1-Main Title 2.06
2-Post-Op 1.20
3-Docking The Betty 1.16
4-Priva Son D'Ogni Conforto* 5.27
5-Face Huggers 2.10
6-Call Finds Ripley 3.02
7-The Aliens Escape 4.12
8-Ripley Meets Her Clones 2.19
9-What's Indside Purvis? 2.28
10-They Swim...6.28
11-The Chapel 2.35
12-The Abduction 3.33
13-The Battle With The Newborn 6.03
14-Ripley's Theme 2.14

*From Haendel's Julius Caesar
Interprété par Maureen Forrester
Courtesy of BMG Classics

Musique  composée par:

John Frizzell

Editeur:

RCA Victor 09026 68955 2

Album produit par:
John Frizzel
Co-Producteur:
Mark Cross
Musique supervisée pour
Twentieth Century Fox par:
Robert Kraft et
Matt Walker

Artwork and pictures (c) 1997 Twentieth Century Fox Film Corp. All rights reserved.

Note: ****
ALIEN RESURRECTION
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Frizzell
Rien ne laissait présager d’une suite à l'univers cauchemardesque et unique de la saga « Alien », une franchise que l'on croyait pourtant définitivement clôt avec le troisième opus de David Fincher sorti en 1992, film qui déconcerta plus d’un spectateur par sa noirceur gothique extrême et son ton plus psychologique. A l’origine, c’est le cinéaste britannique Danny Boyle qui faillit réaliser le film, avant d’être finalement confié à Jean-Pierre Jeunet, réalisateur français de « La cité des enfants perdus », « Amélie Poulain » et « Delicatessen ». C’est la première fois que Jeunet se voit confier la réalisation d’une grosse production hollywoodienne, un fait nouveau en 1997 mais qui devint rapidement un effet de mode à la fin des années 90, incitant bon nombre de réalisateurs français à s’expatrier ainsi à Hollywood. Ce quatrième opus de la saga « Alien » se déroule cette fois-ci 200 ans après la mort de l’officier Ellen Ripley (Sigourney Weaver). Une équipe de scientifiques de la station Auriga ont réussi l’exploit de ressusciter Ripley en croisant son ADN issu de son sang congelé avec celui d’un alien, dans l’unique but de s’emparer de l’embryon alien qu’elle a dans son ventre. Ripley est ensuite faite prisonnière, renouant petit à petit avec sa nature humaine. Peu de temps après, un vaisseau s’amarre à l’Auriga, avec à son bord une équipe de mercenaires et de brutes venus récupérer une pièce manquante pour réparer leur vaisseau. Call (Winona Ryder), l’une des passagères du Bettie, fait la connaissance de Ripley, avec qui elle se lie d’amitié. C’est alors que le cauchemar recommence : quelque part dans la station, des aliens sont nés dès suite d’une expérience scientifique et réussissent à s’échapper, semant la terreur et le chaos dans l’Auriga. Encore une fois, seule Ripley sera en mesure de s’opposer aux monstres.

