1-Opening 2.43
2-Mount of the Gods 1.56
3-Speech 3.01
4-Evolet 2.43
5-Mannak Hunt 2.07
6-Celebration 1.29
7-I Was Not Brave 1.48
8-Night of the Tiger 1.37
9-Lead Them 2.28
10-Terror Birds 3.22
11-Wounded Hunter 1.51
12-Food 1.59
13-Good-Byes 1.13
14-Sea of Sand 2.41
15-Wise Man 1.40
16-He Was My Father 1.05
17-Mark of the Hunter 2.45
18-Free The Mannaks 1.47
19-Not A God 2.35
20-You Came For Me 2.06
21-The End 3.18
22-10.000 BC/End Credits 2.55

Musique  composée par:

Harald Kloser/Thomas Wanker

Editeur:

Decca Records
DCAB001082402

Album produit par:
Harald Kloser
Musique additionnelle:
Thomas Wanker

Artwork and pictures (c) 2008 Warner Bros. Pictures/Centropolis Entertainment. All rights reserved.

Note: **
10.000 B.C.
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Harald Kloser/Thomas Wanker
L’infatigable Roland Emmerich revient en force avec « 10.000 B.C. », spectacle épique se déroulant durant l’ère préhistorique, 10000 ans avant Jésus Christ. Au cœur des montagnes, un jeune chasseur, D’Leh (Steven Strait) tombe amoureux d’une jeune orpheline, la belle Evolet (Camilla Belle - la bien nommée !), que sa tribu recueillit quelques années plus tôt. Mais le jour où des pillards kidnappent Evolet et quelques uns de ses amis, D’Leh et ses compagnons décident de quitter leur montagne pour partir secourir la jeune femme et ses semblables. Mais ils vont devoir pour cela affronter maintes péripéties, franchir les grandes montagnes enneigées, affronter des créatures carnivores, s’allier avec des tribus étrangères et découvrir des civilisations dont ils ignoraient totalement l’existence jusqu’à ce jour. Avec les tribus voisines, D’Leh finit par constituer une armée et part à l’assaut des grandes pyramides dédiées à un dieu vivant qui répand le sang sur ses terres.

« 10.000 B.C. » est donc une production épique typiquement hollywoodienne, comme on en voit à la pelle aujourd’hui au cinéma U.S. Roland Emmerich avoue avoir travaillé sur ce film pendant longtemps, aux côtés de son compère, Harald Kloser, scénariste et aussi compositeur de la musique du film. Le réalisateur souhaitait raconter depuis longtemps une grande histoire préhistorique de courage, d’héroïsme et d’amour. En plaçant au cœur du film des hommes primitifs qui luttent pour défendre des valeurs telles que l’amour et la fraternité, Emmerich accouche d’un spectacle honnête mais au récit bien trop ampoulé pour qu’on y croit vraiment. Roland Emmerich a une vision bien kitsch de la Préhistoire, avec ses hommes en peaux de bête (qui parlent quand même anglais ! - Au moins, Jean-Jacques Annaud avait su éviter ça dans « La Guerre du Feu »), ses shamans, ses grands mammouths et autres clichés du genre. Evidemment, le film n’est pas à prendre au premier degré et n’a pas vocation à être un documentaire (encore heureux !). Le plus agaçant réside surtout dans le caractère ridicule et excessivement « tout public » du film. Là où l’on se serait attendu à une fresque barbare et totalement démesurée, Emmerich accouche finalement d’un film gentillet - avec quasiment aucune goutte de sang - plein de bons sentiments, d’acteurs beaux (on est censé être en plein coeur de la Préhistoire et les personnages principaux semblent sortir tout droit d’une publicité pour parfum !) et autres dialogues nunuches (D’Leh qui dit au lion à dents de sabre : « Je t’ai sauvé la vie, tu ne me dévoreras pas ? »). Comme toujours, Roland Emmerich a un don pour l’infantilisme primaire. C’est un spectacle hollywoodien divertissant, certes - et c’est déjà ça ! - mais est-ce une raison pour prendre les spectateurs pour des crétins ? Bref, aussi divertissant et spectaculaire qu’il soit (la chasse au mammouth, la bataille finale dans les pyramides - qui rappelle étrangement « Stargate » -du même Emmerich - la poursuite avec les oiseaux carnivores, etc.), « 10.000 B.C. » ne laissera aucun souvenir particulier, et ce malgré tous les efforts déployés par le réalisateur, qui avoue avoir tourné là son film le plus difficile à ce jour. On appelle cela du gâchis, tout simplement !

