1-The New World 5.22
2-First Landing 4.45
3-A Flame Within 4.05
4-An Apparition in the Fields...3.42
5-Journey Upriver 4.16
6-Of the Forest 6.55
7-Pocahontas and Smith 3.41
8-Forbidden Corn 11.01
9-Rolfe Proposes 4.31
10-Winter/Battle 8.28
11-All is Lost 8.14
12-A Dark Cloud is Forever Lifted 9.55
13-Listen to the Wind 4.35*

*Interprété par Hayley Westenra
Paroles de Glen Ballard
Musique de James Horner.

Musique  composée par:

James Horner

Editeur:

New Line Records NLR 39058

Produit par:
James Horner, Simon Rhodes

Artwork and pictures (c) 2005 New Line Cinemas. All rights reserved.

Note: ***
THE NEW WORLD
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Horner
Terrence Malick fait partie de ces réalisateurs énigmatiques qui créent l’événement à chaque sortie de leur nouveau film, et pour cause: Malick n’a réalisé que 4 films en à peu près 30 ans de carrière. Après l’inoubliable et poignant ‘The Thin Red Line’ en 1998, Malick nous offre sept ans plus tard son nouveau chef-d’oeuvre, ‘The New World’ (Le nouveau monde). Le film nous transporte en 1607, sur la côte orientale du continent nord-américain. Trois navires britanniques débarquent sur le contient avec à leur bord des colons anglais dont la mission consiste à établir sur cette nouvelle terre un avant-poste économique, culturel et religieux baptisé ‘Jamestown’. Le capitaine Newport (Christopher Plummer) découvre avec ses hommes ce qu’ils appellent le ‘Nouveau Monde’, dominé par un empire indien étendu sur tout le continent. John Smith (Colin Farrell), l’un des officiers de Newport, est arrêté pour insubordination. Mais le capitaine a d’autres chats à fouetter, alors même que les colons entament un redoutable bras de fer avec les indiens qui ne voient pas d’un très bon oeil la présence de colons anglais sur leurs terres. Libéré afin d’assister les colons dans leur tache, Smith part chercher de l’aide auprès des indiens. C’est en arrivant dans leur village qu’il y fait la connaissance de Pocahontas (Q’Orianka Kilcher), la fille du puissant chef Powhatan (August Schellenberg). Les deux individus vont apprendre à se connaître et à s’aimer, créant un lien plus fort que l’amour même, un lien sacré que rien ne semble atteindre. Et pourtant, Smith sait qu’il vient d’un tout autre monde et que cet amour puissant n’a aucun avenir.

Véritable hymne à la beauté de la nature et à l’amour, ‘The New World’ est plus qu’une reconstitution historique, c’est une oeuvre d’art émouvante d’une richesse profonde, transcendée par une mise en scène raffinée et toute en retenue. On y retrouve une personnalité qui rappelle incontestablement les anciens films de Terrence Malick, ‘The Thin Red Line’, ‘Badlands’ et ‘Days of Heaven’, avec toujours ce même regard ébahi, émerveillé et innocent envers l’incommensurable beauté de la nature et des émotions humaines. En effet, comme dans ‘The Thin Red Line’, ce sont les sentiments humains qui sont au centre de ‘The New World’, plus que le simple cadre historique dans lequel se déroule l’intrigue du long-métrage. C’est aussi l’occasion pour le cinéaste de nous offrir une brillante relecture de la légende de Pocahontas, très éloigné de ce Disney avait pu nous offrir dans sa version dessin animé de 1995 (le sujet ayant déjà été abordé à maints reprises au cinéma). La plus grande réussite de ‘The New World’ reste sans aucun doute la peinture que nous offre le réalisateur de cette histoire d’amour immortelle entre une jeune indienne innocente et un explorateur anglais qui traîne un passé douloureux, et qui tente de renaître auprès de cette jeune femme, attiré par sa pureté, son innocence, son rayon de lumière intérieure. Malick filme l’amour comme on l’avait rarement vu au cinéma, évitant soigneusement les clichés avec une retenue exemplaire, un lyrisme saisissant et bouleversant. Chaque plan, chaque image est porteur d’un message philosophique, d’un symbole, d’une idée, que ce soit les traditionnels plans des rayons de soleil filtrés à travers le feuillage des arbres (la signature de Malick) ou les plans des deux corps serrés l’un contre l’autre dans une étreinte pleine de tendresse. Malick nous offre ainsi une vision neuve et poignante de la naissance de l’Amérique à travers l’histoire de cette indienne déracinée et de cet explorateur blessé, sublimée par la mise en scène du réalisateur alternant fureur et retenue avec un tact rare, un sens de l’équilibre cher au cinéaste, le film dégageant un profond sentiment de bien-être, de connexion avec la nature, avec l’amour. Le film alterne donc entre le spectacle grand public et le drame intimiste avec un doigté digne des plus grands maîtres du cinéma américain, Terrence Malick ayant réussit à filmer le Nouveau Monde en 135 minutes comme jamais personne ne l’avait encore fait auparavant. Un chef-d’oeuvre lyrique et poignant qui ne laissera personne de marbre!

