1-Theme from Angela's Ashes 6.18
2-My Story 2.19
3-Angela's Prayer 4.47
4-My Dad's Stories 1.51
5-Lord, Why Do You Want
The Wee Children? 4.03
6-Plenty of Fish and Chips
In Heaven 3.25
7-The Dipsy Doodle 1.08*
8-The Lanes of Limerick 3.25
9-Looking for Work 3.31
10-Pennies from Heaven 2.09**
11-My Mother Begging 3.46
12-If I Were In America 2.34
13-Delivering Telegrams 1.51
14-I Think of Theresa 1.57
15-Angels Never Cough 2.31
16-Watching the Eclipse 3.00
17-Back to America 2.38
18-Angela's Ashes Reprise 6.17

*Interprété par Nat Gonella
and His Georgians
Ecrit par Larry Clinton
**Interprété par Billie Holliday
Ecrit par Johnny Burke
et Arthur Johnston

Musique  composée par:

John Williams

Editeur:

Sony Classical SK 89009

Album produit par:
John Williams
Producteurs exécutifs de l'album:
Alan Parker, Scott Rudin
Montage musique:
Ken Wannberg
Assistant monteur:
Peter Myles
Narration interprétée par:
Andrew Bennett

Artwork and pictures (c) 1999 Universal Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
ANGELA'S ASHES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by John Williams
Trois ans après la comédie musicale ‘Evita’ avec Madonna (1996), le réalisateur Alan Parker nous revient en pleine forme sur ‘Angela’s Ashes’ (Les cendres d’Angela - 1999), drame poignant évoquant la vie d’une famille de miséreux dans l’Irlande des années 30. Adapté du désormais célèbre best-seller de Frank McCourt, lauréat du prix Pulitzer catégorie ‘documents’ en 1997, ‘Angela’s Ashes’ nous transporte aux Etats-Unis en 1935. La famille McCourt tente de survivre dans un milieu pauvre et misérable. Angela (Emily Watson) tente d’élever tant bien que mal ses quatre enfants tout en donnant naissance au cinquième, une petite fille. Hélas, le corps du jeune nourrisson ne supporte pas la malnutrition et le manque d’hygiène dans lequel la famille vit. La petite fille meurt finalement peu de temps après, à peine âgée de sept semaines. Totalement abattus par cette tragédie, les McCourt décident de quitter l’Amérique pour revenir vivre en Irlande, dans le petit village de Limerick. Ils s’installent chez la famille catholique d’Angela, qui leur réserve un accueil particulièrement glacial. Angela essaie tant bien que mal d’élever ses quatre autres enfants, Frank, Malachy Junior et les jumeaux Eugene et Oliver, tandis que son mari Malachy (Robert Carlyle) est toujours au chômage et incapable de trouver du travail. Puis, lorsque la situation semble s’arranger enfin, Malachy part dépenser immédiatement son argent dans des pubs. Et comme si cela ne suffisait pas, Eugene et Oliver meurent de malnutrition. Frank, l’aîné de la famille, décide de prendre les choses en main et de s’occuper de ses frères. En grandissant, il rejoint l’école catholique de Limerick et passe sa communion. Mais lorsque vient enfin le temps de l’adolescence, Frank découvre la vie et franchit les interdits catholiques. Excédé par les saouleries à répétition de son père et son incapacité à faire vivre sa famille, Frank décide de quitter la maison en pleine nuit pour partir se réfugier chez un de ses oncles. Le jeune adolescent s’assume désormais tout seul et trouve un emploi à la poste du village.

