1-Kung Fu 1 0.53*
2-Nothing Ventured,
Nothing Gained 2.34
3-Fisherman's Song
of the East China Sea 3.03**
4-Ambush From All Sides
(Traditional) 0.45
5-Allegro Molto Vivace
from Zigeunerweisen
op. 20 1.02***
6-Moderato from
Zigeunerweisen op. 20 1.24***
7-Decree of the Sichuan
Assassin (Traditional) 4.08
8-Midnight Assassin 0.55
9-The Blade of Gu Qin 1.22
10-Night Club Bande 1.04
11-Sabre Dance 1.26+
12-Daring General 2.45++
13-Casino Fight 2.08
14-Realization 1.30
15-Ying Xiong Men Zhan
Sheng Le Da Du He 1.40+++
16-Dagger Society Suite 2.43#
17-Fisherman's Song of
the East China Sea 3.13**
18-Buddhist Palm 1.31
19-Nothing Ventured,
Nothing Gained 3.30##

*Composé par Stephen Chow
**Composé par Ma Sheng Long
et Gu Guan Ren
***Composé par
Pablo de Sarasate
+Composé par Aram Khatchaturian
++Composé par
Yu Hui Yong et Hu Deng Tiao
+++Composé par
Luo Zong Xian
#Composé par Shang Yi
##Composé par
Raymond Wong et Lin Xi
Interprété par Huang Sheng Yi.

Musique  composée par:

Raymond Wong

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD 6645

Producteur exécutif de l'album:
Stephen Chow
Producteur exécutif pour
Varèse Sarabande:
Robert Townson
Producteurs de l'album:
Connie Wong,
Sal Ladestro,
Kieven Yim

Artwork and pictures (c) 2005 Columbia Pictures Film Production Asia. All rights reserved.

Note: ***
GONG FU
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Raymond Wong
C’est avec un plaisir non dissimulé que les fans de ‘Shaolin Soccer’, choc cinématographique chinois de l’année 2002, peuvent enfin retrouver l’acteur/réalisateur Stephen Chow dans son nouveau long-métrage, le délirant ‘Gong Fu’ (rebaptisé ‘Crazy Kung-Fu’ dans nos contrées), nouvelle comédie d’action pétaradante pour laquelle le réalisateur a du s’associer pour la première fois de sa carrière avec un studio hollywoodien (Columbia Pictures Film Productions Asia) afin de produire ce film énorme. Avec ‘Gong Fu’, Stephen Chow réalise un rêve d’enfant: tourner un film qui rende définitivement hommage aux arts martiaux sous toutes leurs formes et aux héros du kung-fu. Evidemment, le film est marqué par la figure emblématique du mythique Bruce Lee, une inspiration flagrante dans la variété et la virtuosité des combats mais aussi dans un plan proche de la fin du film où le protagoniste principal, Sing (Stephen Chow), se métamorphose lui-même en Bruce Lee le temps d’un plan ‘star’ empreint d’une certaine ironie. Le réalisateur avoue aussi s’être inspiré de sa jeunesse en faisant se dérouler l’histoire du film dans un quartier d’appartements pauvres et délabrés où habite une petite communauté de miséreux réunis autour d’une propriétaire pète-sec et grande-gueule (Yuen Qui) adepte du tétanisant ‘cri du lion’. ‘Gong Fu’ se déroule dans le vieux Shanghai des années 40, où un gang de dangereux bandits surnommés le ‘gang des haches’ terrorise les habitants de la ville et règne en maître sur leur territoire. Un jour, le dénommé Sing et son ami au look sumo débarquent dans le quartier pauvre et prétend être un membre du gang des haches avant d’essayer d’extorquer un peu d’argent à un commerçant, mais sa maladresse et le manque de conviction de son ami faux-gangster ne manquent pas de se retourner contre eux. Chassé du quartier, Sing revient en faisant appel au vrai gang des haches, mais ces derniers se heurtent à des habitants du quartier qui, derrière leur apparence plus qu’ordinaire, se révèlent être des maîtres de techniques d’arts martiaux légendaires. Humilié par cette défaite, le gang des haches décide de répliquer en engageant deux tueurs redoutables qui seront chargés d’éliminer ces maîtres du kung-fu. De son côté, Sing, traîne dans les rues et rêve de devenir un gangster et de faire le mal, après avoir tenté en vain de se prendre pour un héros dans sa jeunesse. Mais sa maladresse handicapante l’empêche se concrétiser son souhait, et petit à petit, il va apprendre à maîtriser un vieux pouvoir qu’il a acquit dans sa jeunesse, ‘la paume de Bouddha’. Lorsque le gang des haches décide finalement d’envoyer un redoutable et mythique tueur surnommé ‘la bête’ pour vaincre les derniers maîtres kung-fu du quartier pauvre, Sing intervient et comprend que son rôle est de protéger les habitants de ce quartier sacré.

