1-In Too Deep 3.09
2-Cool J 2.15
3-Slam Guru 3.27
4-Hair Wind Child 3.56
5-Thank Not 1.53
6-Wild Life 1.52
7-Suite 201 2.49
8-Bust 2.30
9-God's Alive (Inside A Movie) 2.30
10-Ant Heel Blues 2.58
11-Tank Trips 1.38
12-Jay Ball Sweat 2.55
13-Frisco In The Trash 2.34
14-Missing Vocal 3.14

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-6072

Produit par:
Konstantinos Christides,
Flavio Mottala,
Christopher Young

Producteur exécutif:
Robert Townson
Chargé de la musique pour
Dimension Films:
Randy Spendlove
Music Business Affairs:
David Schulhof
Coordinateur du soundtrack:
Jessica Dolinger
Musique supervisée par:
Frank Fitzpatrick
Programmation synthétiseur:
Kenneth Burgomaster,
Arthur Schaer

Montage de la musique:
Chuck Martin
Assistant montage:
Tanya Noel Hill

Artwork and pictures (c) 1999 Miramax Films/Dimension Films. All rights reserved.

Note: **1/2
IN TOO DEEP
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
Pour son troisième long-métrage, 'In Too Deep' (Gangsta Cop), le réalisateur australien Michael Rymer s'intéresse à l'univers de l'infiltration policière, un sujet déjà abordé dans des polars tels que 'Donnie Brasco' (1997) ou 'Deep Cover' (1992). S'inspirant d'une histoire vraie, Rymer évoque le parcours agité de Jeffrey Cole (Omar Epps), un jeune flic noir en mission d'infiltration dans un important cartel de la drogue à Cincinnati dominé par Dwayne Gittens (LL Cool J), un grand baron de la drogue que tous les caïds de la ville surnomment 'Dieu', responsable de 80% des crimes à Cincinnati. Pour Jeffrey devenu Jeff Reid, la mission est simple: il s'agit d'infiltrer la bande à Dieu et d'obtenir sa confiance afin de permettre à la police d'obtenir suffisamment de preuve pour le mettre définitivement hors d'état de nuire et porter ainsi un coup fatal à l'un des plus gros réseaux de drogue de tout le pays. Mais pour le jeune Jeffrey, devenu accroc à sa mission, l'infiltration est plus qu'un simple objectif, c'est un véritable credo, une guerre contre le crime qu'il s'est juré de mener, lui qui a grandit dans les ghettos noirs américains et qui a connu des jeunes tués par la drogue et le crime organisé. Mais sa mission l'amène encore plus loin qu'il n'aurait du aller, jusqu'au point critique de non-retour où il finit par ne plus pouvoir faire la différence entre la réalité et le personnage qu'il s'est inventé. Non seulement Jeffrey met sa vie en jeu, mais sa personnalité souffre d'un dédoublement particulièrement éprouvant, au point de risquer de devenir comme ceux qu'il infiltre depuis de nombreux mois déjà. Même son supérieur, Preston D'Ambrosio (Stanley Tucci), n'arrive pas à le retirer de cette mission, sachant pertinemment qu'il est le seul à être allé aussi loin et qu'il est aussi le seul à pouvoir mener à bien cette guerre contre le crime.

'In Too Deep' nous plonge ainsi dans l'univers des ghettos américains et de la culture black, à grand renfort de tubes hip-hop, d'idiomes des banlieues et de règles entre bande, sur fond de drogue et d'infiltration policière. Comme l'ont fait d'autres réalisateurs avant lui, Michael Rymer évoque le destin éprouvant de ces flics qui, obligés de vivre en permanence pendant des années dans un milieu auquel on peut les arracher à n'importe quel moment, finissent par perdre dangereusement le sens de la réalité, à tel point qu'il faut bien souvent pour eux consulter un psychiatre par la suite. Comme l'expliquait lui-même le scénariste Paul Aaron dans une interview, "cela se rapproche aussi du syndrome psychologique des soldats qui reviennent du front (...). La capacité de concentration se développe, le corps donne tout ce qu'il a en réserve. Et puis, soudain, la guerre cesse et le soldat est censé retourner à une vie normale. Certains y parviennent, d'autres pas.". A cela s'ajoute bien souvent le sentiment de culpabilité d'avoir trahi ceux pour lesquels le flic était pratiquement devenu proche au cours de son infiltration, un sentiment qui met bien souvent du temps à disparaître par la suite. Omar Epps campe donc ici un Jeff Cole très convaincant, face à la star du rap U.S. LL Cool J, magistral dans le rôle d'un imprenable seigneur du crime omnipotent et mégalomane. Si le rythme du film s'avère être particulièrement lent au début, c'est pour mieux renforcer l'amplitude et le danger d'une mission 'sous-marin' aussi dangereuse. Salué au Festival de Cognac 2000 par le Prix spécial du jury et le Prix spécial police, 'In Too Deep' est un excellent polar dramatique réalisé de manière sobre, sans artifice visuel, sans effet de mode, avec ce qu'il faut de tension psychologique.

