1-Les Choristes 1.32
2-In Memoriam 3.25
3-L'arrivée à l'école 1.32
4-Pépinot 1.50
5-Vois sur ton chemin 2.19
6-Les partitions 1.03
7-Caresse sur l'océan 2.10
8-Lueur d'été 2.02
9-Cerf-volant 0.58**
10-Sous la pluie 1.05
11-Compère Guilleri 0.35
12-La désillusion 1.22
13-La nuit 2.20
14-L'incendie 1.23
15-L'évocation 1.23
16-Les avions en papier 1.28
17-Action réaction 1.45
18-Seuls 1.53
19-Morhange 1.57
20-In Memoriam a Cappella 3.19
21-Nous sommes de
Fond de l'étang 2.46*

*Composé par
Christophe Barratier
Paroles de Christophe Barratier
et Philippe Lopes-Curval
**Composé par
Christophe Barratier
Paroles de Christophe Barratier.

Musique  composée par:

Bruno Coulais

Editeur:

WEA Music
5050467-2152-2-1

Musique et paroles de:
Bruno Coulais,
Christophe Barratier

Artwork and pictures (c) 2004 Galatée Films. All rights reserved.

Note: ***1/2
LES CHORISTES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Bruno Coulais
Qui aurait pu penser qu’un petit film sans prétention comme ‘Les choristes’ deviendrait un jour un immense succès quasi planétaire, qui faillit même rentrer dans la catégorie film étranger aux Oscars 2005. Succès surprise massif pour le film de Christophe Barratier, qui, selon ses propres aveux, ne s’attendait absolument pas à un tel succès, d’autant qu’ils sont tout de même peu nombreux les réalisateurs a pouvoir se vanter d’avoir connu un immense succès dès leur premier long-métrage – comme quoi, il faut de tout pour faire un monde. Quelques chiffres éloquents pour résumer la chose: 8,6 millions d’entrées, plus d’un million d’albums et de partitions musicales vendues, un cachet de plus de 5 million d’euros pour Gérard Jugnot, qui endosse au passage la casquette de producteur, faisant de lui l’un des acteurs français les mieux payés de toute l’année 2004. Comment dès lors expliquer un succès finalement aussi disproportionné et, soyons honnête, franchement excessif par rapport au film lui-même? Peut être par rapport à la nature même du sujet, ou comment la musique – et plus particulièrement une chorale – permet de redonner la vie à un pensionnat pour enfants difficiles en France en 1948. Quand on sait que le nombre de chorale a carrément explosé durant l’année de la sortie du film – à tel point que le ministre de l’éducation nationale envisage de rendre la chorale obligatoire au collège – on se dit que décidément, ‘Les choristes’ est devenu un véritable phénomène de société, relançant la mode des chorales et des cours de chant (une mode qui sera forcément bien éphémère, lorsque les gens se seront lassé de tout cela). Pour les dirigeants des chorales et des professeurs de musique, c’est une aubaine, même si, comme le suggère timidement le film de Christophe Barratier, l’étude de la musique à l’école (et surtout au collège et au lycée) est une discipline en voie de disparition, et ce tant que les dirigeants français n’auront pas compris que la musique est un enjeu majeur dans la formation d’un élève (ouverture d’esprit, jugement esthétique, capacité de discernement, cohésion ‘sociale’ à travers un groupe, etc.). Si ‘Les choristes’ pouvait permettre de sensibiliser davantage la population à ces thèmes, tout deviendrait nettement plus simple, mais ne rêvons pas, car un film reste un film.

