1-160 BPM 6.42
2-God Particle 5.20
3-Air 9.08
4-Fire 6.51
5-Black Smoke 5.45
6-Science and Religion 12.27
7-Immolation 3.38
8-Election By Adoration 2.12
9-503 2.14

Musique  composée par:

Hans Zimmer

Editeur:

Sony Classical
88697-52096-2

Album produit et arrangé par:
Hans Zimmer
Soundtrack compilé par:
Bob Badami
Direction musicale pour
Columbia Pictures:
Lia Vollack
Producteurs exécutifs album:
Ron Howard, Brian Grazer,
John Calley

Musique additionnelle de:
Lorne Balfe, Atli Örvarsson
Designer ambiance musicale:
Mel Wesson
Supervision musicale:
Bob Badami
Montage musique:
Daniel Pinder
Assistant montage:
Letitia Rogers

Artwork and pictures (c) 2009 Columbia Pictures Industries Inc. All rights reserved.

Note: ***1/2
ANGELS & DEMONS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Hans Zimmer
Trois ans après « Da Vinci Code », voilà une nouvelle adaptation cinématographique des aventures de Robert Langdon. Inspiré du best-seller de Dan Brown, « Angels & Demons » permet au réalisateur Ron Howard de retrouver Tom Hanks dans le rôle principal, avec une nouvelle intrigue mettant cette fois-ci en scène une confrérie secrète qui s’apprête à détruire l’Eglise catholique de l’intérieur. Les « Illuminati » est une très vieille confrérie considérée comme l’une des plus puissantes de l’Histoire, qui a toujours lutté avec acharnement contre l’obscurantisme en opposant science et religion. Persécutés autrefois par l’Eglise catholique, les membres de cette organisation sont aujourd’hui de retour et préparent une large conspiration au coeur même du Vatican. C’est alors que l’Eglise fait appel à Robert Langdon, expert en symbolique religieuse, qui comprend très vite que les Illuminati sont sur le point de réussir leur coup. Après le décès du Pape, les principaux dirigeants de l’Eglise catholique se réunissent à Rome pour élire le nouveau représentant de la papauté. Mais hélas, plusieurs cardinaux sont kidnappés et menacés de mort par les Illuminati, ces derniers ayant réussis à dérober une puissante bombe d’antimatière qui menace d’exploser dans quelques heures au coeur même du Vatican. Une grande course contre la montre débute alors pour Robert Langdon, qui va tenter de résoudre les énigmes de ce gigantesque jeu de piste l’amenant des églises romaines aux cryptes secrètes, sans oublier les cathédrales et autres lieux souterrains oubliés. Il sera épaulé dans sa mission par Vittoria Vetra (Ayelet Zurer), une belle scientifique italienne qui a travaillé sur la bombe d’antimatière et qui connaît le fonctionnement de cet objet. Filmé comme une gigantesque course contre la montre, « Angels & Demons » s’autorise donc de nombreuses libertés par rapport au roman de Dan Brown (et ce à l’inverse de « Da Vinci Code » qui respectait quasiment à la lettre l’ouvrage d’origine !) afin de privilégier l’action. Ici, pas de grosses « révélations » sur l’Eglise catholique, et ce même si le film égratigne à plus d’une reprise l’image de la religion catholique - image déjà bien fragile en ces temps d’athéisme quasi généralisé. Ron Howard se veut néanmoins prudent et évite toute forme de polémique en privilégiant constamment l’action et le suspense, et ce pendant plus de 2h18. Le film demeure distrayant et captivant de bout en bout, filmé avec une certaine intensité quasi hystérique par moment. Pour un peu, on se croirait presque dans une production Jerry Bruckheimer, avec un montage effréné, un rythme speed et une overdose de musique à l’écran. Le réalisateur a parfaitement su retranscrire toute la beauté des décors uniques de la ville de Rome, et ce même si une bonne partie du film a été tourné en Californie. Tom Hanks demeure impeccable dans le rôle de Robert Langdon, avec un Ewan McGregor tout aussi impeccable dans le rôle du camerlingue, principal bras-droit du Pape au Vatican.

Hans Zimmer retrouve donc Ron Howard après « Da Vinci Code », le compositeur allemand signant pour « Angels & Demons » une partition apocalyptique où des choeurs religieux déchaînés résonnent à pleine puissance avec l’orchestre et des synthétiseurs plus modernes. Moins nuancée et moins profonde que la musique de « Da Vinci Code », la partition de « Angels & Demons » reprend néanmoins des éléments du premier score en les amplifiant ici de façon plus spectaculaire et plus théâtrale. Ainsi donc, la musique de Zimmer prend clairement une tournure opératique dans le film, l’accent étant mis ici sur les voix qui apportent un souffle épique colossal et démesuré aux images du film de Ron Howard. Le compositeur a probablement été inspiré ici par la grandeur des décors de la ville de Rome, et ses trésors d’architecture uniques. N’oublions pas que l’opéra est un genre musical originaire de l’Italie (apparu à Florence au XVIIe siècle) et qu’il s’agit d’une longue tradition musicale indissociable de la culture italienne. Même si le score de Zimmer n’a rien d’un opéra à proprement parler, on retrouve néanmoins une certaine écriture vocale qui pourrait évoquer certaines pages lyriques d’antan, à ceci prêt que le compositeur y apporte son habituelle touche moderne et une utilisation plus prononcée de l’électronique.

