1-Opening Theme 4.33
2-Asamoya no Mori -
Ohayou, Chatran 4.08
3-Koneko Monogatari
(Instrumental) 2.39
4-Self Portrait
(from Ongaku Zukan) 4.43
5-Sakan Tsuri 2.29
6-Natsu-Kumo 3.19
7-Watasuge no Hara 3.56
8-Kobuta Tachi 4.38
9-Mori no Naka no Chatran 3.32
10-Kitsune 0.34
11-Tatakai 1.54
12-Mori no Otozure 3.25
13-Koneko Monogatari
(Vocal Version) 3.40

Musique  composée par:

Ryuichi Sakamoto

Editeur:

MIDI Music MDC7-1017

Produit par:
Ryuichi Sakamoto

(c) 1986 MIDI Music Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE ADVENTURES OF CHATRAN
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Ryuichi Sakamoto
Production familiale japonaise réalisée en 1986 par Masanori Hata, ‘Koneko Monogatari’ (Les aventures de Chatran) a la particularité d’être exclusivement interprété par des animaux. Ici, point de trace des hommes. Tourné à la façon d’un documentaire/fiction, ‘Koneko Monogatari’ met en scène un jeune chaton nommé ‘Chatran’, qui, un jour, décide de partir seul à l’aventure pour découvrir le monde qui l’entoure. Après avoir échoué accidentellement dans une caisse en carton qui dérive le long d’une rivière, Chatran réussit à regagner la terre ferme et retrouve son fidèle ami et compagnon de route, le chien Pousquet. Tout au long de leur périple, ils vont traverser les différentes saisons et faire connaissance avec la faune animale tout en multipliant les rencontres de hasard avec des animaux parfois sympathiques et accueillants et parfois aussi sauvages et menaçants. Ce sera pour Chatran et Pousquet le début d’une grande aventure à la découverte du monde! Evidemment, le film de Masanori Hata se destine avant tout aux jeunes enfants et à tous les amateurs de chat. Le genre du documentaire fiction existe déjà depuis un certain moment, mais au Japon, le genre était encore relativement neuf à l’époque où ‘Koneko Monogatari’ fut tourné. L’utilisation d’une voix off masculine qui commente l’histoire et une voix off féminine qui récite un poème en rapport avec le récit nous ramène constamment à l’aspect documentaire de l’œuvre. Bien sur, tout cela reste très mignon et agréable à regarder, avec beaucoup de tendresse et de poésie. Dommage cependant que la dureté de la nature sauvage entraperçue par Chatran au cours de la scène où il affronte l’ours ou celle où il se fait voler le poisson qu’il vient de pêcher ne soit pas plus développée que cela dans le film. Pour un peu, on aurait presque pensé à un autre film animalier japonais de l’époque, ‘Antarctica’, qui évoquait le destin tragique de chiens de traîneaux abandonnés par leurs maîtres en Antarctique. Mais ‘Koneko Monogatari’ s’avère être bien plus léger et accessible, avec un charme fou qui résiste au temps, et ce malgré le côté un peu daté du film. En tout cas, les quatre années qui ont servis à réaliser ce film (difficile de ne tourner exclusivement qu’avec des animaux!) ont permis d’accoucher de ce petit chef-d’oeuvre de poésie et de tendresse, une belle fable sur la beauté de la nature, l’envie de voyager et de découvrir le monde!

Le célèbre Ryuichi Sakamoto nous a offert pour ‘Koneko Monogatari’ l’une de ses plus belles partitions des années 80. Composée à une époque où Sakamoto commençait à peine à introduire des éléments occidentaux/orchestraux dans ses musiques, la BO de ‘Koneko Monogatari’ apporte une poésie et une énergie agréable au film de Masanori Hata. ‘Opening Theme’ ouvre le film au son de cordes mystérieuses et éthérées, et de synthétiseurs new/age très années 80. Quelques arpèges de clavier parsèment l’ouverture alors que Sakamoto dévoile une partie de son très beau thème principal, d’abord annoncé par un violoncelle et un hautbois soliste. A l’écran, on observe le jour se lever tandis qu’une voix-off commence à réciter un poème lié à l’action du film. Le clavier, la clarinette puis les cordes dévoilent par la suite la très belle mélodie principale qui colle à merveille aux aventures du chaton et des amis. A noter que le thème principal possède un côté typiquement japonais dans sa ligne mélodique pleine de fraîcheur, qui se compose en réalité en deux segments mélodiques bien distincts. Le thème ne cesse de grandir tout au long de l’ouverture, passant avec fluidité d’un instrument à autre, du synthétiseur aux instruments live, avec une once de poésie, de nostalgie savoureuse. ‘Good Morning, Chatran’ permet au compositeur de développer ses atmosphères synthétiques très connotées ‘eighties’ avec une légèreté naïve et un peu enfantine (mais jamais vulgaire). Sakamoto semble mettre un certain humour et une fraîcheur dans sa musique, jouant ici sur un dialogue sautillant entre les différents instruments imités par les synthétiseurs, alors que l’on voit à l’image le jeune Chatran s’aventurer hors de la ferme en compagnie de sa famille. Dommage que le côté ‘kitsch’ des sonorités électroniques soit ici clairement dépassé et plus difficile à écouter aujourd’hui. La musique apporte ici aussi un certain climat de légèreté bon enfant et de nonchalance aux images du film. Sakamoto se fait même plaisir et nous offre son rafraîchissant thème principal dans sa version finale avec ‘Main Theme (Instrumental)’ joué ici aussi par les synthétiseurs avec une rythmique pop kitsch et indubitablement connotée années 80. Impossible de dissocier dans le film ce thème des aventures du jeune Chatran tant la mélodie capte à merveille à l’écran cette sensation de découverte du monde et d’expérience de la jeunesse. On pense parfois ici à la musique de certains génériques de mangas animées des années 80, une musique plaisante et agréable mais qui trahit inévitablement son âge. A noter une ambiance similaire dans le très joli mais kitsch ‘Self Portrait’ lui aussi accompagné par une rythmique pop datée et des synthés ‘eighties’. Sakamoto semble se faire plaisir tout au long des morceaux, jouant sur la beauté et la sobriété de ses lignes mélodiques, sur la simplicité et la finesse de ses harmonies (avec des enchaînements harmoniques parfois typiquement japonais et particulièrement savoureux comme vers la fin du thème de ‘Self Portrait’, qui fait parfois penser à du Joe Hisaishi de l’époque tendance films de Miyazaki). A noter que ‘Self Portrait’ n’a pas été composé pour le film mais provient d’un ancien album de Ryuichi Sakamoto datant de 1984 et intitulé ‘Ongakuzukan’.