Après avoir fait appel à Hans Zimmer sur ‘The Thin Red Line’, Malick se tourne vers un autre grand compositeur hollywoodien du moment, James Horner, qui reste toujours aussi actif à Hollywood malgré une chute vertigineuse de la qualité de ses dernières partitions, qui manquaient toutes cruellement d’inspiration. On craignait qu’Horner nous ressorte sur ‘The New World’ toutes ses formules musicales habituelles qu’il use et abuse depuis plus d’une décennie déjà (sans jamais manifester la moindre envie de se renouveler!)...hélas, on était loin de se tromper car la partition d’Horner pour ‘The New World’ contient bel et bien tous les plus gros défauts du compositeur qui finissent par devenir tellement irritant que l’on se demande à force comment le compositeur peut continuer à obtenir des projets encore aujourd’hui. Et, comme toujours chez Horner, malgré tous ses défauts, on ne reste jamais vraiment indifférent à ses musiques. Pour ‘The New World’, Horner se tourne vers un style plus proche de ‘Legends of the Fall’, ‘Braveheart’, ‘A Beautiful Mind’ ou bien encore ‘Titanic’. Le compositeur utilise l’orchestre symphonique habituel auquel il ajoute choeurs samplés, voix féminines, quelques synthés new-age, un piano, quelques solistes (incluant la flûte ethnique de Tonny Hinnigan) et l’utilisation originale de chants d’oiseaux incorporés au score d’Horner, évoquant la nature qui entoure les protagonistes principaux. Seulement voilà, malgré tous ses efforts, Horner semble n’avoir convaincu le réalisateur qu’à moitié puisque ce dernier a décidé de virer une bonne partie de la musique originale pour utiliser à la place de la musique classique, et plus particulièrement le prélude de ‘L’Or du Rhin’ de Richard Wagner ou un mouvement du ‘Concerto pour piano N°23’ de Mozart, ces deux morceaux tournant quasiment en boucle tout au long du film. On sait que Terrence Malick a toujours eu une certaine affection pour la musique classique puisqu’il utilisait déjà une pièce de Camille Saint-Saëns dans ‘Days of Heaven’ (1978), une de Fauré dans ‘The Thin Red Line’ (1998) et une autre d’Erik Satie dans ‘Badlands’ (1973). Comme toujours chez Malick, la musique classique est associée dans ses films à une certaine esthétique à la fois spectaculaire et contemplative, deux facettes représentées successivement par l’entêtant prélude de Wagner et le très tendre morceau de Mozart. Le Wagner accompagne ici toute la partie concernant l’arrivée et la découverte du Nouveau Monde, tandis que le Mozart apporte un éclairage plus intime et mélancolique durant certaines scènes du film.

La musique d’Horner s’articule de son côté autour de deux thèmes majeurs, le traditionnel thème romantique associé à John Smith et Pocahontas, et un thème plus dramatique qui rappelle par moment ‘The Missing’, et que l’on entend dès le début du film lors de l’ouverture, entonné par les cors symbole de l’aventure dans le Nouveau Monde – Horner évitant le côté épique et grandiose en conservant une approche plus retenue, plus subtile et nuancée. ‘The New World’ s’ouvre donc (dans la version album) sur des chants d’oiseaux avant que piano, orchestre et chœurs samplés amorcent une première partie majestueuse pour l’arrivée dans le Nouveau Monde (morceau non utilisé dans le film). La dernière partie du morceau, toujours aussi majestueuse, nous permet de découvrir le très beau thème romantique qui rappelle bon nombre d’anciens thèmes romantiques d’Horner (aucune surprise donc, au cas où vous ne l’auriez pas encore compris!), tandis que le second thème est entendu aux cors soutenu par un traditionnel tic instrumental d’Horner: une basse de piano arpégée doucement dans le grave. L’arrivée sur le continent américain se fait dans ‘First Landing’ de façon toujours très majestueuse et réservée, avec la présence des choeurs féminins qui renforcent le côté quasi onirique de certains passages de la musique. ‘A Flame Within’ paraît alors bien plus passionné avec ses voix féminines éthérées (associées ici à Pocahontas) et sa flûte exotique typique d’Horner (combien de fois a t’on entendu ça auparavant chez le compositeur?). C’est aussi le moment où le musicien en profite pour développer son magnifique thème principal toujours aussi romantique à souhait (on se croirait par moment dans ‘Titanic’ tant les mélodies et les sonorités sont parfois extrêmement proches!), bien qu’incontestablement ‘too much’ par rapport au ton extrêmement retenu et contemplatif du film de Malick. ‘An Apparition in the Field’ prolonge ce climat romantique et intime par le biais d’une mélodie de piano d’une infime douceur, toujours accompagnée de la voix féminine éthérée. ‘Journey Upriver’ fait quand à lui partie des rares morceaux présents dans le film, le morceau débutant au son du thème secondaire des cors qui accompagnent le générique de début du film et évoque l’aventure d’une façon très calme et nuancée, presque dramatique.

