réalisateur a reconnu avoir abusé sexuellement d'un jeune mineur de 12 ans, ce qui lui avait valu un énorme bide commercial pour son film 'Powder' en 1995. Depuis, le réalisateur a réussi à revenir au devant de la scène mais le passé malsain du réalisateur est toujours plus ou moins présent dans ses films. Ainsi, on constate que le Creeper a une attitude étrange envers Darry: dans une scène du film, on découvre qu'il a reniflé les vêtements du jeune ado. Dans une autre scène clé vers la fin du film, on apprend que le Creeper en veut plus particulièrement à Darry et qu'il compte à son tour dévorer une partie de son corps. On n'oubliera d'ailleurs pas de mentionner cette scène où le démon tient Trish et Darry dans ses bras et qu'il les renifle tout les deux de manière perverse. Il y a ici une rapport à l'homosexualité assez tourmenté, croisé avec une certaine forme de pédophilie et de perversion malsaine (le démon poursuit durant tout le film deux jeunes ados qu'il compte dévorer - que faut-il de plus pour que l'on comprenne la symbolique malsaine de ce postulat qui fait froid dans le dos, une fois que l'on a tenu compte du passé du réalisateur?). Evidemment, il n'est nulle question ici de polémiquer sur le passé noir de Victor Salva, mais force est de constater que le réalisateur semble vouloir se libérer ici de manière impulsive de ses vieux démons (d'où la symbolique du démon) à travers ce film d'horreur qui ne paie pas de mine en apparence mais qui fait particulièrement froid dans le dos, et ce malgré quelques clichés et quelques scènes et effets ridicules. Voilà en tout cas un film d'horreur intelligent aux symboliques malsaines et sans concession, sans gros effets spéciaux et artifices visuels habituels, loin de tous les abrutissants slasher-movies habituels que Hollywood nous balance régulièrement à toutes les sauces!

Le compositeur Bennett Salvay a collaboré auparavant sur deux anciens films de Victor Salva, 'Nature of the Beast' (1995) et 'Rites of Passage' (1999). Pour sa troisième collaboration avec le réalisateur, Salvay sort l'artillerie lourde et nous propose une grosse partition orchestrale horrifique à mi-chemin entre Christopher Young et James Newton Howard. A vrai dire, le manque d'expérience du compositeur (qui a essentiellement débuté avec quelques téléfilms et quelques séries) se fait grandement ressentir ici, la partition manquant cruellement de personnalité, d'originalité. Une fois se constat établi, on ne peut néanmoins s'empêcher d'apprécier l'efficacité de la musique de Bennett Salvay à l'écran. Ainsi, dès le sinistre 'Main Title', le compositeur nous plonge dans une atmosphère lourde et inquiétante à l'aide de synthétiseurs aux effets glauques et morbides, une excellente introduction (à laquelle Victor Salva semble même avoir participé) qui évite de dévoiler d'emblée la partie orchestrale du score, que Salvay ne tarde pas à nous faire découvrir dans 'Truck Attacks', premier morceau d'action orchestral pour l'attaque du camion au début du film. Salvay utilise alors l'orchestre avec quelques éléments électroniques habituels tout en mettant en avant cordes frénétiques, percussions agressives et cuivres dissonants et massifs. On pourra d'ailleurs apprécier ici le côté massif des cuivres qui rendent la scène particulièrement agressive et tendue tout en créant une certaine excitation que l'on retrouvera dans la plupart des morceaux d'action du score. 'Back to The Church - The Pipe' nous plonge alors dans une sombre atmosphère de suspense et de mystère lorsque Trish et Darry arrivent à l'église désaffectée et découvrent le mystérieux tunnel où les attends une horrible découverte. Salvay utilise ici cordes et vents avec quelques éléments synthétiques accentuant la très forte sensation de peur qu'installe le réalisateur durant cette séquence. Le compositeur applique les recettes sans grande originalité, mais force est de constater que le résultat à l'écran est très réussi: on y croit à 100%!

On monte d'un degré dans la terreur avec 'Finding Body' pour l'horrifiante scène de la découverte des corps au début du film. Bennett Salvay installe ici une atmosphère angoissante entre sursaut de terreur et peur pure exploitée à travers un excellent travail de sonorités électroniques glauques. 'House of Pain' poursuit ce travail avec une certaine intensité à laquelle le compositeur ajoute un excellent travail autour d'effets électroniques et orchestraux (contrebasses très présentes avec un contrebasson menaçant, clusters, nuages sonores de pizzicati de cordes, glissendi des cordes, effets de col legno sur les cordes des violons, etc.). Aucun doute possible, on assiste dans 'House of Pain' à la même horreur que témoigne l'une des scènes les plus macabres du film (et ce malgré le côté 'maquette en plastique' des corps), suivi de l'inquiétant 'Kenny and Darla' pour la fin de la scène. Dès lors, le compositeur n'aura de cesse d'osciller entre action/horreur et suspense macabre, avec la même volonté délibérée d'accentuer de manière très 'premier degré' le côté angoissant du film de Victor Salva. Le compositeur trouve même le temps d'écrire un petit thème modeste pour les deux jeunes héros dans 'Trish and Darry's Theme', développé par des cordes sombres, amères et hésitantes. On pourra dès lors apprécier le déchaînement orchestral de 'The Truck Returns' avec ses cuivres massifs, 'The Creeper Attacks' avec ses percussions métalliques, 'Monster Mashed/The Big Flap' et sa tension omniprésente, 'Bone Appetite' et son crescendo horrifique évoquant l'appétit féroce du sinistre Creeper, sans oublier quelques bons déchaînements orchestraux incluant l'attaque dans le commissariat ('My Heart Goes Out'), 'Creepy Crawler' marquant le retour du thème des deux ados opposés au démon ou le sombre 'My Brother's Keeper' et sa fin plus mélancolique au piano lorsque le Creeper disparaît avec Darry.

Avec 'Jeepers Creepers', Bennett Salvay applique les recettes comme un bon professionnel mais n'arrive jamais à les dépasser, probablement du à son manque d'expérience dans le métier. Très fonctionnelle, la musique véhicule parfaitement à l'écran la sensation de peur et de terreur à l'ancienne même si l'on regrettera le manque de relief de la partition (on aurait par exemple aimé entendre le thème de Trish et Darry mieux développé et plus présent dans le film). On a donc à faire ici à une sympathique partition orchestrale où le compositeur distille un parfum d'horreur avec un premier degré sans équivoque, mais qui manque de relief, de personnalité, d'originalité. A réserver donc en priorité à ceux qui veulent se replonger dans l'ambiance macabre du film d'horreur de Victor Salva, et à ceux qui apprécient les traditionnelles ambiances orchestrales horrifiques à la Christopher Young!


---Quentin Billard