La séquence où Chatran pêche est accompagnée de la même façon par des synthétiseurs légers et sautillants tendance new age dans ‘Fishing’. Ici aussi, Sakamoto joue sur une certaine sobriété un peu enfantine qui pourra autant charmer que déplaire à certains. La seconde partie du morceau, plus excentrique et humoristique, utilise des sons de saxophone, de piano et d’harmonica samplés lorsque Chatran se fait voler son poisson par un autre animal de la forêt. On retrouve enfin les instruments acoustiques dans le très enjoué ‘Summer Cloud’ évoquant l’arrivée de l’été. Les cordes, les vents et les cuivres s’unissent ici pour évoquer la beauté de la forêt en plein été alors que Chatran court dans les prés en compagnie de son ami Pousquet. A noter ici une écriture de cordes assez lyrique qui évoque ici aussi certaines partitions de Joe Hisaishi. Mais l’émotion atteint un véritable sommet dans le très charmant ‘The Field of Dandelion’ où, après quelques arpèges de synthétiseurs oniriques, un nouveau thème fait son apparition, inspiré de la mélodie principale. Ce thème est associé ici à l’amitié entre Chatran et Pousquet et provoque inévitablement un petit pincement au coeur par son côté nostalgique et rêveur particulièrement agréable et poétique. C’est le piano qui développe ici le thème accompagné par des cordes pour ce qui demeure l’un des plus beaux morceaux du score de ‘Koneko Monogatari’. La séquence où Chatran rencontre les cochons (‘Pigs’) nous permet de revenir à un style plus sautillant et humoristique tendance mickey-mousing où Sakamoto s’amuse à mélanger bois et instruments synthétiques avec un certain humour. ‘Chatran in the Woods’ prolonge l’aventure du jeune chaton dans les bois avec un mélange de cordes/bois sautillants et quelques sonorités électroniques inventives. On notera ici l’utilisation d’un ostinato de cordes soutenant un saxophone soliste. On appréciera au passage l’inventivité avec laquelle Sakamoto joue avec ses différents instruments, une inventivité qui trouve écho sur la fraîcheur des images du film. ‘Fight’ rompt quand à lui avec la quiétude du reste du score en utilisant une écriture de cordes staccato plus agressive pour la scène où Chatran affronte un ours dans un cabanon abandonné au bord d’une plage. ‘Fight’ reste le seul passage sombre du score de ‘Koneko Monogatari’. A noter qu’il est amusant de constater que l’on entend déjà ici le style orchestral action de Ryuichi Sakamoto que l’on retrouvera une décennie plus tard dans le ‘Snake Eyes’ de Brian De Palma. Et c’est finalement le retour du printemps dans ‘Spring Has Come’ qui reprend le thème principal dans toute sa splendeur par l’orchestre, idéal pour conclure cette belle aventure sur une ultime touche de poésie et de légèreté. Sakamoto nous offre pour finir l’inévitable chanson qui reprend le thème principal dans sa version chantée.

Musique charmante, rafraîchissante et touchante, ‘Koneko Monogatari’ étonne par sa simplicité et son charme enfantin, même si à coup sur certains auditeurs risquent fort d’être rebutés par son côté daté et sa facette gentillette. Mais pour peu que l’on se laisse prendre au jeu, la musique de Sakamoto en devient très vite attachante, un vrai bain de jouvence! Pour une de ses premières compositions aux sonorités occidentales, Ryuichi Sakamoto nous prouve qu’il est aussi très à l’aise dans un registre plus ‘familial’ et nous offre une partition très agréable et poétique qui évoque la fraîcheur de la jeunesse et le plaisir de découvrir la vie à travers les yeux d’un jeune chat. Ceux qui ont encore gardés leur âme d’enfant pourront ainsi se délecter de cette très belle partition devenue très rare de nos jours et qui, hélas, fait partie des petits trésors oubliés du compositeur japonais, à redécouvrir absolument!



---Quentin Billard