Partant finalement d'un argument tout à fait passable pour expliquer le retour à la vie de Ripley (qui, rappelons-le, c’était suicidée à la fin de « Alien 3 »), le réalisateur Jean-Pierre Jeunet a sut créer avec « Alien Resurrection » une atmosphère malsaine et terrifiante, mélangeant l'esthétique d'un Ridley Scott (les longs couloirs sombres du vaisseau), un peu du James Cameron (de l'action et des militaires en veux-tu en voilà) et aussi un peu de David Fincher pour le côté psychologique et surtout la fin bouleversante avec la très brutale mort du nouveau-né Alien. Utilisant des images numériques largement supérieures à celles de « Alien 3 » (et même si l’on regrette parfois le recours trop systématique à des plans numériques pas toujours crédibles) et des séquences ultra sanguinaires (« Alien Resurrection » étant indiscutablement l’opus le plus gore de la franchise), « Alien Resurrection » est une suite audacieuse et très riche, servie par une photographie très réussie à base de teintes verdâtres, bourrée de trouvailles visuelles typiques du réalisateur qui a réussit - malgré la pression des studios - a réunir son équipe française habituelle sur ce film : Darius Khondji à la photographie, Hervé Schneid au montage, Pitof et son studio Dubois aux effets spéciaux, sans oublier la participation de quelques uns des acteurs fétiches de Jeunet, tels que Dominique Pinon ou Ron Perlman (tous deux inoubliables dans « La cité des enfants perdus »). Si la plus grande réussite de « Alien Resurrection » est d’avoir su conserver - miraculeusement- la personnalité et l’esthétique visuelle d’un réalisateur toujours intègre à son art, le film doit aussi beaucoup à sa partie plus psychologique et humaine, avec une réflexion poignante sur les dérives du clonage - rarement la mort d’un monstre aura été aussi bouleversante qu’à la fin de ce film ! - et des scènes dérangeantes car bousculant nos habitudes (la scène très sensuelle où Ripley se retrouve dans les bras d’un alien comme s’il s’agissait de son amant), sans oublier un humour noir parfois très excentrique mais toujours bien dosée. Certes, ce quatrième opus n’atteint pas les sommets d’un Ridley Scott ou d’un James Cameron, mais qu’importe, avec ses scènes d’action anthologiques (la poursuite sous l’eau, l’affrontement final contre le nouveau-né alien, la mort ultra gore de Purvis, etc.) et ses acteurs aux « gueules » mémorables typiques de Jeunet (Brad Dourif et ses allures cadavériques, J.E. Freeman et sa fabuleuse tête de faux-jeton, Ron Perlman en brute épaisse, Dominique Pinon et son faciès particulier inoubliable, Michael Wincott et son allure inquiétante), « Alien Resurrection » a tout d’une grosse production ambitieuse aux ambitions artistiques assumées, une quatrième suite qui fait honneur à la saga et rappelle que l’énorme succès de cette franchise doit incontestablement beaucoup à son niveau artistique qui s’est toujours maintenu depuis ses débuts.

Pour chaque opus de la saga « Alien », il y'avait non seulement un réalisateur différent mais aussi un nouveau compositeur, et qui plus est, bien souvent à ses débuts (en particulier Horner et Goldenthal). Après le chef-d'oeuvre spatial de Jerry Goldsmith, l'excitante partition de James Horner et la ténébreuse musique d'Elliot Goldenthal pour « Alien 3 », c'est finalement au tour d'un petit nouveau de mettre en musique « Alien Ressurection » : John Frizzell. Après avoir écrit les musiques de séries TV telles que « VR.5 », « Undertow », « Crime of The Century » et des films comme « Beavis and Butt-Head Do America », « The Rich Man's Wife » et « Dante's Peak », John Frizzell a été choisi par la direction du film pour apporter sa propre contribution à un univers déjà très riche en frissons, le réalisateur ayant été d’ailleurs pris sa décision après avoir écouter les deux précédents scores de Frizzell pour « The Rich Man’s Wife » et « Dante’s Peak ». La production de « Alien Resurrection » voulait surtout retrouver sur ce film un style musical plus massif et inventif, proche de « Dante's Peak ». Le jeune compositeur - à peine âgé de 31 ans lorsqu’il écrit la musique de ce film - relève donc le défi et nous offre une partition symphonique monumentale, avec un ensemble colossal de plus de 100 musiciens incluant un choeur, alliant orchestrations avant-gardistes extrêmement complexes et utilisation audacieuse et moderne de l’électronique.

Dès les premières secondes du « Main Title », John Frizzell annonce le thème de Ripley sur des images glauques et organiques. Des cordes amples et sombres évoluent tout autour d'un univers synthétique inquiétant intensifiant la sensation de cauchemar organique du générique de début, avant de déboucher sur le thème de Ripley, un thème qui nécessitera plusieurs écoutes avant d’être mémorisé. Musicalement, le « Main Title » se distingue par ses cordes ascendantes bâties autour d’un empilement de quartes, un élément harmonique caractéristique du score de « Alien Resurrection », et qui apporte une couleur assez particulière à la musique du film de Jeunet. Le thème principal se compose en réalité de deux sections qui sont souvent juxtaposées tout au long de la partition, une première partie assez sombre avec sa mélodie de trois notes de cordes glaciales et envoûtantes agrémentées de voix féminines semblant resurgir du passé de Ripley comme un appel de son humanité perdue (Ripley est devenue mi-humaine mi-alien après sa résurrection). Cette idée intéressante est d'autant plus évidente qu’au début de « Post-Op » et « Ripley's Theme », on peut entendre le choeur féminin prononcer clairement son nom à plusieurs reprises : « Ripley ». John Frizzell apporte à la musique du personnage de Sigourney Weaver un lyrisme sombre et bienvenu, une espèce de poésie tragique subtile et lointaine, qui colle parfaitement à l’esthétique très européenne du film de Jeunet. La seconde partie du « Ripley’s Theme » illustre quand à elle le caractère héroïque du personnage dans un style plus aventureux (sans pour autant verser dans l’héroïsme pur !), une partie dans laquelle les cuivres sont mis en avant sur un rythme plus soutenu, et qui illustrera tout au long du film les exploits de notre héroïne préférée. Voilà en tout cas un thème certes peu mémorisable à la première écoute, mais qui s’avère être bien plus riche qu’il n’y paraît, un thème à double facette qui rappelle la nature hybride tragique de l’héroïne (elle est morte une fois et renaît pour être manipulée par des scientifiques sans scrupules) et sa détermination à affronter la menace des aliens.