‘Angela’s Ashes’ est une peinture dure et bouleversante de la jeunesse de l’auteur du roman autobiographique, Frank McCourt. Le film nous montre la pauvreté et la misère comme on la voit rarement dans le cinéma américain. Sans jamais tomber dans le larmoyant facile, ‘Angela’s Ashes’ est un film dur, sans concession et jamais édulcoré, un film au ton réaliste qui rappelle à quel point Alan Parker a toujours été particulièrement attiré par les drames de ce genre. Emily Watson campe une Angela remarquable, entre fragilité, désarroi et détermination, tandis que Robert Carlyle interprète un père embourbé dans un misérabilisme pathétique, alcoolique et bouleversant. Mention spéciale aux jeunes interprètes de Frank, puisque près de 3 acteurs se succèdent pour interpréter le rôle du protagoniste principal durant les 3 principales étapes de sa vie – mention spéciale au jeune Michael Legge qui interprète le Frank adolescent, remarquable de justesse et d’émotion. Le film, totalement débarrassé d’artifices visuels ou de mise en scène, se concentre uniquement sur le jeu de ses acteurs, le tout servi par une photographie de qualité jouant sur les couleurs grisâtres, tristes et froides afin de renforcer la sensation de la misère. Mais dans cet univers de pauvreté et de désespoir réside néanmoins un espoir représenté ici par l’école et le travail, et les valeurs humaines dont Frank fait l’apprentissage tout au long de sa jeunesse: courage, détermination, conviction, amour, etc. Alan Parker en profite au passage pour montrer la rigidité extrême du système catholique irlandais du milieu des années 30. Au final, ‘Angela’s Ashes’ est une bien belle réussite, un drame poignant à conseiller absolument à tous les fans du roman de Frank McCourt, qui désireraient ainsi prolonger l’expérience au cinéma!

La musique de John Williams – qui participe pour la première fois à un film d’Alan Parker – apporte une émotion toute en finesse et en subtilité pour ‘Angela’s Ashes’. Etant donné le sujet du film, la musique se devait de conserver une certaine retenue, une humilité musicale plus proche de ‘Schindler’s List’. C’est pourquoi Williams opte comme pour la partition du chef-d’oeuvre de Steven Spielberg pour une approche orchestrale tout à fait classique avec tout un dialogue d’instruments solistes (piano, violoncelle, harpe, hautbois, etc.), un classicisme d’écriture comme toujours chez le maestro élégant et raffiné. Le score s’articule autour du ‘Theme from Angela’s Ashes’, thème lyrique de toute beauté qui se compose de deux parties, la première s’apparentant à une mélodie à la fois douce et mystérieuse jouée par un piano sur fond de cordes chaleureuses, la seconde partie étant plus nostalgique et mélancolique d’esprit, dominée par les cordes. On notera ici le raffinement des harmonies caractéristiques du compositeur, qui apportent un charme certain à cet très beau ‘Theme from Angela’s Ashes’ évoquant parfaitement cette histoire de survie, de tristesse, d’amour et d’espoir, avec une humilité touchante, réellement poignante, sans jamais en faire de trop, évitant tout pathos dramatique et émotionnel avec une maturité et une maîtrise dont peut se targuer de posséder aujourd’hui le compositeur new-yorkais âgé de 68 ans. A noter pour finir que la première partie du thème est accompagnée par un motif de piano à la main gauche qui rappelle par moment ‘Presumed Innocent’, tandis que la partie finale fait intervenir un hautbois gracieux et léger. Dès lors, Williams a posé les bases de sa partition et utilisera constamment ce thème en deux parties tout au long du film.

‘My Story’ (qui débute avec un monologue dont on se serait passé volontiers sur l’album) débute avec un hautbois solitaire et reprend ensuite la première partie du thème joué par un piano alors que l’histoire commence pour les McCourt en Amérique. ‘Angela’s Prayer’ reprend le hautbois solitaire qui évoque l’isolement et la misère dans laquelle vivent les McCourt, tandis que la seconde partie, plus orchestrale et ample, apporte une tonalité plus dramatique au personnage d’Angela et à la force qu’elle tente de puiser en elle pour survivre avec sa famille malgré des conditions de vie difficiles. A noter l’apparition vers la fin du morceau d’un violoncelle interprété par Steve Erdody, qui apporte une couleur supplémentaire intéressante à la partition de Williams. ‘My Dad’s Stories’ (non utilisé dans le film) se distingue quand à lui par une très intéressante écriture de pizzicati du pupitre de cordes censé évoque la complicité des enfants avec leur père et les histoires passionnante qu’il raconte régulièrement à ses enfants (la musique possède un coté un brin naïf et sautillant). En revanche, ‘Lord, Why Do You Want to Wee Children?’ s’avère être plus émouvant et mélancolique, marquant le retour du thème et des cordes lyriques, suivi d’une très belle partie de violoncelle et d’une variation autour d’un magnifique duo piano/violoncelle, dans l’esprit de certains pages de musique de chambre du 19ème siècle. ‘The Lanes of Limerick’ (lui aussi absent du film) se distingue quand à lui par une très belle écriture pour harpe seule, possédant un côté méditatif et épuré évoquant la ville de Limerick (les amateurs de musique pour harpe seront aux anges avec cette très belle pièce ‘classique’ d’esprit). ‘Looking for Work’ évoque de son côté l’égarement de Malachy alors que ce dernier semble bien incapable de trouver du travail. Williams laisse cette fois-ci la place au violoncelle de Steve Erdody pour évoquer avec douceur et mélancolie la décadence de ce personnage sombrant progressivement dans l’alcool et le misérabilisme (fort heureusement, la musique évite systématiquement ce côté misérabiliste qui se serait avéré de très mauvais goût sur les images du film d’Alan Parker!). Même chose pour l’amer ‘My Mother Begging’ lorsque Frank aperçoit sa mère en train de faire la mendiante dans la rue, reprenant le thème au hautbois suivi d’une nouvelle partie de harpe solitaire. A noter un ‘If I Were in America’ plus poignant, qui illustre les rêves de Frank de partir en Amérique.

