1-The Incident at School 1.59
2-Untie Me...Please 2.14
3-The Crossbow Accident 2.48
4-Get a Television,
Mrs. Tingle 1.07
5-Spanky Shows Up 3.13
6-I Know You 2.19
7-Caught Cheating 1.36
8-My Mom has been very Sick 1.08
9-Luke Confides in Tingle 2.29
10-Close your Eyes 1.18
11-Leigh Ann Crosses
the Line 1.41
12-I Don't Think So 0.48
13-I'm Your Friend 1.07
14-Destiny 5.12
15-Triumph 0.58

Musique  composée par:

John Frizzell

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-6064

Album produit par:
John Frizzell,
Micha Liberman

Montage musique:
Abby Treloggen
Producteur exécutif:
Robert Townson

Artwork and pictures (c) 1999 Miramax Films. All rights reserved.

Note: ***
TEACHING MRS. TINGLE
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Frizzell
Pour son premier passage derrière la caméra, Kevin Williamson (plus connu pour être le scénariste de la trilogie des ‘Scream’ et de la série TV ‘Dawson’) signe avec ‘Teaching Mrs Tingle’ un sympathique thriller teinté d’humour noir. Leigh Ann Watson (Katie Holmes) est une jeune étudiante qui travaille d’arrache-pied pour réussir son oral auprès de sa prof d’histoire/géographie Mrs. Tingle (Helen Mirren), enseignante cruelle et tyrannique détestée de tous, même de tout le personnel de l’établissement. Leigh vise une bonne note qui lui permettrait de décrocher par la suite une bourse pour poursuivre des études supérieures à Harvard. Hélas, ce travail qu’elle préparait durant près de six mois ne lui vaudra qu’un ‘C’ particulièrement injustifiée. Peu de temps après, alors qu’elle est en compagnie de son amie Jo Lynn (Marisa Coughlan), Leigh découvre que Luke (Barry Watson), un de ses camarades de classe, a volé le contrôle d’histoire de Mrs. Tingle afin de tricher à l’examen. C’est alors que la tyrannique enseignante les prend en flagrant délit et part immédiatement les dénoncer, alors que Leigh et Jo Lynn sont innocentes. Pour Leigh, c’est la catastrophe assurée pour son avenir. Ensemble, les trois jeunes étudiants décident de se rendre le soir chez Mrs. Tingle pour discuter calmement du problème, mais comme prévu, l’enseignante ne veut rien entendre et les envoie promener. Excédé, Luke décide de la neutraliser à l’aide d’une arbalète qu’il a volé à l’école, mais lorsque la flèche part accidentellement et blesse Mrs. Tingle, la vie des trois étudiants bascule soudainement dans l’angoisse. Alors que la vieille femme ne revient toujours pas à elle, ils décident de la séquestrer dans sa chambre et de faire croire à l’école qu’elle ne pourra pas venir pour cause de maladie. Mais à son réveil, Mrs. Tingle devient plus mauvaise que jamais et, retenue prisonnière à son lit, va tenter de torturer psychologiquement ses trois jeunes ravisseurs jusqu’à ce que l’un d’entre eux commette une bévue et que la situation se retourne contre eux. Désormais, c’est Mrs. Tingle qui fixe les règles.

