Musique  composée par:

Klaus Badelt

Editeur:


Réalisateur:
Kurt Wimmer
Genre:
Science-fiction/Action
Avec:
Christian Bale,
Sean Bean,
Emily Watson.

(c) 2002 Dimension Films/Blue Tulip.

Note: ***
EQUILIBRIUM
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Klaus Badelt
Imaginez que le prix à payer pour arrêter toutes les guerres serait d’annihiler tous les sentiments et les émotions humaines? C’est sur cet inquiétant postulat que se base l’intrigue de ‘Equilibrium’, film de science-fiction signé par l’artisan Kurt Wimmer dans la plus pure tradition du genre. Le film nous invite à découvrir la société futuriste de la citadelle de Libria en 2070, où les émotions sont strictement prohibées et chassées par une implacable dictature qui oblige les habitants à absorber quotidiennement une drogue nommé Prozium afin d’annihiler tout sentiment humain, et qui rend les gens sereins et actifs. Les habitants de Libria ont tous décidés d’abandonner leurs individualités pour vivre en paix et en harmonie autour d’un dirigeant spirituel surnommé ‘Père’. Afin de conserver cette harmonie, les dirigeants de Libria ont formés les ecclésiastiques, des agents chargés de faire régner la loi en usant au maximum de la force, éliminant systématiquement les opposants au régime qui ressentent des émotions et refusent d’absorber le Prozium. John Preston (Christian Bale) est l’un des plus brillants ecclésiastiques, mais le jour où il doit tuer son ami et équipier Elliot Partridge (Sean Bean), qui a transgressé la loi, il commence à s’interroger et à refouler ses émotions, un sentiment amplifié par le souvenir de sa femme qui fut elle aussi exécutée pour avoir transgressé la loi à son tour. Les choses s’accélèrent lorsque Preston brise par inadvertance son flacon de Prozium sans en demander un autre de rechange. Après avoir arrêté une résistante du nom de Mary O’Brien (Emily Watson), Preston commence à ressentir des émotions qui remontent à la surface et le submergent totalement. Peu à peu, il prend conscience de l’horreur du système dans lequel il vit et va se retourner contre ses dirigeants en devenant le nouvel héros de la résistance.

‘Equilibrium’, c’est donc un énième film de science-fiction qui aborde le thème de la société totalitaire et fasciste à l’instar de grands classiques tels que ‘THX1138’, ‘Fahrenheit 451’, ‘Nineteen Eighty-Four’ ou ‘Logan’s Run’, qui ont probablement influencé le réalisateur Kurt Wimmer (qui est aussi l’auteur du scénario du film). ‘Equilibrium’ s’interroge simplement sur ce qui fait la nature humaine et sur le rapport vital entre l’homme et ses émotions, rapport remis en cause dans une dictature qui parle de lutter contre les guerres et les meurtres alors qu’elle est responsable de la mort de milliers de personnes chaque jour (tout ceux qui s’opposent au régime). Entendre l’un des ecclésiastiques prétendre que cela fait depuis des années qu’il n’y a plus eu de meurtre alors qu’il venait auparavant d’abattre plusieurs résistants fait même froid dans le dos. Kurt Wimmer tempère ces réflexions philosophiques par des scènes d’action à couper le souffle, dans lequel le réalisateur s’est amusé à inventer un nouveau type d’art martial, le ‘kata d’arme à feu’, qui, selon les dires de l’instructeur dans le film, permet d’anticiper tous les mouvements et d’abattre ses ennemis avec une efficacité parfaite bien au delà des 120%. Pour certains, l’esthétique de ‘Equilibrium’ et ces scènes d’action musclées le rapproche sensiblement de ‘The Matrix’, une comparaison quasi systématique très décriée, à commencer par le réalisateur lui-même qui affirme haut et fort que son film n’a absolument rien à voir avec celui des frères Wachowsky. Force est de constater qu’on ne peut que lui donner raison, tant ‘Equilibrium’ diffère dans l’histoire et la mise en scène par une certaine sobriété (les chorégraphies de combat sont réalisées sans aucun trucage – ici, pas d’effets de ‘bullet time’ ou de cascades réalisées à l’aide de câbles) et un scénario plus linéaire et bien moins compliqué que celui de ‘Matrix’. Il serait donc particulièrement hasardeux de s’obstiner, comme le font certains, à vouloir absolument comparer ‘Equilibrium’ à ‘Matrix’, deux films différents qui, malgré quelques points communs (une société totalitaire qui assouvit les humains), proposent deux visions et deux réflexions différentes sur la nature humaine. Christian Bale s’impose radicalement dans le film, entre retenue forcée et émotion à fleur de peau, même si l’on regrettera les 10 dernières minutes du film, qui basculent inévitablement dans le registre de la baston tendance jeu vidéo de Playstation 2 avec sont lot de fusillades, de chorégraphies de combat made in hong kong et d’empilement impressionnant de cadavres. Voilà en tout cas un bon film de sci-fi à réserver en priorité aux fans du genre, ‘Equilibrium’ n’apportant finalement pas grand chose de nouveau au genre!