Si l’intérêt du scénario est plutôt minime, l’atout majeur de ‘Gong Fu’ se situe plutôt dans la façon dont Stephen Chow nous présente ses personnages atypiques et ses situations loufoques à grand renfort d’effets spéciaux massifs qui font de ‘Gong Fu’ l’un des films les plus chers de toute l’histoire du cinéma hong-kongais. Tout est prétexte ici à vanter la gloire et les bienfaits des arts martiaux sous forme d’humour absurde et de séquences déjantées dans la lignée de ‘Shaolin Soccer’. Ici, une mégère proprio au look de vielle ménagère modeste terrasse ses ennemis en poussant le mythique cri du lion qui dévaste tout sur son passage, un modeste commerçant au look quelconque se transforme en maître du kung-fu capable de venir à bout d’une armée entière d’ennemis, deux tueurs musiciens redoutables utilisent une sorte de cithare asiatique pour tirer des épées invisibles et un vieux bonhomme rabougri au look pouilleux se révèle être un vrai tueur sanguinaire et indestructible, maîtrisant le pouvoir du crapaud. Ici, il est bel et bien question de pouvoirs, des pouvoirs qui dépassent le conditionnement humain pour tous ses personnages aux looks désavantageux mais à la force surhumaine. L’humour est ainsi quasi constant tout au long du film, que ce soit dans les nombreux gags en tout genre qui parsèment le film ou dans les diverses allusions cinématographiques qui pimentent quelques scènes, avec des clins d’oeil plus qu’évident à ‘The Matrix’ (le chorégraphe des combats étant Yuen Woo Ping, qui avait déjà assuré les combats dans la trilogie de ‘Matrix’ et de ‘Tigre et Dragon’), ‘The Shining’ (scène clin d’oeil de l’inondation de sang dans le couloir), ‘Spiderman’ (la morale sur la responsabilité qu’implique un grand pouvoir) ou bien encore ‘Tigre et dragon’ et même ‘Gangs of New York’ (‘Gong Fu’ ressemblant par moment à une parodie du film de Martin Scorsese). Mais derrière tous ces clins d’oeil, ‘Gong Fu’ se veut avant tout comme un hommage délirant aux films de kung-fu avec lesquels Stephen Chow a grandit – et plus particulièrement les films de Bruce Lee – un aspect du film pleinement abouti et maîtrisé par un Stephen Chow en pleine forme, qui repousse une fois encore les limites du genre et nous propose un nouvel opus cartoonesque totalement déjanté et visuellement hallucinant, où l’humour absurde à la Monty Python, les effets spéciaux énormes et les chorégraphies de combats spectaculaires et massives cohabitent avec un fun rare où tout semble n’être prétexte qu’au divertissement pur et dur à l’ancienne (à noter que Chow nous propose une petit numéro de comédie musicale assez amusant au début du film, sur fond d’humour noir garanti). Salué par la plupart des critiques internationales comme l’événement cinématographique majeur du cinéma chinois de cette fin d’année, ‘Gong Fu’ est une petite perle atypique dans son genre, à ne rater sous aucun prétexte, surtout si vous avez adoré ‘Shaolin Soccer’!