Voilà une intrigue particulièrement intéressante que le réalisateur développe avec loisir tout au long du film. Il faut dire que ‘Teaching Mrs. Tingle’ ne s’est pas fait sans mal puisqu’à sa sortie il a soulevé une vague de polémique à la suite de la tuerie du lycée Columbine de Liffleton dans le Colorado en avril 1999, ayant entraîné la mort de plusieurs professeurs et élèves de l’établissement. Sorti en août 1999, on a reproché au réalisateur d’avoir voulu jouer sur la vague du sensationnalisme en profitant de l’occasion morbide pour nous offrir ce thriller se déroulant dans le monde des jeunes étudiants. A vrai dire, Kevin Williamson avait même envisagé un scénario nettement plus sombre et brutal puisqu’à l’origine, les étudiants devaient assassiner leur professeur. Mais la réalité a finit par rattraper la fiction, et à la suite des tristes évènements survenus en avril 1999 dans le lycée du Colorado, le scénario et le titre même du film (‘Killing Mrs. Tingle’) ont finalement été changés – plus précisément, c’est bien avant la tuerie au lycée de Columbine que les producteurs du film ont décidés de modifier le script du film, jugé trop provocateur. Mais rien n’y fit, et le film a continué de provoquer une vive polémique, surtout de la part des associations de parents d’élève et les ligues d’éducation américaines qui ont même réussit à faire interdire le film dans certaines salles de cinéma, ‘Teaching Mrs. Tingle’ ayant même été interdit en Allemagne alors qu’un jeune étudiant a décidé à son tour de suivre l’exemple du film en assassinant son propre professeur d’histoire (véridique, hélas!). Evidemment, comme on pourrait s’en douter, cette campagne de dénigrement a fait de la publicité à ce petit thriller modeste qui n’avait besoin que d’un bon scandale pour trouver son public. Qu’en est-il réellement du film en lui-même? Il s’avère être bien moins provocateur et violent qu’il n’y paraît, les étudiants ne levant en fait jamais le doigt contre leur enseignante mais jouant plus au contraire sur l’affrontement psychologique permanent. Helen Mirren est absolument formidable dans la peau de cette enseignante tyrannique et sans coeur, véritable caricature de tous ces profs qui nous ont gâchés notre vie d’étudiant à un moment ou un autre au cours de notre scolarité. A vrai dire, Williamson s’est inspiré d’un souvenir de jeunesse pour écrire l’intrigue du film, lui qui avait été terrorisé étant étudiant par une prof d’anglais toute aussi cruelle que l’est Mrs. Tingle dans le film. Williamson désamorce le suspense et la tension permanente du film en y apportant une bonne dose d’humour noir qui fait osciller le film entre comédie et thriller psychologique. Mieux vaut finalement oublier la réputation sulfureuse du film pour pouvoir pleinement apprécier ce sombre thriller non dénué d’humour, qui se moque habilement des ces vieux prof aigris qui aiment tyranniser leurs élèves.

La partition de John Frizzell pour ‘Teaching Mrs. Tingle’ est à l’image même du film de Kevin Williamson: elle apporte son lot de suspense et d’humour au film, renforçant la tension permanente avec une efficacité redoutable. Avec ‘Incident at School’, Frizzel impose d’entrée de jeu la facette ‘comédie noire’ du film en jouant sur des passages légers entre pizzicati de cordes et vents et un bref élan orchestral plus dissonant pour la scène de l’incident de la flèche au début du film. Si la partie comédie semble légèrement dominer au cours de la première partie, le caractère sombre et ambigu des cordes suggère la méchanceté et la cruauté de l’enseignante, qui se prolonge dans ‘Untie Me...Please’ où Frizzell utilise de façon surprenante un choeur avec cordes, vents et piano. On appréciera d’ailleurs la façon dont Frizzell évoque avec humour la scène où Mrs. Tingle fonce voir le principal pour dénoncer les trois étudiants qu’elle accuse de tricherie dans ‘Caught Cheating’, qui évoque de par son côté ironique et noir le ‘Death Becomes Her’ d’Alan Silvestri, Frizzell accompagnant cette scène sous la forme d’une petite marche grotesque et remplie d’une ironie grinçante rappelant la cruauté de l’enseignante sans coeur, dont le compositeur se moque ici gentiment à travers sa musique. Le compositeur s’amuse en fait à pasticher ici le style thriller du grand Bernard Herrmann dont il recycle ici les formules orchestrales en faisant quelques vagues clins d’oeil à des partitions mythiques telles que ‘Psycho’ ou ‘Vertigo’. Le suspense pointe alors le bout de son nez dans ‘Crossbow Accident’ lorsque Luke blesse Mrs. Tingle avec son arc. On notera le jeu staccato des cordes et les effets de dissonance qui créent ici une très grande tension pour la première confrontation entre les étudiants et leur prof. Dès lors, Frizzell pose la partie ‘suspense’ de sa partition en faisant systématiquement référence à Bernard Herrmann, tandis qu’un morceau comme ‘Get a Television, Mrs. Tingle’ apporte un peu de relief en utilisant un sympathique duo de saxophones jazzy pour la scène où Mrs. Tingle est séquestrée et attachée à son lit. Idem pour l’amusant ‘Close Your Eyes’ où Frizzell nous offre un petit passage jazzy léger avec saxophone, piano et section rythmique traditionnelle alors que les trois étudiants tentent de saouler le coach et de l’endormir afin qu’il ne se doute de rien et qu’il ne découvre pas tout.