Le score de Christopher Young pour 'In Too Deep' a bien du mal à se faire une petite place au sein du film, littéralement envahi de tubes rap/R&B/hip-hop réunissant quelques pointures telles que Mobb Deep, Jagged Edge, Nas, Trick Daddy, Method Man, Ali Vegas, 50 Cent, etc. Pourtant, le score de Young est bel et bien présent et renforce à son tour l'atmosphère psychologique du film de Michael Rymer. Evidemment, étant donné l'importance de la culture black du film, Christopher Young s'est à son tour intéressé aux rythmiques modernes/urbaines de rap et R&B, signant ainsi un morceau comme 'In Too Deep' qui se distingue par sa rythmique rap, son piano et son intéressant solo de trompette en sourdine de Sal Marquez dans un style limite jazz fusion/rap. Il faut néanmoins signaler que ce morceau n'est qu'une démo n'apparaissant pas dans le film. A signaler aussi que le morceau 'Missing Vocal', qui se distingue par ses cordes chaleureuses et mélancoliques et sa rythmique R&B est en fait l'accompagnement instrumental d'une chanson que Young a écrit avec David Hollister, 'Give Me A Reason', chanson que l'on pourra d'ailleurs retrouver dans le précédemment album 'songs' du film publié par Sony. Pour le reste du film, le score s'articuler autour de pièces atmosphériques utilisant les cordes avec quelques synthés, une rythmiques électronique moderne tendance 'Media-Ventures' et des percussions. Ainsi 'Cool J' se distingue par exemple par son utilisation de cordes dissonantes inquiétantes et de percussions agressives pour une scène où Jeff manque de se faire descendre au cours d'un deal foireux. On retrouve dans 'Cool J' le style thriller cher au compositeur, avec des percussions utilisées ici afin de représenter le climax de tension de la scène, tout en rappelant le danger qui plane quotidiennement sur Jeff au cours de son infiltration.

'Slam Guru' prolonge ce style atmosphérique sombre avec un intéressant travail autour des textures électroniques glauques et une rythmique qui donne régulièrement une pulse à la musique durant le film. Les cordes sombres sont ici associées tout au long du film aux tourments et aux doutes du jeune flic. A ce sujet, 'Hair Wind Child' témoigne parfaitement de cette ambiance de doute en imposant avec quelques synthés et quelques cordes une ambiance plutôt mélancolique empreint d'une certaine tristesse. Young nous fait alors comprendre que Jeff ne sait plus où il en est, ne sait plus qui sont ses vrais amis et qui sont ses ennemis, comme dans l'atmosphérique et lent 'Thank Not'. Si vous vous attendiez à un score bourré d'action, vous risquez fort d'être déçu. Au contraire, le score de 'In Too Deep' se distingue par son climat atmosphérique lent et parfois même monotone, car si un morceau comme 'Cool J' créait une ambiance de suspense/thriller plus familière du compositeur, le reste du score s'oriente plus explicitement vers un style atmosphérique et mélancolique où les rythmes commencent à disparaître au profit d'une ambiance orchestrale/électronique plus terne, plus amère. Même la discrète rythmique électro de 'Wild Life' ne parvient pas à rivaliser avec la mélancolie des cordes et le côté sombre des sonorités électroniques, le tout évoquant une fois encore les doutes et les tourments de Jeff.

Plus sombre et tendu, 'Suite 201' développe une rythmique électronique tendance urbaine qui semblent maintenir une certaine tension avec des cordes sombres toujours synonymes de danger, nous rappelant que l'opération peut foirer à n'importe quel moment. Si Young refait une brève allusion à son style thriller/action orchestral dans 'Bust' avec ses timbales agressives, c'est pour mieux repartir dans de l'atmosphérique lent et monotone par la suite, passant ainsi de 'God's Alive (Inside a Movie)' - toujours les touches d'humour chères au compositeur dans le titre de ses musiques - au mélancolique 'Tank Trips' sans oublier l'excellent morceau d'action de 'Jay Ball Sweat' pour la scène de l'arrestation finale avec les flics et la fin (difficile) de la mission de Jeff. Le morceau est rythmé ici par des percussions frénétiques sur fond de cordes dissonantes reprises de 'Cool J', les percussions étant ici lié à un impressionnant climax de tension. 'Frisco In The Trash' conclut avec 'Missing Vocal' le côté plus atmosphérique et mélancolique du score de 'In Too Deep'.

Au final, 'In Too Deep' s'avère être un score atmosphérique lent et monotone parsemé de quelques rares moments de suspense et d'action, un score qui représente à merveille le côté psychologique du film tout en étant associé au protagoniste principal interprété par Omar Epps. Avec 'In Too Deep', on sent une réelle volonté du compositeur d'aborder d'autres horizons musicaux, comme il le fait déjà depuis plusieurs années en mettant en musique des drames ou des comédies en tout genre. Cependant, 'In Too Deep' témoigne encore du goût du compositeur pour des ambiances orchestrales/électroniques noires et inquiétantes, une inquiétude qui rivalise ici avec une mélancolie qui se serait avérée être bien plus poignante si le compositeur avait songé à écrire un thème fédérateur fort pour sa partition, et ce malgré la présence d'un bref motif harmonique de cordes dans quelques morceaux. Si le score renforce le côté sombre et psychologique du film de Michael Rymer, il déçoit par son manque d'énergie, son côté parfois ennuyeux et le manque de renouvellement du compositeur. On aurait par exemple aimé entendre Young développer un peu plus les rythmiques R&B à peine effleuré dans deux ou trois pistes du score, un style musical auquel le compositeur ne s'était encore jamais vraiment confronté (sauf peut-être dans 'Set It Off') et qui aurait donné un peu plus de cohérence à sa musique dans le contexte du film. Mais le compositeur a préféré opter pour une approche plus orchestrale et atmosphérique pour éviter sans aucun doute la redondance avec les chansons rap/R&B du film. Il ne fait donc aucun doute que le score de 'In Too Deep' s'avère être une partition totalement mineure dans la carrière de Christopher Young, mais cela n'empêche en rien de s'intéresser à ce score sur lequel plane l'ombre du Young des musiques de thrillers et des drames intimistes.


---Quentin Billard