L’histoire, on la connaît déjà. Clément Mathieu (Gérard Jugnot), professeur de musique sans emploi, accepte un jour un poste de pion dans l’internat de rééducation de mineurs nommé le ‘fond de l’étang’. Très vite, il se heurte à la politique répressive du directeur, Rachin (François Berléand), qui ne voit pas d’un très bon oeil les activités de Mathieu. Ce dernier décide de créer une chorale au sein de sa classe, une expérience qui va très vite transformer le quotidien des habitants du ‘fond de l’étang’ et qui va s’avérer bénéfique pour le bien de tous, et ce malgré les contestations systématiques de Rachin, qui s’obstine à dénigrer le travail de Mathieu. Le film est en fait un remake de ‘La cage aux rossignols’ de Jean Dréville (1945) avec Noël-Noël dans le rôle de Clément Mathieu. Musicien d’origine, Christophe Barratier a profité de sa première expérience cinématographique pour évoquer ses thèmes fétiches – l’enseignement de la musique, le goût pour le chant, etc. Evidemment, la musique occupe ici une place majeure dans le film, en tant que vertu, expression de soi, la musique qui transcende les âmes, les esprits, bref, la musique qui, comme le dit le vieil adage, ‘adoucit les moeurs’. On pourra évidemment reprocher au réalisateur d’avoir voulu en faire un peu trop, tombant à quelques reprises dans la facilité des bons sentiments et du manichéisme. Mais au final, le film n’est pas si optimiste qu’il n’y paraît puisque Clément Mathieu perd finalement son travail, constat déplorable de la situation de l’éducation musicale et de la place qu’occupent les arts et la culture en France à l’aube du 21ème siècle - il s’agit évidemment d’une interprétation, mais on peut penser que Barratier a peut-être voulu alerter quelque part l’opinion publique sur ce sujet en tournant ce film, et ce même si l’histoire se passe en 1948 – on peut aisément la transposer à notre époque, et remplacer l’internat par les collèges ou les lycées! A noter que le film a aussi propulsé le jeune Jean-Baptiste Maunier, jeune soprano de 14 ans qui profite de sa voix d’enfant (avant d’atteindre la mue) pour séduire le public et continuer sa série de concerts qu’il a entamé un peu partout en France, en compagnie de la chorale des petits chanteurs de Saint-Marc. ‘Les choristes’ évoque aussi le monde de l’enfance à travers un décor inhospitalier – celui d’un internat d’après-guerre déshumanisé – et de jeunes acteurs particulièrement doués. Par moment émouvant et rempli de poésie, parfois dur (notamment lorsque Mathieu se heurte à un enfant rebelle, criminel et associable), le film de Christophe Barratier mérite sans aucun doute d’être considéré comme l’un des petits bijoux du cinéma français de cette nouvelle décennie. Quand à savoir si un succès aussi excessif et disproportionné était mérité, c’est une toute autre histoire!

La musique désormais très populaire de Bruno Coulais a sans aucun doute largement contribué au succès du film de Christophe Barratier, qui savait que pour réussir son film, il devait obtenir de la part de son compositeur une musique de qualité. Le réalisateur étant lui-même musicien de formation, il a aussi signé quelques chansons du film pour les besoins de l’histoire. La partition de Bruno Coulais a donc été écrit pour la chorale d’enfants, avec une petite formation instrumentale. Une fois encore, le compositeur en profite pour nous démontrer son amour de la voix, qu’elle soit écrite pour un choeur mixte (‘Brice de Nice’), une chorale corse (‘Himalaya’) ou un choeur d’enfant, comme c’est le cas ici. Le score s’articule autour de deux thèmes majeurs, celui de ‘Vois sur ton chemin’ – thème désormais célèbre entonné un peu partout dans les chorales et dans les classes de musique en France – et un thème plus mélancolique d’esprit associé à Clément Mathieu et que l’on entend dans ‘Caresse sur l’océan’ (autre chant majeur de la partition des ‘Choristes’). La musique s’articule en fait autour de deux axes majeurs : une partie instrumentale dominée par l’orchestre, et qui développe les différentes ambiances hors des scènes de chorale, comme ‘L’arrivée à l’école’ lorsque Mathieu arrive pour la première fois au ‘fond de l’étang’ au début du film, accompagné de façon plus retenue avec l’orchestre et un chœur d’enfant sans parole qui confère un côté mystérieux au morceau, presque inquiétant (curieusement, le morceau fait ici penser à du Danny Elfman), reflétant les sentiments de Mathieu à l’arrivée d’un internant aussi froid et déshumanisé (on retrouve ces choeurs mystérieux dans ‘Seuls’).