Le compositeur nous offre ensuite un second thème plus intime pour l'androïde Call (Winona Ryder), assez mélancolique, avec ses notes descendantes évoquant la sensibilité d'un personnage entièrement synthétique. Ironiquement, le personnage qui semble posséder la plus grande humanité dans ce film n’est autre qu’un androïde (Call), d’où un regard somme toute très noir sur la perte de l’humanité chez les hommes du futur, totalement dépassés par la technologie, et qui finissent par créer des robots bien plus humains qu’eux (un thème classique du cinéma de science-fiction, déjà abordé en 1982 par Ridley Scott dans « Blade Runner » !). John Frizzell contribue à son tour à cette ironie grinçante en nous livrant un thème mélancolique et solitaire qui suggère la fragilité du personnage de Winona Ryder dans le film, personnage qui, comme tous les autres, va se retrouver rapidement confronté aux horreurs des aliens. On retrouve ce thème pour la scène où Call et Ripley sont dans la chapelle (« The Chapel » avec son duo hautbois/cordes) et dans la scène où Call rencontre pour la première fois Ripley (« Call Finds Ripley »), l’androïde essayant alors de tuer la jeune femme afin d’éliminer la menace alien qui sommeille en elle. A noter que le compositeur propose un petit clin d’oeil au « Alien » de Jerry Goldsmith lors de l’introduction du film, réutilisant brièvement le motif de flûtes de deux notes de la mythique partition de 1979, pour la scène où l'on découvre le corps de Ripley encore jeune entièrement plongé dans son éprouvette, morceau d’ailleurs absent du CD !

L’ensemble de la partition de « Alien Resurrection » repose sur deux autres motifs associés cette fois-ci aux aliens eux-mêmes : l’un apparaît dans « Alien Escape », l’autre dans « They Swim » et « What's Inside Purvis ? », un motif d'une dizaine de notes confié la plupart du temps aux trombones et accompagnant généralement les moments les plus tendus du film, et plus particulièrement dans « Aliens Escape », scène incroyablement intense où les aliens réussissent à s'échapper de leur prison et à massacrer sauvagement l’équipage. Le second motif apparaît ensuite dans « The Battle With the Newborn », confié à des cuivres massifs. Il illustre quand à lui le nouveau-né alien et se distingue par son côté massif et menaçant, le tout sur fond de rythmes martelés de façon plus agressive. Loin de se contenter d’une approche purement symphonique, John Frizzell nous propose en plus un travail passionnant autour de l’électronique, et pour mener à bien sa tâche, le compositeur a travaillé pendant près de 4 mois afin de compiler ses différentes sonorités synthétiques qu’il a lui-même crée pour les besoins de son film, utilisant parfois pour cela des sons acoustiques (bruits de flûte, bruitages divers) qu’il a lui-même déformé et retravaillé par le biais de l’électronique, afin d’obtenir des sonorités inédites, alliant sensations organiques étranges et crépitements viscéraux. Les synthétiseurs créent dans la musique de « Alien Resurrection » une atmosphère sonore très particulière et tout à fait reconnaissable, témoignant par la même occasion du talent du jeune compositeur pour tout ce qui touche à la musique électronique expérimentale. Le « Main Title » est d’ailleurs là pour nous le rappeler avec panache !

