1-White Whale 2.14
2-Punishment 1.36
3-To Amman 2.42
4-Aisha 2.11
5-All By Himself 1.32
6-Burning Safehouse 1.46
7-Al-Saleem 2.05
8-Manchester Raid 2.40
9-Chased 1.35
10-NSA Speech 2.46
11-Tortured 2.13
12-Dead Sea 1.16
13-No Touch 1.21
14-I Am Out 2.37
15-Rabid Dogs 2.49
16-Lost Vision 2.00
17-Never Lie To Me 1.14
18-I Shutter To Think 2.27
19-Half Steps 1.28
20-Making The Call 1.11
21-My Fault 1.53
22-Betrayal 3.31

Musique  composée par:

Marc Streitenfeld

Editeur:

Varèse Sarabande VSD-6923

Produit par:
Marc Streitenfeld
Producteur exécutif:
Robert Townson
Producteur exécutif album:
Ridley Scott
Directeur de la musique pour
Warner Bros. Pictures:
Doug Frank, Gary Le Mel,
Carter Armstrong

Montage musique:
Del Spiva
Assistant montage:
Joe Bonn
Préparation de la musique:
Booker White
Album business affairs:
Keith Zajic, Dirk Hebert
Assistant musique:
Nick Delaplane

Artwork and pictures (c) 2008 Warner Bros. Entertainment, Inc. All rights reserved.

Note: **1/2
BODY OF LIES
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Marc Streitenfeld
Après son récent « American Gangster », le toujours aussi prolifique Ridley Scott revient avec un nouveau film, « Body of Lies » (Mensonges d’état), thriller géopolitique comme on en voit à la pelle aujourd’hui dans le cinéma américain contemporain. Roger Ferris (Leonardo DiCaprio), ancien journaliste blessé durant la guerre en Irak, se retrouve recruté par la CIA afin de traquer le chef d’un groupe de terroristes basé en Jordanie. Ferris doit alors compter sur le soutien d’un vétéran de la CIA, Ed Hoffman (Russel Crowe) et du chef des renseignements jordaniens, qui semble jouer double jeu. Ferris sait que sa mission sera particulièrement périlleuse, car au moindre écart de conduite de ses deux associés, toute l’opération pourrait échouer dangereusement. Le film de Ridley Scott nous propose ainsi une vision assez réaliste (ou du moins crédible) de la traque contre le terrorisme international, un sujet décidément d’actualité depuis le 11 septembre 2001, et qui vire quasiment à l’obsession dans le cinéma américain contemporain. Ridley Scott pointe du doigt à travers son film les limites de la CIA qui, malgré une technologie qui semble infinie, continue de se heurter à l’exercice de l’espionnage sur le terrain. Le film montre aussi les relations complexes entre les agents infiltrés, les services secrets et les indic’, un jeu de balance assez périlleux dans lequel aucune erreur n’est permise (à ce sujet, la scène de torture finale est particulièrement éprouvante !). Comme d’habitude, DiCaprio et Crowe nous offrent une interprétation sans faille, Ridley Scott allant même jusqu’à se moquer ouvertement du personnage de Russel Crowe qui passe une bonne partie du film avec un téléphone visé dans l’oreille en donnant ses instructions à DiCaprio tout en s’occupant en même temps de ses gamins. Scott ne se gêne donc pas pour tourner certains éléments de l’histoire à la dérision, même s’il ne prend au final aucun parti pris véritable - le point fort de « Body of Lies ». Comme souvent, Scott filme l’histoire avec une certaine objectivité quasi journalistique, même s’il est évident que l’on sent derrière les images le sarcasme sous-jacent adressé à la CIA - et par la même occasion, à l’administration Bush et sa gestion très controversée dans la guerre contre le terrorisme.

A la musique, on retrouve Marc Streitenfeld, qui avait déjà signé la musique des deux précédents films de Ridley Scott, « A Good Year » et « American Gangster ». Streitenfeld a écrit pour « Body of Lies » une musique atmosphérique aux couleurs arabisantes, qui nous permet de plonger plus intensément dans les décors jordaniens du film. Dès les débuts de sa partition, Streitenfeld pose le ton : « White Whale » utilise quelques cordes avec des synthétiseurs discrets, des guitares incluant un oud (guitare traditionnelle des pays arabes), des percussions orientales diverses ainsi qu’une voix arabisante qui évoque certains chants religieux musulmans. « White Whale » possède un côté mystérieux et sombre idéal pour introduire le film de façon énigmatique (ambiance qui sera reprise dans « Al-Saleem »). Puis, les morceaux s’enchaînent rapidement dans le film, la plupart ne dépassant que très rarement les 2 minutes. Des pièces comme « Punishment » ou « To Amman » apportent leur lot de sonorités arabisantes - incluant pour « To Amman » une flûte exotique du plus bel effet. A noter l’utilisation plus intime de l’oud dans « Aisha » pour la scène où Ferris fait la connaissance de la belle Aisha à l’hôpital d’Amman, l’un des rares morceaux plus doux et intimes du score, mais qui conserve là aussi une certaine retenue, une tension sous-jacente. Ferris sait qu’il risque beaucoup à côtoyer une jordanienne en plein milieu de la ville, mais il décide néanmoins d’assumer sa relation avec la jeune femme.