Le compositeur Raymond Wong retrouve Stephen Chow après avoir oeuvré ensemble sur ‘Shaolin Soccer’, pour lequel Wong avait signé un score synthétique à la fois épique et rythmé. Le score de ‘Gong Fu’ s’avère malheureusement être un poil en dessous de la qualité de ‘Shaolin Soccer’, même s’il conserve malgré un fun et une énergie considérable à l’écran. Pour commencer, on notera que le réalisateur a décidé d’opter pour un mélange score original/musiques non originales puisque la bande son inclut quelques extraits de pièces telles que la fameuse ‘danse du sabre’ d’Aram Khatchatourian, deux extraits du ‘Zigeunerweisen’ opus 20 pour violon et orchestre du compositeur espagnol Pablo de Sarasate (accompagnant la scène délirante où la proprio poursuit Sing à la vitesse de l’éclair, à la manière du cartoon Bip bip et le coyote) sans oublier toute une série de pièces chinoises traditionnelles et de réadaptations de pièces musicales asiatiques par Raymond Wong pour les besoins du film. L’ouverture du film se fait au son de ‘Kung Fu 1’ (écrit par Stephen Chow lui-même), pièce de synthé basé sur un petit ostinato rythmique hérité de ‘Shaolin Soccer’, avec ses cuivres dissonants qui, curieusement, rappellent par moment le style des scores de ‘Matrix’ de Don Davis (une allusion musicale probablement voulue, pour coïncider avec les clins d’oeil à Matrix que l’on retrouve tout au long du film). Avec ‘Nothing Ventured, Nothing Gained’, Raymond Wong dévoile le thème associé au gang des haches, qui semble faire curieusement référence ici au thème de James Bond, avec un motif de cuivres qui rappelle vaguement le célèbre air de ‘Peter Gunn’ d’Henry Mancini, et qui accompagne non sans humour la chorégraphie du gang des haches au début du film, sur fond d’ostinato de percussions et de divers effets de cuivres. Le thème contraste quand à lui avec celui de ‘Fisherman’s Song of the East China Sea’, adaptation orchestrale d’un air chinois de Ma Sheng Long et Gu Guan Ren, qui apporte une touche plus paisible et pastorale au quartier pauvre de la porcherie, interprété ici par les instrumentistes du ‘Hong Kong Chinese Orchestra’, utilisant divers instruments chinois traditionnels (dominé par le violon ‘erhu’, très popularisé depuis le succès des partitions de films asiatiques tels que celles de Tan Dun pour ‘Tigre et dragons’ ou ‘Hero’) couplé avec les cordes de l’orchestre occidental traditionnel. Le morceau apporte un charme quasi étonnant à la scène où l’on découvre les quartiers de la porcherie.