‘I Know You’ est quand à lui plus représentatif de la partie thriller du film avec un morceau plus terrifiant où Frizzell joue sur des cordes dissonantes, les percussions et les cuivres agressifs alors que le coach (Jeffrey Tambor) arrive chez Mrs. Tingle et se révèle être son amant venu lui rendre une petite visite à l’improviste. Le compositeur évoque ici la tension de la scène dans un style qui n’est pas sans rappeler par moment son travail sur ‘Alien Resurrection’ (1997). La torture psychologique débute dans ‘I Know You’ avec ses cordes sombres à la Herrmann qui renforcent inexorablement la tension. Frizzell se fait même plaisir en nous offrant un petit morceau pseudo-larmoyant toujours plein d’humour dans ‘My Mom Has Been Very Sick’ avec un violon et un piano lorsque Jo tente d’amadouer Mrs. Tingle au début du film en racontant que ses parents sont gravement malades. Idem pour ‘Luke Confides in Tingle’ alors que Luke se fait à son tour amadouer par Mrs. Tingle qui commence à le manipuler dangereusement. Frizzell utilise ici des pizz légers, des cordes mystérieuses, un cor et un piano pour évoquer mystérieusement la sournoiserie de la vieille femme. On retrouve d’ailleurs le thème associé à Mrs. Tingle dans le mystérieux et sombre ‘I’m Your Friend’ qui évoque curieusement le thème de ‘Apt Pupil’ de John Ottman (coïncidence?). ‘Leigh Ann Crosses the Line’ se penche même vers un côté plus triste et intimiste à l’aide d’un piano et de quelques cordes évoquant les sentiments de Leigh par rapport à l’inquiétude qu’elle nourrit pour son avenir qui lui paraît compromis, maintenant qu’elle s’est laissé embarquer malgré elle dans cette galère.

La partie thriller revient dans ‘I Don’t Think So’ avec ses cordes staccato non dénuées d’humour et ses effets de dissonance qui suggèrent la tension entre Mrs. Tingle et les élèves, tandis que l’action culmine dans ‘Destiny’ lors du violent affrontement final entre l’enseignante et les trois étudiants, où l’on retrouve les effets orchestraux chers au compositeur et ses cuivres massifs hérités de ‘Alien Resurrection’ et ‘Dante’s Peak’. Quand à ‘Triumph’, il nous propose un final plus optimiste et apaisé à l’aide de cordes qui suggère la victoire finale lors de la remise des diplômes en fin d’année. Avec ‘Teaching Mrs. Tingle’, John Frizzell se montre décidément soucieux de développer son propre style orchestral matiné ici d’une bonne dose d’humour et de dérision, même si l’ensemble manque encore cruellement de personnalité et d’originalité (on pense à Herrmann, Silvestri, Ottman, etc.). Superbement orchestrée, la partition véhicule un humour et une tension très présente tout au long du film, au travers d’un thème sarcastique associé à Mrs. Tingle qui fait d’elle une véritable ‘mère fouettarde’ à l’ancienne. Partition mineure et sans prétention, ‘Teaching Mrs. Tingle’ devrait vous séduire malgré tout par son mélange entre suspense, terreur et humour noir, qui nous dévoile le côté plus humoristique du style du jeune John Frizzell, jusqu’ici essentiellement cantonné aux productions horrifiques massives et aux drames. Voilà en tout cas un petit score sympa de Frizzell à (re)découvrir!


---Quentin Billard