« All By Himself » met en avant une écriture de cordes plus soutenue avec quelques darboukas et l’oud en dévoilant un thème plus sombre et vaguement mélancolique, thème repris dans « Burning Safehouse » où s’ajoute un rebab (sorte de violon traditionnel du monde arabe) et quelques sonorités plus sombres. Le morceau évoque la lutte contre le terrorisme, avec une tension constante qui traverse l’ensemble de la partition de « Body of Lies ». A noter un travail de percussions plus soutenu dans « Manchester Raid » où se dévoile le thème principal du score, un motif de 6 notes ascendantes puis descendantes, et qui sera associé au personnage de DiCaprio tout au long du film. L’instrumentation orientale devient ici plus intense, mélangeant cithare, flûte, darboukas et oud avec les cordes. Idem pour le sombre « Chased » accompagnant une séquence de poursuite vers le milieu du film. Le problème du score de Marc Streitenfeld, c’est que les morceaux se suivent et se ressemblent tous, n’apportant rien de particulier à la musique dans le film - que l’on peine à remarquer au-delà des images, tant elle paraît ultra fonctionnelle et sans grande saveur. « NSA Speech » reprend exactement les mêmes éléments que les morceaux précédents, mais sans apporter une once de développement ou de nouveautés, si bien qu’on finit par s’ennuyer un peu à la longue, et ce même si le score contient quelques bonnes idées.

Le thème revient dans le sombre « NSA Speech », évoquant les dangers de la mission de Ferris sur le terrain, tandis qu’un morceau comme « Tortured » fait la part belle au rebab dans une ambiance proche d’une lamentation quasi funèbre. Ensuite, c’est l’oud qui domine dans le très intime « Dead Sea ». La tension monte alors d’un cran dans « I Am Out », lorsque Ferris comprend qu’il a été manipulé et qu’il souhaite annuler toute l’opération. Les sonorités orientales sont toujours omniprésentes, afin de mieux renforcer à l’écran le sentiment d’immersion dans une culture étrangère. « I Am Out » s’impose par son rythme de darboukas dansant, son oud mélodique et ses cordes qui développent encore une fois le thème principal de Ferris, avec un rythme de plus en plus pressant et tendu. L’action devient plus intense avec l’agressif « Rabid Dogs » et « Lost Vision », lorsque Ferris s’est fait capturer par les terroristes d’Al-Saleem tandis que la CIA continue de suivre sa position, mais en vain. Les derniers morceaux du score se veulent plus doux et retenus, comme « Half Steps » et sa mélodie entêtante de guitare ambiguë ou « Making The Call » avec ses synthétiseurs mystérieux et inquiétants. Enfin, « Betrayal » reprend l’ambiance de « White Whale » avec ses sonorités arabisantes et son atmosphère mystérieuse et envoûtante.

Marc Streitenfeld a donc opté totalement ici pour la musique du monde arabe en délaissant l’approche orchestrale traditionnelle. On retrouve néanmoins ici quelques cordes et cuivres pour les passages plus sombres et agités, mais ce sont bel et bien les instruments orientaux qui dominent ici, avec de très belles parties d’oud, de darboukas, de rebab ou de chant arabe. Pour un score hollywoodien de cette envergure, une telle approche peut paraître osée mais elle réussit parfaitement au film de Ridley Scott. Seule ombre au tableau : on ne retient finalement pas grand-chose de la partition de « Body of Lies », qui demeure indiscutablement fonctionnelle de bout en bout et sans grande saveur. Le caractère atmosphérique de la musique rend l’écoute dans le film et sur l’album quelque peu insipide et ennuyeuse. Force est de constater que depuis que Ridley Scott ne travaille plus avec Hans Zimmer, la qualité de ses musiques a été sérieusement revue à la baisse. A quand le retour de Hans Zimmer sur un film de Ridley Scott ?


---Quentin Billard