Exceptionnellement, Harald Kloser endosse donc la double casquette de scénariste et de compositeur. Son score pour « 10.000 B.C. » s’affirme dans la continuité de ses précédentes partitions, mélangeant orchestre symphonique, touches électroniques discrètes et percussions primitives. Sa musique apporte une certaine émotion au film, avec un thème solennel et majestueux comme Kloser les affectionne tant (on n’est guère loin du thème de « AVP » ou « The Day After Tomorrow »), thème associé tout au long du film aux exploits héroïques de D’Leh. Mais avant cela, le compositeur prend le temps d’asseoir le côté primitif/exotique de sa musique avec une introduction sombre et mystérieuse aux sonorités tribales : percussions diverses et voix africaines (on cherche le rapport avec la Préhistoire ?), une idée développée dans « Mount of the Gods » avec ses chants africains survoltés et sauvages, soutenus par un orchestre ample et l’attirail habituel de percussions. On retrouve aussi le désormais traditionnel duduk arménien, toujours connoté « son oriental » dans tous les films où les compositeurs l’emploient (à outrance, devrait-on dire !) ainsi que quelques violons aux sonorités arabisantes pour la scène des pyramides, sans oublier quelques flûtes exotiques pour le début de « Speech », qui annonce le thème principal solennel, développé par des cordes et des cuivres amples. A noter que l’on a souvent reproché au compositeur de s’être très sévèrement inspiré du thème de « King Arthur » de Hans Zimmer pour écrire la mélodie principale de « 10.000 B.C. », un fait hélas véridique, qui n’échappera pas aux oreilles les plus attentives (Kloser, un compositeur paresseux ?).

Harald Kloser passe donc en revue tous les clichés du genre, qu’il s’agisse des percussions exotiques, des chants africains tribaux ou des instruments tendance « couleur locale/dépaysement garanti ». Si certains passages se veulent plus doux et intime comme « Evolet » ou « I Was Not Brave » (avec son inévitable duduk), accompagnant les scènes plus humaines et calmes du film, ce sont les passages d’action qui s’imposent ici par leur puissance et leur efficacité incontestable sur les images. On pense tout d’abord à la chasse aux mammouths de « Mannak Hunt » (cordes survoltées, percussions tribales, rythmes massifs à la « AVP », sonorités exotiques diverses, etc.), « Night of the Tiger » avec ses percussions tribales massives lorsque D’Leh affronte le tigre aux dents de sabre, sans oublier l’excitant « Terror Birds » (scène de l’attaque des oiseaux carnivores), sans aucun doute le meilleur morceau d’action du score de « 10.000 B.C. ». Hélas, l’ensemble sent le réchauffé à plein nez et le manque d’idées flagrant. On est loin ici de la richesse orchestrale de « The 13th Floor ». Kloser aligne ici aussi les clichés les uns à la suite des autres, même s’il fait preuve d’une grande maîtrise dans ces grandes séquences d’action, manipulant les rythmes et les percussions avec un certain savoir-faire. Sa musique apporte l’excitation épique nécessaire aux images, tout en faisant monter la tension au cours de la traque des créatures de « Terror Birds ». A noter ici la façon dont Kloser manipule les changements de rythme et de tempi, avec de nombreux effets de rupture qui ne sont pas sans rappeler certains passages de « AVP ».

Reste au final quelques passages de chant africains/tribaux efficaces, qui raviront les amateurs de musique du monde : « Food » et « Celebration » en tête de peloton, morceaux dans lesquels se mélangent les chants tribaux censés représenter la musique des hommes primitifs qui fêtent ici le retour de la nourriture pour toute la tribu à la suite d'une chasse plutôt fructueuse. Pour un film hollywoodien aussi calibré, c’est un parti pris assez osé et plutôt réussi pour une fois - les américains ayant une sérieuse tendance à gommer toute forme d’authenticité pour « américaniser » les cultures musicales étrangères qu’ils évoquent parfois dans leurs films. On pourra aussi apprécier quelques touches arabisantes - un peu hors sujet - dans « Goodbyes », où Kloser et son acolyte Thomas Wanker (à la musique additionnelle) continuent de développer leurs sonorités ethniques pour les décors préhistoriques du film de Roland Emmerich. « Sea of Sand » nous permet ensuite d’apprécier le retour du thème solennel lorsque D’Leh conduit son armée à travers le désert. Le thème évoque cette idée de fraternité et possède un coté fédérateur assez appréciable à l’écran, bien que la ressemblance avec certains passages du thème de « King Arthur » de Hans Zimmer soit assez gênante à la longue. « Oceans of Sand » possède ce côté à la fois solennel et épique que l’on apprécie dans ce type de partition, idée qui trouve écho dans le « End Credits », qui résume l’essentiel de la partition d’Harald Kloser pour le générique de fin. A noter aussi quelques derniers morceaux d’action particulièrement intenses, « Free The Mannaks », « Mark of the Hunter » et « He Was My Father ».

Vous l’aurez donc compris, ce n’est pas encore avec « 10.000 B.C. » qu’Harald Kloser prouvera qu’il a l’étoffe d’un grand compositeur de musique de film. Décidément, après les déceptions de « AVP » et « The Day After Tomorrow », Kloser continue de s’enliser dans les musiques stéréotypées affligeantes, bourrées d’effets faciles et de banalités, multipliant les partitions fonctionnelles et sans grande saveur, à l’instar de son collègue Tyler Bates, qui joue finalement dans la même catégorie. Hélas, difficile aujourd’hui de tempérer un constat aussi sévère : il est regrettable de s’apercevoir qu’il existe toute une nouvelle génération de jeunes musiciens qui tentent de prendre le relais sans vraiment apporter quoique ce soit au cinéma pour lequel ils travaillent. Force est de constater qu’Harald Kloser est encore un de ces faiseurs qui sait écrire de la musique efficace et alimentaire, mais qui s’oublie très vite, faute de réelle idée ou d’ambition musicale personnelle. Décidément, on en vient même à regretter la bonne époque de la collaboration Roland Emmerich/David Arnold. A quand les retrouvailles entre les deux compères ?



---Quentin Billard