Comme toujours, on retrouve les orchestrations monotones et ultra plates du compositeur (cordes, cuivres et percussions la plupart du temps), la nouveauté provenant ici de la présence du violon soliste de Joshua Bell, qui avait déjà récemment offert ses services à James Newton Howard sur la partition du film « Defiance ». Le violon apporte à la musique de Zimmer un lyrisme inattendu particulièrement agréable dans le film, et que l’on retrouve notamment dans « God Particle » entendu vers le début du film, le violon reprenant avec grâce le thème principal de « Da Vinci Code » (le morceau « Chevalier de Sangreal »). Zimmer reprend aussi le thème menaçant de la conspiration de « Da Vinci Code » et nous propose un relifting intégral de ses thèmes d’origine permettant d’assurer la continuité avec le précédent score du compositeur. Le mélange des chœurs religieux et des rythmiques synthétiques est particulièrement bien vu de la part du compositeur, qui retranscrit ainsi à merveille sur les images du film l’éternel duel entre la science et la religion, entre les Illuminati et l’Eglise catholique. Cherchant continuellement à compenser ses lacunes de composition par une conceptualisation forcenée de ses musiques, Hans Zimmer apporte à ce gigantesque jeu de piste une dimension musicale surpuissante, même si l’on reprochera principalement l’overdose de musique dans le film et le fait que le score soit mixé étrangement (trop) fort sur les images - d’où la dimension opératique de la musique, car l’on se demande parfois si l’on regarde un film ou un opéra ! Les amateurs du score de « Da Vinci Code » pourront apprécier des reprises thématiques de divers motifs du précédent opus musical de Zimmer dans le morceau « Air », le tout parsemé de ces voix spirituelles qui renvoient au titre du film : « anges et démons », le combat entre deux conceptions archaïques du bien et du mal.

Le nouveau score de Hans Zimmer vaut surtout pour son attraction principale, « 160 BPM », véritable tour-de-force choral de plus de 6 minutes dans lequel les choeurs et les rythmiques synthético-orchestrales s’unissent dans une déferlante de notes, le tout sur un rythme saccadé typique du compositeur (le morceau est entendu lors du générique de fin du film). Ce morceau déchaîné aux résonances religieuses grandioses nous permet de retrouver un Hans Zimmer plutôt tourné vers le passé, reprenant ici des rythmes, des harmonies ou des sonorités proches de certaines de ses oeuvres du début des années 90 - « 160 BPM » est clairement calqué (de façon incroyablement similaire !) sur la musique de la série TV « First Born » que Zimmer écrivit en 1989 aux côtés de Stanley Myers. Le compositeur en profite donc pour officier sur le film de Ron Howard un retour aux sources, utilisant des synthétiseurs un peu plus kitsch des années 90, et ce alors que « Da Vinci Code » offrait un son bien plus orchestral et plus « classique » d’esprit. La musique renforce donc cette tension omniprésente dans le film et accentue cette chasse aux énigmes menée par un Robert Langdon déterminé. Cette détermination se ressent ainsi dans les envolées chorales de la musique de Zimmer, qui mélange influences grégoriennes et médiévales dans un style typiquement « Media-Ventures/Remote Control », le plus basique qui soit. Bien loin donc de révolutionner le style qu’il s’est forgé en l’espace d’une quinzaine d’années, Hans Zimmer se tourne donc vers le passé et en profite pour passer en revue quelques uns de ses stéréotypes musicaux qui lui sont aujourd’hui purement et simplement indissociables.

La musique alterne donc entre envolées chorales grandioses et morceaux atmosphériques accompagnant les moments plus sombres du film (comme la séquence où Langdon et le garde sont enfermés dans la chambre des archives du Vatican, privés d’oxygène). Hélas, les passages atmosphériques peinent bien souvent à susciter le moindre intérêt sur l’album - demeurant néanmoins parfait à l’écran - la faute incombant tout autant au manque d’ambition de Hans Zimmer dans ces passages qu’à ses lacunes d’écriture qui l’obligent à avoir bien souvent recours à du sound design facile et sans grande imagination. C’est le cas dans un morceau comme « Black Smoke », évoquant l’une des nombreuses scènes de poursuite où Langdon essaie de reconstituer le puzzle des Illuminati à travers différents monuments romains. Le violon de Joshua Bell n’apparaît qu’occasionnellement dans la musique, certains ayant vu dans cette association avec la superstar du violon classique une opération marketing rusée de la part du compositeur teuton. Pourtant, il est indéniable que le violon apporte une émotion rafraîchissante à certains passages de la musique dans le film, qu’il s’agisse de « God Particle » ou de l’ouverture poignante de « Science and Religion ».