‘Pépinot’ développe le thème nostalgique de Mathieu par le biais d’un piano intimiste accompagné par un orchestre chaleureux et paisible. Coulais apporte une émotion véritable au film et propose un indispensable complément émotionnel aux images du long-métrage de Christophe Barratier. ‘La désillusion’ nous permet de retrouver ce thème avec une tristesse quasi rêveuse, interprété ici par une clarinette et des cordes chaleureuses qui confèrent à ce thème une douceur très touchante, sans oublier sa très belle reprise au hautbois dans ‘L’évocation’, tandis que des morceaux comme ‘Les partitions’ et le sombre ‘Action réaction’ (évoquant la politique de répression de Rachin) tempèrent le climat ‘bon enfant’ de l’oeuvre et renforce le côté plus sombre et dur de l’histoire. Le reste de la partition fait donc la part belle aux chants interprétés par les petits chanteurs de Saint-Marc et Jean-Baptiste Maunier en soprano soliste, accompagnés par l’orchestre et un piano. Le thème principal de ‘Vois sur ton chemin’ est développé tout au long du film, associé aux chanteurs du ‘fond de l’étang’, tandis que le compositeur s’amuse à faire référence à la musique religieuse ‘classique’ dans ‘In Memoriam’ où Coulais imite le style des oeuvres religieuses de J.S. Bach pour l’un des morceaux que fait chanter Mathieu à sa chorale dans le film. ‘Cerf-volant’ et ‘Nous sommes du fond de l’étang’ sont quand à eux les deux chants écrits par Christophe Barratier lui-même, ‘Cerf-volant’ possédant un côté rêveur avec son rythme à trois temps, tandis que ‘Nous sommes du fond de l’étang’ est interprété par les choristes à la fin du film comme une sorte de façon pour eux d’exprimer leur joie à travers la musique. On regrettera le fait que la plupart des autres pièces ne font finalement que tourner autour des mêmes thèmes, que ce soit la reprise de ‘Cerf-volant’ dans ‘Morhange’ ou ‘Sous la pluie’ et sa reprise au hautbois du thème de ‘Vois sur ton chemin’. En fin de compte, au bout d’une vingtaine de minutes, Bruno Coulais a déjà dit tout ce qu’il avait à dire dans sa musique, le reste n’étant qu’une suite de développements qui n’apportent finalement pas grand chose à l’oeuvre elle-même si ce n’est de renforcer l’émotion du film.

Evidemment, ‘Les choristes’ est une bande originale de qualité signé par l’un des meilleurs compositeurs officiant pour le cinéma français à l’heure actuelle, aux côtés de Alexandre Desplat, Philippe Rombi, Nicolas Errera, etc. Cela ne fait aucun doute. En revanche, on est quand même en droit de s’interroger là aussi sur le réel bien-fondé de l’énorme succès commercial de cette musique, qui, là encore, ne méritait peut-être pas tant de louanges, car il s’agit après tout d’une petite partition modeste et sans prétention dont la simplicité en fait finalement une oeuvre légère, facile et simplette, qui n’a franchement rien d’un grand chef-d’oeuvre (sa récompense aux victoires de la musique paraît dès lors carrément excessive!). En écoutant la BO des ‘choristes’, il faut impérativement savoir relativiser et replacer la musique dans son contexte. Dans le film, la musique est censé être écrite par un pion qui s’adresse à une jeune chorale d’enfants, d’où un niveau musical finalement pas très poussé et un peu gnian-gnian par moment. Mais cela n’empêche évidemment pas le compositeur d’apporter une certaine poésie poignante à sa musique, évoquant l’innocence (idéalisée) de l’enfance à travers la pureté de la voix de Jean-Baptiste Maunier et de la chorale des petits chanteurs de Saint-Marc. Véritable hymne au chant et à ses vertus, la partition des ‘Choristes’ s’avère être une oeuvre simple, touchante et délicate, mais qui n’a pourtant rien du grand chef-d’oeuvre relayé par les médias et les critiques exagérément dithyrambiques, un score qui sied à merveille au film de Christophe Barratier mais qui va finir par lasser le public à force d’être sans cesse entendu partout et rabâché inlassablement à la radio, à la télévision, dans les concerts, dans les écoles de musique, etc. ‘Les choristes’, bientôt victime de son propre succès?


---Quentin Billard