La musique de Klaus Badelt contribue très largement à l’ambiance sombre et dramatique du film. Le jeune compositeur de chez Media-Ventures a utilisé ici toute une série de samples orchestraux/électro provenant des banques de sons de Media-Ventures (aucun vrai orchestre n’a été utilisé ici) afin de créer l’ambiance musicale adéquate pour le film de Kurt Wimmer. Ainsi, la musique s’articule autour de passages orchestraux sombres avec les rythmiques électroniques modernes habituelles et une bonne dose de choeurs qui apportent une sonorité un peu particulière au film, et ce dès le début. Badelt accentue la dimension religieuse du film (et sa critique très satirique et à peine déguisée du puritanisme américain et du fanatisme religieux – n’est-il pas question un moment du héros à qui l’on demande de tester sa foi envers le Père?) à l’aide de ces choeurs qui parcourent l’ensemble de sa musique en suggérant à la fois le côté fasciste de cette dictature et les émotions humaines qui sont interdites. Ainsi, ces voix pourraient se faire l’écho de la nature humaine, des émotions et des sentiments traqués et annihilés, tandis que la partie électronique résumeraient finalement le côté plus froid et malsain du film (l’absence d’émotion, le regard vide et inexpressif des gens, etc.).

Pour arriver à ses fins, Klaus Badelt utilise deux thèmes majeurs, le premier s’inspirant vaguement d’un motif du ‘Mission: Impossible 2’ de Hans Zimmer, accompagné par moment par des guitares électriques et des percussions comme pour la scène de la fusillade dans le couloir à la fin du film, un thème d’action qui évoque le volte-face de John Preston contre ses dirigeants. Le second thème, plus dramatique, est associé quand à lui aux émotions de Preston, thème plus mélodique à la fois sombre et vaguement mélancolique accompagné par des choeurs accentuant la nature humaine du héros qui finit par reprendre le dessus sur son conditionnement forcé. Pour le reste, le score de ‘Equilibrium’ accompagne de façon très ordinaire le reste du film entre morceaux d’action bourrés de rythmiques électroniques et de samples d’orchestre et passages plus dramatiques comme pour la scène où les agents abattent les chiens (sans aucun doute l’une des séquences les plus dures du film). On regrettera le fait que les morceaux d’action soient extrêmement quelconques, alors que l’on préfèrera au contraire se rabattre sur les passages plus sombres et dramatiques où Badelt apporte à quelques reprises une certaine sensibilité aux images, même s’il ne va certainement pas assez loin par rapport à ses réelles capacités. ‘Equilibrium’ s’avère donc être un score d’action/dramatique tout à fait ordinaire, parfait pour les fans du compositeur mais qui risque de laisser les autres de marbre. Malgré quelques bonnes idées, le score laisse un peu sur notre faim et aurait mérité à gagner en profondeur et en originalité, même si son impact sur les images du film est absolument indéniable. Pour un film qui parle de la lutte contre les émotions humaines, la musique de Badelt s’avère finalement être assez émouvante, même si on était en droit de s’attendre à quelque chose de franchement plus mémorable!


---Quentin Billard