1-The Uninvited 3.28
2-Twice Told Tales 2.22
3-I'm at a Party 3.36
4-Glass Act 1.35
5-Bloody Milk 3.25
6-Corpse Christmas 5.41
7-Pairs in Love 1.50
8-Terror on the Water 3.13
9-Twin Nightmares 4.18
10-Cry of Love 5.30
11-Working Dreams 2.41
12-The Screaming Bell 2.01
13-What Have You Done? 2.42
14-A Dance With No One 1.33
15-A Tale of Two Sisters 4.43

Musique  composée par:

Christopher Young

Editeur:

Lakeshore Records
LKS-34064

Album produit par:
Christopher Young
Musique additionnelle de:
David G. Russell
Montage musique:
Thomas Milano

Artwork and pictures (c) 2009 DreamWorks SKG and Paramount Pictures. All rights reserved.

Note: ****1/2
THE UNINVITED
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Christopher Young
Surfant sur la vague des remakes U.S. de films d’horreur asiatiques, voici « The Uninvited » (Les intrus), remake de « Janghwa, Hongryeon » (2 soeurs), film d’épouvante coréen de Kim Jee-Woon sorti en 2003. Réalisé par Tom et Charles Guard et produit par DreamWorks, « The Uninvited » reprend les grandes lignes du film d’origine dont il s’inspire, transposé cette fois-ci aux Etats-Unis : après un séjour en hôpital psychiatrique, la jeune Anna Rydell (Emily Browning) revient chez elle et retrouve sa soeur Alex (Arielle Kebbel), son père Steven (David Strathairn) et sa belle-mère Rachael (Elizabeth Banks), qu’elle ne supporte pas. Anna doit alors subir les remontrances constantes de Rachael, qui cherche désormais à prendre la place de sa mère, décédée tragiquement il y a de nombreux mois dans un incendie accidentel, décès dont la jeune fille ne s’est jamais vraiment remise. Anna est alors constamment harcelée par un fantôme qui semble hanter la maison et les environs, un fantôme qui, à chacune de ses apparitions, semble vouloir dire quelque chose à la jeune fille, bien trop terrorisée pour tenter d’analyser le mystérieux message qui lui est transmis. Puis, petit à petit, Anna et Alex finissent par soupçonner Rachael d’avoir assassiné leur mère pour pouvoir épouser leur père et s’emparer de ses biens. « The Uninvited » s’avère être au final un remake honnête et sans prétention, bien plus simple et surtout bien moins ambitieux que le film d’origine. Les jeunes Emily Browning et Arielle Kebbel campent un duo de soeur tout à fait convaincant, face à une Elizabeth Banks parfaite dans le rôle d’une belle-mère tyrannique et inquiétante. Ici, pas de gore ou d’effets sanguinolents : « The Uninvited » fonctionne essentiellement sur le suspense psychologique et l’atmosphère de mystère qui domine l’ensemble du film des frères Guard, même si l’on regrettera le côté souvent prévisible et extrêmement cliché de certaines scènes - par exemple, les séquences d’apparition fantomatiques sont d’une ringardise incroyable : on croirait presque voir par moment un mauvais mélange entre « The Grudge » et « The Sixth Sense ». Voilà en tout cas un film d’épouvante psychologique à réserver en priorité aux inconditionnels du genre et à ceux qui ont apprécié le film coréen de Kim Jee-Woon.

Christopher Young rempile encore une fois sur un énième film d’épouvante - son genre de prédilection - « The Uninvited » lui permettant de nous offrir une nouvelle grande partition symphonique sinistre, macabre et envoûtante, dans la lignée de scores tels que « The Glass House », « Unforgettable » ou la musique rejetée de « Hide and Seek ». Le score de « The Uninvited » repose pour commencer sur l’inévitable thème principal, mélodie envoûtante, intime et mélancolique entendue dès le début du film (« The Uninvited ») et qui se reconnaît grâce à sa mélodie en 2 notes chantée par un duo de voix féminines, une idée astucieuse puisque le thème est associé dans le film au personnage des deux soeurs, Anna et Alex, et évoque par la même occasion l’idée de la dualité qui est au coeur même de l’intrigue du film (à noter qu’ici aussi, l’utilisation de la voix rappelle « Hide and Seek » !). La musique se veut d’abord intime, calme et un brin mélancolique au début du film, « Twice Told Tales » développant le second thème du score, mélodie jouée par un piano et des cordes avec comme toujours cette mélancolie latente qui semble suggérer beaucoup de souffrance refoulée chez la jeune héroïne du film.

