1-2010 5.15*
2-Earth/Space 3.15
3-Probe 4.15
4-Bowman 1.44
5-Reactivating Discovery 2.24
6-Space Linkup/Earth Fallout 3.55
7-Visitation/Countdown 5.47
8-Nova/New Worlds/
Also Spratch Zarathoustra
(excerpt) 6.23
9-New World Theme from "2010"
(End Title) 2.30

*Interprété par Andy Summers
Inspiré de 'Also Spratch Zarathoustra'
Composé par Richard Strauss
Arrangé par Andy Summers et
Tony Humecke
Produit par Richard Rudolph

Musique  composée par:

David Shire

Editeur:

A&M Records CD5038/
DIDX253

Score produit par:
Craig Huxley, David Shire
Coordination de l'album pour MGM:
Harry Lojewski
Supervision de l'album:
Jonathan A. Zimbert

Artwork and pictures (c) 1984 MGM/UA Entertainment Co. All rights reserved.

Note: **1/2
2010
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by David Shire
Réaliser une suite au célébrissime ‘2001 A Space Odyssey’ de Stanley Kubrick était loin d’être une mince affaire! Passer derrière ce que beaucoup considèrent comme l’un des plus grands films de toute l’histoire du cinéma était un défi osé qu’a quand même tenu à relever le réalisateur Peter Hyams, connu au début des années 80 avec quelques films comme ‘The Star Chamber’, ‘Outland’, ‘Hanover Street’ ou bien encore ‘Capricorn One’. ‘2010’ se propose ainsi de repartir là où ‘2001’ s’arrêtait. Toujours inspiré du roman homonyme d’Arthur C. Clarke, ‘2010’ nous transporte en l’an 2010. Une équipe de cosmonautes russes et américains est envoyée dans l’espace pour partir en expédition à bord d’Odyssey 2 afin de découvrir ce qui s’est passé avec Odyssey 1 il y a maintenant 9 ans, après la disparition mystérieuse de l’équipe de Dave Bowman lors d’une expédition près des deux satellites de Jupiter, Europe et Io. Hélas, sur terre, la situation politique est plus que jamais tendue entre les Etats-Unis et la Russie, qui sont au bord d’une guerre nucléaire. A bord du vaisseau Leonov, russes et américains sont obligés de coopérer et de s’entraider pour mener à bien leur mission. Les scientifiques américains sont dirigés quand à eux par le docteur Heywood Floyd (Roy Scheider), qui était responsable de mission sur Odyssey 1 il y a 9 ans. Pour lui, cette nouvelle mission est capitale car il tient à effacer son cuisant échec et à décoder l’énigmatique phrase laissée par Dave Bowman avant que celui-ci ne disparaisse mystérieusement : « mon dieu, c’est plein d’étoiles ! ». L’expédition de l’Odyssey 2 les amènera à percer le mystère du monolithe découvert près de Jupiter, qui pourrait suggérer la présence d’une forme de vie inconnue près de l’un des deux satellites de la planète.

Evidemment, Peter Hyams n’a ni le génie ni le talent artistique d’un Kubrick. Il ne prétend d’ailleurs nullement égaler ce monstre sacré du cinéma avec son ‘2010’. Et pourtant, cette suite s’avère être pleinement réussie, si l’on excepte quelques points vieillots et dépassés comme le contexte de la guerre froide entre américains et soviétiques, peut-être d’actualité à la sortie du film en 1984 mais totalement inconcevable pour un film censé se dérouler au 21ème siècle ! Les effets spéciaux restent très impressionnants bien qu’un peu datés aujourd’hui. La mise en scène est quand à elle bien plus banale et lisse que celle de Kubrick – et aussi bien plus hollywoodienne – mais Hyams s’en tire à bon compte en nous proposant quelques belles montées de tension, du mystère, du suspense et même un brin de réflexion sur la nature humaine. Les séquences autour du monolithe de Jupiter sont elles aussi très spectaculaires et réussies, en lien direct avec le film de Kubrick. Dommage cependant que la révélation finale soit un peu gentillette et moralisatrice. Niveau casting, on retrouve Keir Dullea qui interprétait Dave Bowman dans ‘2001’ avec pour les nouveaux acteurs Roy Scheider, Helen Mirren, John Lithgow, Bob Balaban, etc.