La dernière partie du film, débutant ainsi avec ‘If I Were in America’, se prolonge avec l’excellent ‘Delivering Telegrams’ qui se distingue par son écriture très rythmée des cordes pour la scène des télégrammes, reprenant l’écriture en pizzicati sautillants de ‘My Dad’s Stories’, l’un des rares moments plus dynamique et rythmée de la partition de ‘Angela’s Ashes’, apportant un relief savoureux à la partition. A noter comment la partie secondaire du thème principal vient se greffer admirablement en contrepoint de la partie en pizz du morceau, témoignant une fois de plus de toute la science d’écriture du compositeur. La scène après les funérailles de Theresa (‘I Think of Theresa’) reprend ce côté mélancolique et amer avec le thème toujours très présent (on pourrait quand même reprocher au compositeur d’avoir un peu trop souvent repris ce thème tout au long du score!), comme dans ‘Angels Never Cough’. ‘Watching the Eclipse’ est un peu différent, avec son écriture de cordes/célesta plus mystérieuse et feutrée lors de la scène de l’éclipse, avant que l’histoire ne touche enfin à sa fin avec la magnifique conclusion ‘Back to America’. La musique change alors radicalement d’ambiance et d’allure ici. La mélancolie de la musique laisse place finalement à un grand moment d’espoir et de triomphe personnel, lorsque Frank accomplit enfin son rêve: partir vivre en Amérique. L’orchestre sonne ici ample, tout en conservant une approche solennelle brillante et émouvante, remplie d’espoir et de rêve. L’album se termine comme toujours chez Williams avec un ‘Angela’s Ashes Reprise’ nous permettant de réentendre une dernière fois le thème dans toute sa splendeur.

La partition de John Williams pour ‘Angela’s Ashes’ apporte au très beau film d’Alan Parker son lot d’émotion, de mélancolie et de respect pour l’histoire et les personnages. La musique n’en fait jamais de trop, évite tout pathos dramatique avec une retenue exemplaire (même si certains passages s’avèrent être parfois plus ample et dramatique) et souligne chaque trait de l’histoire avec un savoir-faire et une maîtrise d’écriture chère à John Williams. Point de fanfare pétaradante ici, Williams dévoile une sensibilité classique plus proche de son magnifique ‘Schindler’s List’ ou du récent ‘Seven Years in Tibet’, une musique qui lui vient tout droit du coeur, en adéquation parfaite avec l'ambiance et les personnages du film. Avec son jeu de dialogue entre les différents instruments solistes et son écriture orchestrale raffinée, la musique de ‘Angela’s Ashes’ touche directement le coeur du spectateur, apportant une ‘lumière’ considérable à la très belle histoire de l’enfance misérable de Frank McCourt en Irlande, même s’il paraît évident que la BO de ‘Angela’s Ashes’ ne fait certainement pas partie de cette catégorie de partition que l’on apprécie instantanément dès la première écoute, et qui nécessitera plusieurs écoutes pour pouvoir en apprécier toutes les subtilités et les détails. Voilà en tout cas une partition à recommander à tous ceux qui s’intéressent à la facette plus intime et dramatique de la musique de John Williams!


---Quentin Billard