Le score prend alors une tournure plus noire et effrayante avec « I’m at a Party » dans lequel Christopher Young utilise un choeur féminin de façon inquiétante, les voix étant ici l’élément majeur du score de « The Uninvited ». Le compositeur suggère la présence d’esprits maléfiques à l’aide de voix fantomatiques dissonantes, dans un style plutôt avant-gardiste, accompagné des sursauts orchestraux habituels et des effets instrumentaux que Young utilise constamment pour ce type de film. On retrouve ainsi le style avant-gardiste à la Penderecki que Chris Young avait déjà utilisé dans les récents « Exorcism of Emily Rose », « The Grudge » et « The Grudge 2 », avec son lot de glissandi de cordes, clusters, jeux sur les quarts de ton, trilles de cors, clusters vocaux, etc. Certains passages apportent un peu de plus de nuance au score comme « Glass Act » et ses cordes rythmées évoquant la détermination des deux soeurs à découvrir la vérité au sujet de leur belle-mère. Pourtant, c’est l’horreur et le suspense qui reprennent très vite le dessus avec l’utilisation du thème mélancolique de piano interrompu brutalement par un terrifiant sursaut orchestral pour une autre scène d’apparition spectrale du film (séquence du lait qui se transforme en sang). Ici aussi, Young reprend les effets instrumentaux dissonants déjà mis en place dans « I’m at a Party », auquel s’ajoute ici un très intéressant travail autour des chuchotements vocaux, un effet sonore que Young utilisera dans certains passages « fantomatiques » du score pour évoquer la présence des esprits maléfiques. A ce sujet, on notera le très intense « Corpse Christmas » qui développe ce travail vocal autour du choeur entre passages chantés traditionnels (qui semblent liés dans le film au chant des âmes perdues), chuchotements et clusters dissonants, sans oublier les sursauts terrifiants de l’orchestre qui suggère un sentiment d’horreur et de chaos extrêmement intense à l’écran.

Jonathan Broxton dans sa récente critique de la BO de Chris Young pour son site « Movie Music U.K. » disait que certains passages du score tels que « Twin Nightmares » ou « Cry of Love » prenaient une toute autre ampleur lorsqu’on les écoutait au casque, car le travail vocal réalisé par le compositeur donne parfois l’impression - malsaine - d’entendre les esprits nous parler directement dans l’oreille. C’est tout à fait le sentiment qui se dégage de certains passages où règnent ce sentiment de folie, de terreur et de chaos. Si le compositeur s’autorise une petite respiration avec la reprise du thème mélancolique d’Anna dans « Pairs in Love », la terreur revient dans le bien-nommé « Terror on the Water » et ses cordes dissonantes qui rappellent « The Grudge ». Mais ce sont réellement des morceaux tels que « Twin Nightmare », « Cry of Love », « The Screaming Bell », « A Dance With No One » ou la révélation finale de « What Have You Done ? » qui retiennent plus particulièrement ici notre attention. « Twin Nightmares » s’impose avant tout par son utilisation remarquable du chœur féminin dans un style dissonant et aléatoire particulièrement sinistre, avec une reprise mystérieuse du thème d’Anna joué ici par un harmonica de verre (une trouvaille sonore particulièrement intéressante, qui renforce l’atmosphère « fantomatique » de la musique dans le film). Quand à « Cry of Love », il permet à Christopher Young de revenir à un style clairement avant-gardiste (on pense ici au « Requiem » de Ligeti) pour un morceau 100% vocal, dans lequel les choristes féminines chantent, chuchotent, parlent et crient de façon aléatoire en utilisant une succession de mots incompréhensibles et étranges. Ici aussi, l’ambiance fantomatique règne en maître et apporte un côté véritablement dérangeant/surréaliste à la partition de Chris Young - dommage cependant que le morceau n’ait pas été utilisé dans le film ! L’angoissant et envoûtant « Cry of Love » nous renvoie une fois de plus au style avant-gardiste/bruitiste cher au compositeur, témoignant encore une fois de la passion et de la maîtrise du musicien pour ce style de musique qui jalonne sa carrière depuis ses débuts. Et dans un style similaire, « The Screaming Bell » est d’une intensité toute aussi remarquable, avec ses sonorités de souffle frénétique et d’effets vocaux étranges qui renforcent l’angoisse latente du morceau dans le film. Enfin, la musique se conclut sur une ultime reprise émouvante du thème principal chanté par le duo vocal dans le superbe « Tale of Two Sisters », idéal pour conclure le film sur une touche plus intime, mélancolique et apaisée.

Les amateurs d’atmosphères musicales fantomatiques et macabres en auront ici pour leur argent ! Avec « The Uninvited », Christopher Young confirme sa passion pour les musiques de film d’horreur et nous offre une nouvelle perle rare à classer à côté de son oeuvre maîtresse qu’est « The Exorcism of Emily Rose ». Peut être moins dérangeante et un peu moins intense que la musique de « Emily Rose », celle de « The Uninvited » apporte néanmoins un souffle d’angoisse et de terreur assez impressionnant dans le film des frères Guard. Déroutante, complexe, mystérieuse, envoûtante, inquiétante et terrifiante, la musique de Christopher Young pour « The Uninvited » confirme encore une fois - mais était-ce bien la peine de le rappeler ? - le talent et la passion du maître absolu de la musique d’épouvante hollywoodienne, une musique d’épouvante de haut niveau, intelligente, belle et maîtrisée, à découvrir sans plus tarder !


---Quentin Billard