1-On Earth As It Is On Heaven 3.48
2-Falls 1.53
3-Gabriel's Oboe 2.12
4-Ave Maria Guarani 2.48
5-Brothers 1.30
6-Carlotta 1.19
7-Vita Nostra 1.52
8-Climb 1.35
9-Remorse 2.46
10-Penance 4.00
11-The Mission 2.47
12-River 1.57
13-Gabriel's Oboe 2.38
14-Te Deum Guarani 0.46
15-Refusal 3.28
16-Asuncion 1.25
17-Alone 4.18
18-Guarani 3.54
19-The Sword 1.58
20-Misere 0.59

Musique  composée par:

Ennio Morricone

Editeur:

Virgin Records America

Album produit par:
Ennio Morricone
Indian Instrumentation by:
Incantation
Choir by: London Voices
Directeur musical:
Geoffrey Shaw
And by:
Barnet Schools Choir
Directeur musical:
J. Maxwell Pryce
Direction chorale:
David Bedford

Artwork and pictures (c) 1987 Warner Bros./Kingsmere Production, Ltd. All rights reserved.

Note: *****
THE MISSION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Ennio Morricone
Excellent film de Roland Joffé, 'The Mission' montre les ravages des missions religieuses du 18ème siècle et de ces hommes d'église qui, au nom de la religion, s'étaient fixés comme but de convertir des peuples indiens d'amérique du sud au christianisme, allant même jusqu'à les massacrer si jamais les indigènes s'opposaient à leurs desseins. Jeremy Irons interprète le rôle du père Gabriel, un jésuite envoyé dans cette mission à Asuncion auprès des indiens Guarani pour vivre avec eux et leur enseigner la religion chrétienne. Quand à Robert De Niro, parfait comme d'habitude, il joue le rôle de Rodrigo, un ancien trafiquant d'esclave reconverti en prêtre jésuite après avoir tué son propre frère lors d'un défi. Les deux hommes, ayant partagé ensemble le même mode de vie des jésuites dans ce village Guarani, vont se retrouver opposés lors d'une guerre pour l'indépendance des tribus. L'un croira à la puissance de la prière, l'autre à celle de l'épée.

Ennio Morricone a probablement composé là ce que nous pouvons bel et bien appeler son chef d'oeuvre. Pour lui, 'The Mission' fut le moment opportun d'y exprimer toute sa foi en Dieu et sa spiritualité. 'The Mission' est un peu l'oeuvre religieuse que fut le sublime 'Requiem' de Fauré ou plutôt de Verdi pour rester en Italie. Morricone ne tarit pas d'éloges d'ailleurs à propos de celui qu'il appelle son "maître". Dans le film de Joffé, Morricone a traduit d'un côté le recherche de la spiritualité, le pouvoir de la foi, mais aussi la menace et la cruauté des hommes, deux aspects personnalisés chacun dans les deux personnages principaux incarnés par Jeremy Irons et Robert De Niro (même si le personnage de De Niro se reconverti en prêtre auprès des jésuites, il n'empêche qu'il choisit la solution de la violence à la fin du film). Le thème principal restera probablement à jamais gravé dans les mémoires de tous les béophiles comme l'un des plus beaux thème jamais écrit pour le cinéma. Il s'agit en fait du 'Gabriel's Oboe', un thème que joue le père Gabriel sur son hautbois alors qu'il se retrouve en pleine forêt, entouré d'une tribu d'indiens Guarani. D'abord seul, le thème revient ensuite dans la musique de Morricone sous forme orchestrale, toujours avec le hautbois soliste, dont le magnifique timbre vient transcender ce que Morricone tient à appeler un "arioso" dans la tradition italienne, sauf qu'ici c'est un arioso instrumental. C'est vrai qu'il y'a un peu de cela. Gabriel joue ce thème pour tenter de rentrer en contact avec les Guarani, de les charmer par le pouvoir de la musique, d'atteindre Dieu par le puissance incantatoire de la musique, car il ne faut pas oublier que Gabriel est avant tout en mission pour convertir les indiens à la religion chrétienne. Donc, bien plus que le thème s'apparentant au personnage de Gabriel, c'est avant tout le thème de la foi en Dieu, de l'humilité de l'homme face à son créateur, de son amour pour Dieu, le pouvoir incantatoire de la musique, etc.