Plongé au coeur de l'action, la musique de « Alien Resurrection » se veut bien plus puissante et aussi parfois très chaotique et incroyablement agressive - mais sans jamais tomber dans le cacophonique pur ! John Frizzell installe une atmosphère oppressante et agressive tout au long du film, reflétant l’incroyable brutalité des aliens, la manipulation des humains et les dangers qu’affrontent nos héros tout au long de leur périple. A ce sujet, impossible de passer à côté de deux morceaux en particulier, « Aliens Escape » et le désormais anthologique « They Swim », un grand moment de musique de film d’action moderne ! « Aliens Escape » dispense une atmosphère de terreur et de chaos pur, avec un orchestre complètement déchaîné et frénétique, renforcé par des synthétiseurs étranges et inquiétants associés aux aliens. Frizzell illustre la panique et l'anarchie qui s'empare petit à petit de la station entière avant de se conclure sur un passage d’action martial effréné lorsque les derniers militaires de l’Auriga se font massacrer par les créatures - le tout se terminant dans un épouvantable bain de sang. Frizzell utilise pour l’occasion un nouveau thème, un motif d’action plutôt rythmique souvent confié aux cuivres, et qui revient à plusieurs reprises dans des morceaux tels que « Aliens Escape » ou « They Swim ». Ici, pas de subtilité en vue ! John Frizzell ne fait pas dans la dentelle et illustre la séquence avec une intensité constante. Mention spéciale à l’interprétation sans faille de l’orchestre, qui exécute des parties extrêmement complexes et virtuoses avec une puissance de jeu constante. Visiblement, Frizzell sait écrire pour un orchestre et son approche avant-gardiste/expérimentale à la limite du courant bruitiste rappelle les grandes heures de la musique savante atonale du milieu du 20ème siècle. On est loin ici de la classe d’un Elliot Goldenthal ou d’un Jerry Goldsmith, mais qu’importe, le jeune John Frizzell possède un talent indiscutable et sait faire « exploser » son orchestre avec une virtuosité rarement entendue chez un jeune compositeur de sa génération.

Et comme si cela ne suffisait pas, Frizzell repousse les limites du possible avec le terrible « They Swim », morceau-clé de la partition de « Alien Resurrection » et formidable faire-valoir de John Frizzell. Pendant ses quelques 6 minutes (le morceau ayant été raccourci de 2 minutes pour l’album), « They Swim » illustre avec une intensité rare la très spectaculaire séquence sous-marine où deux aliens prennent en chasse le groupe de Ripley et l'équipage du Betty - à noter que cette scène hallucinante faillit d’ailleurs coûter la vie à Winona Ryder et Ron Perlman lors du tournage ! Le morceau s’attache ensuite à accompagner avec une férocité orchestrale extrême la lutte acharnée entre les humains et les aliens accrochés ensemble à l’échelle suspendue dans le vide. John Frizzell joue ici sur les effets de masse chaotiques mais toujours très contrôlés, des orchestrations complexes (avec des doublures instrumentales parfois très recherchées !), des élans rythmiques constants, des changements de mesure complexes et virtuoses, des sonorités synthétiques étranges et même des accélérations de tempo effréné pour deux passages en particulier : la mort de Hillard (Kim Flowers) et celle de Christie (Gary Dourdan). Ces deux passages assez stressants inspirèrent d’ailleurs le compositeur Trevor Rabin pour un morceau assez similaire dans la musique du film « Deep Blue Sea », preuve s’il en est que la partition de « Alien Resurrection » a influencé pas mal de compositeurs par la suite - c’est d’ailleurs bien souvent le signe des grandes oeuvres ! Morceau d’action monumental aux orchestrations ultra complexes et incroyablement maîtrisées, « They Swim » a très vite rejoint le clan très prisé des morceaux d’action anthologiques de la musique de film hollywoodienne, un véritablement déchaînement orchestral surexcitant d’une puissance et d’une complexité rare qui vous scotchera à votre siège du début jusqu’à la fin - et qui se paye même le luxe de nous offrir de superbes envolées héroïques pour les exploits de Ripley - incontournable !

