1-The Big Kahuna 6.10
2-Cheesballs and Shrimp 3.02
3-Charade 2.26*
4-Measured by Dogs 1.14
5-Philed With Fuller 1.05
6-God's in the Closet 2.04
7-Industrial Lubricants 2.16
8-Salterello 1.41
9-Happy Jesus 2.11
10-Hey Pachucho! 3.34**
11-Binga Binga Bongo 2.33***
12-A Little Something
of What I Am 1.16
13-The Lateness of Things 2.00
14-El Kahuna Grande 1.20

*Ecrit par Johnny Mercer
et Henry Mancini
Interprété par Si Zentner
**Ecrit par Eddie Nichols,
James Achor et Mando Dorame
Interprété par Royal Crown Revue
***Ecrit par Terry Snyder
Interprété par Terry Snyder
et The All Stars.

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Varèse Sarabande VSD-6140

Album produit par:
Anita Camarata,
Kaylin Frank, Robert Townson

Montage musique:
Terry Wilson

Artwork and pictures (c) 1999 Franchise Pictures. All rights reserved.

Note: ***1/2
THE BIG KAHUNA
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
« The Big Kahuna » fait partie de ces petits films méconnus qui possèdent pourtant une grande richesse et un énorme potentiel. L’histoire se déroule essentiellement dans une chambre d’hôtel, entre 3 personnages : deux vendeurs de lubrifiants, Larry Mann (Kevin Spacey) et Phil Cooper (Danny DeVito), ainsi qu’un jeune collègue récemment employé dans la société, Bob Walker (Peter Facinelli). Phil et Larry, deux vétérans du commerce industriel, viennent tout juste de finir leur dernière soirée d’une convention lorsqu’ils reçoivent leur jeune collègue Bob du département de recherche. Le trio décide alors de se réunir dans une chambre du luxueux Hospitality Suite dans un hôtel californien afin d’y accueillir un important client présent lors de la convention, et avec qui les deux vendeurs espèrent bien signer un contrat juteux. Mais c’est le jeune Bob Walker qui entre en premier en contact avec l’homme en question, discutant avec lui de sujets tels que la religion, la vie et la mort. Lorsque Larry et Phil apprennent qu’il l’a laissé filer, ils décident de confier au jeune homme une nouvelle mission : recontacter le dit client et lui proposer de venir les rejoindre dans leur chambre d’hôtel pour discuter business. Mais Bob est un homme honnête et intègre. Sa nouvelle discussion avec le dit client l’amènera encore une fois à reparler de religion plutôt que de business.

« The Big Kahuna » est l’unique réalisation de John Swanbeck, sur un scénario de Roger Rueff, adapté d’une pièce de théâtre. Le film lui-même a d’ailleurs été tourné à la manière d’une pièce de théâtre : quasiment un seul décor et seulement trois acteurs principaux. Toute l’histoire réside autour des dialogues et des relations entre les trois personnages. L’intrigue débute ainsi avec cette histoire de vente de lubrifiants et dévie très rapidement sur une mise à nue des personnages : chacun se confie, exprime ses sentiments, sa vision personnelle de la vie. Larry est le vieux vendeur cynique qui ne croit qu’au pouvoir de la vente, Phil est un vétéran fatigué et dépressif, qui ne s’est jamais vraiment remis de son divorce, et Bob est un jeune vendeur dynamique mais qui croit plus au pouvoir de la communication humaine qu’à celle de l’échange intéressé. Evidemment, ces différences de point de vue vont très vite provoquer un clash entre les trois personnalités, et plus particulièrement entre Larry et Bob, qui ne partage pas du tout la vision cynique et matérialiste de son collègue. Pour lui, sa foi en Dieu est plus importante que la vente de lubrifiants. L’histoire raconte donc cette confrontation philosophique entre les trois hommes le temps d’une nuit assez agitée, où il sera question de conviction, de remise en question, d’éthique et de déontologie. Si le script tient bien la route, c’est avant tout grâce aux performances d’un trio d’acteur exceptionnel : Danny DeVito et Kevin Spacey, face au jeune Peter Facinelli, qui s’impose par l’honnêteté et la conviction de son jeu d’acteur. « The Big Kahuna » est un exemple fort d’un cinéma indépendant qui ne repose sur aucun artifice particulier mais revient au contraire aux racines même du cinéma : un simple jeu d’acteur sur un seul décor suffit à tenir en haleine le spectateur pendant près de 90 minutes.