Un second thème, entendu dans 'Falls', représente lui aussi la mission, puisqu'on l'entend lorsque Gabriel grimpe le long d'une montagne pour rejoindre la forêt des Guarani, la cadre naturel d'une grande beauté étant alors renforcé par ce superbe thème. Morricone utilise d'ailleurs dans ce passage une flûte de pan pour énoncer le thème, repris ensuite majestueusement par les cordes, la flûte faisant partie du groupe d'instrumentistes indien. 'Incantation' venus jouer spécialement pour la musique de Morricone. Troisième thème, celui du 'Vita Nostra', motif de flûtes indiennes repris à l'orchestre, renforcé par les chants du London Voices venant exprimer ici la joie de vivre des indiens mais aussi leur spiritualité, donc quelque part, une certaine d'hymne à Dieu. On pourrait aussi penser que 'Vita Nostra' exprime le bonheur de vivre en communion pacifique, Jésuites/Guarani, chacun apportant de la chaleur humaine à l'autre, et ce sous le regard paisible de Dieu. Ce côté éthnique se retrouve dans le plus beau morceau de la BO, 'On Earth As It Is In Heaven' ('sur la terre comme dans le paradis', traduit littéralement), que l'on entend pour le générique de fin, et qui réunit en fait les deux thèmes principaux: celui du 'Vita Nostra', et celui de Gabriel, exprimant parfaitement ainsi la communion des deux peuples: celui des Guarani avec son lot d'instruments et de percussions ethniques, et celui des occidentaux représentés par les jésuites. Grandiose à souhait et vraiment inoubliable, ce morceau exprime en 3 minutes 48 toute la ferveur religieuse de Morricone non seulement pour le film en lui même, mais aussi par rapport à ses propres convictions religieuses. Plus qu'une simple musique de film, 'The Mission' est véritablement l'hymne humble d'un musicien composé en hommage à Dieu. Notons aux passages des chants religieux composés par Morricone pour le film et que chantent les Guaranis dans leur village, 'Ave Maria Guarani' et 'Te Deum Garani'.

Une seconde partie, moins marquante, évoque les passages les plus agités du film. 'Carlotta' représente la déception et l'amertume de Rodrigo lorsqu'il apprend que sa femme Carlotta sort avec son propre frère (Morricone utilise des cordes et une guitare dans une ambiance sombre et dramatique). 'Remorse' évoque les remords de Rodrigo après avoir tué son frère en duel à travers une très sombre musique de cordes rappelant beaucoup le style d'écriture orchestrale de 'The Thing' (1982). 'Penance' évoque le châtiment que s'inflige lui même Rodrigo pour tenter de se laver de sa faute. 'Refusal', 'Alone' et 'Guarani' évoquent les combats opposant les Guarani/Jésuites aux soldats des colonisateurs. On notera des emplois très particuliers des divers instruments à vents ethniques dans le très étrange 'Guarani' créant un véritable climat de tension dans la scène, vite rejoint par les cordes sinistres tout droit sorties de 'The Thing'. Ces parties tumultueuses et agitées sont moins intéressantes mais tout de même importantes dans le contexte de l'histoire du film.

Le CD trouve comme le film sa conclusion sur 'Miserere', magnifique reprise du thème de la mission à la voix d'un jeune garçon dont la pure beauté du chant illumine la scène finale où l'on voit justement des enfants sur une pirogue naviguant sur l'eau, bien après les massacres dans le village et la forêt. On notera cette fameuse métaphore du violon qui flotte sur l'eau et un message optimiste de l'homme, l'enfant évoquant quelque par la bonté et l'innocence de l'homme qui face à l'horreur de la guerre, symbolisé par l'objet métallique crasseux qui se trouve au fond de l'eau et ressemblant à une épée, a le pouvoir de dire non et de suivre la juste voie, symbolisée par le violon qu'il prend alors avec lui, une métaphore que remarqua justement Morricone et qui décidé de souligner par le 'Miserere', un autre chant dédié à Dieu, au pouvoir de la foi, à l'humilité.

'The Mission' est, comme nous l'avons déjà dit plus haut, bien plus qu'une simple musique de film. Morricone expliqua lui même qu'il voulait absolument trouver cette spiritualité dans ce film pour composer sa musique. Il a parfaitement réussi ce qui fait sans nul doute de 'The Mission' son chef d'oeuvre: un pur trésor de musique, une beauté musicale profonde, des harmonies célestes, des orchestrations remarquables. Il n'y a pas d'autres mots: un chef-d'oeuvre incontournable dans la carrière exemplaire du maestro italien!



---Quentin Billard