Ce dernier morceau demeure sans aucun doute LE moment d’émotion incontournable de la nouvelle partition de Hans Zimmer, pour la scène où le camerlingue sauve le Vatican en emportant avec lui la bombe dans les airs. Les nappes synthétiques et les cordes mélancoliques s’associent ici pour créer une atmosphère plus élégiaque et dramatique, avec son final contemplatif mélangeant cordes et choeurs spirituels pour ce plan symbolique du nuage « divine » dans le ciel après l’explosion de la bombe. Zimmer maîtrise toujours aussi parfaitement ce style de musique élégiaque poignante, qui apporte une dimension plus émotionnelle et humaine parfaite sur les derniers instants du film (on ressent ici quelques vagues réminiscences à Richard Wagner dans l’écriture élégiaque des cordes). Quoiqu’il en soit, « Science and Religion » devrait donc ravir les fans du Zimmer plus lyrique, classique et élégiaque hérité de « The Thin Red Line » et « Invincible ». Le morceau permet aussi d’apporter une rupture par rapport au style plus synthético-orchestral très « 90’s » du reste du score. Zimmer reprend cette ambiance lyrique et contemplative dans « Election by Adoration » pour le final du film, avec le retour du violon de Joshua Bell. Le message est ici plus que limpide : la course poursuite est terminée, l’aventure touche à sa fin. Zimmer en profite aussi pour reprendre ici une phrase mélodique de « Da Vinci Code », le compositeur créant lui-même son propre jeu de pistes plutôt que de nous proposer une nouvelle thématique originale - un choix tout à fait discutable, mais que le compositeur assume néanmoins de bout en bout avec une aisance totalement décomplexée. Enfin, on appréciera la reprise du thème de « Da Vinci Code » dans « 503 » avec son duo violon/violoncelle sur fond de cordes, un morceau idéal pour conclure le film sur une ultime touche d’émotion particulièrement agréable.

Vous l’aurez donc compris, Hans Zimmer ne fait pas dans la dentelle ici et apporte à la musique de « Angels & Demons » une dimension chorale opératique extrêmement grandiose sur les images du film de Ron Howard, personnifiant cette lutte acharnée entre la science et la religion avec une intensité incroyable sur les images, le principal souci venant hélas de cette abondance bien souvent fastidieuse d’élans musicaux grandiloquents à l’écran, une fureur orchestrale/chorale qui finit par fatiguer plus qu’elle ne fédère. Pour certains, la musique de « Angels & Demons » brasse beaucoup d’air pour ne pas dire grand chose, et hélas, ce n’est pas complètement faux. Néanmoins, Zimmer réussit à nous convaincre encore une fois grâce à sa force de persuasion et au pouvoir évocateur de sa musique qui, en plus d’apporter tension et action frénétique aux aventures de Robert Langdon, parvient aussi à renouer avec une époque musicale lointaine du compositeur, à travers l’emploi de certaines sonorités électroniques un peu datées (même l’orgue synthétique de « 160 BPM » semble surgir d’une autre époque !) et de rythmes typiquement « nineties » du compositeur. Quoiqu’il en soit, Hans Zimmer assume complètement tous ses choix musicaux et apporte donc au film de Ron Howard un souffle épique quasi apocalyptique totalement démesuré, une évocation musicale d’une Eglise sur le déclin confronté au bouleversement des repères, des valeurs. Dommage que Zimmer cède bien souvent à la facilité en s’inspirant massivement ici du style des musiques de « trailer » (bande annonce de film), des musiques pseudo-spectaculaires qui misent bien souvent sur la surenchère chorale bien à la mode depuis le succès de la trilogie des « Lord of the Rings » d’Howard Shore. Un morceau comme « 160 BPM » paraît même surgir d’une banque de « trailer music » comme on entend à la pelle aujourd’hui dans la plupart des bandes-annonces de blockbusters hollywoodiens. Au final, « Angels & Demons » nous impose un constat mitigé, un sentiment en demi-teinte partagé entre la puissance monumentale de cette musique et les faiblesses d’écriture du compositeur qui s’en ressentent grandement ici. On aurait préféré un peu plus de subtilité et d’émotion, comme c’était le cas dans « Da Vinci Code ». Toujours est-il que, avec le nouveau score de « Angels & Demons » - jeu de mot mis à part - les fans de Hans Zimmer seront aux anges !



---Quentin Billard