A l’origine, la musique de ‘2010’ devait être écrite par Tony Banks du groupe Genesis. Mais sa partition fut rejetée et remplacée par celle de David Shire qui du composer rapidement une nouvelle partition pour le film de Peter Hyams. Exit ici la sélection classique et contemporaine choisie par Stanley Kubrick dans ‘2001’ (qui devait pourtant être mis en musique à l’origine par Alex North qui essuya là aussi un renvoi au dernier moment – décidément !). Dans ‘2010’, le réalisateur a préféré utiliser un score original signé David Shire, qui, afin de retranscrire toute la dimension futuriste et spatiale du film, a décidé d’utiliser essentiellement des synthétiseurs. Shire s’est vu assister par Craig Huxley sur la partie électronique du score, Huxley étant plus connu comme étant l’inventeur du Blaster Beam, un instrument crée en 1979 pour les besoins de la partition de ‘Star Trek The Motion Picture’ de Jerry Goldsmith. Chose curieuse : seul le tout dernier morceau du score est entièrement orchestral. A vrai dire, il s’agit même du seul morceau que l’on retient généralement de la partition de ‘2010’, le reste étant finalement guère mémorable. Niveau matériel, Shire a utilisé le Synclavier II, le Yamaha DX-1 et le Roland Jupiter-8, de même que le Blaster Beam de Craig Huxley est utilisé dans le morceau 'Reactivating Discovery'. Bref, autant dire de suite que le matériel utilisé par Shire et Huxley sur '2010' était à cette époque à la pointe de la technologie et ce qui se faisait de mieux dans le domaine de l'électronique.

La musique intervient pour la première fois dans ‘Earth-Space’ alors que Heywood Floyd apprend à sa femme qu’il va partir en mission dans l’espace. Shire utilise ici un motif de 2 notes lié à la famille de Floyd, puis, très rapidement, la musique évolue vers une ambiance plus mystérieuse et planante à base de sonorités électroniques new-age très connotées années 80. Ceux qui ont des difficultés avec les synthétiseurs kitsch « eighties » risquent indubitablement d’avoir du mal à écouter le score de ‘2010’, assurément. Néanmoins, le compositeur arrive à créer une ambiance musicale particulière pour le film de Peter Hyams, renforçant la dimension futuriste, spatiale et métaphysique de son récit. David Shire prolonge cette ambiance quasi surréaliste avec l’inquiétant ‘Probe’ lorsque l’équipage du Leonov envoie une sonde sur la surface d’Europe, l’un des deux satellites de Jupiter. On est plus proche ici du style des vieilles musiques de film à suspense « eighties » à petit budget. A noter que le morceau ‘Bowman’ dévoile le thème principal de la partition, ‘New Worlds’, thème que Shire reprendra à la fin du film dans une forme symphonique. Il s’agit d’une mélodie mystérieuse qui suggère la présence de nouveaux mondes dans l’espace. De la même façon, ‘Reactivating Discovery’ (qui utilise le Blaster Beam de Craig Huxley durant la scène où les scientifiques remettent en marche la navette Discovery) et ‘Space Linkup/Earth Fallout’ s’articulent autour d’une série de drones et de sonorités électroniques mystérieuses et vaporeuses qui maintiennent une certaine tension à l’écran. A noter que la partie finale de ‘Visitation Countdown’ laisse apparaître un semblant de tonalité et d’espoir au sein d’un score résolument sombre, mystérieux et atonal. La première partie chaotique de ‘Nova/New Worlds’ débouche finalement sur une reprise du thème principal de la partition, ‘New Worlds’, déjà entendu aux synthétiseurs dans ‘Bowman’. David Shire nous en propose une reprise ample et très classique d’esprit pour un final pour le moins majestueux et grandiose. Il est d’ailleurs assez amusant de voir comment Shire passer des synthétiseurs à l’orchestre avec cette piste qui, après la froideur de l’électronique, révèle finalement la partie humaine de la musique du compositeur, dans un style très ‘Golden Age’ hollywoodien, un langage musical classique que David Shire a toujours su maîtriser dans ses oeuvres. A noter pour finir que la bande originale de ‘2010’ inclut aussi deux morceaux repris de ‘2001’ et qui permettent de faire le transition avec le film de Kubrick : le célébrissime ‘Ainsi parlait Zarathoustra’ de Richard Strauss (qui a immortalisé à tout jamais ‘2001’) et le fameux et surréaliste ‘Lux Aeterna’ de Ligeti, utilisé dans ‘2010’ lors des scènes où l’on aperçoit le monolithe de Jupiter.

Au final, ‘2010’ est un score plutôt mineur de David Shire qui parvient difficile à faire éclipser la sélection musicale assez exceptionnelle qu’avait constitué Stanley Kubrick sur ‘2001’ à partir de morceaux classiques et contemporains. Qu’à cela ne tienne, le compositeur remplit néanmoins parfaitement le cahier des charges et nous offre un score électronique aux sonorités synthétiques froides et futuristes bien qu’aujourd’hui extrêmement datées. Quel dommage, quand on sait que la musique de ‘2001’ avait justement l’avantage de résister au temps grâce à son statut intemporel et universel, alors que la composition de Shire pour ‘2010’ est au contraire plus ciblée, conventionnelle et inévitablement datée. Néanmoins, la partition du compositeur révèle une surprise de taille, un souffle épique symphonique inattendu pour ‘New Worlds Theme’, entendu à la fin du film. Mais au final, ‘2010’ reste un score fonctionnel franchement guère mémorable et qui est aujourd’hui tombé dans l’oubli.


---Quentin Billard