Certains morceaux plus sombres et atmosphériques comme « Face Hugger » évoquent la partie plus suspense/horreur du film de Jeunet. « Face Hugger » est assez représentative de cette atmosphère organique glauque et dérangeante qui évoque la prise de pouvoir progressive des aliens sur les membres de l’Auriga. Cette pièce accompagne ici la scène où les Face Huggers des oeufs d’alien se préparent à féconder leurs proies. A noter l’utilisation très réussie d’un effet instrumental particulier aux cors, un vibrato au quart de ton, une technique avant-gardiste déjà utilisée par Elliot Goldenthal dans « Alien 3 » et que Frizzell utilise à plusieurs reprises dans « Face Hugger » pour suggérer la présence menaçante des aliens par ses sonorités sombres et dissonantes. Autre élément instrumental important ici : la présence d’un Rub Rods, un instrument assez rare originaire des Etats-Unis et constitué d’un alignement de plusieurs tiges d’aluminium de différentes longueurs disposées à la verticale, tiges que l’on frotte avec un gant ou un chiffon de colophane. Cet instrument est très souvent utilisé dans les musiques de film - on le confond parfois avec le waterphone ! - Pour information, Jerry Goldsmith s’en était déjà servi sur « Star Trek The Motion Picture » en 1979. N’oublions pas non plus de signaler l’étrange introduction extrêmement brutale de « The Battle With The Newborn », qui accompagne la scène ultra gore où l’alien déchiquette l’estomac de Purvis et défonce le crâne du Dr. Wren (sans aucun doute LA scène gore du film de Jeunet !). L’introduction du morceau est un pur modèle d’expérimentation électronique, créant une ambiance totalement surréaliste et cauchemardesque, à la limite du grotesque. La musique bascule ici dans l’horreur et l’anarchie pure, avec ses sonorités synthétiques organiques associées à l’alien, instaurant une ambiance malsaine et dérangeante, aux dissonances extrêmes. Niveau orchestration, Frizzell met ici l’accent sur les percussions métalliques pour souligner l’incroyable violence délirante de cette séquence. Le morceau enchaîne ensuite sur la scène où Ripley affronte le nouveau-né, passage plus sombre et rythmé nous faisant entendre l’impressionnant thème de cuivres du bébé alien. Signalons au passage toutes les techniques de corde dissonantes stridentes suraigües que Frizzell utilise à plusieurs reprises pour évoquer le cri des aliens, un effet sonore très intéressant qui confirme le talent et l’inventivité d’un musicien toujours en quête d’expérimentation musicale. Notons pour finir un morceau plus dramatique dans « Ripley Meets Her Clones » qui rappelle les origines tragiques de l’héroïne, ou le sensuel et inquiétant « The Abduction » qui développe le thème de Ripley et ses choeurs féminins pour la scène où Ripley est enlevée par les aliens et conduite à la reine.

« Alien Resurrection » apparaît au final comme une partition colossale et démesurée, où le chaos et la terreur règnent au côté d’un lyrisme plus sombre et étrange. John Frizzell signe pour le film de Jean-Pierre Jeunet une musique à la fois agressive, puissante, terrifiante et aussi parfois plus touchante. L’incroyable violence qui se dégage de certains morceaux apporte une intensité incroyable aux images du film, Frizzell ayant réussi l’exploit de renouveller l’approche musicale des trois films précédents en réinventant toute une pléiade d’effets électroniques/instrumentaux modernes pour évoquer les aliens - les véritables stars du film ! Sans atteindre la maestria d’un Goldsmith ou d’un Goldenthal, la musique de John Frizzell, bien plus conventionnelle (et donc peut être décevante à la première écoute), est un concentré d’énergie pure parfois très déstabilisant mais toujours aussi passionnant, une musique qui grandit en nous au fil des écoutes. Frizzell fait preuve ici d’une maîtrise saisissante de l’orchestre symphonique et de ses orchestrations - entouré d’une équipe d’habitués des musiques horrifiques, Pete Anthony, Brad Dechter, Jeff Atmajian, Frank Bennett, Robert Elhai et Don Nemitz (les mêmes qui travailleront d’ailleurs quelques années plus tard sur la musique de « Aliens Vs. Predator Requiem » de Brian Tyler !). La complexité parfois extrême de l’écriture orchestrale de Frizzell apporte une richesse insoupçonnée à la musique de « Alien Resurrection », bourrée de détails et de trouvailles en tout genre (les voix de Ripley qui prononcent son nom, les effets électroniques organiques de « The Battle With The Newborn », l’utilisation d’un Rub Rods, etc.). Ce n’est certes pas une partition aussi innovante que l’a pu l’être celle d’Alien 3 d’Elliot Goldenthal en son temps, mais cela n’en demeure pas moins un très solide nouvel opus de qualité dans l’univers musical de la saga « Alien », un score qui reste encore aujourd’hui trop sous-estimé et qui, pourtant, mériterait amplement d’être réhabilité et apprécié à sa juste valeur, ne serait-ce que pour pouvoir savourer le puissant « They Swim », un grand moment de musique de film !


---Quentin Billard