Etonnamment, la musique de « The Big Kahuna » a été confiée à Christopher Young, peu habitué à ce type de cinéma indépendant, un changement de registre judicieux de la part du compositeur qui revient ici à un style plus jazzy/rock léger et intime. Dès le générique de début, Young fait preuve de son inventivité habituelle en utilisant un ensemble instrumental assez restreint : cordes, marimba, piano, accordéon, guitare basse et quelques petites percussions, avec une mélodie légère de piano qui apporte une certaine fraîcheur aux images du film. « « The Big Kahuna » (premier morceau du score) s’impose par sa légèreté et sa simplicité toute à l’image du film. Young se fait plaisir et cela s’entend ! On retrouve ici un Chris Young plus proche des ses musiques de comédie - qu’il s’agisse de « Wonder Boys », « Lucky You » ou « Sweet November ». Les amateurs du Young jazzy seront aux anges avec « Cheesballs & Shrimp », morceau de jazz rétro pur et dur dans la lignée de « Rounders », « Shade » ou « The Man Who Knew Too Little ». L’accordéon de Frank Marocco domine le morceau, sur fond de batterie jazzy légère et d’un orgue hammond. Idem pour « Measured By Dogs » avec son ambiance jazzy rétro tendance « musique de polar des années 50 ». La musique apporte un certain humour, une certaine légèreté au film de John Swanbeck. Inversement, « Philed With Fuller » se veut plus nuancé et contemplatif avec ses trilles instrumentaux un brin mystérieux et son motif mélodique retenu, évoquant la conversation entre Bob et Fuller - le morceau apporte un côté humain très touchant à cette scène, illustrée avec une sobriété rare de la part de Chris Young. Même chose pour le magnifique « God’s in the Closet » accompagnant la scène où Phil se confesse à Larry au sujet d’un rêve qu’il a fait concernant Dieu. Le morceau est confié à la guitare de George Doering qui nous offre une interprétation fine et toute en douceur, révélant la sensibilité d’un compositeur que l’on a trop souvent tendance à cantonner aux scores de films d’horreur/suspense !

Le score alterne ainsi entre jazz rétro (« Industrial Lubricants », « A Little Something of What I Am »), morceaux plus intimes et touchants avec piano (« The Lateness of Things », « Salterello » - titre qui fait référence au nom du compositeur Hans J. Salter) pour évoquer ce duel philosophique entre les trois compères, sans oublier du rock/funky bien cool dans « Happy Jesus » et « El Kahuna Grande » où l’orgue hammond apporte un côté « Gospel/Blues » assez sympathique au morceau, et qui rappelle là aussi maint passages des scores « poker » de Chris Young, tendance « Rounders », « Lucky You » ou « Shade ». En conclusion, « The Big Kahuna » demeure une belle surprise de bout en bout, un score très sympathique et attachant dans lequel on sent à quel point Christopher Young s’est fait plaisir en écrivant la musique du film de John Swanbeck. Renouant avec son style jazzy/rock cool traditionnel, Young apporte une émotion et une légèreté fort appréciable au film, illustrant ce duel philosophique avec une sobriété et une classe exemplaire (et aussi une bonne dose de bonne humeur, idéal pour redonner le sourire à tous les auditeurs!). Alors ce n’est certes pas LE chef-d’oeuvre de Chris Young, mais cela n’en demeure pas moins une partition de qualité, à ne pas manquer, surtout pour tous ceux qui souhaiteraient entendre une autre facette musicale du grand Christopher Young !


---Quentin Billard