James Horner poursuit son exploration des atmosphères orchestrales intimes et sentimentales, sans jamais sortir une seule fois hors des sentiers battus. ‘Of The Forest’ confirme cette orientation émotionnelle de la partition de ‘The New World’ en réutilisant les chants d’oiseaux associés ici à la beauté de la nature avec laquelle communient John Smith et Pocahontas. D’un point de vue instrumental, Horner met l’accent ici sur le piano avec quelques cordes, les chœurs samplés et la flûte exotique dans une atmosphère envoûtante et clairement onirique, qui incite à la rêverie, à l’évasion, au repos de l’âme (avec ces chants d’oiseaux, on dirait presque le genre de musique que l’on écoute en thérapie anti-stress pour se relaxer chez soi!). Arrivé à partir de 4.50, Horner utilise alors quelques synthétiseurs new age qui renforcent la dimension onirique de ‘Of The Forest’ et apporte un souffle émotionnel au film de Malick (ou devrions nous plutôt dire ‘aurait apporté un souffle émotionnel au film’ vu que cette pièce n’est elle aussi pas utilisée dans le film). Les amateurs d’ambiances romantiques raffinées devraient se régaler avec ‘Pocahontas and Smith’ qui reprend le très beau Love Theme d’abord joué par un hautbois et repris ensuite par les cordes. ‘Forbidden Corn’ développe à son tour une écriture plus fluide du piano comme des gouttes d’eau qui tomberait doucement sur des pierres, d’où le côté parfois presque impressionniste de la musique d’Horner (ce qui est là aussi loin d’être neuf chez lui!) qui colle parfaitement avec l’ambiance générale du film. ‘Rolfe Proposes’ reprend l’écriture de piano de ‘An Apparition in the Field’ mais de façon plus mélancolique et sombre, évoquant la passion de John Rolfe (Christina Bale) pour Pocahontas. ‘Winter – Battle’ sort alors du lot en s’imposant par son climat résolument sombre, dramatique et massif. Si la première partie s’annonce assez tragique dans le fond, la seconde paraît plus agressive avec ses percussions guerrières accompagnant la scène de bataille vers la fin du film, entre les colons anglais et les indiens. Là aussi, impossible de ne pas penser à certaines anciennes oeuvres d’Horner comme les musiques de bataille de ‘Braveheart’ notamment – duquel le compositeur semble s’être clairement inspiré pour ce morceau, puisqu’on y retrouve des sonorités électroniques chaotiques très similaires. De l’influence de ‘Braveheart’, il est encore question dans ‘All Is Lost’ qui s’impose par son climat plus dramatique et mélancolique, et qui accompagne la séparation de Pocahontas et Smith, retournant finalement seul dans son pays d’origine (le morceau provoque néanmoins un certain sentiment d’amertume, un gros pincement au coeur). Finalement, ‘A Dark Cloud Is Forever Lifted’ résume tout l’esprit de la partition en reprenant les deux thèmes majeurs et les principaux passages du score. Comme d’habitude, on a aussi droit à la sempiternelle chanson pop du générique de fin, ‘Listen to The Wind’, interprétée par la jeune Hayley Westenra sur des paroles de Glen Ballard, reprenant la magnifique mélodie du thème romantique développée ici dans toute sa splendeur, chanson que Malick a décidé là aussi de ne pas utiliser pour le film (elle aurait quand même quelque peu juré avec le reste de la musique entendue dans le film!).

L’ensemble demeure donc agréable et très réussi d’un point de vue purement musical, James Horner s’affirmant plus que jamais comme le roi des musiques émotionnelles et mélodramatiques à Hollywood. Mais le fait qu’une bonne partie de la musique soit passée à la trappe et que le score donne une très sévère impression de déjà entendu nuit quelque peu à l’écoute de cette musique. Du coup, que reste t’il vraiment du travail de James Horner dans le film? Pas grand chose, seulement à peine une vingtaine de minutes de musique sur les quelques 80 minutes composées pour le film, même pas la moitié! On pourrait alors se poser légitimement la question de l’utilité d’avoir demandé à un compositeur de créer une musique originale si ce n’est pour finalement ne pas l’utiliser au dernier moment dans le film. Mais pourtant, la musique entendue dans le film apporte un certain souffle aux images, alors Terrence Malick a t’il eu tort de procéder de la sorte? Il semblerait bien que non, surtout qu’à l’écoute du score intégral de James Horner tel qu’on peut l’entendre sur l’album, nous avons encore à faire une fois de plus à un Horner qui ne prend aucun risque, qui nous balance toutes ses recettes habituelles sans jamais vraiment réussir à les dépasser. Du coup, seuls les mordus de James Horner et de ses belles musiques mélodramatiques et intimes trouveront un grand intérêt à l’écoute de ‘The New World’ qui, malgré sa beauté apparente et son impact émotionnel évident, n’en demeure pas moins très peu passionnant pour qui connaît déjà les anciennes oeuvres du compositeur et n’a pas envie d’entendre une énième partition compilant tous les anciens succès d’Horner. Dommage, pour une première collaboration avec Terrence Malick, on était en droit de s’attendre à quelque chose de bien meilleur, surtout après les précédents chef-d’oeuvres de Hans Zimmer et d’Ennio Morricone sur les précédents films du réalisateur!


---Quentin Billard