Soucieux de maintenir cette couleur ‘asiatique’ apportée par ‘Fisherman’s Song of the East China Sea’, le compositeur utilise aussi une pièce chinoise traditionnelle dans ‘Ambush from All Sides’ pour évoque la contre-attaque du gang des haches de façon plus minimaliste, à l’aide d’une cithare et d’un tambour. On retrouve cette touche asiatique traditionnelle dans ‘Decree of the Sichuan General’ pour la scène du premier combat dans le quartier avec la participation des instrumentistes traditionnels du Hong-Kong Chinese Orchestra qui apportent une force non négligeable à la musique dans le film (à noter ici l’importance des percussions qui dynamisent les combats). La scène déjantée des deux tueurs à la cithare est accompagnée au son du ‘Midnight Assassin’ de Raymond Wong, qui s’apparente à un jeu d’improvisation sur les cordes de l’instrument dans le style de la musique chinoise traditionnelle dans la continuité du reste de la partition, le morceau se prolongeant dans le virtuose ‘The Blade of Gu Gin’. Evidemment, le compositeur n’oublie pas l’humour et l’éclectisme de la musique et nous propose carrément un petit mambo kitsch au synthé dans ‘Night Club Band’, qui sert de ‘source music’ pour la scène où Sing se rend au Night Club du chef du gang des haches. Eclectisme semble être le maître mot de la musique de ‘Gong Fu’ puisque l’on passe très souvent d’un style à un autre avec malgré tout une certaine unité stylistique avec l’utilisation régulière de musiques chinoises traditionnelles souvent réorchestrées. La ‘danse du sabre’ de Khatchatourian (extraite de son fameux ballet ‘Gayaneh’) est utilisée quand à elle pour la scène où Sing part délivrer ‘la bête’ dans l’asile d’aliéné (encore une autre touche d’humour de la musique), la découverte du personnage de la bête se faisant d’ailleurs au son de ‘Daring General’ de Yu Hui Yong et Hu Deng Tiao dont le caractère rythmé et majestueux contraste avec la scène où le tueur fait sa ‘démo’ devant le gang des haches. L’action n’est évidemment pas de reste puisque Raymond Wong nous propose par exemple un solide morceau d’action pour ‘Casino Fight’ évoquant à grand renfort de percussions et de cuivres à la ‘Matrix’ l’affrontement spectaculaire et déjanté entre la bête et le couple de maître kung-fu dans le casino vers la dernière partie du film. On pourra même apprécier l’apport dramatique et émotionnel de ‘Realization’ lorsque Sing découvre enfin ses pouvoirs, Wong faisant ici brièvement référence au motif de cuivres du ‘Matrix’ de Don Davis. Seul problème, et il est de taille, on aurait aimé entendre sur l’album les morceaux plus romantiques et émouvants accompagnant les scènes entre Sing et la jeune fille à la sucette, morceau qui aurait ajouté un relief émotionnel indispensable à un album qui semble avoir honteusement mis de côté une bonne partie du score de Wong pour le film de Stephen Chow - au lieu de 37 minutes, on aurait sans aucun doute put aller jusqu’à une cinquantaine de minutes de musique, un inconvénient majeur de l’album qui nous laisse finalement un peu sur notre faim!

La dernière partie du film se prolonge avec son lot d’action et pièces chinoises comme l’imprononçable ‘Ying Xiong Men Zhan Sheng Le Da Du He’ de Luo Zong Xian ou le ‘Dagger Society Suite’ de Shang Yi, sans oublier l’explosif et grandiose ‘Buddhist Palm’ pour l’attaque finale de Sing, évoquée ici à grand renfort de choeurs de synthé qui, ici aussi, font penser au ‘Matrix’ de Don Davis, et plus particulièrement au passage final épique de ‘Anything is Possible’. Dommage que le morceau soit un brin trop court et qu’il manque ici aussi d’autres morceaux d’action de même qualité. Malgré sa courte durée et l’absence de plusieurs excellents passages du score de Raymond Wong, la musique de ‘Gong Fu’ a de quoi réjouir les fans de Raymond Wong et de l’univers déjanté du film de Stephen Chow, même si le nouveau travail de Wong sur ‘Gong Fu’ s’avère être bien moins accrocheur et mémorable que celui de ‘Shaolin Soccer’, le principal défaut étant ici l’absence d’un grand thème fédérateur en dehors du motif du gang des haches et du quartier de la porcherie. L’album s’avère être largement incomplet et aurait du inclure les passages plus dramatiques et intimistes au lieu de trop miser sur la sélection ‘classique/traditionnel’ dont on se lasse un peu vite à l’écoute mais qui apporte néanmoins une certaine force aux images du film et renforce l’univers asiatique des décors du Shanghai des années 40. Reste en tout cas la preuve incontestable du talent de Raymond Wong, dont on espère beaucoup de ses futures collaborations avec Stephen Chow!


---Quentin Billard